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Chaldéens & de Sénéque, ont foutenu [f] que les cométes font des planétes de quelque tourbillon voifin du nôtre; comme de celui de la canicule & d'au. tres étoiles de la prémiére grandeur; que ces planétes étrangères, qui font placées à l'extrémité de leur tourbillon, comme Saturne eft à l'extrémité du nôtre, mettent un long efpace de temps à achever leurs révolutions; que se trouvant du côté de notre tourbillon, elles deviennent visibles pour nous pendant quelque temps, & difparoif fent lorfqu'en continuant leur route, elles s'éloignent de nous; que cette queue lumineuse qu'on voit derrière les cométes toujours en oppofition du foleil, prouvent qu'elles ne font point des corps lumineux par eux-mêmes, mais que du côté que nous les voïons, elles reçoivent leur illumination de notre foleil, comme elles la reçoivent auf fi de l'étoile, ou du foleil de leur tourbillon, du côté oppofé à notre foleil & tourné vers le leur, en forte que cette queue n'eft autre chofe que les raions de ces deux foleils réunis & rompus fur les contours de ces globes. Ces Coperniciens font fervir cette explication à prouver le mouvement de la terre: car fi les cométes font un cercle autour d'un centre pofé au-delà de la fphére de nos planétes, il eft impoffible qu'elles tournent autour de la terre, & par conféquent il faut de néceffité que la

terre tourne.

Cette caufe phyfique des cométes toute ingénieufe qu'elle eft, ne me paroît pas recevable. Comment concevoir la queue lumineufe,que l'on nomme autrement la chevelure de la comé se, produite par une lumiére que les

[f] Hift. de l'Acad ̧ des fcient, ann, 1723.

raïons du foleil portent audelà des bor nes de notre tourbillon, & qui n'étant que réfléchie, a affez de force pour revenir jufqu'à nous, après avoir une fe conde fois franchi les barriéres qu'elle rencontre dans les mouvements oppofés des deux tourbillons? C'eft.comme fi l'on vouloit faire paffer & repaffer un foible courant d'eau au travers de deux torrents fort rapides, dont le cours feroit contraire. Ileft vrai que la lumiére des étoiles traverfe des efpaces inconcevables, & que pour venir jufqu'à nous, elle perce plufieurs courants des tourbillons intermédiaires, mais ib n'y a nulle comparaifon à faire d'une lumiére directe à une lumiére refléchie.

114.

roit la plus

S'il étoit néceffaire de prendre parti L'opinion dans cegrand nombre d'opinions fur les de Longocométes, j'inclinerois davantage à l'ex- montan paplication de Longomontan que j'ai rap- fimple. portée, comme à la plus fimple. Elle reflemble à celle d'Ariftote auffi mentionnée ci-deffus. Il faut feulement prendre garde que la parallaxe nous a appris que les cométes font fort éloignées de la terre,& de bien loin au-deffus de la région de la lune, contre le fentiment d'Ariftote; qu'elles ne peuvent donc être produites des exhalaifons de la terre, & qu'il faut les compofer, ou d'une matiére éthérée épaifle, ou des exhalaifons des planétes fupéricures. Les cométes font affez fréquentes [glon Les comé en compte fept, depuis l'an 1298. juf- res arrivent fréquemqu'à l'an 1314. ving-fix, depuis l'an ment. 1500. jufqu'à l'an 1543.il en a paru touts les ans, pendant plufieurs années de fuite. On en vit quatre tout à la fois en 1529. on en compte huit ou neuf pour la feule année 1618. & combien y en a-t-il qui achévent leur courfe, fans Bbbb 3

[g] Bayle, penfées diverfes. §.56.

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116. Prédictions

fe faire voir combien font plongées dans les raions du foleil, comme celle dont Poffidonius a rapporté [ 6 ], qu'elle n'avoit été vûë que par hazard pendant une éclipfe de foleil ?

Les aftronomes d'Egypte & de Chaldes cométes.dée, au rapport de Diodore [i], prédifoient les cométes, ce qui eft affez dif. ficile à concilier avec ce que le même auteur dit que les Chaldéens donnoient de fi mauvaises raifons des éclip. fes, qu'ils n'ofoient les publier.

Apollonius Myndius, qui fe vantoit d'avoir appris l'aftronomie des Chaldéens [7], affuroit qu'ils mettoient les cométes au nombre des planétes, & qu'ils en connoiffoient le cours ; mais Épigéne, qui fe vantoit auffi d'avoir étudié chez les Chaldéens, foutenoit qu'ils n'avoient rien déterminé fur les cométes, & qu'ils avoient du penchant à croire que c'étoit des exhalaifons al lumées fortuitement par les vents.

On a dit auffi de [m] Phérécyde, d'Anaximandre, & d'Abaris l'Hyperboréen, qu'ils prédifoient les tremble ments de terre & les cométes. Mais ces prédictions font vraisemblablement fuppofées, & de la nature de celles que plufieurs auteurs [n]ont attribuées

117.

fleuve Egos

à Anaxagore de quelques pierres qui devoient tomber du ciel. Il prédit au rapport de Pline [o] la chute d'une Chure d's pierre qui tomba dans l'Egos riviére de ne pietre la Cherfonéfe de Thrace. Les marbres dans le d'Arondel ont marqué la chute de cet- prédite. te pierre, en la quatrième année de la foixante-dixfeptiéme Olympiade. Plutarque témoigne [p] que de fon temps cette pierre fe gardoit encore dans le Péloponéfe,& fe montroit aux curieux; qu'elle fut regardée comme le préfage de la grande defaite des Athéniens à la journée d'Egos, qui fut fuivie de la prife d'Athénes par Lyfandre général des Lacédémoniens. Ariftote [9] a parlé de ce phénoméne, comme d'une pierre, qui avoit été enlevée par quelque vent violent, & qui retomba enfuite.

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[b] Multos cometas non videmus, quod obfcurantur radiis folis, quo dificiente, quemdam cometem apparuiffe, quem fol vicinus obtexerat, Poffidonius tradit. Sen. queft. natural.lib.7.c.20. [i] Died. Sic, lib.1. & 2. [k] Diod. Sic. lib.z.

[1] Bayle penf.fur la comét. §.212. Em] Cùm vidiffet Pherecydes aquam hauftam de jugi puteo, terræ motus inftare dixit. Cic. de divinat, lib.r.

[n] Anm. Marcell. lib. 22. Tzetz, Chil. 6. Philoftr. de vitá Apollonii, lib.1.6.2. [o] Plin. lib. 2.c 58.

[p] Plutarch, in Lyfandr.

[q] Ariftor. meteor. lib.1.c.7.

[r] Quid illi, qui effe contrarios veftigiis noftris antipodas putant, num aliquid loquuntur? aut eft quifquam tam ineptus qui credat effe homines quorum veftigia funt fuperiora quàm capita, aut ibi, quæ apud nos jacent, inverfa pendere ? fruges & arbores deorfum verfus crefcere? pluvias & nives furfum verfas cadere in terram?.... & miratur aliquis hortos penfiles inter feptem mira narrari, cum philofophi & agros, & maria, & urbes, & montes penfiles faciant? Lactant. de falfà fapientia.lib.3.c.4.

119.

Opinions

par Pythagore[s], & plufieurs fiécles
après Pythagore par Pline[] le natu-
ralifte.

On a cru pendant long-temps, que
l'opinion des Antipodes avoit été con-
damnée comme hérétique, par le pape
S. Zacharie: mais les derniers critiques
ont fait voir [u], que l'évêque Virgile
ne fut pas repris par Boniface archevê-
que de Maïence & légat du pape, pour
avoir foutenu qu'il y eut des Antipodes,
mais un autre foleil & une autre lune
qui éclairoit l'autre hémisphère.

Les Epicuriens ne croioient pas que nciennes les difques du foleil & de la lune fufle foleil. fent plus grands qu'ils paroiffent à nos yeux. Ils le fondoient [x], fur ce que les objets qui paroiffent plus petits à cause de leur distance, font auffi apperçus moins diftinctement, au lieu que nous trouvons dans le foleil & dans la lune plus de clarté & de fumiére,que dans les objets les plus proches, d'où ils concluoient que puifque la chaleur du foleil n'eft pas éteinte, ni la clarté des deux luminaires affoiblie par l'éloi gnement, la grandeur apparente n'eft pas non plus diminuée.

Xénophane croïoit [y] qu'il y avoit plufieurs foleils pour les zones différen tes,& même pour les différents climats. Eratofthéne a enfeigné que le foleil étoit vingt-fept fois plus grand que la terre; & Macrobe [z] a taché de

prouver par de fort mauvaifes raifons, que le foleil furpaffe huit fois en groffeur le globe terreftre. Anaximéne pa rut avancer le paradoxe le plus étran ge, en difant que le globe du soleil n'étoit pas moins grand que le Péloponnéfe,& c'eft long-temps depuis Anaximéne,qu'Epicure a foutenu que les difques du foleil & de la lune n'étoient pas plus grands que leurs apparences. Thalés avant Anaximéne a foute. nu que le globe du foleil étoit plus ›grand fept cents vingt fois que celui de la lune, mais fans rien déterminer par rapport à la terre. Héraclite [ a [com paroît la mesure du difque folaire à celle du pié de l'homme.

Chryfippe & Cleanthés regardoient le foleil comme un amas de feu doué d'intelligence, & produit par les exhalaifons de la mer.

Epicure avoit pour principe que le foleil s'allumoit touts les matins de nouveaux feux, & s'éteignoit touts les foirs dans les eaux de l'Océan Florus [b] rapportant l'expédition de Decimus Brutus le long des côtesd'Espagne [c], affure que Brutus ne voulue arrêter fes conquêtes, qu'après avoir été témoin de la chute du soleil dans l'Océan, & avoir entendu avec une efpéce d'horreur le bruit terrible que caufe l'extinction de cet aftre dans les eaux de la mer. Les anciens croïoient auffi [d]que

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120.

Opinions

le foleil & les autres aftres fe nourrif foient les uns des eaux douces des fleuyes, & les autres des caux falées de la mer: Cléanthés donnoit pour raifon du retour du foleil, lorfqu'il étoit arrivé aux folftices, que cet aftre ne vouloit pas s'éloigner de fa nourriture.

Pytheas difoit [e ]qu'à l'ifle Thulé, à fix jours de la grande Bretagne vers le Nord, & dans touts ces quartiers là, il n'y avoit ni terre, ni mer, ni air, mais un composé des trois, fur lequel later re & la mer étoient fufpenduës, & qui fervoit comme de lien à toutes les parties de l'univers, fans qu'il fût poffible d'aller dans ces efpaces, ni à pić, ni fur des vaiffeaux. Pytheas en parloit comme d'une chofe qu'il avoit vûë.

Le Vayer fraconte qu'un bon ana choréte fe vantoit d'avoir été jufqu'au bout du monde, & de s'être vû contraint d'y plier les épaules, à caufe de l'union du ciel & de la terre dans cette extrémité.

Cléon accufa Anaxagore d'impiété, pour avoir avancé que le foleil n'étoit pas un dieu, mais une groffe meule em brafee. Anaxagore attribuoit la lumié re du foleil a la refraction de l'æther ou du feu élémentaire.

Xénophane a cru que les étoiles s'étei des anciens gnoient touts les jours & fe ralumoient fur les étoi- toutes les nuits par l'embrafement des nuées. Métrodore, Straton, &

les.

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Anaximandre, Xénophane,les Stoi- 12 ciens croïoient que la lune éclairoit de fa propre lumiére. Les Epicuriens ne fçavoient fi fa lumière lui étoit propre ou étrangère.

Zénon [b] définiffoit la lune, un aftre doué d'intelligence & de prudence, & compofé d'un feu artiste.

Aftronomie

La plupart de ces opinions ne font guéres plus fubtiles, que celle des Ca- des Sauraraïbes[i], qui croient sérieusement, Bes. que la lupe fut créée avant le foleil, & qu'aïant vu la beauté du soleil,elle alla

fe cacher de honte, pour ne fe plus montrer que la nuit ; ou que l'hypothéfe des Hurons de la nouvelle France, qui s'imaginent que la terre étant percée de part en part, le foleil passe touts les jours par ce trou, & retourne ainfi d'une des extrémités de l'hémisphère à l'autre ou enfin que le fyftéme du philofophe Indien, qui enfeignoit que la terre étoit portée par un grand éléphant, qui étoit foutenu par une gran de tortue, apuiée fur quelque chofe d'inconnu.

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CHAPITRE QUATRIE ME.

De la Medecine.

SOMMAIRE.

a. La médecine est un art conjectural. 2. Confiance inconfiderée des hommes. 3. Danger des remédes. 4. La théorie des tempéraments fort incertaine .5. Divifions des humeurs en quatre efpéces. 6. Trois fortes d'efprits, naturels, vitaux, & animaux. 7. Différentes pinions fur la circulation du fang. 8. Systéme d'Afclepiade différent de celui de Galien. 9. Les maladies font peu connues des médecins 10. Diétes extraordinaires. 11. Contradictions fur l'origine des maladies. 12.Certai nes maladies for trépanduës dans certains temps & ignorées dans d'autres. 13. Maladies inconnues aux Grecs, décrites par les Arabes. 14. Opinions diverfes fur l'origine des maladies vénériennes. 15. Remèdes de ces maladies. 16. Incertitude des médecins fur les remédes qu'ils emploient. 17.Syfteme des infectes. 18. Touts lesgrands médecins ont été fort refervés fur l'ufa. ge des médicaments. 19. Ancien ufage

des eaux minérales. 20. Médecine réglée fur l'aftrologie. 21. Les anciens médecins attribuoient beaucoup de vertus aux nombres, 22. Paracel fe étoit fort entête de l'aftrologie.23. Purgatifs topiques. 24. Obfervations fur la tranfpiration. 25. Avantures d'Adrien aux bains publics.26.Tranf. plantation des maladies. 27. Inoculation de la petite vérole. 28. Remédes inhumains & fuperftitieux. 29. Touts les anciens médecins étoient empiriques. 30. Trois principes des Tom. I.

empiriques.31.Raifon des empiriques. 32. Réponses des dogmatiques. 33. Sentiment de Celfe fur cette dispute. 34. des remédes de précaution. 35. Sentiments contraires dans la medecine.36. Quatre périodes dans les maladies. 37. Loi d'Egypte. 38. de l'ufage de l'eau de vie. 39. Sentiment de Pline fur les médicaments. 40. Plufieurs Remèdes compofes par les médecins Arabes. 41. Découverte de l'antimoine. 42. Hiftoire de l'antimoine. 43. Le fuccés des remédes dépend beaucoup de l'imagination. 44. Dureté du médecin Callianax. 45. Guérifons des maladies par les amufements agréables. 46. Guérison de la piquure de la Tarentule. 47. Re. medes pour provoquer les éternuëments .48. Bains froids ordonnés par Charmis. 49. Cautéres ufités par Hippocrate. o. Aiguilles enfoncées par les médecins Japonois. 51.différentes opinions fur les faignées. 52. Des faignées dans la petite vérole. 53. Les médecins devenus plus entreprenants. 54. Différents raisonnements fur la petite vérole. 55. Hiftoire fingulière de Galien. 56. Les grands plus expofés au danger des remédes. 57. Incertitudes de la médecine fur le régime. 58. Il faut être vieux de bonne heure, pour l'être longtemps. 59. De l'usage de l'eau. 60. Des boiffons chaudes. 61. Diéte de Vefpafien. 62. Confeil de Celfe. 63.Triple précepte d'échole de Salerne. 64. De l'exercice. 65. Danger d'une fanté d'athlète. 66. Il eft fain de renouveller l'air. 67. Chrystallifation des fels contenus dans l'air .68. De la circulation des humeurs. 69. Diverfes opinions fur la digeftion.70. Incertitudes fur la génération. 71. Sentiments renouvelles, donnés pour Cccc

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