Page images
PDF
EPUB

lement le vôtre; puisque vos ancêtres et vous avez porté le premier jusqu'à la restauration, et que vous portez le second depuis la restauration seulement.

Cette question, Monsieur, que chacun se fait dans le département qui vous a nommé, n'est pas une vaine question de curiosité. Des écrivains judicieux et instruits ont, à différentes époques, écrit l'histoire de votre pays; l'histoire de ce Boulonnais, tant céPays; lèbre depuis vingt siècles, tant par les événements qui s'y sont passés, que par l'influence qu'ils ont eue sur les destinées du monde.

Une histoire particulière aussi importante par ses liaisons avec l'histoire générale, n'est pas, susceptible d'être interrompue, et, n'en doutez pas, elle sera continuée un jour.

La place éminente que vous occupez aujourd'hui, Monsieur, vous appelle à jouer un rôle dans cette histoire; et comme l'his toire n'est interressante et utile qu'autant qu'elle est exacte, on se demande aujourd'hui plus que jamais, en Boulonnais, si vous étes, ou si vous n'êtes pas de l'illustre famille de ce fameux Rosny, duc de Sully, qui à tant de titres sera toujours cher à la France, et dont le nom est en quelque sorte devenu une glorieuse propriété nationale,

que personne n'oserait aujourd'hui banalement usurper sans un grand danger, celui du ridicule, qui est naturellement d'un poids écrasant chez la nation qui aime le plus à rire en Europe.

Jusqu'à ce que vous ayez bien voulu, Monsieur, résoudre, pour vos commettants, ce problème historique qui n'en saurait être un pour vous, vous les abandonnez au vague du vaste champ des conjectures, et vous sentez que, faute de mieux, ils doivent s'y livrer entièrement.

En attendant la solution qu'il vous est si facile de donner sur ce point, je vais jeter un coup d'œil sur les principaux on dit qui ont circulé lors des élections.

Un journal d'abord, comme bien vous savez, a élevé la question de la légalité de votre nomination sous le nouveau nom de Rosny, qui n'est de fait celui de personne, en Boulonnais. Il a rappelé le trait cité par La Bruyère, d'un sieur Syrus qui changea autrefois son S en C pour avoir quelque ressemblance avec l'ancien roi de Perse, et il aurait pu ajouter philosophiquement à cela la réflexion de La Bruyère, qui ajoute malicieusement qu'il n'eut qu'à perdre, par la comparaison qu'on fait tonjours de celui qui porte un grand nom, avec les grands hon mes qui

l'on porté; plus d'un lecteur à cet égard à supplée à la brièveté du journaliste.

On a refeuilleté La Bruyère, et dans La Bruyère on a vu que de son temps il y avait des personnes qui avaient jusqu'à trois noms : un pour la ville, un pour la campagne, et l'autre, pour je ne sais plus quelle circonstance: et l'on s'est demandé si, à l'exemple de ces temps gothiques, vous voudriez aussi avoir deux noms; un pour la vie privée, et un autre pour la vie politique.

Le trait de Cyrus en a même rappelé un plus récent d'un nommé Franqclin, qui se disait descendant de l'illustre Franklin, et s'il n'y avait pas, Monsieur, quelque chose de trop trivial et de trop au-dessous de la gravité de cette lettre, dans la réponse que lui fit le juge en lui remettant ses papiers, je vous la citerais ici, mais cette réponse est généralement connue, votre mémoire y suppléera facilement.

ins

On s'est encore également demandé si, crit à votre naissance sur les actes civils sous le nom de Jean-Baptiste Delegorgue de Rony, et vous présentant à la Charnbre sous le noi de Jean-Baptiste Delegorgue de Rosny, vou; ne seriez pas exposé à vous entendre dire : Faites disparaître une petite s et votre acte de naissance vous servira.

En attendant que vous éclaircissiez le doute de l'identité de la famille de Rosny de Sully avec la vôtre, voici, Monsieur, le résultat des recherches qui ont été faites à ce sujet, et les réflexions qu'elles ont suggérées.

1o Le baron de Rosny Maxinailien de Béthune, depuis duc de Sully, honoré de l'amitié du grand Henri, naquit, en 1539, d'une très ancienne famille de France à la terre de Rosny, qui appartient aujourd'hui à madame la duchesse de Berry, et sur la généalogie de votre famille on trouve, vers 1588, ce qui suit :

Jean Delegorgue, marchand tanneur à Abbeville, propriétaire du fief de Retouval, et consul (consul, des tanneurs) en 1588 c'est-à-dire à l'époque de la vie de Rosny de Sully.

2

Jean Delegorgue, marchand tanneur, fut marié à Françoise Mourète, propriétaire du fief de Rony, sis à Bouillancourt en Serie, près Blangy, à quatre lieues d'Abbeville.

Françoise Mourète, propriétaire du fief de Rony, était fille de Mourète, marchand brasseur, et de Robert le Canu, elle et son mari firent hommage de leur fief au seigneur, le 11 mars 1604.

# Jean Delegorgue, fils des précédents, propriétaire des fiefs de Rony et de Retouval,

docteur en médecine, fut marié à demoi¬ selle Delagarde; il fut tué par M. Carpentier, prêtre qui était fou, et inhumé paroisse St-Gilles, le 21 juillet 1658.

Jean Delegorgue, seigneur de Rony, docteur en médecine à Abbeville, paroisse Ste.Catherine, fils des précédents, marié à demoiselle l'Allemand, par contrat du 9 septembre 1653, devant De Boulogne, notaire à Abbeville.

Jacques-François Delegorgue, seigneur de Rony, conseiller au présidial d'Abbeville, puis heutent-général, en la chaussée du Boulonnais, mort à Abbeville, paroisse Se.-Catherine, le12 oct. 17 12, marié à Antoinette-Nicole Leroy, François-André Delegorgue (Delegorgue, comme on l'a vu constamment ci-dessus, et non pas, Delagorgue, comme quelques-uns l'ont dit sans doute par corruption) sieur de Rony, né à Boulogne, vers 1705, paroisse St.-Joseph; mort à Abbeville, paroisse du St.-Sépulcre, le 19 juillet 1755, marié par contrat du 29 mai 1731 devant Delignère, notaire. Vient ensuite:

Antoine-Nicolas Delegorgue de Rony (votre respectable père, Monsieur), trésorier de France au bureau des finances d'Amiens, qui, par parenthèse, signa toujours de Rony, ainsi qu'il appert sur votre propre extrait de

« PreviousContinue »