Et qu'en maître déja vous savez vous y prendre! Et vous, qui lui donnez de si douce manière MYRTIL. Ah! quittez de ces mots l'outrageante bassesse, LYCARSIS. Je veux lui parler, moi. Toutes ces amitiés... MYRTIL. Je ne souffrirai point que vous la maltraitiez. Au milieu de mon sein vous chercher un supplice; MÉLICERTE. Non, non, ne croyez pas qu'avec art je l'enflamme, SCÈNE V. LYCARSIS, MYRTIL. MYRTIL. Hé bien! vous triomphez avec cette retraite, Et, dans ces mots, votre ame a ce qu'elle souhaite : LYCARSIS. Comment! à quel orgueil, fripon, vous vois-je aller? MYRTIL. Oui, j'ai tort, il est vrai: mon transport n'est pas sage; 'Molière s'est servi de la même idée et presque des mêmes expressions dans la troisième scène du quatrième acte du Tartuffe. Marianne dit à son père : Mon père, au nom du ciel qui connoît ma douleur, « Et par tout ce qui peut émouvoir votre cœur, « Relâchez-vous un peu des droits de la naissance, Et dispensez mes vœux de cette obéissance. « Ne me réduisez point, par cette dure lot, LYCARSIS, à part. Aux douleurs de son ame il me fait prendre part. Quel amour! quels transports! quels discours pour son age! MYRTIL, se jetant aux genoux de Lycarsis. Voyez, me voulez-vous ordonner de mourir? Je n'y puis plus tenir : il m'arrache des larmes, MYRTIL. Que si, dans votre cœur, un reste d'amitié Et vous ferez bien plus que me donner la vie. Vous ferez pour moi que son oncle l'oblige A me donner sa main? Jusqu'à me plaindre au ciel de ce que je vous dot; Et cette vie, hélas! que vous m'avez donnée, Ne me la rendez pas, mon père, infortunée. »> L'effet de ce discours est différent dans les deux pièces. Orgon résiste; Lycarsis se rend. La raison en est simple. Lycarsis n'a point appris d'un faux dévot à repousser les plus purs sentiments de la nature. LYCARSIS. Oui. Lève-toi, te dis-je. MYRTIL. O père, le meilleur qui jamais ait été, LYCARSIS. Ah! que pour ses enfants un père a de foiblesse ! MYRTIL. Me tiendrez-vous au moins la parole avancée ? Non. LYCARSIS. MYRTIL. Me permettez-vous de vous désobéir, Si de ces sentiments on vous fait revenir? Prononcez le mot. LYCARSIS. Oui. Ah! nature! nature! Je m'en vais trouver Mopse, et lui faire ouverture MYRTIL. Ah! que ne dois-je point à vos rares bontés! (seul.) Quelle heureuse nouvelle à dire à Mélicerte! 'Que tout cela est simple, vrai, naturel! que l'inquiétude de Myrtil et la bonté de son père sont heureusement exprimées! Les précautions du premier, pour assurer un bonheur auquel il ne peut croire, sont pleines de grace et de passion : le cœur d'un amant est toujours inquiet; le cœur d'un père est toujours foible : c'est ce double sentiment qui donne tant de vérité à cette scène, scène encore neuve aujourd'hui, quoiqu'elle serve de dénoûment à toutes nos comédies. SCÈNE VI. ACANTHE, TYRÈNE, MYRTIL. ACANTHE. Ah! Myrtil, vous avez du ciel reçu des charmes TYRÈNE. Peut-on savoir, Myrtil, vers qui, de ces deux belles, ACANTHE. Ne faites point languir deux amants davantage, Il vaut mieux, quand on craint ces malheurs éclatants, MYRTIL. Rendez, nobles bergers, le calme à votre flamme; La belle Mélicerte a captivé mon ame. Auprès de cet objet mon sort est assez doux, Et si vos vœux enfin n'ont que les miens à craindre, ACANTHE. Ah! Myrtil, se peut-il que deux tristes amants...? TYRÈNE. Est-il vrai que le ciel, sensible à nos tourments...? MYRTIL. Oui, content de mes fers comme d'une victoire, |