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1 Deut. II. 26.

des Hammonites: il les chargea de lui remon

&

trer les égards que les anciens Ifraëlites eurent Nomb. par l'ordre de Dieu pour le païs de Hammon, XXI. II. pour celui de Moab, lorsqu'ils fortirent d' Deut, I. Egypte, pour aller en Canaan. 'Il leur fit re9. &c. préfenter par ces Députez, que ce que le peúple d'Ifraël avoit pris de ce côté du Jourdain dans le païs des Amorrhéens, il l'avoit eu pár droit de conquète: qu'il avoit demandé d'abord à Sihon leur Roi, qui vivoit alors, la permiffion de paffer dans fes Etats: que ce Prince avoit non feulement refufé de leur accorder cette demande, mais qu'il n'y avoit répondu que par des actes d'hoftilité: que les Ifraelites avoient été contraints d'oppofer la force à la force: & que ç'avoit été par le fecours de Dieu, qui favorife ceux qui font engagez dans une guerre jufte, qu'ils avoient conquis le Royaume de Sihon. Il leur dit que fi les Moabites avoient remporté quelqué avantage 'par la faveur de leurs Dieux, ils prétendroient être authorisez à le garder, & ils ne fe croiroient pas obligez à s'en défifter; qu'à plus forte raifon les Ifraëlites, dont le Dieu avoit donné tant de preuves de fuperiorité fur ceux des autres nations, étoient fondez à garder ce qu'ils avoient conquis par fa puiffante protection. Jephthé' infiftoit fur cet article en parlant à ceux de Moab, parce que le païs du Roi Sihon, dont le peuple d'Ifrael étoit en poffeffion alors, avoit été autrefois pris par les Amorrhéens fur ceux de Moab, qui croyoient avoir droit de le reprendre. Jephthé rappella encore aux Moabites le mauvais fuccès des armes de Balac contre le peuple d'Ifraël. Il les exhorta d'avoir cet e

xemple

xemple toûjours préfent à leurs yeux, afin d'éviter de tomber dans les mêmes malheurs. Il leur dit qu'après tout il y avoit une prefcription de près de trois cens ans en faveur des Ifraëlites que les guerres n'auroient point de fin, & que la Societé feroit dans un bouleverfement continuel, s'il étoit permis de revendiquer ainfi des Etats après tant de Siècles. Jephthé voulut engager le Roi de Hammon par tous ces motifs à prévenir l'effufion du fang, & à fe déporter de la guerre, qu'il avoit déclarée aux Ifraëlites.

Mais ce Prince eut recours, à la raison ordinaire des Rois, qui ne peuvent défendre leur caufe par la juftice, je veux dire à la force & à la contrainte. Alors Jephthé faifi de courroux contre l'Opprefleur. & animé de cet Efprit de Dieu, qui l'avoit choifi pour terminer l'oppreffion, alla fondre fur les ennemis; il les enfonça & il les pourfuivit depuis Haroher juf- Jug. qu'à Minnith, en vingt villes, & jufques à la plai- 33. ne des vignes. Haroher étoit une ville des Moabites, fituée fur les rives méridionales du fleu- Deuter. II. 36. ve Arnon. -La Ville de Minnith étoit placée au 12. Septentrion d'Haroher. Nous ne pouvons pas iv. 48. bien déterminer l'efpace qui étoit entre ces deux Jug. x1. villes. On doit préfumer qu'il étoit confidérable, fi l'on retient notre Verfion, qui porte xxiv. 5 qu'il contenoit vingt villes. Mais il y de l'équivoque dans l'arrangement des termes Hébreux: O quelques Interpretes entendent non qu'il y avoit vingt villes dans l'efpace qui étoit entre

Haro

Io & II Voi. RELAND. Palestina. lib. III. pag. 89

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III.

26.

2 Sam.

Jug. XI.

30. 31.

*Harocher & la Vallée de Minnith, mais que
cette Vallée s'appelloit Minnith des vingt villes,
comme l'on appelloit Philadelphie de Decapo-
lis, c'eft-dire, de dix villes, cette contrée de
la Mer de Galilée, qui étoit ainfi nommée,
parce qu'elle contenoit dix villes confidérables,
à favoir Céfarée de Philippe, Cedès, Neph-
thalim, Afor, Sepher, Capernaum, Corazin,
Bethfaida, Jotapate, Tibérias, & Scythopolis.
Pour ce qui regarde le lieu, qui eft appellé dans
nos Verfions la Vallée des Vignes, il y a dans le
Texte, *, Abel des vignes.
12 St.Jerô-
me & 3 Eusèbe diftinguent trois villes qui
portoient ce nom : il n'eft pas démontré de la-
quelle des trois il eft ici queftion: probable-
ment c'eft de celle qui étoit à fix milles de Phi-
ladelphie, ou de Rabba des Hammonites, au
rapport de ces deux mêmes Géographes.

Nous ne nous arrêterons pas plus longtemps à la Victoire de Jephthé. L'Hiftoire fainte n'en rapporte aucune particularité. Nos recherches doivent rouler uniquement fur la principale circonftance de cet événement, ce fut le dévoue.ment, que ce Juge d'Ifraël fit de fa fille unique fujet fertile en controverfes parmi les Savans, & qui mérite toute l'attention, que nos Lecteurs voudront donner à ce Difcours. Voici le Texte: Jephthé fit un vœu à l'Eternel, & il dit: Si tu livres les enfans de Hammon en ma main; alors tout ce qui fortira des portes de ma maison au devant de moi, quand je retournerai en paix du païs des enfans de Hammon, fera à l'Eternel,

*Il y avoit une autre ville de ce nom dans le païs des Hammonites. Du moins c'eft ce qu'on femble pouvoir concluire de Josué x111. 25. Voi fur la Vallée dẹ

&c.

nel, & je l'offrirai (on peut traduire, ou je l'offrirai) en holocaufte. Jephthé s'aquita de fon vœu : 'Hiftoire fainte le rapporte de cette manière : Et comme Jephthé venoit à Mitfpa en fa maifon, Ibid. voici fa fille, qui étoit fa feule & unique, fans qu'il verf. 34. eût d'autre fils, ou fille, fortit au devant de lui avec des tambours & des flutes. Et fi-tôt qu'il l'eût apperçue il déchira fes vétemens, & il dit; Ha ma fille! tu m'as abbaiffé, & tu ès du nombre de ceux qui me troublent car j'ai ouvert ma bouche à l'Eternel, & je ne pourrai me retracter. Et elle répondit, mon père, as-tu ouvert ta bouche à l'Eternel? Fai moi felon ce qui eft forti de ta bouche, puisque l'Eternel t'a vangé de tes ennemis les enfans de Hammon. Toutefois elle dit à fon père; Que ceci me foit fait laisse moi pour deux mois, afin que je m'en aille, & que je defcende par les montagnes,

من

que je pleure ma virginité, moi & mes compagnes. Et il dit: Va; & il la laiffa aller pour deux mois. Elle s'en alla donc avec fes compagnes, & pleura fa virginité fur les montagnes. Et au bout de deux mois elle retourna vers fon père, & il lui fit felon le vœu qu'il avoit fait, & elle n'avoit point connu d'homme. De là vint la coûtume en Ifraël, que d'an en an les filles d'Ifraël alloient pour pleurer, (ou, comme l'on peut traduire, pour entretenir) la fille de Jephthe Galaadite,pendant quatre jours chaque année.

Deux fentimens partagent les Savans für cette matière: les uns prétendent que Jephthó à immolé en holocaufte fa fille unique les autres qu'il n'a fait que la féqueftrer de la fociété, &

Minnith Ezech. xxvII. 17. Jug. xt. 33.

la

12 & 13 HIERON. & EUSEB. Onomat. in voce Abel vinearum pag. 3.

la vouer au célibat, afin quelle s'emploïât toute entière à des miniftères religieux. Examinons ces deux fentimens pour le faire avec fuccès il faut agiter ces quatre Questions.

1. L'autorité d'un père fur les enfans s'étendelle jufqu'à immoler fa fille unique en holocaufte, ou jufques à la condamner au célibat? C'est la première Queftion.

11. Jephthé doit-il être fenfé fi fcrupuleux obfervateur des Loix divines, qu'il ait fuivi ponctuellement dans fa conduite à l'égard de fa fille ce qui étoit prefcrit par ces Loix? C'est la feconde Question.

III. Dans ce que nous fourniffent les monumens de l'Antiquité touchant les cultes fuperftitieux, que les Ifraëlites avoient adoptez du temps de Jephthé, y a-t-il quelque chofe qui favorite plus le fentiment de ceux qui croyent que Jephthé a immolé fa fille, que celui de ceux qui foûtien. nent qu'il n'a fait que la condamner au célibat? C'eft la troifiéme Question.

IV. Enfin le Texte facré eft-il plus favorable à l'une qu'à l'autre de ces hypothètes ? C'eft la quatriéme Queftion.

1. L'autorité d'un père fur fes enfans s'étendelle jufqu'à lui permettre d'immoler fa fille unique en holocaufte, ou de la condamner au célibat. Nous répondons, que la Loi n'autorifoit Jephthe ni à condamner fa fille au célibat, ni à l'immoler en holocaufte.

Elle ne l'autorifoit pas à l'immoler en holocaufte. Dieu eft le Maitre de la Religion. I n'a pas laiffé aux hommes la liberté de régler fon culte. L'abus qu'ils avoient fait de cette liberfous la Loi naturelle, les en a fruftrez. Auffi Dieu avoit il marqué lui-même aux Juifs avec préci

fion,

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