PARAPHRASE DU PSAUME CXLV. (MALHERBE.) N'espérons plus, mon âme, aux promesses du monde, En vain pour satisfaire à nos lâches envies, Ce qu'ils peuvent n'est rien; ils sont ce que nous sommes, Et meurent comme nous. Ont-ils rendu l'esprit, ce n'est plus que poussière Dont l'éclat orgueilleux étonnait l'univers; Et dans ces grands tombeaux où leurs ombres hautaines Font encore les vaines Ils sont mangés de vers. Là se perdent ces noms de maîtres de la terre; D'arbitres de la paix, de foudres de la guerre : Comme ils n'ont plus de sceptre, ils n'ont plus de flatteurs; Et tombent avec eux d'une chute commune, Tous ceux que leur fortune A fait leurs serviteurs. Lâches envies (cowardly), shameful passions; à ployer les genoux, in kneeling; rendu l'esprit, expired; foudres de la guerre, formidable warriors. À UN PÈRE SUR LA MORT DE SA FILLE. (MALHERBE.) Ta douleur du Perrier sera donc éternelle? Le malheur de ta fille au tombeau descendue Est-ce quelque dédale où ta raison perdue Je sais de quels appas son enfance était pleine, Mais elle était du monde où les plus belles choses Et rose elle a vécu ce que vivent les roses, La mort a des rigueurs à nulle autre pareilles: La cruelle qu'elle est se bouche les oreilles, Le pauvre en sa cabane où le chaume le couvre Et la garde qui veille aux barrières du Louvre N'en défend point nos rois. Trépas, death; dédale, maze; avecque (avec), with, by; on a beau_la prier, it is of no avail to entreat her; se bouche les oreilles (stops her ears), turns a deaf ear; chaume, thatch; veille, is watching. SCÈNES DU CID. ACTE PREMIER. SCÈNE I. Chimène, Elvire. Chi. Elvire, m'as-tu fait un rapport bien sincère? Ne déguises-tu rien de ce qu'a dit mon père? Elv. Tous mes sens à moi-même en sont encor charmés; Il estime Rodrigue autant que vous l'aimez; Et, si je ne m'abuse à lire dans son âme, Il vous commandera de répondre à sa flamme. Chi. Dis-moi donc, je te prie, une seconde fois, Ce qui te fait juger qu'il approuve mon choix, Apprends-moi de nouveau quel espoir j'en dois prendre; Un si charmant discours ne se peut trop entendre; Tu ne peux trop promettre aux feux de notre amour La douce liberté de se montrer au jour. Que t'a-t-il répondu sur la secrète brigue Entre ces deux amants me penche d'un côté ? Elv. Non: j'ai peint votre cœur dans une indifférence Qui n'enfle d'aucun d'eux ni n'abat l'espérance, Et, sans les voir d'un œil trop sévère ou trop doux, Attend l'ordre d'un père à choisir un époux. Ce respect l'a ravi; sa bouche et son visage M'en ont donné sur l'heure un digne témoignage : Et, puisqu'il faut encor vous en faire un récit, Voici d'eux et de vous ce qu'en hâte il m'a dit : "Elle est dans le devoir; tous deux sont dignes d'elle, Tous deux formés d'un sang noble, vaillant, fidèle, Don Rodrigue, surtout, n'a trait en son visage Je vous laisse à juger s'il prendra bien son temps, Chi. Il semble toutefois que mon âme troublée Un moment donne au sort des visages divers; SCÈNE VI. Le Comte, D. Diègue. Le Comte. Enfin vous l'emportez, et la faveur du roi D. Diègue. Cette marque d'honneur qu'il met dans ma famille Montre à tous qu'il est juste, et fait connaître assez Le Comte. Pour grands que soient les rois, ils sont ce que nous sommes, Ils peuvent se tromper comme les autres hommes; D. Diègue. Ne parlons plus d'un choix dont votre esprit s'irrite; La faveur l'a pu faire autant que le mérite; Et le nouvel éclat de votre dignité Lui doit enfler le cœur d'une autre vanité. Reposer tout armé, forcer une muraille, Il lira seulement l'histoire de ma vie. Là, dans un long tissu de belles actions, Il verra comme il faut domter des nations, Et sur de grands exploits bâtir sa renommée. Le Comte. Les exemples vivants ont bien plus de pouvoir; Un prince dans un livre apprend mal son devoir. Et qu'a fait, après tout, ce grand nombre d'années, Si vous fûtes vaillant, je le suis aujourd'hui, D. Diègue. Je le sais, vous servez bien le roi; D. Diègue. Qui l'a gagné sur vous l'avait mieux mérité. Le Comte. Qui peut mieux l'exercer en est bien le plus digne. D. Diègue. En être refusé n'en est pas un bon signe. Le Comte. Vous l'avez eu par brigue, étant vieux courtisan. |