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2.

de ces raifons.

çaufée par la divinité répandue dans toute la nature. Cicéron [], & Marfile Ficin [f] en ont cherché la caúfe dans l'imagination: Pomponace dans les influences célestes.

Mais fuppofé, que cette humeur Réfutation mélancholique, où ces vapeurs, ou ces influences puffent exciter dans l'ef prit les facultés qui s'y trouvent, cos caufes ne pourroient lui donner des facultés étrangères. Ces caufes, en leur fuppofant quelque pouvoir, n'auroient leur effet que dans ce qui dé pend des fens elles pourroient faire exprimer avec plus de force & d'éloquence, ce qu'on fçavoit déja. Le poëte excité par la mélancholie, compofera, fi l'on veut, de plus beaux vers; L'orateur s'énoncera avec plus de feu, le philofophe difputera avec plus de pénétration. Toutes les idées, qui fe trouvent dans les traces du cerveau, pourront être renouvellées & réveilJées; mais quelque mouvement, quel que chaleur qui foit communiquée à l'efprit, cette caufe ne peut en faire fortir, ce qui n'y fut jamais. Elle ne peut exciter en lui, ce qui lui eft étranger; ni lui faire produire, ce qu'il n'a pas conçu; puifqu'on ne peut attribuer à aucune caufe des effets, qui n'ont aucune analogie ni relation avec elle.

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C'eft de quoi nous ferons pleinement perfuadés par le détail de ces divinations prétendues naturelles.

Il y a une espéce de prédiction par les fentes, crevalles, & tumeurs qui arri meurs de la vent naturellement à la terre, & fans qu'on y touche. Cette divination eft attribuée aux vapeurs foûterraines: el

la terre.

rebus quid poffit aliud caufæ afferre mortalium quifpiam, quam diffulæ per omne naturæ, fubinde aliter atque aliter numen erumpens? Plin, lib. 2. c. 93.

les ont produit les plus renommés des oracles, & celui de Delphes fut découvert par l'yvreffe que les vapeurs foûterraines cauférent à un troupeau de chévres, & même au berger. Ces vapeurs forties des entrailles de la terre, après avoir caufé les fentes, les tumeurs, & les crevaffes qu'on remarque dans fa fuperficie, rencontrent les influences céleftes; & leur mélange apprend quel doit être l'avenir, les deux extrémités de la nature fe réunissant pour le prognoftiquer.

culatoire.

La fpéculatoire eft l'art d'interpréter les éclairs, les tonnerres, les cométes, De la f & autres météores. Cette fcience eft appuïée fur un raifonnement fort fimple. Si l'aftrologue trouve la connoissance de l'avenir dans les influences éma. nées des globes céleftes fi prodigieusement éloignés de nous, quelle doit être la vertu & la force de ces météores, qui fe forment, & qui agiffent dans une région fi voifine de la nôtre ?

Les difpofitions [g] de l'air influent beaucoup fur celles de l'efprit humain ; & par conféquent fur les décisions des hommes, & fur les événements. Quelques devins ont prétendu, que certains mouvements des animaux indiquant les difpofitions de l'air, étoient des fources de divinations naturelles, fans y faire intervenir les divinités payennes, ni les démons, comme dans les augures, ni aucune caufe métaphyfi que. Ainfi l'on difoit que les poiffons de la fontaine de Limyra rendoient, touts muets qu'ils étoient, des réponfes fur l'avenir; que s'ils avaloient la nourriture qui leur étoit jettée, c'étoit

[e] Cic. de divinat. lib. 2.

[f] Marfil F cin. theel, Platonic, de im mortal, animor. lib. 3. c. 2. [g] Plin. lib. 31. c. 2.

De la divimation par

un figne de la réuffite, mais que s'ils repouffoient cette nourriture de la queue, l'événement devoit être contraire.

Une femme nommée Anthufe, du temps de l'empereur Léon, trouva l'art es nuées. de prédire par les nuées [b], art inconnu aux anciens, & dont, fuivant la remarque de Photius, on ne s'étoit pas avifé jufqu'à elle. Cette divination par les nuées eft préférable à l'aftro. logie judiciaire, qui demande des recherches profondes, & des connoiffances fçavantes, au lieu que la divination par les nuées eft bien moins hérif fée de difficultés.

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pendant que l'aftre dont on veut conferver les influences domine, & dans un temps ferein. Alors on peut croire, felon la penfée de cet auteur que les influences de l'aftre pénétreront le métal fondu, le perceront d'une infinité de trous, & en rempliront touts les pores: de forte que ce métal, après même s'être figé, confervant touts fes trous, y confervera auffi la matiére céleste qui s'y fera infinuée. Il compare les talifmans aux pierres d'aiman; & fuppofe que comme la matiére magnétique circule à l'entour de l'aiman, de même l'influence céleste circule autour du talifman. La matiére de l'af tre, ajoute-t-il, qui eft amaffée autour du talifman, ne peut-elle pas être un poifon pour les bêtes venimeufes, & ne peut-elle pas par fes effu fions, préferver quelque lieu de touts infectes?

9.

verru na

Cette explication phyfique revient Refutation à l'opinion de Paracelfe, qui définit de cette les talifmans [i], des boëtes, où l'on turelle. conferve les influences. Le pére le Brun [k] fait ces réflexions fur cette prétendue vertu naturelle des talifmans: fi ces piéces de métal fondues fous certaines conftellations pouvoient produire phyfiquement ces effets, donc partout où il fe trouveroit du métal fondu fous la conftellation requife l'ef fet attendu devroit être produit. Or on peut affurer qu'il y a depuis longtemps à Paris du métal fondu en tout temps, & fous toutes les conftellations, outre qu'on en fond touts les jours à la monnoïe, & en vingt au- ' tres endroits de la ville: donc Paris Pppp 2

[i] Imagines & characteres funt pixides, in quibus magus fiderum vires af fervat. Paracelf. philofophia fagacis. l. 1.

x.

[k] Le P. le Brun. hift.crit des pratiq. fu perftit, t.1.p. 375. feconde édit.

10.

mans attri

doit être prélervé de touts accidents fàcheux. Car rien ne manque à ce métal fondu, que le deffein d'en faire un talifman; circonftance qui n'étant pas physique, ne peut empêcher la vertu que la conftellation lui donne.

Gaffarel [] fonde les propriétés des La vertu talifmans fur plufieurs caufes réunies, des talif fçavoir l'influence des aftres, la vertu de buée à plu- la ressemblance, & l'expérience. C'eft fers cau- ce que Marfile Ficin explique en ces termes [m]: L'art donne à la matiére un commencement de vertu & de propriété, par une figure femblable à celle du modéle céleste; en forte que lorfque cette matiére ainfi difpofée reçoit en clle les qualités actives des influences, elle en eft pénétrée, comme le foulfre eft embrafé par la flamme.

Ce philofophe grand Platonicien donne ici quelque emploi aux idées & aux exemplaires de Platon, dont on n'eût peut-être jamais bien connu l'ufage, fans les talifmans. Nous obferverons au fujet du raisonnement de Marfile Ficin, que c'est l'art ordinaire de ceux qui débitent des raifonnements où ils n'entendent rien eux-mêmes, de tacher de leur donner quelque air de probabilité, en les finiffant par la comparaifon de quelque effet naturel. Albert le grand [] a diftingué les talifmans purs aftrologiques, de ceux où il entre de la magie.

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TY. Vertu des

La vertu des talismans [o] a été foutenue par Ptolémée, Alexandre d'A- talifmans phrodifée, Porphyre, Marfile Ficin, la foutene plupart des Platoniciens, & par les al- curs phiochimiftes Artephius & Thebit.

par plus.

fophes.

12.

Scaliger s'en moc

Scaliger [p] marque peu de foi aux talifmans, lorfqu'il rapporte l'hiftoire d'un aftrologue, qui fondit & fabriqua que. avec beaucoup de cérémonies une figure métallique fous les afpects les plus convenables pour chaffer les mouches, & y grava myftérieufement les charaEtéres les plus forts. Mais il n'eut pas plûtôt expofé cette figure fur la fenêtre, qu'une mouche vint fe pofer, & faire. fon ordure fur cette figure même.

té des talic

L'invention des talifmans paffe pour I. fort ancienne; quelques-uns l'attri- Anciennebuent à un Egyptien nommé Jacchis, mans. qui vivoit fous le roi Sennyés. D'autres. la rapportent à Nécepfos roi d'Egypte, qui a été poftérieur à Sennyés, & à Jac. chis, mais qui vivoit cependant plus de 200, ans avant Salomon. C'eft de Nécepfos [9] qu'Auíone parle dans une lettre à S. Paulin..'

Pline [r] dit du jafpe qui tire fur le verd, que tout l'Orient le portoit comme un talifman, L'opinion commune étoit, dit-il ailleurs [] que Milon de Crotone devoit les victoires à la pierre [] Alectorienne qu'il portoit dans les combats.

Les gens de guerre en Egypte avoient

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[p] Scalig. adverf. Cardan. de fubtilit exercitat. 246. §. 3.

[q] Quique magos docuit myfteria va

na Necepfos. Auson. epift ad Pontium Paulin. 19.

[r] Totus verò Óriens pro amuletis traditur geftare eam (rafpim) quæ ex iis fmaragdo fimilis eft. Plin, lib. 37. c. 9.

[s] Plin. lib. 37. c. 10.

[] La pierre Ale torienne eft une pierre: tirée du corps d'un cog, appellée ainsi du mes qui en grec fignifie un coq

T4.

Du jalpe

15. Des (canz bées.

16,

fur eux des figures de fcarabées, pour fortifier leurs courages, & pour mon trer que les mâles feuls doivent aller à la guerre [u], parceque cette efpéce d'animal n'a point de femelles.

On attachoit au col du roi d'EgypTalinan te [x], un talifman dont la vertu condu roi d' E- fiftoit à le détourner de toute forte d'injuftices.

gypte,

17.

d'Alexan

dre.

On lit dans Trebellius Pollio, que De la figure les Macriens révéroient Aléxandre le grand d'une façon fi particuliére, que les hommes de cette famille portoient la figure de ce monarque gravée en or ou en argent dans leurs bagues, & que les femmes la portoient dans leurs ornements de têtes, & dans leurs braf felets [y], parce qu'on dit que ceux qui portent la tête d'Akxandre gravée en or, ou en argent, en reçoivent du fecours dans toutes leurs actions. Eudamus Athénien contemporain Talitimans d'Ariftophane étoit célébre par la comd'Eudamus. pofition des talifmans. Un des per

i8.

19.

fonnages de la comédie de Plutus dit: Je n'ai rien à craindre [z], je porte un anneau, qu'Eudamus m'a vendu lui-même. Et le fcholiafte d'Ariftophane [4] dit fur ce vers, qu'Eudamus faifoit des anneaux qui garantiffoient des démons & des ferpents.

Ceux qui triomphoient [b], porPréfervatis toient de petites boëtes, où l'on enportés par fermoit les préfervatifs qu'on croïoit triompho- les plus propres & les plus puiffants

ceux qui

ient, & par les enfants.

[*] Επεὶ κ οκάνθαρος θηλείας φύσεως & KETENKEY. Cl. Ælian de animalib.lib.10.0.15.

[3] ψέλιν τῷ Βασιλεῖ τῶν Αἰγυπτίων προσάρτητο, αναστέλλων τῶν ἀδικημάτων. Suid. in voce éxior.

[y] Quia dicuntur juvari in omni actu fuo, qui Alexandrum expreffum vel auto geftitant vel argento, Trebell. Poll. in triginta tyrannis.

[ 2 ] φορά γαρ πριάμενος τον δακτύλιον sarda axp E'udays. Ariftoph, in Pluto.,

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21,

Les habitans [c] de Naples étant Talismans affligés d'une grande quantité de fang- de virgile. fuës, Virgile jetta dans un puits une fangfuë d'or qui les en délivra entiérement. Un ancien ouvrage dédié à l'empereur Othon III. intitulé, Les amufements impériaux[d], porte que Virgile fit une mouche d'airain, qui pendant les huit ans, qu'elle demeura attachée à une des portes de la ville de Naples, empêcha qu'aucune mouche n'y pût entrer; qu'il mit fur l'une des portes de Naples deux ftatuës,l'u ne defquelles fe nommoit joïcufe & belle, l'autre trifte & hideufe; qui avoient cette puiffance, que fi quelqu'un entroit par le côté, où étoit la prémiére, toutes les affaires lui fuccéPPPP 399;

[α] Οὗτος ὁ Εὐδαμος φυσικός δακτυλίες ποιῶν πρὸς δαίμονας· κ ἔφεις, ἧς τα τοιαῦτα Schol. Ariftoph. in loc.citat.

[6] Bula geftamen erat triumphantium, quam in triumpho præ fe gerebant, inclufis intra eam remediis, quæ crederent adverfus invidiam valentiffima. Macrob.Saturnal.l.1.c.6.

[c] Naudé, apol. ch. 21, Georg. Pillan philolog. 3.4.6 16

[d] Otia Imperatoris .

22.

contre la

doient à fouhait; mais qu'elles avoient une issuë malheureufe, pour ceux qui entroient du côté de la feconde ftatuë; cet auteur ajoute quelques autres ré. veries femblables.

Alexandre Trellien cite un talifman Talisman contre la cholique, affurant qu'il en cholique. connoît les bons effets par fa propre expérience. Il ordonne de graver' fur un anneau de fer à huit angles, ces paroles [e]: Fui, fui, malheureufe bile, l'alouette te cherche. Il falloit, ajoute ce médecin, travailler à la gravure de cette bague, au 17.0u au 21. de la lune: & il obferve qu'on doit fuivre le précepte du divin Hippo crate, qui recommande de ne révéler Jes myftéres qu'aux initiés, & de les cacher aux prophanes.

23.

de Conftantinople.

24.

trouvés à Paris.

Le ferpent d'airain de l'Hippodrome [f] de Conftantinople fut élevé, pour chaffer les bêtes vemineuses.

Grégoire de Tours [g] rapporte qu'à Paris, en nettoïant la riviére, on Talifmans trouva des talifmans contre les ferpents, les loirs, & les incendies: & qu'un fer. pent & un loir d'airain aïant été ôtés, Ja ville redevint fujéte aux incendies, & que les ferpents & les loirs en grand nombre cauférent beaucoup d'incommoditéaux habitants. Gaffarel dit à ce "fujet [b]:,, Nous foupirons touts les "jours les dommages, que le feu a du "depuis fait fi long-temps en cette vil"le. Et auparavant la découverte de cette lame merveilleufe, touts ces mal

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heurs y étoient inconnus

25.

far les t

Les talifmans ont eutant de répu- opinion tation, qu'il eft affez difficile de fe probable perfuader, qu'aucun d'eux n'ait cu lilimans quelque forte de vertu, & qu'il n'y ait pas eu quelque fondement à touts les contes qui ont été debités à ce sujet:car les fables font prefque toujours hantées fur quelque chofe de vrai. Il paroît donc vraisemblable, que files talifmans ont eu effectivement quelque propriété, ils agiffoient ou par la matiere dont ils étoient composes, ou dont ils étoient frottés, ou par des remédes naturels inférés dans leurs figures concaves, ou par quelque autre fupercherie,

26,

La phyfiognomie fe fonde fur les De la phyexpériences, comme toutes les autres fiognomic. divinations, & fur les lumiéres qu'elle tire de l'aftrologie judiciaire. Elle examine toute la difpofition du corps; car lorfqu'on ne confidére que le front, on la nomme métopofcopie; fi elle ne regarde que la main, elle s'appelle cheiromantic.Les phyfiognomiftes font affez vains, pour vouloir non feulement connoître le tempérament & les inclinations, mais prédire le détail de toute forte d'événements. Ils avancent des régles téméraires & bizarres.

27.

Il y a, difent-ils, trois principales De la mélignes dans le front, qui défignent toposcopic. trois âges différents, & font fous la domination de trois planétes. L'inférieure régie rieure régie par Mercure eft celle qui

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[e] Deʊye, qeʊye, 18 Konú, úxopúdanos é Care.Alex.Trallian.lib.10.in fine. [f] Le mot grec hippodrome, fignifie un espace deftiné aux courfes de chevaux.

[g] Aïebant enim hanc urbem quafi confecratam fuiffe antiquitùs, ut non ibi incendium prævaleret, non glis, non ferpens apparuiflet. Nuper autem cùm

cuniculus pontis emundaretur, & cœ num de quo repletum fuerat, auferretur, ferpentem gliremque æneum repeterunt, quibus ablatis, & glires ibide inceps extrà numerum & ferpentes apparuerunt; & pofteà incendia perferre cœpit. Gregor. Turon,bit.lib.8.c.33.

[b] Gaffarel curiosités inoïïes,p.112.

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