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ascendant si le tombeau égaloit l'oppresseur et l'opprimé ».

Malheureux sophiste, de quel droit viens-tu arracher à l'innocence le sceptre de la raison, pour le remettre dans les mains du crime; pour jeter un voile funèbre sur la nature, désespéref le malheur, réjouir le crime, attrister la vertu; dégrader l'humanité? Eh! si l'existence de Dieu, si l'immortalité de l'ame n'étoient que des songes, elles seroient encore la plus belle de toutes les conceptions de l'esprit humain ».

:

« La nature a mis dans l'homme le sentiment du plaisir et de la douleur, qui le force à fuir les objets physiques qui lui sont nuisibles et à chercher ceux qui lui conviennent le chefd'œuvre de la société seroit de créer en lui j pour les choses morales, un instinct rapide qui, sans le secours tardif du raisonnement, le portât à faire le bien et à éviter le mal. Or ce qui pro duit ou remplace cet instinct précieux, ce qui supplée à l'insuffisance de l'autorité humaine, c'est le sentiment religieux qu'imprime dans les ámes l'idée d'une sanction donnée aux pré ceptes de la morale, par une puissance supé rieure à l'homme. Vous vous garderez donc bien de briser le lien sacré qui nous unit à l'auteur de notre être. Il suffit même que cette opinion salutaire ait regné chez un peuple, pour qu'il soit dangereux de la détruire; car les motifs des devoirs et les bases de la moralité s'étant néces

sairement liés à cet idée, l'effacer, c'est démoraliser le peuple ».

rang

A la suite de son rapport, il fit décréteg que le peuple Français reconnoissoit l'existence de l'Etre suprême, et l'immortalité de l'ame; que le peuple français mettoit aų de ses devoirs, de détester la mau vaise foi et la tyrannie ; qu'il seroit insti❤ tué des fêtes qui rappelleroient les événe mens glorieux de la révolution; que tous les ans la république française célébreroic à l'avenir, le 10 acût, le 21 le 21 janvier jour de la mort du roi, et le 31 mai jour où le massacre des Girondins fuc arrêté. Il fut décrété aussi qu'il seroit affecté une fête à chaque jour de décadi. Voici l'énumération de ces fêtes: A l'Être suprême et à la Nature; (il fut arrêté que celle-là auroit lieu le 20 prairial, lors prochain). Au Genre humain; au peuple français; aux Bienfaiteurs de l'humanité z aux Martyrs de la Liberté, à la Liberté et à l'Égalité; à la République; à la Liberté du monde ; à l'Amour de la patrie; à lą Haine des tyrans et des traîtres; à la Vé A az

rité; à la Justice ; à la Pudeur ; à la Gloire et à l'Immortalité; à l'Amitié; à la Frugalité au Courage; à la Bonne-foi; à PHéroïsme; au Désintéressement ; au Stoïcisme; à l'Amour; à l'Amour conjugal; à l'Amour paternel; à la Tendresse maternelle ; à la Piété filiale; à l'Enfance ; à la Jeunesse ; à l'Age viril; à la Vieillesse; au Malheur ; à l'Agriculture; à l'Industrie; à nos Aïeux ; à la Postérité et au Bonheur. Pour que l'univers fût instruit de ce discours, et de l'institution nouvelle dont il avoit été suivi, on en ordonna la transcription dans toutes les langues. C'eût été merveilleusement fait, sans-doute, si tous les peuples eussent été instruits de ce qui se passoit, si on eût pu leur cacher que, dans le moment où l'on vouloit avoir l'air de respecter l'enfance et la vieillesse en France, on y égorgeoit impitoyablement la vieillesse et l'enfance; que quand on parloit d'y honorer le malheur et la vertu, on y érigeoit des autels sanglans au crime, à la guerre civile, au carnage, à la délation, à l'impiété, à la destruction, et

que le fer des bourreaux y étant émoussé, on employoit le bronze, la flamme et les flots, à l'extermination du peuple.

C'est en effet, au moment où Robes. pierre prononçoit un discours aussi touchant, au moment où il faisoit décréter de pareilles fètes, que l'on mettoit à exécution, avec la dernière rigueur, un décret rendu peu de jours auparavant, sur le rapport de Saint-Just. Il est impossible. d'en passer sous silence les principales dispositions. On a vu que ce Saint- Just ainsi que tons les beaux diseurs des comités de gouvernement, ne venoient jamais demander un décret, que leur projet ne fût accompagné de phrases bannales et insignifiantes; Saint-Just done, fit précéder le décret dont nous allons analyser les principales dispositions, d'un discours qui n'exciteroit que le rire de la pitié, s'il no provoquoit l'indignation la plus forte. On y remarquoit ces phrases:

« Un homme révolutionnaire est plein d'honneur et de probité; il est policé sans fadeur, mais par franchise, et parce qu'il est en paix avec son propre coeur. Il croit que la grossièreté est une marque de tromperie et de remords, et

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qu'elle déguise la fausseté sous l'emportement, Les aristocrates parlent et agissent avec tyrannie; l'homme révolutionnaire est intraitable aux mé chans, mais il est sensible, il est si jaloux de la gloire de la patrie et de la liberté, qu'il ne fait rien inconsidérément; il court dans les com bats; il poursuit les coupables et défend l'inno. $ cence devant les tribunaux. Il dit la vérité, afin qu'elle instruise et non pas qu'elle outrage. Il sait que, pour que la révolution s'affermisse, il faut être aussi bon aujourd'hui qu'on étoit méchant autrefois. La probité n'est pas une finesse de l'esprit, mais une qualité du cœur bien entendue. Marat étoit doux dans son ménage, ( il vivoit avec une prostituée aussi hideuse de figure qu'atroce par le cœur) il n'épouvantoit que les traîtres, Jean Jacques Rousseau étoit révolutionnaire, ec n'étoit pas insolent; d'où je conclus qu'un révolutionnaire est un héros de bon sens et de probité ».

Et après cette belle conclusion, SaintJust fit décréter, entre autres choses, que tous les prévenus de conspiration seroient traduits, de tous les points de la république, au tribunal révolutionnaire de Paris; que les comités de salut public et de sûreté générale rechercheroient prompte. ment les complices des conjurés, et les fer Foient traduire au tribunal révolutionnaire

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