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couvroit en Egypte, & que vous avez confervée dans le Defert.

L'explication qui nous femble la plus naturelle, c'eft celle-ci : J'ai ôté de deffus vous l'op probre des Egyptiens: c'est-à-dire, j'ai ôté de desfus vous ce qui vous rendoit conformes aux Egyptiens, & qui avoit rendu les Egyptiens abominables à vos yeux, lorfque vous étiez en Egypte. Or ce qui avoit rendu les Egyptiens abominables aux Juifs, c'étoit le prépuce.

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Nous ne ferons plus qu'une remarque au fu jet de ce qui eft raconté fur la Circoncifion adminiftrée par l'ordre de Jofué. Elle roule fur Tofué le nom du lieu, où fe paffa cet événement. Il V.3.9. eft appellé Guilgal, & Côteau des prépuces. Il est

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clair que quand l'Hiftorien l'appelle de cette maniére, il fuit le ftyle dont nous voyons tant d'exemples dans l'Ecriture, il donne au lieu ร dont il parle, un nom qu'il n'a porté qu'à l'oc cafion de l'action qu'il vient de raconter. Le lieu, dont il eft ici queftion, ne fut appellé Côteau des prépuces, que parce que c'étoit un lieu élevé, où les Ifraelites furent circoncis Une des plus extravagantes penfées des Rabins, c'eft que Jofué entafla les uns fur les autres, tous les prépuces de ceux qui furent circoncis, & qu'il en fit un fi grand monceau, Verf. 9. qu'on pouvoit le prendre pour un côteau. Ce lieu fut auffi appellé. Guilgal, d'un mot Hébreu qui fignific rouler.. Il eft dit expreffément qu'il eut ce nom, parce que Dieu avoit dit, j'ai rou té de deffus vous Popprobre des Egyptiens. Il est

éton

30. JALCJT Tom. II. fot. 4. pag. 1. col. 1. P KE ELIEZER cap. 29. pag. 68.

31. JOSEPH, Antiq. Lib. V. cap. 1. pag. 182.

étonnant que Jofephe ait avancé " que le mot de Guilgal fignifie liberté. Quelque furprenante que foit cette méprife; elle l'eft encore moins que celle des Septante, qui en faifant l'histoire de la Circoncifion que nous venons de raconter, ont Voi. la

pris le mot Hébreu midbar, qui fignifie Defert, Verfion pour le nom propre du Defert dans lequel les des LXX. Juifs furent errans pendant quarante ans : du fur Jofue moins ils ont ajoûté à ces paroles du Chap. V. V. 5. vers. 5. de Jofué, on n'avoit circonci aucun du pexple dans le Defert, le mot de Mabdaritide.

XII. 43.

Le fecond évenement remarquable qui fe paffa dans le camp de Guilgal, ce fut la célébration de la Pâque. Elle avoit été négligée dans le Defert coinme la Circoncifion, & par des raisons à peu près femblables. D'ailleurs il n'étoit pas permis à ceux qui n'avoient pas reçû la Circoncifion de participer au Sacrement de la Pâque. La Loi difoit expreffément, que les étrangers ne pouvoient y être admis qu'après avoir reçû ce figne de l'Alliance: Si quel- Exod. que Etranger, qui habite dans ton païs, veut faire la Pâque à l'Eternel, il faut que tout mâle qui lui apartient foit circoncis: alors il s'aprochera pour faire la Pâque, & il fera comme celui qui est né au milieu de vous: mais aucun incirconcis n'en mangera. Les Rites des Juifs répondoient à cette Loi. La Guemare de Babylone porte, que celui qui néglige de circoncire quelcun de fes enfans mâles, ou de fes domestiques, n'eft pas en état de célébrer la Pâque. Et voici un paflage remarquable de 33 Manimonidés: Comme un homme, qui

32. Gemara Babyl. ad tit. Jebamot. cap. 8. fol. 70. 71. pag. 2.

33. MAIMONIDES Tractat. Corban, SALOM. JARCHI in Exod. XII. 44. pag. 480.

qui n'a pas recû lui-même le figne de la Circoncifion ne peut pas faire la Pâque, aussi celui, qui néglige de Padminiftrer à quelcun de fes enfans ou de fes efclaves, foit grands, foit petits, ne peut pas y participer, felon ce qui eft écrit, que le mâle foit circoncis, & qu'enfuite il faffe la Pâque. Que s'il immole la victime Pafchale avant que d'avoir été circoncis, il profane la Pâque. Il n'y avoit qu'une exception à cette régle générale: elle étoit en faveur de ceux dont les fréres étoient morts de la plaie de la Circoncifion," ainfi que nous l'avons déjà expliqué.

Dès que Jofué eût levé, à l'égard des Ifraëlites qui étoient fous fes ordres, le grand obstacle qui les éloignoit de la Pâque, il les admit à ce Sacrement: ils furent circoncis, & ils célébrérent la Pâque. Nous avons befoin de rappeller ici ce que nous avons déjà remarqué, que l'ordre d'adminiftrer la Circoncifion ne regar doit que ceux qui étoient nez depuis la fortie d'Egypte. Il eft démontré que tous ceux qui en étoient fortis n'étoient pas morts dans le Defert. Ce ne furent que ceux qui étoient au dess fus de l'âge de vingt ans, & qui avoient murmuré dans Cadés Barné. La Tribu de Levi n'avoit pas non plus été envelopée dans le ferment que Dieu avoit prononcé, qu'aucun des Nombr. Ifraelites n'entreroit dans le païs qu'il avoit juXIV. 30. ré de leur donner. Nous rappellons ici cette

remarque pour réfoudre une difficulté qui fe préfente naturellement à l'efprit dans l'Hiftoire que nous racontons. Les Ifraëlites pafférent le Jourdain le dixiéme jour du mois de Nifan. Ils allérent ce jour-là même ou peut-être le jour fui

34. Dans notre I. vol. Difcours XV. pag. 2574

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fuivant, au Camp de Guilgal. Ils furent circoncis l'onziéme ou le douziéme du même mois: le quatorziéme ils immolérent la Pâque, & ils la mangérent le quinzième, c'est-à-dire deux ou trois jours après avoir été circoncis. Comment des gens, qui étoient dans la plus grande douleur que caufoit la plaie de la circoncifion, étoient-ils en état d'immoler des victimes, & de faire tous les autres préparatifs de la Pâque? Cette queftion fe réfout par la remar que que nous venons de faire. Tous les Ifraëlites qui pafférent le Jourdain ne furent pas circoncis en Guilgal: ce ne furent que ceux qui étoient nez dans le Defert. Les premiers purent faire les préparatifs de la Pâque : & la plaie de la Circoncifion n'empêcha pas les autres d'en manger

La plupart des Interprétes difent, que la Pâque de Guilgal fut la troifiéme que célébrérent les Ifraëlites. La premiére avoit été faite en Egypte: la feconde dans le Defert, après la conftruction du Tabernacle, comme cela est raconté dans le Chapitre IX. des Nombres, & Nombr. fur ce paffage la glofe de Juifs porte, qu'il eft IX. 5. écrit à la honte des Ifraëlites, qu'ils n'ont fait la Pâque dans le Defert qu'une feule fois. Quelques Interprétes chrétiens ont parlé d'une autre Pâque célébrée avant celle de Guilgal.

Enfin le dernier évenement confidérable, qui arriva dans la Camp de Gui'gal avant la prife de Jérico, ce fut que la manne ceffa de tomber du ciel le lendemain de la Pâque, & que les Ifraëlites mangérent du grain rôti, qui étoit du crû de la Terre de Canaan, de cette même Jofué V.

35. Au commencement de ce Difcours,

an

II. I.

année. Ce font les propres termes de l'Hiftoire S'il y a quelquelque équivoque dans cette expreffion le lendemain de la Pâque, elle ne fauroit être confidérable, ni caufer de l'obfcurité dans la Chronologie facrée. Toute la différence, qui peut fe trouver dans cette matiére, ne peut être que d'un jour. Car fi par le jour de Pâque, on entend le quatorziéme du mois de Nifan qui étoit le jour de l'immolation de l'Agneau Pafchal, la Manne aura ceflé de tomber le quinziéme du même mois. Que fi par le jour, de la Pâque on entend le quinziéme, qui étoit le jour de la manducation de cet Agneau, la manne aura ceffé de tomber le feizième jour : ce qu'il importe peu de déterminer. A quel de ces deux partis qu'on fe range, on voit dans quel fens il faut entendre ces paffages de l'Ecri ture, qui difent que les liraëlites ont mangé de la Manne pendant quarante ans. Il eft clair qu'il ne faut pas entendre qu'elle tomba pendant quarante années completes; il en faut retrancher un mois entier car elle ne commença à tomber dans le camp de Ifraëlites que le quinziéme jour du fecond mois de leur fortie d'Egypte, & elle ceffa le feizième, ou le dix-feptième du premier mois, quarante ans après qu'ils furent affranchis de leur efclavage.

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Il paroit par cela même que les Juifs fe trompent, lorsqu'ils difent que la Manne cefla de tomber le jour même de la mort de Moyfe; celle de Marie fut fuivie felon, eux de la perte d'un Puits d'eau vive; la mort d'Aaron fit dif

paroi

36 Voi. in additionibus Talmudicis Maffechet Sota cap. II. voi. un grand recueil de citations fur ce fujet Joff. BUXTORF. Hiftor. Manna cap. 9. pag. 385. &c.

37. JOSEPH, cité fur le témoignage d'ADRICHO

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