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la quitter. Il n'est plus ce tems où, tour: nant un œil enflammé sur l'audacieux collègue qui oscit provoquer la discussion d'un projet de décret présenté par son co mité de salur public, Robespierre sembloit dire: « Vois-tu, dans ce regard, l'épée de Gainas qui va te percer le sein!» Non la menace du tyran n'est plus aujourd'huį qu'un cri de grâce; ses mouvemens sont les frissons de l'agonie ; il est pâle déjà de sa mort prochaine.

Des caractères terribles, tracés par des mains courageuses, s'offrent par - tout à ses regards des mains invisibles écrivent sur la muraille la condamnation du coupable, et il ne peut feuilleter ses papiers sans les y rencontrer encore. сс Tq tends à la dictature, lui crie celui-ci (1), tu veux tuer la liberté...... tu as fait périr les plus fermes soutiens de la répu blique...... tremble! Tremblez tous, nouveaux décemvirs; des vengeurs de la patrie sont prêts à faire couler votre sang.

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Environne-toi de gardes, de noirs, d'es claves, je serai parmi eux, n'en doute point! Quoi! réduire la France à deux millions d'hommes ! et c'est trop encore, as-tu dit.... tremble! »

cc Tu es encore, lui écrit un autre, tigre, couvert du plus pur sang de la France, bourreau de ton pays, tu es encore?.... Écoute, lis l'arrêt de ton châ, timent. J'ai attendu, j'attends encore que le peuple affamé sonne l'heure de ton tré pas que, juste, il te traîne au supplice.... Si mon espoir étoit vain, s'il étoit différé, écoute, lis; cette main qui tracę ta sentence, cette main que tes yeux egarés cherchent à découvrir, cette main qui presse la tienne avec horreur, percera ton cœur inhumain.... Tous les jours je suis avec toi je te vois tous les jours ; à toute heure mon bras levé cherche ta poitrine...... O le plus scélérat des hommes! vis encore quelques jours pour penser à moi, dors pour rêver de moi; que mon souvenir et ta frayeur soient le premier appareil de ton supplice.... adieu; ce jour

même, en te regardant, je vais jouir de ta

terreur ",

On fait, disoit Frédéric le grand, un métier de dupe, quand on gouverne les états dans un tems de révolution. Le mot de dupe est trop foible pour Robespierre sans doute, quelle qu'ait été sa chûte ; mais on peut dire, que si ce sont-là les roses que ceuillent les tyrans, il est bien étonnant qu'il y ait des hommes qui songent à l'être, Hélas! c'est qu'il est de. l'homme de croire qu'on sera toujours plus heureux qu'un autre, et qu'un premier crime commis pour parvenir à l'autorité, en nécessite un second pour se maintenir dans le pouvoir, quand il est acquis.

3 a

Ces menaces et beaucoup d'autres, dont on accabloit Robespierre, dans des écrits, anonymes, eussent dû lui faire hâter l'exécution de son projet ; mais trop foible devant un colosse de puissance dont il vou-loit s'imposer tout le poids, elles ne développèrent dans son ame que le sentiment de la peur, encore plus impérieux chez lui que l'amour même de la tyrannie. Tout ce

qu'il avoit tenté avec ses collègues réunis des comités de gouvernement, tous les assassinats commis de concert avec eux, il les avoit soutenus avec un front d'airain; il étoit étayé ; mais, livré à ses propres forces, elles l'abandonnèrent. La peur le dominoit à un tel point, que la veille d'exécuter l'assassinat de la représentation nationale, il avoit le dessein de s'évader," avant que de s'être souillé de ce dernier for fait.

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Par une première lettre, datée de Londres, on voit que telle étoit son envie. Cette première lettre est à peu près insignifiante, mais, par une seconde, à lui adressée quelques jours après la fête de I'Être suprême, on voit clairement qu'il se ménageoit la ressource d'une prompte évasion. Par cette lettre, on le prie d'être tranquille sur les objets que son adresse a su faire parvenir depuis le commencement de ses craintes. « A présent, vous allez employer, lui dit-on, toute la vigilance qu'exige la nécessité de fuir un théâtre où vous devez bientôt paroître et disparoître pour la dernière fois ; il est inutile de vous

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fappeler toutes les raisons qui vous exposent; car ce dernier pas, qui vient de vous mettre sur le sopha de la présidence, vous rapproche de l'échafaud, où vous verriez cette canaille qui vous encense vous cracher au visage, comme elle a fait à ceux que vous avez jugés. Égalité, dit d'Orléans, vous en fournit l'exemple ainsi, puisque vous êtes parvenu à vous former ici un trésor suffisant pour exister long tems, ainsi que les personnes pour qui j'en ai reçu de vous, je vais vous at tendre avec grande impatience, pour rire avec vous du rôle que vous avez joué dans le trouble d'une nation aussi crédule qu'avide de nouveautés... Prenez votre parti d'après nos arrangemens »

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Travaillé par l'espoir de regner tiraillé par la crainte d'échouer et la peur du supplice, ne sachant quel parti prendre, on voit que le lâche n'étoit pas homme à brû ler ses vaisseaux pour se mettre dans la nécessité de vaincre. C'est au milieu de cette incertitude et de cette fluctuation qui devoient le perdre, que le 8 thermidor artiva. Mais d'en venir aux détails

avant que

1

de

Da

précieur

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