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Art. I. Les provinces susdites s'allient, s'unissent et se liguent à perpétuité, pour rester en confédération comme si elles ne faisaient qu'une seule province, sans permettre qu'on les sépare jamais l'une de l'autre par aucune convention ou traité quelconque, sans infraction cependant aux priviléges, franchises, immunités, statuts, louables usages, et tous autres droits que chacune des provinces, villes, membres et habitans peuvent posséder. Non-seulement elles n'y porteront aucune atteinte, mais elles s'engagent, au contraire, à s'assister les unes les autres pour les défendre et les maintenir par tous les moyens convenables, au péril de leurs vies et de leurs biens, contre quiconque voudrait les attaquer; et quant aux différends qui pourraient survenir entre les membres ou villes de l'une ou de l'autre province de cette union, à l'occasion de ces droits, priviléges, etc., ils seront vidés par le juge ordinaire, ou par des arbitrages, ou à l'amiable, sans que les autres provinces, villes ou membres, tant que les parties se soumettront à la justice ordinaire, puissent s'en mêler, sinon par la voie de médiation pour faciliter un accommodement.

II. Les susdits pays, en vertu de cette union, s'engagent solidairement et mutuellement, au péril de leurs biens et de leurs vies, de se défendre l'un l'autre contre toute violénce qu'on voudrait leur faire, au nom du roi ou de sa part; soit parce qu'à l'occasion de la pacification de Gand ils ont pris les armes contre Don Juan, et reçu pour gouverneur l'archiduc Mathias; soit à cause des conséquences qui en ont résulté ou qui pourraient en résulter, même sous prétexte d'introduire et rétablir la religion catholique à main armée; soit à cause des nouveautés survenues dans lesdites provinces, depuis l'an 1558; soit à cause de cette présente union et confédération; soit enfin dans le cas où l'on voudrait attaquer une province, une ville ou un membre en particulier, ou bien tous en général.

III. Les susdites provinces s'engagent de s'entre-secourir contre tous seigneurs, princes, états ou villes, soit étrangers, soit du pays qui leur voudraient nuire ou faire la guerre; bien entendu que les secours et subsides seront spécifiés par la généralité de l'union, avec connaissance de cause et suivant les occurrences.

IV. Et pour mieux assurer lesdites provinces, villes et membres, il est statué que les villes frontières et autres que

l'on jugera en avoir besoin, seront fortifiées suivant l'avis et l'ordre desdites Provinces-Unies, aux dépens des villes et provinces où elles sont situées; mais que la généralité contribuera à la dépense pour la moitié : bien entendu que si lesdites provinces jugent à propos de construire quelques nouveaux forts dans quelques-unes des mêmes provinces, ou de faire réparer où démolir ceux qui s'y trouvent, les frais seront à la charge de la généralité.

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V. Afin de subvenir aux frais nécessaires pour la fense des provinces, il est statué que de trois mois en trois. mois, ou dans des termes plus convenables, on affermera dans les provinces de l'union, publiquement, au plus offrant et dernier enchérisseur, ou bien l'on fera percevoir, par des collecteurs, certains impôts établis sur le vin, la bière, les grains, les draps d'or, d'argent ou de laine, les bêtes à cornes, les terres ensemencées, les bêtes de bou cherie, les chevaux, les bœufs, et sur tous les autres articles que, dans la suite, on jugerait à propos de taxer, d'un consentement unanime. Enfin, l'on pourra y employer les revenus des domaines du roi, mais après en avoir déduit les charges dont ils seraient grevés.

VI, Les mêmes subsides seront, conformément à l'avis commun, augmentés ou diminués suivant les besoins et les circonstances, et ne pourront être renforcés que pour la défense commune, et pour ce que la généralité serait obligée de supporter en sus, sans qu'on puisse les divertir à aucun autre usage.

VII. Les villes frontières, et même les autres places, comme la nécessité l'exigera, seront obligées, en tout temps, de recevoir telles garnisons que lesdites ProvincesUnies jugeront à propos de leur envoyer, avec l'avis du stathouder de la province où la garnison doit être placée; mais ces garnisons seront payées par les provinces de l'union. De plus, les capitaines avec les soldats, outre le serment qu'ils auront fait à la généralité, seront encore obligés d'en prêter un à la ville, place ou province où ils seront distribués, ainsi qu'il sera exprimé dans la teneur de leurs patentes. On fera observer aux soldats une discipline si exacte, que les habitans, tant ecclésiastiques que séculiers, n'en seront aucunement molestés. La garnison sera, aussi hien que les bourgeois et habitans, tenue de payer les impôts et accises; mais la généralité paiera leurs logemens

aux bourgeois et autres, comme il se pratique dans la province de Hollande.

VIII. Et pour qu'on puisse trouver des secours toujours prêts dans le besoin, tous les habitans mâles de chaque province, depuis l'âge de dix-huit jusqu'à soixante ans, seront tenus dans l'espace d'un mois, au plus tard, de faire enregistrer leurs noms, afin qu'à la première assemblée des états confédérés, on puisse ordonner ce qu'on jugera plus convenable pour la sûreté et pour la défense des pays de l'union.

IX. On ne pourra conclure ni paix, ni trève; entreprendre aucune guerre, lever aucun impôt ou contribution en faveur de la généralité, sans l'avis et consentement unanime des provinces de l'union. Mais dans toutes les autres affaires relatives à la conduite de cette confédération, on se réglera suivant ce qui aura été conclu à la pluralité des voix des susdites provinces. Ces voix seront recueillies, comme cela s'est pratiqué jusqu'à présent dans l'Assemblée des états-généraux, toujours par provision, jusqu'à ce qu'il en soit ordonné autrement, de l'avis unanime des Confédérés. Au cas que les provinces de l'union ne pussent s'ac corder sur des affaires relatives à la trève, à la paix, à la guerre ou aux contributions, la décision en sera remise provisionnellement à Messieurs les Stathouders actuels des susdites provinces, qui les vuideront entre les parties, ou les décideront comme ils le jugeront convenable. Bien entendu que si les Stathouders ne pouvaient s'accorder entre eux, ils se choisiraient tels assesseurs et adjoints impartiaux que bon leur semblerait, et les parties seront tenues de se soumettre au jugement qu'ils auront porté.

X. Aucune des provinces, ni des villes, ni aucun membre de l'union, ne pourra faire aucune alliance avec les seigneurs ou états voisins, sans le consentement des autres Confédérés.

XI. Au cas que quelques voisins, soit princes, seigneurs, villes ou pays, souhaitent d'accéder à la présente union, ils pourront y être admis de l'avis et du consentement unanime des provinces de l'union.

XII. Sur l'article de la monnaie et le cours des espèces, les provinces seront obligées de se conformer aux ordon

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nances qui seront rédigées à la première occasion, et sur ce sujet, l'une ne pourra rien innover sans les autres.

XIII. A l'égard de la religion, la Hollande et la Zélande en agiront comme bon leur semblera: mais les autres princes de l'union pourront se régler sur la paix religieuse que l'Archiduc et son Conseil ont arrangée, d'après l'avis des états-généraux (1). Sur cet article, elles publieront telles ordonnances qu'elles jugeront convenables pour le repos et le bien être de chaque province, ville et membre et pour la défense des droits de chacun, tant ecclésiastiqué quelaïque, sans qu'elles puissent être inquiétées ou molestées à ce sujet, par une autre province; pourvu cependant que chacun jouisse de la liberté de conscience, et que personne ne soit recherché ni inquiété pour cause de religion, ainsi qu'il a été arrêté par la pacification de Gand,

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XIV. Pour déférer à la pacification de Gand, tous les religieux et ecclésiastiques jouiront de leurs biens situés dans les provinces-unies; mais les religieux qui, dans le temps de la guerre auront quitté leur cloître, situés sur un territoire soumis aux Espagnols pour se retirer dans la Hollande et la Zéelande, seront entretenus honnêtement par les Couvents et Communautés d'où ils sont sortis, ce qu'on fera pareillement à l'égard de ceux qui se sont retirés de la Hollande et de la Zéelande dans les autres provinces.

XV. Ceux qui, pour cause de religion ou pour d'autres motifs raisonnables, auront quitté ou voudront quitter leurs Couvens ou Communautés situés dans les provinces de l'union, seront entretenus, leur vie durant, des revenus desdits Couvens; mais ceux qui dorénavant, entreront dans les cloîtres et qui les abandonneront ensuite, ne pourront rien en réclamer pour leur entretien et ne pourront en re

(1) Cet article causa d'abord des difficultés. On s'imagina qu'il était rédigé pour exclure de la conféderation tous ceux qui admettaient la paix religieuse, ou du moins les deux religions, la catholique et la protestante. En conséquence, quelques jours après, on ajouta par forme d'explication, qu'on n'a vait pas eu intention d'exclure de la confederation les provinces et villes qui n'admettraient que la religion romaine et où le nombre des réformés n'était pas assez considérable pour qu'ils pussent, conformément à la paix religieuse, avoir l'exercice de leur culte; qu'on était prêt à les recevoir dans l'union, pourvu qu'ils en observassent les articles et se comportassent en bous patriotes, parce que le but n'était pas qu'une province ou une ville imposât des condi tions aux autres, sur l'article de la religion.

tirer que ce qu'ils y auront apporté. De plus, les religieux actuels ou futurs auront toute liberté de religion et d'habit, pourvu qu'en toute autre chose, ils se soumettent à leurs supérieurs (1).

XVI. S'il survenait, ce qu'à Dieu ne plaise, quelque mésintelligence ou différend entre les provinces, ils seront terminés par les autres provinces ou par leurs Commissaires, et si l'affaire intéresse toutes les provinces en général, elle sera déférée aux Stathouders, comme il a été statué dans l'article neuvième. Ils seront obligés de rendre raison et justice aux parties, dans l'espace d'un mois, ou plutôt si la nécessité le demande, après en avoir été requis et interpellés par l'une ou par l'autre partie. Et leur sentence sera exécutée, nonobstant tout appel, relevé d'appel, révision; nullités qu autres réclamations quelconques.

XVII. Les provinces, villes et membres de l'union éviteront avec soin de donner aucune occasion de guerre aux états et provinces étrangers; et pour les prévenir, ils rendront aussi bonne justice aux étrangers qu'aux habitans. Si l'une des provinces était en défaut sur ce point, les autres seraient obligées d'y prêter la main, conformément aux droits, privilèges et louables coutumes de chaque province.

XVIII, Aucune province, ville ou membre de l'union, ne pourra asseoir des impôts, des droits de transports, ou aucune taxe quelconque au préjudice des autres, sans le consentement de la généralité, ni charger aucun des confédérés plus que ses propres habitans.

XIX. Et pour prévenir toutes les difficultés qui pourraient survenir, les Confédérés seront obligés sur la convocation de ceux qu'on autorisera à cet effet, de comparaitre à Utrecht, au jour qui leur sera prescrit, pour délibérer sur les affaires exprimées par les lettres de convocations, à moins que la chose n'exige le secret. Les arrêtés y seront formés à l'unanimité ou à la pluralité des voix. Ceux même qui n'auront pas comparus seront obligés de se conformer à

(1) On donna encore une autre explication à cet article, le premier février. Les confédérés craignant que ces religieux n'intentassent des procès pour hé ritages, successions et douations, statuèrent que tous les procès élevés ou à élever, à ce sujet, fussent sursis jusqu'à ce qu'il en fùt autrement ordonné par les confédérés et par les autres membres qui entreraient dans l'union, ou même par l'autorité souveraine, si cela était nécessaire.

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