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Nfin bórnant le cours de tes galanteries,
Alcippé, il est donc vrai, dans peu tu te maries.
Sur l'argent, c'est tout dire, on est déja d'ac-

cord.
Ton Beaupere futur vuide són coffre fort:
Et déjale Notaire a, d'un stile energique,
Griffonné de ton joug l'instrument authentique.
C'eft bien fait. Il est temps de fixer tes de firs.
Ainsi que les chagrins l’Hymen a fes plaifirs.
Quelle joye en effet, quelle douceur extrême !
De se voir caressé d'une Epoufe qu'on aime :
De s'entendre appeller petit Cæur, où mon Bonn
De voir autour de fui croistre dans sa maison,
Sous les paisibles loix d'une agreable Mere ,
De petits Eitoyens dont on croit eftre Pere!"
Quel charme ! au moindre malqui nous vient menacet,
De la voir auffi-toft accourir , s'empresser,
S'effrayer d'un peril qui n'a point d'apparence,
Et souvent de douleur fe pâmer paravance.
Car to ne feras point de ces Jaloux affreux,
Habiles à ferendre inquiets, malheureux,
Penfeat toûjours qu'un autre curs yeux le desole,

.
Mais quoy, je voy déja que ce discours t'aigrit.
Charmé de Juvenal t, & plein de son esprit
Venez-vous, diras-tu, dans une piece outrée ,-
Comme lui noas chanter: * Que dés le temps de Rhu
La Chasteté dějä, la rougerir sur le front;
Avóit éhes lits Humains Feceu plus d'un affront:
Qu'on vid avec le fer naiftre les Injustices,
L'Impieté, l'orgueil, de tous les autres Vices,
Mais que la Bonne foy dans l'amour conjugal
N'alla point jusqu'au temps du troisiéme Metal?

"C6

Ces t Juvenat a fait une Satire contre les Femmes, qui eft son pløs bet ouvrage.

* Paroles du conamencement de la Satire di Juvinatu

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Ces mots ont dans sa bouche une emphậze admirablo ::
Mais je vous dirai, moi, sans alleguer la fable,
Que fi fous Adam mesme & loin avant Noé,
Le Vice audacieux des Hommes avoué
A la.triste Innocence en tous lieux fit la guerre,
Il demeura pourtant de l'honneur sur la Terre :
Qu'aux temps les plus féconds en Phrynés, en Lays,
Plus d'une Penelope honora son pays;
Et que meime aujourd hui, sur ces fameux modeles., i
On peut trouver encor quelques Femmes fideles,

Sans doute; & dans Paris, 6 je Içay bien.compter,
Il en est jusqu'à trois, que je pourois citer..
Ton Epouse dans peu fera la quatriéme.
Je le veux croire aingi: Mais la Chasteté mesmę
Sous ce beau nom d'Epouse entralt-t-elle chés toys
De retour d'un voyage, en arrivant, croy. moy. 2.3
Fais toûjours du logis avertir la maistresse.

Tel partit tout baigné des pleurs de la Lucrece, • Qui faute d'avoir pris ce loinjudicieux, Trouva. Tu sçais... Je sçay que d'un conte odieux Vous avés commemoi fali vostre memoire. Mais laissons-là, dis-cu, Joconde & son histoire. Du projet d'un Hymen deja fort avancé, Devant vous aujourd'hui criminel Et mis sur la sellete aux pies de la cononcé,!1.

ic Je voy bien tout de bon qu'il faut que je m'explique.

Jeune autrefois par vous dans le monde conduïc : J'ay trop bien profité, pour n'e&re pas inftruir A quels discours malins le Mariage expoze. Je sgai, que c'est un texte où chacun fait la gloze: Que de Maris trompés tout rit dans l'Univers, on Epigrammes, Chansons, Rondeaux, Fables en vers, Satire , Comedie'; & sur cette matiere, J'ay yeu tout ce qu'ont fait la Fontaine & Moliere, j'ay leu tout ce qu'ont dit Villon, & Saint Gelais Arioste, Marot, Bocace, Rabelais, Estous ces vieux Recueils de Satires naïves. Des malices du Sexe immorteles archives, a ko

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Mais, tout bien balancé, j'ay pourtant reconnu,
Que de ces contes vains le Monde entretenu
N'en a pas de l'Hymen moins veu fleurir l'usage';
Que sous ce joug moqué tout à la fin s'engage :
Qu'à ce commun filet les Railleurs mesmes pris
Ont esté trés-fouvent de commodes Maris;
Et que pour eftre heureux sous ce joug salutaire
Tout dépend en un mot du bon choix qu'on sçait faire..

Enfin, il faut ici parler de bonne foy,
Je vieillis; & ne puis regarder sans effroy,
Ces Neveux affamés, dont l'importun visage
De mon bien à mes yeux fait déja le partage.
Je croy déja les voir, au moment annoncé
Qu'à la fin, sans retour, leur cher Oncle est passé,
Sur quelques pleurs forcés qu'ils auront foin qu'on voye,
Se faire consoler

du sujet de leur joye. Je me fais un plaisir , à ne vous rien celer, De pouvoir, moi vivant, dans peu les desoler; Et, trompant un.espoir pour eux fi plein de charmes , Arracher de leurs yeux de veritables larmes,

Vous dirai-je encor plus ? Soit foiblesse, ou raisoning, Je suis las de me voir les soirs en ma maison Seul avec des Valets souvent voleurs & craigres, Et toûjours à coup seur ennemis de leurs Maistres.. Je ne me couche point, qu'aulli-toft dins mon lit Un souvenir fascheux n'apporte à mon esprit, Ces Histoires de morts lamentables, tragiques, Dont Paris tous les ans peut grosir ses Chroniques. Dépouillons-nous ici d'une vaine fierté. Nous naissons, nous vivons pour la societé. Anous:mesmes.livrés dans une folitude Nôtre bonheur bien-toft fait nostre inquietude ; Et fi, durant un jour, notre premier Ayeul Plus riche d'une coste avoit vefcu tout seul, Je doute, en fa demeure alors-f fortunées. S'il n'eust point prie Dieu d'abreger la journée. N'allons donc point ici reformer Univers, Ni par de vains discours, & de frivoles vers

Eta.

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Etalant au Publiç nôtre misanthropie,
Censurer le lien le plus doux de la vie.
Laissons-là, croyés moi, le monde tel qu'il eft.
L'Hymenée est un joug, & c'est ce qui m'en plaist.
L'Homme en fes passions toûjours errant fans guide:
A besoin qu'on lui mette & le mors & la bride.
Son pouvoir malheureux ne sert qu'à le gesner,
Et pour le rendre libre, il le faut enchaîner.
C'est ainsi que souvent la main de Dieu l'aflife.
Ha bon ! voila parler en docte Janseniste !
Alcippe, & fur ce point fi sçavamment touché,

се
Des-mares , *dans saint Roch, n'auroit pas mieux pref-
Mais c'est trop t'insulter. Quittons la raillerie. [ché.
Parlons sans hyperbole & fans plaisanterie.
Tu viens de mettre ici l'Hymen en son beau-jour.
Enten donc: & permets, que je presche à mon tour.

L'Epouse que tu prens, fans tache en fa conduite, Aux vertus, m'a-t-on dit, dans Port-Royal instruite gs Aux loix de son devoir regle tous fes desirs. Mais qui peut t'asseurer, qu'invincible aux plaisirsChés coi dans une vie ouverte à la licence, Elle conservera sa premiere innocence ? Par toi-mesme bien-toft conduite à l'Opera , De quel air penses-tu, que ta Sainte verra D'un spectacle enchantear la pompe harmonieuse, Ces danses, ces Heros à voix luxurieuse; Entendra ces discours sur l'amour seul roulans, Ces doucereux Renauds, ces insensés Rolands; Sçaura d'eux qu'à l'Amour comme au seul Dieu supréOn doit immoler tout, jusqu'à la vertu mesmę: [me, Qu'on ne sçauroit trop toft le laisser enflammer:. Qu'on n'a receu du Ciel un caurque pour aimeri Et tous ces Lieux communs de Morale lubrique Que Lully rechauffa des sons de la musique ? Mais de quels mouvemens dans son ceurexcités Sentira-t-elle alors tous ses sens agités ? Je ne te respons pas, qu'au retour moins'timide bigne Ecoliere enfin d'Angelique & d'Armide,

L. Pere Des-mates, fameux Predicattuno

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Elfe n'aille à l'instant pleine de ces doux sons,
Avec quelque Medor pratiquer ces leçons.

Supposons toutefois, qu'encor fidele & pure
Sa vertu de ce choc revienne fans blessure.
Bien-toit dans ce grand Monde, où tu vas l'entraîner,
Au milieu des écueils qui vont l'environner,
Crois-tu que toûjours ferme aux bords du précipice
Elle poura marcher fans que le pié lui glife?
Que toûjours infenfible aux discours enchanteurs.
D'urridolatre amas de jeunes Seducteurs,
Sa sagesse jamais ne deviendra folie?
D'abord tu la verras, ainsi que dans Clélie,
Recevant ses Amans sous le doux nom d'Amis
S'en tenir avec eux aux petits soins permis ;
Puis bien-toft en grande eau sur le fleuve de Tendre',
Naviger à souhait, tout dire, & tout entendre,
Et ne préfume pas que Venus, ou Sathan
Souffre qu'elle en demeure aux termes du Roman.
Dans le crime il suffit qu'une fois on débute,
Une chûte toûjours attire une autre chûte.
L'honneur est comme une lfe escarpée & sans bords..
On n'y peut plus rentrer dés qu'on enest dehors.
Peut-eftre avant deux ans ardente à te déplaire,
Eprise d'un Cadet, yvre d'un Mousquetaire,
Nous la verrons hanter les plus honteux brelans,
Donner chés la Cornu rendés-vous aux Galans;
De Phêdredédaignant la pudeur enfantine, :
Suivre à fiunt découvert Z...& Mellaline:
Conter pour grands exploits vingt-hommes rüinés
Bleffés, battus pour elle, & quatre affaflinés ;
Trop heureux ! fi toûjours Femme defordonnée,
Sios mesure & fans regle au vice abandonnée,
Par cent traits d'impudence aisés à ramaser,
Elle t'acquiert au moins un droit pour la chaffer.

Mais que deviendras-tu ? fi, folle en son caprice ;.
N'aimant que le scandale & l'éclat dans le vice,
Bien moins pour son plaisir, que pour l'inquieter,
Au fond peu vicieuse elle aime à coqueter?

Ene

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