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fa Patrie tous les fervices dont il eft capable, & je ne vois pas quelle différence il y a entre les Animaux Brutes, & celui qui paffe fa vie fans fonger en aucune maniére à remplir cette obligation. Du ref te, PEducation des Enfans eft une chofe fi importante, & le fecret de les bien élever eft d'une utilité si générale, que fi j'étois auffi capable de traiter cette matiére que je le fouhaiterois, je n'aurois pas be Join d'être preffé ou importuné par qui que ce foit, pour me réfoudre à le faire. Cependant le peu de merite de cet Ouvrage & la jufte défiance où je fuis qu'il ne foit mal reçú, ne m'empêcheront pas de le donner tel qu'il eft, puis qu'on ne demande de moi fi ce n'eft que je le confacre au Public. Quelque petit que foit ce Préfent, je n'ai pas bonte de le lui offrir. Et j'ofe me flatter, que tout le monde ne perdra pas fon temps à la lecture de fet Quvrage, fi d'autres perfonnes

du

du caractère de ceux qui l'ont approuvé en manufcrit, viennent à juger qu'il n'étoit pas indigne de voir le jour.

Depuis peu j'ai été confulté fur la Maniére d'élever les Enfans par tant de perfonnes, qui m'ont avoué ingenûment qu'ils ne favoient comment s'y prendre, & d'un autre côté, l'on fe plaint fi généralement de la prompte corruption de la Jeunesse, qu'on ne fauroit blâmer ceux qui mettent à la mode P'examen de cette matiere, & qui en écrivent quelque chofe, quand ce ne feroit que pour exciter les autres à l'approfondir davantage, ou à les redreffer s'ils fe trompent. Car les fautes qui regardent l'Education font celles pour lesquelles il faut avoir le moins d'indulgence. Les fuites en font trop dangereufes. Si Pon n'y remedie promptement, elles font des impreffions qu'on ne peut plus effacer, & qui par conféquent fe répandent fur tout le refte de la vie. Pour

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Pour moi, je fuis fi peu entété des chofes que j'avance dans cet Ouvrage, que je ne ferois nullement faché que des perfonnes plus capables de traiter cette matiére, vouluffent compofer, à l'ufage de notre Nobleffe Angloife, un Traité complet fur l'Education, dans lequel ils corrigeaffent les fautes où je puis étre tombé; car je fouhaite avec beaucoup plus de paffion que nos jeunes-gens de qualité apprennent les moyens les plus propres à fe former aux bonnes chofes, (ce que tout le monde doit avoir à cœur) que de voir qu'on approuve les fentimens que j'ai fur cette matiére. Quoi qu'il en foit, vous pourrez toujours me rendre ce témoignage, que la Méthode que je propofe dans ce Livre, a eu un fuccès extraordinaire dans la perfonne du Fils d'un Gentilhomme de notre connoiffance. Je ne veux pas dire par-là que le bon temperament de ce jeune-homme n'y ait beaucoup contribué, mais ce que j'o

j'ofe affurer, c'est que vous êtes convaincu auffi bien que fes Parens, qu'en fuivant la Méthode qu'on employe ordinairement pour inftruire les Enfans, on ne feroit pas venu à bout de celui-ci, qu'on n'auroit pú lui infpirer de l'amour pour les Livres & pour la Science, ni l'engager à defirer, comme il fait, d'apprendre plus de chofes, que ceux qui font auprès de lui ne jugent à propos de lui en enfeigner.

Mais mon deffein n'est pas de vous donner une haute idée de mon Ouvrage, car je fai déja le jugement que vous en faites. Je ne veux pas non plus le faire valoir dans l'efprit des autres hommes par la confidération de l'opinion favorable que vous en avez. Comme la bonne Education des Enfans eft une des chofes auxquelles les Parens font le plus fortement engagez & par devoir & par interét, & que le bonheur & la profperité d'une Nation en dépendent extrémement,

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je fouhaiterois que chacun prít à cœur cette affaire, & qu'après avoir examiné & diftingué foigneufement la part que le Caprice, la Coútume, ou la Raifon y peuvent avoir on s'appliquát à mettre en ufage la Méthode qui dans les différentes conditions des hommes feroit la plus facile, la plus courte, & la plus propre pour en faire des gens vertueux, utiles à la Societé,

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habiles, chacun dans fa profeffion. Mais on devroit fur tout prendre foin de l'Education des Jeunes-gens de bonne-Maison, car fi les perfonnes de ce rang font une fois bien élevées, elles mettront bientôt tout le refte dans l'ordre. Voilà ce qui m'a engagé à compofer ce petit Ouvrage.

Il feroit inutile d'ajoûter de nouvelles reflexions à celles de Mr. Locke, pour montrer qu'il eft d'une abfolue néceffité de

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