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le faire voyager. Le roi lui disait l'autre jour : Eh bien, M. le duc d'Orléans, vous allez donc en Italie? Non pas, Sire, que je sache. Mon Dieu si, vous y allez ; c'est moi qui vous le dis, et vous m'entendez bien. Non, Sire, je n'entends point, et je ne quitte la France que quand je ne puis faire autrement.

-Ce Deffiat, député en ma place, est petit-fils de Ruzé Deffiat qui donna l'eau de chicorée à Madame Henriette d'Angleterre. Leur fortune vient de là. Monsieur récompensa ce serviteur fidèle. Monsieur vivait avec le chevalier de Loraine, que Madame n'aimait pas. Le ménage était troublé. Deffiat arrangea tout avec l'eau de chicorée. Monsieur, depuis ce temps, eut toujours du contre-poison dans sa poche, et Deffiat le lui fournissait. Ce sont là de ces services que les grands n'oublient point, et qui élèvent une famille noble. Mon remplaçant n'est pas un homme à donner aux princes, ni poison, ni contre-poison; il ferait quelques quiproquo. C'est une espèce d'imbécille qui sert la messe, et communie le plus souvent qu'il peut. Il n'avait, dit-on, que cinquante voix dans le collége électoral: ses scrutateurs ont fait le reste. J'en avais deux cent vingt connues. L'empereur Alexandre a dit à M. de Châteaubriand: Pour l'intérêt de mon peu

ple et de ma religion, je devais faire la guerre au Turc; mais j'ai cru voir qu'il s'agissait de révolution entre la Grèce et le Turc: je n'ai point fait la guerre. J'aime bien moins mon peuple et ma religion, que je ne hais la révolution, qui est proprement ma bête noire. Je me réjouis que vous soyez venu; je voulais vous conter cela. Quelle confidence d'un empereur! Et le romancier qui publie cette confidence! Tout dans son discours est bizarre.

Il entend sortir les paroles de la bouche de l'empereur. On entend sortir un carosse ou des chevaux de l'écurie; mais qui diantre entendit jamais sortir des paroles? Et que ne dit-il: Je les ai vu sortir, ces paroles, de la bouche de mon bon ami qui a huit cent mille hommes sur pied? cela serait plus positif, et l'on douterait moins de sa haute faveur à la cour de Russie.

Notez qu'il avait lu cette belle pièce aux dames; et quand on lui parla d'en retrancher quelque chose, avant de la lire à la Chambre, il n'en voulut rien faire, se fondant sur l'approbation de madame Récamier. Or, dites maintenant qu'il n'y a rien de nouveau. Avait-on vu cela? Nous citons les Anglais Est-ce que M. Canning, voulant par: ler aux Chambres, de la paix, de la guerre, consulte les ladys, les mistriss de la cité?

Les gens de lettres, en général, dans les emplois, perdent leur talent, et n'apprennent point les affaires. Bolinbroke se repentit d'avoir appelé près de lui Addisson et Steele.

Socrate, avant Boissy d'Anglas, refusa, au péril de sa vie, de mettre aux voix du peuple assemblé une proposition illégale. Ravez n'a point lu cela; car il eût fait de même dans l'affaire de Manuel. Il est vrai que Socrate, président les tribus n'avait ni traitement de la cour ni gendarmerie à ses ordres. Manuel a été grand quatre jours; c'est beaucoup. Que faudrait-il qu'il fit à présent? Qu'il mourût, afin de ne point décheoir.

- D'Arlincourt est venu à la cour, et a dit: Voilà mon Solitaire et mes autres romans, qui n'en doivent guères au Christianisme de Châteaubriand. Mon galimathias vaut le sien; faites-moi conseiller-d'état au moins. On ne l'a pas écouté. De rage, il quitte le parti, et se fait libéral. C'est le maréchal d'Hocquincourt, jésuite ou janséniste, selon l'humeur de sa maîtresse, et l'accueil qu'il reçoit au Louvre.

Ravez maudit son sort, se donne à tous les diables. Il a fait ce qu'il a pu, dans l'affaire de Manuel, pour contenter le parti jésuite. Il n'a point réussi. Ceux qu'il sert lui reprochent de s'y être mal pris, disent que

c'est un sot, qu'il devait éviter l'esclandre, et qu'avec un peu de prévoyance, il eût empêché l'homme d'entrer, ou l'eût fait sortir sans vacarme. Fâcheuse condition que celle d'un valet! Sosie l'a dit; les maîtres ne sont jamais contents. Ravez veut trop bien faire. Hyde de Neuville va mieux, et l'entend à merveille. Je vois, je vois là-bas les ministres de mon roi. Il a son roi comme Pardessus : Mon roi m'a pardonné. Voilà le vrai dévoue ment. Le dévouement doit être toujours un peu idiot. Cela plaît bien plus à un maître, que ces gens qui tranchent du capable.

Serons-nous capucins, ne le serons→ nous pas? Voilà aujourd'hui la question. Nous disions hier: Serons-nous les maîtres du monde?

Ce matin, me promenant dans le PalaisRoyal, M..ll...rd passe, et me dit: Prends garde, Paul-Louis, prends-garde; les cagots te feront assassiner. Quelle garde veux-tu, lui dis-je, que je prenne? Ils ont fait tuer des rois; ils ont manqué frère Paul, l'autre Paul, à Venise, Fra Paoolo Sarpi. Mais il l'échappa belle.

Fabvier me disait un jour : Vos phraseurs gâtent tout: voulant être applaudis, ils mettent leur esprit à la place du bon sens que le peuple entendrait. Le peuple n'entend

point la pompeuse éloquence, les longs raisonnements. Il vous paraît, lui dis-je, aisé de faire un discours pour le peuple; vous croyez le bon sens une chose commune et facile à bien exprimer.

-Le vicomte de Foucault nous parle de sa race. Ses ancêtres, dit-il, commandaient à la guerre. Il cite leurs batailles et leurs actions d'éclat. Mais la postérité d'Alphane et de Bayard, quand ce n'est qu'un gendarme aux. ordres d'un préfet, ma foi, c'est peu de chose. Le vicomte de Foucault ne gagne point de batailles; il empoigne les gens. Ces nobles ne pouvant être valets de cour, se font archers ou geôliers. Tous les gardes-ducorps veulent être gendarmes.

Les Mémoires de madame Campan méritent peu de confiance. Faits pour la cour de Bonaparte, qui avait besoin de leçons, ils ont été revus depuis par des personnes in

téressées à les altérer. L'auteur voit tout dans l'étiquette, et attribue le renversement de la monarchie à l'oubli du cérémonial. Bien des gens sont de cet avis. Henri III fonda l'étiquette, et cependant fut assassiné. On négligea quelque chose apparemment ce jourlà. L'étiquette rend les rois esclaves de la

cour.

Dans ces mémoires il est dit qu'une fille de

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