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PQ' 2070

1877 500633

V.33

AB

CORRESPONDANCE

33

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CORRESPONDANCE. I

AVERTISSEMENT

POUR LA PRÉSENTE ÉDITION.

A la fin du mois de décembre 1704, le jeune Armand Arouet, âgé de dix-neuf ans, écrivait un compliment de nouvelle année à Mme du PontBailly, sa cousine, femme d'un marchand poitevin. Ce morceau de littérature achevé, le jeune homme le faisait signer par son petit frère François-Marie, dit Zozo, âgé de dix ans. Or Zozo n'était autre que le grand épistolier du XVIIIe siècle, François de Voltaire. M. Benjamin Fillon a retrouvé dans un grenier du Poitou cette première lettre signée d'un sobriquet enfantin par la main qui devait en signer des milliers d'autres. On nous excusera d'en reproduire ici le texte, puisque c'est le point de départ de la célèbre correspondance, au delà duquel il sera très-certainement difficile de reculer.

A Madame, Madame du Pont-Bailly, à la Cháteigneraye,
pays de Poitou.

Paris, le 29 décembre 1704.

Madame et très-honorée cousine,

Mon papa m'a fait cette grace de me comander d'estre son secrettaire ce premier d'année, et vous tesmoigner les humbles respects de nostre maison, avec les veux et les prieres que nous faisons pour vostre prospérité, santé, bonheur et satisfacion, qui ne sont en doutte de vostre costé eu égard à nous. Il vous suplie, madame ma cousine, le croire toujours bon parent et ne vous despartir de l'affection que vous devez à sa famille, et moy, le secrettaire, je finiray en me disant, et Zozo, Vos très-humbles et respectueux cousins,

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Depuis plusieurs années déjà, François-Marie avait perdu sa mère, morte le 13 juillet 1701, lorsqu'il avait six ans et demi, et que, par conséquent,

il avait à peine connue. C'est pourquoi cette épître est écrite seulement au nom du père, M. le receveur des épices de la chambre des comptes, ou payeur de la chambre des comptes, Arouet.

Ce spécimen étant donné ici pour la satisfaction des curieux, notre recueil commence à la date de 4744, lorsque François-Marie est parvenu à sa dix-septième année et qu'il est encore élève du collège Louis-le-Grand. L'épisode romanesque des amours du futur Voltaire avec Mlle Olympe Dunoyer occupe la fin de l'année 1743 et le commencement de 4714. Puis la correspondance se développe d'année en année, et s'étend bientôt comme un vaste fleuve, jusqu'aux derniers jours de l'auteur.

Cette correspondance, qui embrasse un espace de soixante-sept ans, est une œuvre de premier ordre, un de nos grands monuments littéraires. Voltaire l'a élevé au jour le jour, à son insu. Il se trouve qu'elle est la véritable histoire du dernier siècle, le témoignage de la plus rapide et de la plus étonnante transformation d'idées qui se soit opérée jamais dans une nation, en même temps que l'autobiographie la plus sincère, la plus vivante et mouve mentée qu'un homme célèbre ait laissée ad posteros. Et plus elle s'enrichit par de nouvelles découvertes, plus l'intérêt est vif, plus le tableau s'anime en se diversifiant. La valeur de cette partie de l'œuvre de Voltaire est, du reste, si unanimement reconnue aujourd'hui qu'il est inutile d'y insister 1.

La correspondance de Voltaire s'accroît d'une manière presque indéfinie. Beuchot avait déjà recueilli 7,473 lettres, et, gêné par des droits de propriété littéraire, fatigué par de longues recherches, il en avait laissé de côté un certain nombre, notamment les lettres à Me Quinault, imprimées en 1822, dont il avait dû se borner à donner des sommaires, et celles du recueil des Pièces inédites de Voltaire tirées de la bibliothèque de Jacobsen et publiées en 4820.

Depuis l'édition de Beuchot, des recueils importants ont été mis au jour: Les plus considérables sont les suivants :

Correspondance inédite de Voltaire avec Frédéric II, le président de Brosses et autres personnages, avec des notes par Th. Foisset; Paris, Levavasseur, 1836, un vol. in-8°. Nouvelle édition à la librairie Didier et Cio, en 1858.

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Lettres inédites de Voltaire recueillies par M. de Cayrol et annotées par M. Alph. François, avec une préface de M. Saint-Marc Girardin; Paris, Didier et Cie, 4856, deux vol. in-8°.

Lettres et documents puisés par M. Léouzon Leduc dans la bibliothèque de Voltaire au palais de l'Ermitage de Saint-Pétersbourg, reproduits dans diverses publications: Études sur la Russie, Amyot, 1852, in-12; Voltaire el la Police, Ambroise Bray, 1867, in-12.

Voltaire à Ferney, sa correspondance avec la duchesse de Saxe-Gotha; suivie de lettres et de notes historiques entièrement inédites, recueillies et

1. Voyez, sur les caractères littéraires de la correspondance, l'introduction en tête des Lettres choisies de Voltaire. Paris, Garnier frères, 1 vol. grand in-8° ou 2 vol. in-12.

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