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NOTES.

permet pas à un homme de se taire (2). Vous ne | gue se remue dans son palais comme le poisson contez pas la chose comme elle est, dira quel- dans l'eau ; et que, quand on l'accuseroit d'être qu'un de ces grands parleurs à quiconque veut plus babillard qu'une hirondelle, il faut qu'il l'entretenir de quelque affaire que ce soit : j'ai parle aussi écoute-t-il froidement toutes les tout su; et, si vous vous donnez la patience de railleries que l'on fait de lui sur ce sujet ; et jusm'écouter, je vous apprendrai tout. Et si cet qu'à ses propres enfants, s'ils commencent à autre continue de parler: Vous avez déja dit s'abandonner au sommeil: Faites-nous, lui dicela (3); songez, poursuit-il, à ne rien oublier. sent-ils, un conte qui achève de nous endorFort bien; cela est ainsi, car vous m'avez heu- mir (9). reusement remis dans le fait; voyez ce que c'est que de s'entendre les uns les autres. Et ensuite: Mais que veux-je dire? Ah! j'oubliois une chose: Oui, c'est cela même, et je voulois voir si vous tomberiez juste dans tout ce que j'en ai appris. C'est par de telles ou semblables interruptions qu'il ne donne pas le loisir à celui qui lui parle de respirer; et, lorsqu'il a comme assassiné de son babil chacun de ceux qui ont voulu lier avec lui quelque entretien, il va se jeter dans un cercle de personnes graves qui traitent ensemble de choses sérieuses, et les met en fuite. De là il entre dans les écoles publiques et dans les lieux des exercices (4), où il amuse les maîtres de vains discours, et empêche la jeunesse circonstance. Fort bien, vous y êtes; c'est cela mème.

par

de profiter de leurs leçons. S'il échappe à quelqu'un de dire: Je m'en vais, celui-ci se met à le suivre, et il ne l'abandonne point qu'il ne l'ait remis jusque dans sa maison (5). Si par hasard il a appris ce qui aura été dit dans une assemblée de ville, il court dans le même temps le divulguer. Il s'étend merveilleusement sur la fameuse bataille qui s'est donnée sous le gouvernement de l'orateur Aristophon (6), comme sur le combat célèbre que ceux de Lacédémone ont livré aux Athéniens sous la conduite de Lysandre (7). Il raconte une autre fois quels applaudissements a eus un discours qu'il a fait dans le public, en répète une grande partie, mêle dans ce récit ennuyeux des invectives contre le peuple; pendant que de ceux qui l'écoutent, les uns s'endorment, les autres le quittent, et que nul ne se ressouvient d'un seul mot qu'il aura dit. Un grand causeur, en un mot, s'il est sur les tribunaux, ne laisse pas la liberté de juger; il ne permet pas que l'on mange à table; et, s'il se trouve au théâtre, il empêche non seulement d'entendre, mais même de voir les acteurs (8). On lui fait avouer ingénument qu'il ne lui est pas possible de se taire, qu'il faut que sa lan

(1) Ou du Babil. (La Bruyère.) On pourroit intituler ce Caractère, de la Loquacité. Il se distingue du Caractère I par un babil moins insignifiant, mais plus impor tun. M. Barthélemy a inséré ce Caractère à la suite de l'autre dans son chap. xxvIII du Voyage d'Anacharsis.

(2) Littéralement, « La loquacité, si l'on vouloit la « définir, pourroit être appelée une intempérance de << paroles. >>

(3) Je crois qu'il faut traduire, « Avez-vous fini? n'ou<bliez pas votre propos, etc. » M. Barthélemy rend ainsi ce passage : « Oui, je sais de quoi il s'agit; je pourrois << vous le raconter au long. Continuez, n'omettez aucune

« Voyez combien il étoit nécessaire d'en conférer en<< semble. >>

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(6) C'est-à-dire sur la bataille d'Arbelles et la victoire d'Alexandre, suivies de la mort de Darius, dont les nouvelles vinrent à Athènes lorsque Aristophon, célèbre orateur, étoit premier magistrat. (La Bruyère.) Ce n'étoit pas une raison suffisante pour dire que cette bataille avoit été livrée sous l'archontat d'Aristophon. Paulmier de Grentemesnil a cru qu'il étoit question de la bataille des Lace

démoniens, sous Agis, contre les Macédoniens commandés par Antipater; mais il n'a pas fait attention que dans ce cas Théophraste n'auroit pas ajouté les mots de ceux de

Lacédémone au trait suivant seulement. Je crois, avec | par toute la ville, que tous s'accordent à dire Corsini, qu'il faut traduire « sur le combat de l'orateur, la même chose, que c'est tout ce qui se raconte << c'est-à-dire de Démosthène, arrivé sous Aristophon. »>

C'est la fameuse discussion sur la couronne que Démosthène croyoit mériter, et qu'Eschine lui disputoit. Ce combat, qui rassembla toute la Grèce à Athènes, étoit un sujet de conversation au moins aussi intéressant pour un

du combat (9), et qu'il y a eu un grand carnage. Il ajoute qu'il a lu cet évènement sur le visage de ceux qui gouvernent (10); qu'il y a un homme caché chez l'un de ces magistrats de

habitant de cette ville, que la bataille d'Arbelles, et il fut puis cinq jours entiers, qui revient de la Macé

livré précisément sous l'archontat d'Aristophon.

(7) Il étoit plus ancien que la bataille d'Arbelles, mais trivial et su de tout le peuple. (La Bruyère.) C'est la bataille qui finit par la prise d'Athènes, et qui termina la

guerre du Péloponèse, l'an 4 de la quatre-vingt-treizième olympiade.

doine, qui a tout vu, et qui lui a tout dit. Ensuite, interrompant le fil de sa narration: Que pensez-vous de ce succès? demande-t-il à ceux qui l'écoutent (11). Pauvre Cassandre! malheureux prince! s'écrie-t-il d'une manière touchante: voyez ce que c'est que la fortune; car

(8) Le grec dit simplement, « Il vous empêche de jouir enfin Cassandre étoit puissant, et il avoit avec lui <du spectacle. »

de grandes forces (12). Ce que je vous dis, pour

(9) Le texte porte, « Et il permet que ses enfants l'em-suit-il, est un secret qu'il faut garder pour vous << pêchent de se livrer au sommeil, en le priant de leur

<< raconter quelque chose pour les endormir. »

CHAPITRE VIII.

Du débit des nouvelles (1).

Un nouvelliste, ou un conteur de fables, est un homme qui arrange, selon son caprice, des discours et des faits remplis de fausseté; qui, lorsqu'il rencontre l'un de ses amis, compose son visage, et lui souriant: D'où venez-vous ainsi? lui dit-il; que nous direz-vous de bon? n'y a-t-il rien de nouveau? Et continuant de l'interroger: Quoi donc ! n'y a-t-il aucune nouvelle (2)? cependant il y a des choses étonnantes à raconter. Et sans lui donner le loisir de lui répondre: Que dites-vous donc? poursuit-il; n'avez-vous rien entendu par la ville? Je vois bien que vous ne savez rien, et que je vais vous régaler de grandes nouveautés. Alors, ou c'est un soldat, ou le fils d'Astée le joueur de flûte (3), ou Lycon l'ingénieur, tous gens qui arrivent fraîchement de l'armée (4), de qui il sait toutes choses; car il allègue pour témoins de ce qu'il avance des hommes obscurs qu'on ne peut trouver pour le convaincre de fausseté (5) : il assure donc que ces personnes lui ont dit que le roi (6) et Polysperchon (7) ont gagné la bataille, et que Cassandre, leur ennemi, est tombé vif entre leurs mains (8). Et, lorsque quelqu'un lui dit: Mais en vérité cela est-il croyable? il lui réplique que cette nouvelle se crie et se répand

seul, pendant qu'il court par toute la ville le débiter à qui le veut entendre. Je vous avoue que ces diseurs de nouvelles me donnent de l'admiration (13), et que je ne conçois pas quelle est la fin qu'ils se proposent : car, pour ne rien dire de la bassesse qu'il y a à toujours mentir, je ne vois pas qu'ils puissent recueillir le moindre fruit de cette pratique; au contraire, il est arrivé à quelques uns de se laisser voler leurs habits dans un bain public, pendant qu'ils ne songeoient qu'à rassembler autour d'eux une foule de peuple, et à lui conter des nouvelles. Quelques autres, après avoir vaincu sur mer et sur terre dans le Portique (14), ont payé l'amende pour n'avoir pas comparu à une cause appelée. Enfin il s'en est trouvé qui, le jour même qu'ils ont pris une ville, du moins par leurs beaux discours, ont manqué de dîner (15). Je ne crois pas qu'il y ait rien de si misérable que la condition de ces personnes : car quelle est la boutique, quel est le portique, quel est l'endroit d'un marché public où ils ne passent tout le jour à rendre sourds ceux qui les écoutent, ou à les fatiguer par leurs mensonges?

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(3) L'usage de la flûte, très ancien dans les troupes. (La Bruyère.)

(4) Le grec porte : « Qui arrivent de la bataille même. >>

(5) Je crois avec M. Coray qu'il faut traduire : « Car <«< il a soin de choisir des autorités que personne ne puisse

« récuser. »

CHAPITRE IX.

De l'effronterie causée par l'avarice (1).

Pour faire connoître ce vice, il faut dire que c'est un mépris de l'honneur dans la vue d'un vil intérêt. Un homme que l'avarice rend ef

(6) Arrhidée, frère d'Alexandre-le-Grand. (La Bruyère.) fronté ose emprunter une somme d'argent à

(7) Capitaine du même Alexandre. (La Bruyère.)

(8) C'étoit un faux bruit; et Cassandre, fils d'Antipater, disputant à Arrhidée et à Polysperchon la tutèle des enfants d'Alexandre, avoit eu de l'avantage sur eux. (La Bruyère.) D'après le titre et l'esprit de ce Caractère, il n'y est pas question de faux bruits, mais de nouvelles fabriquées à plaisir par celui qui les débite.

(9) Plus littéralement : « Que le bruit s'en est répandu

<< dans toute la ville, qu'il prend de la consistance, que << tout s'accorde, et que tout le monde donne les mêmes

« détails sur le combat. »

(10) Le texte ajoute: «Qui en sont tout changés. »

celui à qui il en doit déja, et qu'il lui retient avec injustice (2). Le jour même qu'il aura sacrifié aux dieux, au lieu de manger religieusement chez soi une partie des viandes consacrées (3), il les fait saler pour lui servir dans plusieurs repas, et va souper chez l'un de ses amis; et là, à table, à la vue de tout le monde, il appelle son valet, qu'il veut encore nourrir aux dépens de son hôte; et lui coupant un morceau de viande qu'il met sur un quartier de pain: Tenez, mon ami, lui dit-il, faites bonne chère (4). Il va lui-même au marché acheter des viandes cuites (5), et, avant que de convenir du prix, pour avoir une meilleure composition du marchand, il le fait ressouvenir qu'il lui a au

Cassandre favorisoit le gouvernement aristocratique établi à Athènes par son père; Polysperchon protégeoit le parti démocratique. (Voyez la note 17 du Discours sur Théo-trefois rendu service. Il fait ensuite peser ces

phraste.)

(11) Au lieu de, « Ensuite, etc., » le grec porte, « Et, « ce qui est à peine croyable, en racontant tout cela, il <«< fait les lamentations les plus naturelles et les plus per

<< suasives. >>

(12) La réflexion, « car enfin, etc., » est tirée de quelques mots grecs dont on n'a pas encore donné une explication satisfaisante, et qui me paroissent signifier tout autre chose. Le nouvelliste a débité jusqu'à présent son conte comme un bruit public, et dans la phrase suivante

viandes, et il en entasse le plus qu'il peut : s'il en est empêché par celui qui les lui vend, il jette du moins quelques os dans la balance : si elle peut tout contenir, il est satisfait; sinon, il ramasse sur la table des morceaux de rebut, comme pour se dédommager, sourit, et s'en va. Une autre fois, sur l'argent qu'il aura reçu de quelques étrangers pour leur louer des places au théâtre, il trouve le secret d'avoir sa part franche du spectacle, et d'y envoyer (6) le lende main ses enfants et leur précepteur (7). Tout lui fait envie ; il veut profiter des bons marchés, et demande hardiment au premier venu une chose qu'il ne vient que d'acheter. Se trouve

il en fait un secret : cette variation a besoin d'une transition; et il me paroît que ce passage, qui signifie littéralement << mais alors étant devenu fort, » est relatif au conteur, et veut dire, « mais ayant fini par se faire croire. » On sait qu'en grec le verbe dérivé de l'adjectif qu'emploie ici Théophraste signifie au propre je m'efforce, et aut-il dans une maison étrangère, il emprunte figuré j'assure, j'atteste.

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jusqu'à l'orge et à la paille (8); encore faut-il que celui qui les lui prête fasse les frais de les faire porter jusque chez lui. Cet effronté, en un mot, entre sans payer dans un bain public, et là, en présence du baigneur, qui crie inutilement contre lui, prenant le premier vase qu'il rencontre, il le plonge dans une cuve d'airain qui est remplie d'eau, se la répand sur tout le corps (9) Me voilà lavé, ajoute-t-il, autant « que j'en ai besoin, et sans en avoir obligation

à personne; remet sa robe, et disparoît.

NOTES.

(1) Le mot grec ne signifie proprement que l'impudence, et Aristote ne lui donne pas d'autre sens; mais Platon le définit comme Théophraste. (Voyez les notes de Casaubon.)

(2) On pourroit traduire plus exactement « à celui au« quel il en a déja fait perdre, » ou, d'après la traduction de M. Levesque, « à celui qu'il a déja trompé. »

C'étoit la coutume des Grecs. Voyez le chapitre du Contre-temps. (La Bruyère.) On verra dans le chapitre XII, note 4, que non seulement << on mangeoit chez soi une < partie des viandes consacrées,» mots que La Bruyère a insérés dans le texte, mais qu'il étoit même d'usage d'inviter ce jour-là ses amis, ou de leur envoyer une portion

de la victime.

(4) Dans le temps du luxe excessif de Rome, la conduite que Théophraste traite ici d'impudence auroit été très modeste; car alors, dans les grands diners, on faisoit emporter beaucoup de choses par son esclave, soit sur les

instances du maître, soit aussi sans en être prié. Mais les savants qui ont cru voir cette coutume dans notre auteur me paroissent avoir confondu les temps et les lieux. Du temps d'Aristophane, c'est-à-dire environ un siècle avant Théophraste, c'étoient même les convives qui apportoient

la plus grande partie des mets avec eux; et celui qui don

noit le repas ne fournissoit que le local, les ornements et les hors-d'œuvres, et faisoit venir des courtisanes. (Voyez Aristoph,, Acharn., v. 1085 et suiv., et le Scol.)

(5) Comme le menu peuple, qui achetoit son souper chez le charcutier. (La Bruyère.) Le grec ne dit pas des viandes cuites, et la satire ne porte que sur la conduite ridicule que tient cet homme envers son boucher.

(6) Le grec dit, d'y conduire.

(9) Les plus pauvres se lavoient ainsi pour payer moins. (La Bruyère.)

CHAPITRE X.

De l'épargne sordide.

Cette espèce d'avarice est dans les hommes une passion de vouloir ménager les plus petites choses sans aucune fin honnête (1). C'est dans cet esprit que quelques uns, recevant tous les d'aller eux-mêmes demander la moitié d'une mois le loyer de leur maison, ne négligent pas obole qui manquoit au dernier paiement qu'on leur a fait (2); que d'autres, faisant l'effort de donner à manger chez eux (3), ne sont occupés, pendant le repas, qu'à compter le nombre de fois que chacun des conviés demande à boire. Ce sont eux encore dont la portion des prémices (4) des viandes que l'on envoie sur l'autel de Diane est toujours la plus petite. Ils apprécient les choses au-dessous de ce qu'elles valent; et, de quelque bon marché qu'un autre, en leur rendant compte, veuille se prévaloir, ils lui soutiennent toujours qu'il a acheté trop cher. Implacables à l'égard d'un valet qui aura laissé tomber un pot de terre, ou cassé par malheur quelque vase d'argile, ils lui déduisent cette perte sur sa nourriture; mais si leurs femmes ont perdu seulement un denier (5), il faut alors renverser toute une maison, déranger les lits, transporter des coffres, et chercher dans les recoins les plus cachés. Lorsqu'ils vendent, ils n'ont que cette unique chose en vue, qu'il n'y ait qu'à perdre pour celui qui achète. Il n'est permis

́(7) Leur pédagogue. C'étoit, comme dit M. Barthé-à personne de cueillir une figue dans leur lemy, chapitre xxvi, un esclave de confiance chargé de suivre l'enfant en tous lieux, et sur-tout chez ses différents maitres. On peut voir aussi à ce sujet le bas-relief représentant la mort de Niobé et de ses enfants au Musée Pio

Clementino, tome iv, planche 17, et l'explication que

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jardin, de passer au travers de leur champ, de ramasser une petite branche de palmier (6), ou quelques olives qui seront tombées de l'arbre. Ils vont tous les jours se promener sur leurs terres, en remarquent les bornes, voient si l'on n'y a rien changé, et si elles sont toujours les mêmes. Ils tirent intérêt de l'intérêt même, et ce n'est qu'à cette condition qu'ils donnent du temps à leurs créanciers. S'ils ont invité à dîner quelques uns de leurs amis, et qui ne sont que des personnes du peuple (7), ils ne feignent point de leur faire servir un simple hachis; et on les a vus souvent aller eux-mêmes au marché pour ce repas, y trouver tout trop cher, et en

revenir sans rien acheter. Ne prenez pas l'habitude, disent-ils à leurs femmes, de prêter votre sel, votre orge, votre farine, ni même du cumin (8), de la marjolaine (9), des gâteaux pour l'autel (10), du coton (11), de la laine (12); car ces petits détails ne laissent pas de monter, à la fin d'une année, à une grosse somme. Ces avares, en un mot, ont des trousseaux de clefs rouillées dont ils ne se servent point, des cassettes où leur argent est en dépôt, qu'ils n'ouvrent jamais, et qu'ils laissent moisir dans un coin de leur cabinet; ils portent des habits qui leur sont trop courts et trop étroits; les plus petites fioles contiennent plus d'huile qu'il n'en faut pour les oindre (15): ils ont la tête rasée jusqu'au cuir (14), se déchaussent vers le milieu du jour (15) pour épargner leurs souliers; vont trouver les foulons pour obtenir d'eux de ne pas épargner la craie dans la laine qu'ils leur ont donnée à préparer, afin, disent-ils, que leur étoffe se tache moins (16).

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(5) Dans le texte il n'est point question d'un repas que donne l'avare, mais d'un festin auquel il assiste; et le mot grec s'applique particulièrement à ces repas de confrérie que les membres d'une même curie, c'est-à-dire de la troisième partie de l'une des dix tribus, faisoient régulièrement ensemble, soit chez un des membres de cette association, soit dans des maisons publiques destinées à cet usage. (Voyez la note de M. Coray sur le chap. 1 de cet ouvrage; Pollux, liv. VI, segm. 7 et 8, et Anacharsis, chap. XXVI et LVI. )

(4) Les Grecs commençoient par ces offrandes leurs repas publics. (La Bruyère.) Les anciens regardoient en général comme une impiété de manger ou de boire sans avoir offert des prémices ou des libations à Cérès ou à Bacchus. Mais il doit y avoir quelque raison particulière pour laquelle ici les prémices sont adressées à Diane; et c'étoit peut-être l'usage des repas de curies, puisqu'on sacrifioit aussi à cette déesse en inscrivant les enfants dans ce corps, et cela au moment où on leur coupoit les cheveux. (Voyez Hesychius, in voce Kureotis.) M. Barthé

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(7) La Bruyère a rendu ce passage fort inexactement. Il faut traduire : « S'il traite les citoyens de sa bourgade, «< il coupera par petits morceaux les viandes qu'il leur << sert. » Les bourgades étoient une autre division de l'At

tique que celle en tribus; il y en avoit cent soixante-quatorze. Les repas communs de ces différentes associations étoient d'obligation, et les collectes pour en faire les frais étoient ordonnées par les lois. Il paroît, par ce passage et par le chapitre suivant, note 14, que, dans ces festins, celui chez lequel ou au nom duquel ils se donnoient étoit chargé de l'achat et de la distribution des aliments, mais qu'il étoit surveillé de près par les convives.

(8) Une sorte d'herbe. ( La Bruyère.)

(9) Elle empêche les viandes de se corrompre, ainsi que le thym et le laurier. ( La Bruyère.)

(10) Faits de farine et de miel, et qui servoient aux sacrifices. (La Bruyère.)

(11) Des bandelettes pour la victime, faites de fils de laine non tissus, et réunis seulement par des nœuds de distance en distance.

(12) Au lieu de laine, Théophraste nomme ici encore une espèce de gâteaux ou de farine qui servoient aux sacrifices; et plus haut il parle de mèches, mot que La Bruyère a omis, ou qu'il a voulu exprimer ici.

(13) Voyez sur l'usage de se frotter d'huile, le Caractère v, note 4.

(14) « Ils se font raser jusqu'à la peau. » Voyez Caractère iv, note 7.

(15) Parceque dans cette partie du jour le froid en toute saison étoit supportable. (La Bruyère.) Il me semble que, lorsqu'il s'agit d'Athènes, il faut penser plutôt aux inconvénients de la chaleur qu'à ceux du froid : c'est afin que la sueur n'use pas ses souliers.

(16) C'étoit aussi parceque cet apprêt avec de la craie, comme le pire de tous, et qui rendoit les étoffes dures et grossières, étoit celui qui coûtoit le moins. (La Bruyère.) Il n'est question dans le grec ni de craie ni de laine, mais de terre à foulon, et d'un habit à faire blanchir. (Voyez les notes de M. Coray.) M. Barthélemy observe, dans son chap. xx, que le bas peuple d'Athènes étoit vêtu d'un drap qui n'avoit reçu aucune teinture, et qu'on pouvoit reblanchir, tandis que les riches préféroient des draps de couleur.

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