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des nombreuses assises marneuses du Jura, mais encore chacune des couches qui les constituent, peuvent offrir des différences dans leur composition chimique et aussi dans leurs propriétés physiques.

Ainsi, en les considérant à ce dernier point de vue, les unes, exposées à l'action de l'air, se délitent facilement et rapidement en fragments qui ne tardent pas eux-mêmes à se fuser et à se réduire en poussière impalpable. Cet état de division est nécessairement le plus convenable pour permettre aux différents agents d'exercer une action efficace sur leurs éléments.

D'autres marnes, comme l'a remarqué depuis longtemps M. de Gasparin. après s'être délitées et fusées, laissent comme résidus de nombreux rognons plus ou moins gros, quelquefois microscopiques, qui ne peuvent jouer d'autre rôle que celui du sable ou du gravier; l'action chimique de ces rognons devient ainsi complètement nulle.

Il est évident qu'une marne de cette dernière catégorie ne pourra pas produire, à quantité égale, dans la plupart des cas, le même effet que celles de la première.

D'un autre côté, la composition chimique varie peut-être encore plus que les propriétés physiques. Dans les unes, l'argile domine, dans d'autres, le calcaire l'emporte de beaucoup.

Une marne des environs de Poligny, qui a été analysée par M. Pidancet dans le laboratoire du collège, n'a pas donné moins de 18 p. 020 de gypse ou sulfate de chaux, de telle sorte qu'on pourrait l'employer efficacement dans la culture des légumineuses. D'autres renferment, outre le sulfate de chaux, du carbonate de magnésie, etc.

On conçoit dès lors combien les effets des marnes de notre pays sur un même sol doivent être variables, et par suite l'influence de ces variations sur le désappointement de nos cultivateurs qui emploient trop souvent la marne sans se rendre compte de sa nature.

M. Pidancet s'étend ensuite longuement sur la nécessité d'étudier chimiquement la nature du sol arable, et d'analyser aussi, couche par couche, chacune des marnes de notre pays, C'est pour lui le seul moyen d'arriver à doser nettement la quantité de telle ou telle marne propre à produire de bons effets sur une parcelle déterminée.

Il fait un appel aux cultivateurs et les engage à l'aider dans ses recherches, en lui indiquant les résultats de leurs expériences.

Il demande ensuite qu'une enquête perpétuelle soit ouverte à la Société sur la question qui a été posée à l'ordre du jour. Cette proposition est adoptée. La séance est levée à 4 heures.

BIBLIOGRAPHIE AGRICOLE.

Entretiens sur l'agriculture et sur l'’horticulture PAR M. LEFÈVRE-BRÉART, MEMBRE CORRESPONDANT.

Ce qui préoccupe le plus aujourd'hui les économistes et les moralistes, c'est la fâcheuse tendance des habitants des campagnes vers les grands centres de population. S'il y a accord sur la gravité du mal, il n'en est pas tout-à-fait de même sur la nature des remèdes à y appliquer. Néanmoins, le plus grand nombre pense que le système d'éducation primaire suivi jusqu'à ces temps derniers, entre pour une large part dans ce dégoût des travaux champêtres qui s'empare des jeunes générations. Pour satisfaire le besoin universellement senti d'un solide enseignement agri

cole, les livres traitant de la matière ont pullulé partout. Initier, dès leurs premiers pas dans la vie, les enfants aux pratiques rationnelles et saper ainsi, par sa base, la routine, ce suprême fléau de l'agriculture, tel a été le but de ceux qui les ont écrits. Mais une regrettable lacune reste pourtant à combler dans leurs traités : la plupart n'ont pas eu assez présente la pensée qu'ils travaillaient pour des enfants et qu'ils devaient, en les instruisant, s'attacher à faire naître dans leurs cœurs un goût, un amour profond pour le plus noble et le plus sacré des arts. Par un ton amical et tout paternel; par d'intéressantes digressions historiques, voire même des biographies d'agriculteurs marquants; par des extraits remplis d'à-propos, de publications spéciales; par des excursions aussi agréables qu'instructives dans le domaine des autres connaissances humaines, il n'ont pas suffisamment atténué ce que la science agricole a, comme toute science du reste, de fastidieux, de sec, d'aride, de rebutant pour la première jeunesse; ils n'ont pas assez mêlé de roses aux épines, pas assez placé d'oasis pleins de fraîcheur et de verdure au milieu des sables du désert et présenté, avec la théorie et les meilleurs procédés des diverses manipulations auxquelles l'homme soumet journellement la terre et ses produits, le côté poétique, attrayant et éminemment moral de la vie des champs pour, répétons-nous, faire des agrophiles en même temps que des agronomes ou des agriculteurs. Ce sont-là les conditions d'un succès assuré que l'on est heureux de rencontrer dans les Entretiens sur l'agriculture et l'horticulture, par M. Lefèvre-Bréart, dont le second volume vient de paraitre.

Comme son aîné (1), ce second volume est d'un style didactique simple, clair, précis et méthodique; tout y est puisé à des sources de bon aloi; c'est la science enrichie de ses plus récentes conquêtes. Il traite des labours, des assolements, de la mécanique agricole, de la botanique, des insectes et des insectivores, etc., etc.; il contient de nombreuses figures d'instruments aratoires. L'extension donnée aux matières qu'il renferme et qui embrassent une étendue de près de 400 pages, a conduit l'auteur au-delà des limites qu'il s'était fixées. Un troisième volume devient nécessaire pour mener à bonne fin une œuvre si bien commencée. Ce dernier volume est sous presse et sera bientôt mis au jour. Alors, disons-le hautement, M. Lefèvre-Bréart, cet instituteur poète autant que bon agronome, aura fait un traité élémentaire d'agriculture des plus complets et des plus heureusement conçus, dont la place est marquée à l'avance dans toutes nos écoles rurales et dans les bibliothèques communales, ces créations modernes et bénies, destinées à détruire le monopole de la vie intellectuelle qu'avaient eu jusqu'ici les grandes agglomérations; alors, M. Lefèvre-Bréart se sera acquis des droits incontestables à la bienveillance et aux sympathies du nombre immense aujourd'hui de ceux qui, comme nous, placent l'agriculture, considérée comme science ou comme art, au premier rang parmi tout ce qui occupe et occupera jamais l'esprit ou les bras des mortels.

GINDRE, de Molain, membre fondateur.

(4) Voir le rapport flatteur qui en a été fait dans le Bulletin de la Société, année 1861,

POLIGNY, IMP. DE MARESCHAL.

page 35.

OBSERVATIONS METEOROLOGIQUES RECUEILLIES A POLIGNY.

ÉLÉVATION: 338 AU LIEU D'OBSERVATION.

(Juin 1863).

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NOTA.-Les températures au-dessous de zéro sont précédées du signe : celles au-dessus ne sont précédées d'aucun signe.

Le signe B signifie beau temps; V temps variable ou demi-couvert; C ciel couvert; Br brouillard; P pluie; N neige; 0 orage avec tonnerre.

OZONOMÈTRE. Le chiffre 0 signifie la négation de l'ozone dans l'atmosphère, et le chiffre 21 le plus haut degré auquel on puisse le rencontrer. IMPRESSION DE L'AIR. A signifie apre, C chaud, D doux, F froid, Fa frais, G glacial, H humide. L lourd, S sec. Le signe 2 en surmontant un autre. exagère sa valeur ordinaire, la lettre a la diminue.

Recapitulation. La plus haute température de juin a été de 29°, la plus basse de 11°; le barom. est monté à 746m et descendu à 736; les vents Nont soufflé 7 fois, l'E 1 fois, le S-E 1 fois, le S 9 fois, le S-09 fois, l'0 1 fois, le N-0 2 fois; le ciel a été 10 fois beau 13 fois variable et 7 fois couvert; il y a eu 14 jours de pluie. Dr GUILLAUMOT.

LA GÉOLOGIE DU JURA,

ETUDE PAR M. JUST PIDANCET

(Suite).

Terrain keupérien ou Marnes irisées,

Le muschelcalk du Jura est habituellement recouvert par un puissant dépôt de marnes aux couleurs vives et variées, renfermant, comme roches subordonnées, des masses de sel gemme, des couches de gypse et des bancs de dolomie. Tout cet ensemble constitue un des étages spéciaux du trias, qui a été désigné depuis longtemps par les géologues allemands sous le nom de keuper; tandis qu'en France, l'expression de maines irisées semble avoir prévalu.

Le terrain keupérien, par son importance industrielle, a fixé dès longtemps l'attention des géologues, et à son étude dans les chaînes du Jura, E se attachent les noms des savants les plus célèbres. Cependant, on doit le dire, de n'est guère que depuis la publication des travaux de M. Jules Marcou, sur le Jura salinois, qu'on a pu parvenir à se faire une idée nette et précise de cette formation, une des plus intéressantes à étudier au double point de vue de la pétrographic et de l'utilité des matériaux qu'elle fournit à l'industrie et à l'agriculture.

Au moment où nous avons dù mettre la première main à ce travail, nous étions sur le point de suivre textuellement les divisions proposées par le savant que nous venons de citer; mais en soumettant à une rigoureuse investigation les localités qui ont été l'objet de ses études, en étendant nos observations au-delà des limites qu'il s'est imposées pour ses descriptions, nos idées ont dù se modifier, et notre classification, quoique se rapprochant un peu de celle de M. Marcou, en diffère cependant d'une manière assez notable.

L'extrême rareté et quelquefois l'absence complète de fossiles dans la plupart des couches keupériennes, enlève au géologue son guide le plus sur, et ne lui permet ordinairement que l'emploi de caractères tirés de la pétrographie, qui sont loin, dans le cas particulier, de présenter une constance suffisante pour ne pas laisser quelque prise à l'erreur.

Tous les géologues qui ont étudié le keuper des chaines du Jura ont constaté, vers la partie moyenne de ce terrain, un grand banc de calcaire magnésien qu'on peut considérer comme horizon géognostique; malheureusement ce banc n'est pas le seul qu'on rencontre dans cette formation, et la ressemblance de caractères que présentent avec lui

d'autres assises, force le géologue à apporter la plus grande circonspection dans l'étude des marnes irisées du Jura.

Nous divisons le terrain qui nous occupe en trois grands groupes ou étages l'étage inférieur, caractérisé par la présence du sel gemme à la partie inférieure, est désigné sous le nom d'étage salifère.

L'étage moyen, renfermant la plus grande partie des gypses exploités dans le Jura, est surtout caractérisé par de grandes masses de marnes rouges gypsifères; nous l'appelons étage gypsifère.

La dénomination de marnes irisées, proprement dites, a été appliquée à l'étage supérieur, dont chaque couche marneuse présente une coloration spéciale.

L'absence du gypse, la présence d'un grand reptile, le Dimodosaurus poligniensis, permettent de le distinguer facilement des deux autres groupes.

Le grand banc de dolomie, dont nous avons parlé tout-à-l'heure, est placé à la séparation de l'étage inférieur et de l'étage moyen, et sépare habituellement le terrain des marnes irisées en deux zônes topographiques parfaitement distinctes.

L'étage moyen concourt, avec l'étage supérieur et l'infra-lias, à la formation de terrasses couronnées par l'escarpement des calcaires à gryphées arquées, et dont les talus à pente douce présentent quelquefois, à la séparation des deux étages keupériens, une légère saillie due à la présence d'un second bane de dolomie, qui est souvent remplacé plus ou moins complètement par des bancs de gypse blanc.

Le terrain des marnes irisées est un des plus importants de la chaîne du Jura, au point de vue de ses applications.

Les dolomies fournissent des moëllons employés dans la construction; un grand nombre de villages de la Haute-Saône, le village de Vorges, dans le département du Doubs, celui de Grozon et plusieurs autres, dans le département du Jura, sont entièrement construits avec la dolomie inférieure, qui est aussi frequemment employée à la confection de chaux moyennement hydraulique.

Toutes peuvent être employées à la préparation des divers sels de magnésie.

Les gypses de l'étage inférieur, et surtout ceux de l'étage moyen, donnent lieu à un grand nombre d'exploitations, qui fournissent des plâtres de très-bonne qualité pour les constructions et l'agriculture.

Les sels gemines et les houilles pyriteuses de l'étage inférieur ali

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