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intelligence; grossière et terrestre, quand il prend ses matériaux dans les sensations; céleste et presque divine, s'il la forme avec les élémens les plus purs de la sensibilité.

D'où venaient les innombrables difficultés de ce premier problème de la métaphysique?

Elles étaient surtout dans une expression, dont l'habitude nous empêchait de découvrir le vice et la dangereuse influence.

En appelant la sensibilité du nom de faculté de sentir, on avait associé deux idées incompatibles. Nous avons séparé ces deux idées. Ainsi séparées, elles ont été aussi fécondes en vérités, que, dans leur réunion, elles avaient été fécondes en erreurs.

L'activité nous a donné le système des facultés de l'âme; et, dans ces facultés, nous avons eu les causes de l'intelligence.

La sensibilité n'a plus été toujours la même. Une observation attentive nous a montré des oppositions de nature, où l'on soupçonnait à peine quelques différences d'espèce. Plusieurs inanières de sentir ont donc été constatées; et les sources de l'intelligence ont été reconnues.

On avait placé l'activité dans la sensibilité. On avait placé la sensibilité dans la matière; et dans cette sensibilité, aussi injustement en

noblie qu'injustement dégradée, on n'avait aperçu qu'un phénomène, changeant à la vérité dans ses formes, mais invariable dans son

essence.

Nous avons dégagé l'activité de la sensibilité; nous avons laissé la matière à son inertie insensible; nous avons séparé le sentiment de tout ce qui n'est pas lui. Alors, dans le sentiment, nous avons vu, non pas un seul phénomène, qui n'aurait annoncé que le premier degré de l'intelligence; mais quatre phénomènes pour l'annoncer toute entière; quatre élémens également nécessaires pour former la raison de l'homme; quatre sources d'idées; quatre origines de connaissances.

A quoi aboutit enfin le travail auquel nous nous livrons depuis l'ouverture du cours? A quoi se réduisent tant de recherches, tant de discussions?

Je craindrais de le dire à l'amour-propre ; je ne le dirais pas à de faux savans; mais je le dirai à vous, messieurs. Nous avons expliqué un mot, un seul mot, le mot sentir; ou, si j'avais acquis le droit de penser qu'on ne reconnaîtra plus une faculté de sentir, qu'on ne verra jamais l'activité dans la sensibilité, je dirais que

nous avons expliqué un mot encore, le mot agir.

Combien donc il est vrai qu'après les jugemens qui sortent immédiatement de l'expérience, la rectitude ou la fausseté de nos opinions dépend des signes de la pensée !

Et

pour finir par où nous avons commencé ; pour vous rappeler une proposition dont les développemens appartiennent à la logique, combien il doit être vrai que l'esprit humain est tout entier dans l'artifice du langage!

CONCLUSION.

L'ANALYSE de la faculté de penser, et l'analyse de la sensibilité, forment deux théories qui tendent vers le même but.

L'une fait voir comment agit notre âme; l'autre, comment elle est affectée; réunies, elles nous enseignent comment elle connaît.

L'infinie multitude de sentimens qui nous viennent, en foule et sans ordre, de tous les points de l'univers, et de toutes les parties de nous-mêmes, portent à l'âme les affections de plaisir ou de peine, sans pouvoir encore l'éclairer. La pensée agit; elle est attentive; elle compare; elle raisonne. L'esprit démêle et sé- . pare des élémens qui étaient réunis et confondus ; il les distribue en espèces, dont il détermine le caractère, le rang, le nombre : déjà brille la lumière, le jour a pénétré le chaos, et l'intelligence est créée.

Que fallait-il pour amener de tels objets à une telle simplicité ? Il fallait avoir découvert ses principes. (Préface de l'Esprit des Lois.)

FIN.

TABLE

DES MATIÈRES.

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PHILOSOPHIE. Introduction à la
seconde partie.

Dans quelle acception nous prenons le mot philo-
sophie. Principales découvertes des philo-
sophes depuis Descartes. Résumé de la pre-
mière partie du cours de philosophie. In-
dication des suivantes. Nous nous bor-
nons à l'étude de l'entendement, que nous
considérons dans ses effets ou dans les
idées, après l'avoir considéré dans ses fa-
cultés.

SECONDE PARTIE. De l'entendement considéré
dans ses effets, ou, des idées.

PREMIERE LEÇON.

-

- De la nature des idées.

Importance du sujet. Divisions des philosophes
sur la nature de l'idée. Cause principale,
et effets de ces divisions. Comparaison de
la méthode des chimistes et de celle des
métaphysiciens. Les uns vont des choses
aux mots. Les autres veulent aller aux cho-
ses par les mots. En quoi consiste la nature
de l'idée ..

pag.

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