fuccès c'étoit à qui donneroit le plus à l'Empire; & par une fingularité bizarre il n'y eut plus de Vierges que les nouvelles mariées. TANDIS que les filles s'aplaudiffoient le plus d'être femmes fans en avoir les charges, les femmes outrées. de fe voir filles crioient vengeance & miféricorde. Qu'elles prennent donc notre place, & nous prendrons la leur, difoient elles; l'équité veut qu'elles fe marient à leur tour. Mais les garçons fe trouvoient trop bien du célibat, & les maris fur le point de le préférer fe ravifèrent, prirent des maitref fes, imaginèrent les petites maifons, jouèrent au quinze, fe confolèrent enfin du malheur de leurs triftes épouses. LE feul Fidèle étoit auffi inconfola ble ble que Modefte: fa douleur toucha la tendre Eglé; elle l'attendit un jour dans l'appartement de la Reine abfente, & comme on étoit au fort de l'été, elle fe mit en fimple corfet & en jupon du plus léger bafin, fe jetta fur un lit de repos dans une attitude de la faifon, & fit femblant de dormir. Les rideaux des fenêtres étoient tirés, & ne laiffoient voir qu'un demi-jour. Le Roi arrive, comme elle l'avoit prévu, la prend pour fa femme, aproche doucement, & cueille un baifer fur fa bouche. Surprise agréable! à peine eut-il touché le corail de fes lèvres qu'il fe fentit renaitre. Il benit le Ciel, & jouit de fes bienfaits avec des tranfports dix fois redoublés, mais dans un filence profond, de peur que le moindre changement dans les circonftances n'en mît un dans fa félicité. Eglé avoit la même raifon pour fe taire; F 3 mais mais un excès de plaifir lui fit ouvrir les yeux, ce qui n'est pas naturel. Eh bien, Reine de mes defirs, lui dit alors Fidèle triomphant, ai-je réparé mes torts, & me pardonnez-vous le paffé? N'en doutez point, Roi de mes vœux, repartit la fauffe Modefte en contrefaifant fa voix; mais il la reconnut au premier mot, & du comble du raviffement tomba dans la dernière confternation. Ah! fi ma femme le favoit!...... Elle le fait, s'écria la Reine qui rentroit par un escalier dérobé & qui avoit vu la fin de la dernière fcène. Vous connoissez mon crime, & vous ignorez mon erreur, repliqua-t-il en fe précipitant à fes pieds; trompé par un faux jour Taifez-vous, interrompit Modefte, c'est moi qui fuis trompée je veux changer mon état contre le fien, & la marier tout à l'heure. C'eft donc .... avec le Roi, dit bien vite Eglé qui commençoit à fe remettre. Qui, Mademoiselle, avec le Roi lui-même & je prendrai ma revanche. Arrêtez, s'écria Fidèle, fongez que vous allez perdre la grandeur dédommagée par le plaifir j'ai rompu le charme ..... .... J'en ferai C'est ce qu'il faudra voir..... & je brule de vous en convaincre. Levez-vous, & commençons toujours par donner un mari à ma difcrète coufine. Le vieux Barbarin.... Mais le Roi lui repréfenta qu'Eglé étoit la première Fée de fa Cour, fa plus proche parente, celle dont l'époux devoit remplir de droit la charge de fon premier Menin, qui vaquoit alors, & qui donnoit le privilége unique d'entrer chés elle fans être annoncé à toutes les heures du jour & même de la nuit. A ce mot elle nomma le Silphe Mirza, qui n'eut garde de refufer Eglé, car il aimoit la Reine; & pouvoit fe flatter de lui plaire, joignant à toutes les graces de la figure tous les travers de l'efprit & tous les défauts du cœur. CEPENDANT Fidèle ne fe trouva rien moins que defenchanté dans les bras de fa chère Modefte, qui devint furieufe, & lui defefpéré de voir la vertu ftérile, les femmes en friche, des pères fans titre, des enfans fans nom, & l'Univers entier menacé d'être bâtard. ELLE alloit fe mettre à la tête des rebelles; il lui demanda humbřement du tems pour envoïer confulter l'Oracle; elle lui donna deux jours. Fendl'air, le plus léger des filphes, part de la main, & rapporte cette double réponse: 1. Qu'on rende au Roi ce |