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C'est ce que l'on a vu dans tous les combats de la vérité contre l'erreur, d'Abel contre Caïn, de Moïse contre les magiciens de Pharaon, d'Élie contre les faux prophètes, de JésusChrist contre les Pharisiens, de saint Paul contre Barjésu, des apôtres contre les exorcistes, des chrétiens contre les infidèles, des catholiques contre les hérétiques; et c'est ce qui se verra aussi dans le combat d'Élie et d'Énoch contre l'Antechrist. Toujours le vrai prévaut en miracles.

nonçoient une fausse doctrine qui ne parût pas | chrétien; catholique, hérétique; calomniés, cavisiblement fausse aux lumières du sens com- lomniateurs; entre les trois croix. mun, et si un plus grand faiseur de miracles n'avoit déja averti de ne pas les croire. Ainsi, s'il y avoit division dans l'Église, et que les ariens, par exemple, qui se disoient fondés sur l'Écriture comme les catholiques, eussent fait des miracles, et non les catholiques, on eût été induit en erreur. Car, comme un homme qui nous annonce les secrets de Dieu n'est pas digne d'être cru sur son autorité privée, aussi un homme qui, pour marque de la communication qu'il a avec Dieu, ressuscite les morts, prédit l'avenir, transporte les montagnes, guérit les maladies, mérite d'être cru; et on est impie si on ne s'y rend, à moins qu'il ne soit démenti par quelque autre qui fasse encore de plus grands miracles. Mais n'est-il pas dit que Dieu nous tente? Et ainsi ne peut-il pas nous tenter par des miracles qui semblent porter à la fausseté?

Il y a bien de la différence entre tenter et induire en erreur. Dieu tente; mais il n'induit point en erreur. Tenter, c'est procurer les occasions qui n'imposent point de nécessité. Induire en erreur, c'est mettre l'homme dans la nécessité de conclure et suivre une fausseté : c'est ce que Dieu ne peut faire, et ce qu'il feroit néanmoins, s'il permettoit que, dans une question obscure, il se fit des miracles du côté de la fausseté.

On doit conclure de là qu'il est impossible qu'un homme cachant sa mauvaise doctrine, et n'en faisant paroitre qu'une bonne, et se disant conforme à Dieu et à l'Église, fasse des miracles pour couler insensiblement une doctrine fausse et subtile: cela ne se peut. Et encore moins, que Dieu, qui connoît les cœurs, fasse des miracles en faveur d'une personne de cette

sorte.

V.

Il y a bien de la différence entre n'être pas pour Jésus-Christ, et le dire; ou n'être pas pour Jésus-Christ, et feindre d'en être. Les premiers pourroient peut-être faire des miracles, non les autres: car il est clair des uns qu'ils sont contre la vérité, non des autres; et ainsi les miracles sont plus clairs.

Les miracles discernent donc les choses douteuses, entre les peuples juif et païen, juif et

Enfin, jamais en la contention du vrai Dieu, ou de la vérité de la religion, il n'est arrivé de miracle du côté de l'erreur, qu'il n'en soit aussi arrivé de plus grand du côté de la vérité.

Par cette règle, il est clair que les Juifs étoient obligés de croire Jésus-Christ. Jésus-Christ leur étoit suspect; mais ses miracles étoient infiniment plus clairs que les soupçons que l'on avoit contre lui. Il falloit donc le croire.

Du temps de Jésus-Christ, les uns croyoient en lui, les autres n'y croyoient pas, à cause des prophéties qui disoient que le Messie devoit naître en Bethleem, au lieu qu'on croyoit que Jésus-Christ étoit né dans Nazareth. Mais ils devoient mieux prendre garde s'il n'étoit pas né en Bethleem; car ses miracles étant convaincants, ces prétendues contradictions de sa doctrine à l'Écriture, et cette obscurité, ne les excusoient pas, mais les aveugloient.

Jésus-Christ guérit l'aveugle-né, et fit quantité de miracles au jour du sabbat, par où il aveugloit les Pharisiens, qui disoient qu'il falloit juger des miracles par la doctrine.

Mais, par la même règle qu'on devoit croire Jésus-Christ, on ne devroit point croire l'Antechrist.

Jésus-Christ ne parloit ni contre Dieu, ni contre Moïse. L'Antechrist et les faux prophètes, prédits par l'un et l'autre Testament, parleront ouvertement contre Dieu et contre Jésus-Christ. Qui seroit ennemi couvert, Dieu ne permettroit pas qu'il fit des miracles ouvertement.

Moïse a prédit Jésus-Christ, et ordonné de le suivre. Jésus-Christ a prédit l'Antechrist, et défendu de le suivre.

Les miracles de Jésus-Christ ne sont pas pré

Ce qui fait croire les faux, c'est le défaut de charité : Eo quòd charitatem veritatis non receperunt ut salvi fierent, ideò mittet illis Deus operationem erroris, ut credant mendacio. (2 Thess., 2, 10.)

dits par l'Antechrist; mais les miracles de l'Ante- | que vous n'êtes pas demes brebis. (Joan., 10, 26. ) christ sont prédits par Jésus-Christ. Et ainsi, si Jésus-Christ n'étoit pas le Messie, il auroit bien induit en erreur; mais on ne sauroit y être induit avec raison par les miracles de l'Antechrist. Et c'est pourquoi les miracles de l'Antechrist ne nuisent point à ceux de Jésus-Christ. En effet, quand Jésus-Christ a prédit les miracles de l'Antechrist, a-t-il cru détruire la foi de ses propres miracles?

Il n'y a nulle raison de croire à l'Antechrist qui ne soit à croire en Jésus-Christ; mais il y en a à croire en Jésus-Christ, qui ne sont point à croire à l'Antechrist.

VI.

Les miracles ont servi à la fondation, et ser

Lorsque j'ai considéré d'où vient qu'on ajoute tant de foi à tant d'imposteurs qui disent qu'ils ont des remèdes, jusqu'à mettre souvent sa vie entre leurs mains, il m'a paru que la véritable cause est qu'il y a de vrais remèdes; car il ne seroit pas possible qu'il y en eût tant de faux, et qu'on y donnât tant de croyance, s'il n'y en avoit de véritables. Si jamais il n'y en avoit eu, et que tous les maux eussent été incurables, il est impossible que les hommes se fussent imaginé qu'ils pourroient en donner; et encore plus

viront à la continuation de l'Église jusqu'à l'An- que tant d'autres eussent donné croyance à ceux techrist, jusqu'à la fin.

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Il en arrivera de même à l'avenir : ou Dieu ne permettra pas de faux miracles, ou il en procurera de plus grands: car les miracles ont une telle force, qu'il a fallu que Dieu ait averti qu'on n'y pensât point quand ils seroient contre lui, tout clair qu'il soit qu'il y a un Dieu; sans quoi ils eussent été capables de troubler.

qui se fussent vantés d'en avoir. De même que, si un homme se vantoit d'empêcher de mourir, personne ne le croiroit, parcequ'il n'y a aucun de remèdes qui se sont trouvés véritables par la exemple de cela. Mais comme il y a eu quantité connoissance même des plus grands hommes, la croyance des hommes s'est pliée par-là, parceque, la chose ne pouvant être niée en gésont véritables, le peuple, qui ne peut pas disnéral, puisqu'il y a des effets particuliers qui cerner lesquels d'entre ces effets particuliers sont les véritables, les croit tous. De même, ce

qui fait qu'on croit tant de faux effets de la lune, c'est qu'il y en a de vrais, comme le flux

de la mer.

a tant de faux miracles, de fausses révélations, Ainsi il me paroît aussi évidemment qu'il n'y de sortiléges, etc., que parcequ'il y en a de

Et ainsi, tant s'en faut que ces passages du treizième chapitre du Deuteronome, qui portent qu'il ne faut point croire ni écouter ceux qui feront des miracles, et qui détourneront du service de Dieu; et celui de saint Marc : Il s'é-vrais; ni de fausses religions, que parcequ'il y Levera de faux christs et de faux prophètes, qui feront des prodiges et des choses étonnantes, jusqu'à séduire, s'il est possible, les élus mêmes (MARC, 13, 22), et quelques autres semblables, fassent contre l'autorité des miracles, que rien n'en marque davantage la force.

VII.

Ce qui fait qu'on ne croit pas les vrais miracles, c'est le défaut de charité: Vous ne croyez pas, dit Jésus-Christ parlant aux Juifs, parce

y

rien de tout cela, il est comme impossible que
en a une véritable. Car s'il n'y avoit jamais eu
les hommes se le fussent imaginé, et encore
plus que d'autres l'eussent cru. Mais comme il
a eu de très grandes choses véritables, et qu'ainsi
elles ont été crues par de grands hommes, cette
impression a été cause que presque tout le
monde s'est rendu capable de croire aussi les
fausses. Et ainsi, au lieu de conclure qu'il n'y
a point de vrais miracles, puisqu'il y en a de
faux, il faut dire, au contraire, qu'il y a de
vrais miracles, puisqu'il y en a tant de faux ;

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et qu'il n'y en a de faux que par cette raison | ture visible. Beaucoup de chrétiens hérétiques qu'il y en a de vrais ; et qu'il n'y a de même de l'ont connu à travers son humanité, et adorent fausses religions que parcequ'il y en a une vé- Jésus-Christ Dieu et homme. Mais pour nous, ritable. Cela vient de ce que l'esprit de l'homme, nous devons nous estimer heureux de ce que se trouvant plié de ce côté-là par la vérité, de- Dieu nous éclaire jusqu'à le reconnoître sous les vient susceptible par-là de toutes les faus- espèces du pain et du vin. setés.

VIII.

Il est dit, Croyez à l'Église; mais il n'est pas dit, Croyez aux miracles; à cause que le dernier est naturel, et non pas le premier. L'un avoit besoin de précepte, non pas l'autre.

Il y a si peu de personnes à qui Dieu se fasse paroître par ces coups extraordinaires, qu'on doit bien profiter de ces occasions, puisqu'il ne sort du secret de la nature qui le couvre que pour exciter notre foi à le servir avec d'autant plus d'ardeur, que nous le connoissons avec plus de certitude,

On peut ajouter à ces considérations le secret de l'esprit de Dieu caché encore dans l'Écriture. Car il y a deux sens parfaits, le littéral et le mystique; et les Juifs, s'arrêtant à l'un, ne pensent pas seulement qu'il y en ait un autre, et ne songent pas à le chercher : de même que les impies, voyant les effets naturels, les attribuent à la nature, sans penser qu'il y en ait un autre auteur; et comme les Juifs, voyant un homme parfait en Jésus-Christ, n'ont pas pensé à y chercher une autre nature: Nous n'avons point pensé que ce fût lui, dit encore Isaïe (Is., 53, 5): et de même enfin que les hérétiques, voyant les apparences parfaites du pain dans l'Eucharistie, ne pensent pas à y chercher une autre substance. Toutes choses couvrent quelque mystère; toutes choses sont des voiles qui couvrent Dieu. Les chrétiens doivent le reconnoître en tout. Les afflictions temporelles couvrent les biens éternels où elles conduisent. Les joies temporelles couvrent les maux éternels qu'elles causent. Prions Dieu de nous le faire reconnoître et servir en tout ; et rendons-lui des graces infinies de ce qu'étant caché en toutes choses pour tant d'autres, il s'est découvert en toutes choses et en tant de manières pour nous.

IX.

Si Dieu se découvroit continuellement aux hommes, il n'y auroit point de mérite à le croire; et s'il ne se découvroit jamais, il y auroit peu de foi. Mais il se cache ordinairement, et se découvre rarement à ceux qu'il veut engager dans son service. Cet étrange secret, dans lequel Dieu s'est retiré, impénétrable à la vue des hommes, est une grande leçon pour nous porter à la solitude, loin de la vue des hommes. Il est demeuré caché sous le voile de la nature, qui nous le couvre, jusques à l'incarnation; et quand il a fallu qu'il ait paru, il s'est encore plus caché en se couvrant de l'humanité. Il étoit bien plus reconnoissable quand il étoit invisible que non pas quand il s'est rendu visible. Et en- Les filles de Port-Royal, étonnées de ce qu'on fin, quand il a voulu accomplir la promesse qu'il dit qu'elles sont dans une voie de perdition; fit à ses apôtres de demeurer avec les hommes que leurs confesseurs les mènent à Genève; jusqu'à son dernier avènement, il a choisi d'y qu'ils leur inspirent que Jésus-Christ n'est pas demeurer dans le plus étrange et le plus obscur en l'Eucharistie, ni à la droite du Père: sachant secret de tous, savoir, sous les espèces de l'Eu- que tout cela étoit faux, s'offrirent à Dieu en cet charistie. C'est ce sacrement que saint Jean ap- état, en lui disant avec le prophète : Vide si via pelle dans l'Apocalypse une manne cachée (Apoc., iniquitatis in me est. (Ps., 138, 24.) Qu'arrive-t-il 2, 17); et je crois qu'Isaïe le voyoit en cet état, là-dessus? Ce lieu, qu'on dit être le temple du lorsqu'il dit en esprit de prophétie : Véritable- diable, Dieu en fait son temple. On dit qu'il ment vous êtes un Dieu caché. (Is., 45, 15.) C'est faut en ôter les enfants; on dit que c'est l'arselà le dernier secret où il peut être. Le voile de nal de l'enfer: Dieu en fait le sanctuaire de ses la nature qui couvre Dieu a été pénétré par plu- graces. Enfin on les menace de toutes les fusieurs infidèles, qui, comme dit saint Paul (Rom., reurs et de toutes les vengeances du ciel, et 1, 20), ont reconnu un Dieu invisible par la na- | Dieu les comble de ses faveurs. Il faudroit avoir

perdu le sens pour en conclure qu'elles sont | suivoient sa doctrine par ses miracles; les autres

dans la voie de perdition.

Les jésuites n'ont pas laissé néanmoins d'en tirer cette conclusion; car ils concluent de tout que leurs adversaires sont hérétiques. S'ils leur reprochent leurs excès, ils disent qu'ils parlent comme des hérétiques. S'ils disent que la grace de Jésus nous discerne, et que notre salut dépend de Dieu, c'est le langage des hérétiques. S'ils disent qu'ils sont soumis au pape : c'est ainsi, disent-ils, que les hérétiques se cachent et se déguisent. S'ils disent qu'il ne faut pas tuer pour une pomme: ils combattent, disent les jésuites, la morale des catholiques. Enfin, s'il se fait des miracles parmi eux, ce n'est pas une marque de sainteté; c'est au contraire un soupçon d'hérésie.

Voilà l'excès étrange où la passion des jésuites les a portés; et il ne leur restoit plus que cela pour détruire les principaux fondements de la religion chrétienne. Car les trois marques de la véritable relation sont la perpétuité, la bonne vie et les miracles. Ils ont déja détruit la perpétuité par la probabilité, qui introduit leurs nouvelles opinions à la place des vérités anciennes : ils ont détruit la bonne vie par leur morale corrompue et maintenant ils veulent détruire les miracles en détruisant ou leur vérité, ou leur conséquence.

Les adversaires de l'Église le nient, ou en nient la conséquence: les jésuites de même. Ainsi, pour affoiblir leurs adversaires, ils désarment l'Église, et se joignent à tous ses ennemis, en empruntant d'eux toutes les raisons par lesquelles ils combattent les miracles. Car l'Église a trois sortes d'ennemis : les Juifs, qui n'ont jamais été de son corps; les hérétiques, qui s'en sont retirés; et les mauvais chrétiens, qui la déchirent en dedans.

Ces trois sortes de différents adversaires la combattent d'ordinaire diversement; mais ici ils la combattent d'une même sorte. Comme ils sont tous sans miracles, et que l'Église a toujours eu contre eux des miracles, ils ont tous eu le même intérêt à les éluder, et se sont tous servis de cette défaite : qu'il ne faut pas juger de la doctrine par les miracles, mais des miracles par la doctrine. Il y avoit deux partis entre ceux qui écoutoient Jésus-Christ: les uns qui

qui disoient: Il chasse les démons au nom de Belzebuth. Il y avoit deux partis au temps de Calvin : celui de l'Église, et celui des sacramentaires, qui la combattoient. Il y a maintenant les jésuites, et ceux qu'ils appellent jansénistes, qui contestent. Mais les miracles étant du côté des jansénistes, les jésuites ont recours à cette défaite générale des Juifs et des hérétiques, qui est qu'il faut juger des miracles par la doctrine.

Ce n'est point ici le pays de la vérité : elle est inconnue parmi les hommes. Dieu l'a couverte d'un voile qui la laisse méconnoître à ceux qui n'entendent pas sa voix. La porte est ouverte aux blasphèmes, et même sur les vérités les plus certaines de la morale. Si l'on publie les vérités de l'Évangile, on en publie de contraires, et on obscurcit les questions en sorte que le peuple ne peut discerner. Aussi on demande: Qu'avez-vous pour vous faire plutôt croire que les autres? Quel signe faites-vous? Vous n'avez que des paroles, et nous aussi. Si vous n'avez point de miracles, on dit que la doctrine doit être soutenue par les miracles; cela est une vérité dont on abuse pour blasphemer la doctrine. Et si les miracles arrivent, on dit que les miracles ne suffisent pas sans la doctrine; et c'est une autre vérité pour blasphemer les miracles.

Que vous êtes aises, mes pères, de savoir les règles générales, pensant par-là jeter le trouble, et rendre tout inutile! On vous en empêchera, mes pères : la vérité est une et ferme.

X.

Si le diable favorisoit la doctrine qui le détruit, il seroit divisé, omne regnum divisum, etc. Car Jésus-Christ agissoit contre le diable, et détruisoit son empire sur les cœurs, dont l'exorcisme est la figure, pour établir le royaume de Dieu. Et ainsi il ajoute : In digito Dei, etc., regnum Dei ad vos, etc. (Luc, 11, 17, 20.)

Il étoit impossible qu'au temps de Moïse-on réservât sa croyance à l'Antechrist, qui leur étoit inconnu. Mais il est bien aisé au temps de l'Antechrist de croire en Jésus-Christ, déja connu.

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Nous ne sommes pas aujourd'hui dans la peine de faire ce discernement; il est pourtant bien facile à faire. Ceux qui ne nient ni Dieu, ni Jésus-Christ, ne font point de miracles qui ne soient sûrs. Mais nous n'avons point à faire ce discernement. Voici une relique sacrée. Voici une épine de la couronne du Sauveur du monde, en qui le prince de ce monde n'a point de puis

Quand les schismatiques feroient des mira- | ou faits par le diable: étant nécessités d'être cles, ils n'induiroient point à erreur. Et ainsi convaincus, s'ils reconnoissoient qu'ils fussent il n'est pas certain qu'ils ne puissent en faire. de Dieu. Le schisme est visible; le miracle est visible. Mais le schisme est plus marqué d'erreur que le miracle n'est marqué de vérité. Donc le miracle d'un schismatique ne peut induire à l'er- | reur. Mais hors le schisme, l'erreur n'est pas si visible que le miracle est visible. Donc le miracle induiroit à l'erreur. Ainsi un miracle parmi les schismatiques n'est pas tant à craindre; car le schisme, qui est plus visible que le mira-sance, qui fait des miracles par la propre puiscle, marque visiblement leur erreur. Mais quand il n'y a point de schisme, et que l'erreur est en dispute, le miracle discerne.

sance de ce sang répandu pour nous. Dieu choisit lui-même cette maison pour y faire éclater sa puissance.

Ce ne sont point des hommes qui font ces mi

Il en est de même des hérétiques. Les miracles leur seroient inutiles; car l'Église, autori-racles par une vertu inconnue et douteuse, qui risée par les miracles qui ont préoccupé la croyance, nous dit qu'ils n'ont pas la vraie foi. Il n'y a pas de doute qu'ils ne l'ont pas, puisque les premiers miracles de l'Église excluent la foi des leurs, quand ils en auroient. Il y auroit ainsi miracles contre miracles, mais premiers et plus grands du côté de l'Église; ainsi il faudroit toujours la croire contre les miracles.

Voyons par-là ce qu'on doit conclure des miracles de Port-Royal.

Les Pharisiens disoient : Non est hic homo à Deo, qui sabbatum non custodit. (JOAN., 9, 16.) Les autres disoient : Quomodò potest homo peccator hæc signa facere? Lequel est le plus clair? Dans la contestation présente, les uns disent: Cette maison n'est pas de Dieu; car on n'y croit pas que les cinq propositions sont dans Jansénius. Les autres: Cette maison est de Dieu; car il s'y fait de grands miracles. Lequel est le plus clair?

nous oblige à un difficile discernement. C'est Dieu même ; c'est l'instrument de la passion de son fils unique qui, étant en plusieurs lieux, a choisi celui-ci, et fait venir de tous côtés les hommes pour y recevoir ces soulagements miraculeux dans leurs langueurs.

La dureté des jésuites surpasse donc celle des Juifs, puisqu'ils ne refusoient de croire JésusChrist innocent que parcequ'ils doutoient si ses miracles étoient de Dieu. Au lieu que les jésuites ne pouvant douter que les miracles de Port-Royal ne soient de Dieu, ils ne laissent pas de douter encore de l'innocence de cette maison.

Mais, disent-ils, les miracles ne sont plus nécessaires, à cause qu'on en a déja; et ainsi ils ne sont plus des preuves de la vérité de la doctrine. Oui. Mais quand on n'écoute plus la tradition; qu'on a surpris le peuple; et qu'ainsi, ayant exclu la vraie source de la vérité, qui est la tradition, et ayant prévenu le pape, qui en est le dépositaire, la vérité n'a plus de liberté de paroître: alors les hommes ne parlant plus de la

Ainsi la même raison qui rend coupables les Juifs de n'avoir pas cru en Jésus-Christ, rend les jésuites coupables d'avoir continué de persévérité, la vérité doit parler elle-même aux homcuter la maison de Port-Royal.

Il avoit été dit aux Juifs, aussi bien qu'aux chrétiens, qu'ils ne crussent pas toujours les prophètes. Mais néanmoins les Pharisiens et les scribes font grand état des miracles de JésusChrist, et essaient de montrer qu'ils sont faux,

Pascal veut parler d'un schisme ouvert et reconnu de part

et d'autre, tel, par exemple, que celui des donatistes, des calvinistes, etc. Il ne faut point prendre le change.

mes. C'est ce qui arriva au temps d'Arius.

Ceux qui suivent Jésus-Christ à cause de ses miracles honorent sa puissance dans tous les miracles qu'elle produit; mais ceux qui, en faisant profession de le suivre pour ses miracles, ne le suivent en effet que parcequ'il les console et les rassasie des biens du monde : ils déshonorent ses miracles, quand ils sont contraires à leurs

commodités.

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