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Vois comme elle est importune! Tant qu'elle sera là, nous ne pourrons rien exécuter, continua le Nain. Tandis qu'elle dormira, au contraire, tu · viendras dans mon palais où nous trouverons un char attelé de licornes. Ces licornes te conduiront en peu de jours à la Cour de Bretagne et BlancheFleur n'ayant pu prévenir la reine Mab, on se doutera seulement de ton départ quand tu seras hors de toute atteinte. D'ailleurs mes Korigans, qui sont meilleurs qu'on ne le dit, t'accompagneront et te protégeront.

Bouton-d'Or! répéta la voix de BlancheFleur qui se rapprochait.

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Oh! dit-elle en voyant accourir son élève tout essoufflé, j'ai grand'peur que, malgré ma défense, tu ne te sois trop approché de l'avenue des Lis et que de là viennent les mauvais conseils qui détruisent l'effet de mes leçons. Demain, je parlerai à la reine. »

Cette menace décida Bouton-d'Or; ce qui n'était encore qu'un vague projet devint une resolution arrêtée. En un instant, il oublia le dévouement, les soins de sa gouvernante, il ne vit qu'une autorité qui le gênait et dont il devait se débarrasser à tout prix. Comme il faut peu de chose pour gâter le cœur des enfants! Une flatterie, un encouragement au mal, une amitié dangereuse, et les voilà perdus!

Bouton-d'Or se leva dès l'aube, détacha doucement l'opale magique du corsage de la pauvre petite Elfe, puis, dès que les portes du palais furent ouvertes, courut à l'avenue des Lis, qu'il suivit dans toute sa longueur, jusqu'à ce qu'il aperçût la demeure du Nain-Jaune. C'était une hutte, construite en sable, jetée au milieu d'une plaine d'œillets d'Inde. Deux Korigans en gardaient l'entrée; ils l'introduisirent avec empressement auprès de leur souverain.

« Voici, dit Bouton-d'Or au Nain Jaune triomphant, voici l'opale de Blanche-Fleur. »>

Et il la lui remit.

Au même instant, une affreuse vipère se glissa dans la hutte, apportant sur son dos un petit être éploré, les cheveux épars et les mains chargées de chaînes. Bouton-d'Or eut quelque peine à reconnaître Blanche-Fleur dans cet équipage lugubre; c'était bien elle pourtant!

« Il y a longtemps que je prépare ma vengeance, lui dit le roi des Korigans; c'est à vous que je dois d'avoir vu dans les siècles passés manquer mon mariage avec Mab. Soyez punie, et par les mains de votre élève chéri, ce qui rendra la punition plus cruelle encore! »>

Bouton-d'Or entendit un soupir étouffé, puis le fracas terrible qui accompagne un tremblement de terre. Le Nain, Blanche-Fleur, les Korigans, tout disparut, et il se trouva seul dans une .lande de Bretagne.

« Sauras-tu gagner le pain qu'il te faut maintenant pour vivre, beau-fils de roi? dit à son oreille une voix aigre qu'il reconnut pour être celle du Nain. Sauras-tu passer tes journées en mer, à pêcher du poisson comme ton père Yvain, ou filer la laine et le chanvre comme ta mère Yvette? >>

Et un murmure moqueur régna longtemps dans l'air; c'étaient les Korigans qui éclataient de rire.

Bouton-d'Or se laissa tomber anéanti:

« Mab! ma chère marraine ! criait-il en se tordant les mains. »

Mais rien ne lui répondit.

Il se leva et voulut marcher; les ronces et les pierres déchiraient ses pieds chaussés de satin. Bientôt il eut faim, il eut soif, deux souffrances dont jusque-là il n'avait pas même connu le nom; il regarda vainement autour de lui pour tâcher de découvrir quelque habitation où il pût demander l'hospitalité, puis se coucha par terre, comme tout petit il l'avait fait sur la tombe d'Yvette.

A cette heure-là, passait sur son âne un paysan qui revenait du marché; il fut tout surpris de trouver seul, dans la lande, un bel enfant vêtu de velours, avec un pourpoint semé de pierreries, de fins bas de soie et une toque à plumes blanches.

« Que faites-vous ici, mon jeune seigneur? » demanda-t-il.

Bouton-d'Or lui raconta son histoire.

« Ce petit a perdu la raison, ou bien il ment, pensa le paysan qui ne croyait ni aux Elfes, ni à la reine Mab, mais il a sur lui des diamants qui ont beaucoup de valeur sans doute. Je vais done emmener chez nous l'enfant, à seule fin d'avoir les diamants. >>

Il faut vous dire que cet homme était fort avare et n'aimait que l'argent au monde.

« Viens avec moi, dit-il à Bouton-d'Or, je te donnerai une écuelle de soupe et une botte de paille dans la grange pour te faire un lit. Et puis, si tu veux travailler, je t'emploierai comme domestique jusqu'à ce que tu aies trouvé mieux. »

Le pauvre petit était si accablé de chagrin qu'il savait à peine ce qu'il faisait; il accepta l'offre du paysan, qui le prit en croupe sur son âne.

Ils arrivèrent bientôt devant une maisonnette de chétive apparence, sur la porte de laquelle se tenait une grosse femme revêche et un affreux marmot aux cheveux roux.

« Quel embarras nous apportes-tu donc là? demanda la femme à son mari en apercevant Bouton-d'Or.

-Tais-toi, la Rousse, répondit le mari à voix basse; il est cousu de diamants comme un prince.»> Et en deux mots, il lui raconta ce qu'il savait de Bouton-d'Or.

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Entre, mon gars, dit la femme d'un ton adouci. Qu'il tombe du ciel ou de l'enfer, l'argent est toujours bon à prendre.»

Elle le fit souper avec ses enfants et son mari, puis le conduisit dans l'étable, où, las de pleurer, il s'endormit.

Le lendemain matin, il trouva près de lui, à la place de ses beaux habits, une méchante souquenille de toile bise, si sale, qu'il ne voulut point la mettre; mais, en ce moment, la Rousse entrait, un morceau de pain noir à la main.

<< Point levé encore, paresseux! cria-t-elle. Allons! allons ! debout! >>

Bouton-d'Or se hasarda, timidement, à demander ses habits.

« Des habits de velours pour aller pècher du goëmon? dit-elle en haussant les épaules. Ils sont serrés dans mon coffre, tes habits. Ceux-ci ne te semblent-ils pas assez bons pour toi ? »

Elle lui jeta le morceau de pain noir, et Bouton-d'Or sortit de l'étable, affublé de sa souquenille, si honteux de la mine qu'il devait faire, qu'il n'osait plus lever les yeux.

Le paysan, qui s'appelait Poulidu, et son fils qu'on nommait Rousset, l'emmenèrent alors au bord de la mer.

Écoute bien, dit Pouldu en lui mettant un long râteau entre les mains, tu es ici pour pêcher du goëmon. Le goëmon, c'est cette plante marine que le flux des vagues apporte sur la plage. Il faut le saisir avec ton rateau et le mettre en tas à distance, afin que la vague, en se retirant, n'ait point le temps de l'emporter. Cette herbe-là nous sert à engraisser nos terres. Allons, vite à l'ouvrage ! »>

Le râteau était trop lourd pour les petites mains frêles de Bouton-d'Or, et, malgré sa bonne volonté, il ne parvenait pas à le manier.

Pouldu et son fils se moquaient de lui à cœurjoie.

« Voyez-vous ce beau filleul des fées qui ne sait seulement pas râtisser du goëmon.

Appelle donc ta marraine à ton secours, s'écriait Rousset. >>

Et Bouton-d'Or, humilié, au désespoir de se sentir si faible, rentra le soir sans avoir ramassé plus d'un petit panier de goëmon, ce qui fit que la Rousse ne lui donna point à souper.

C'était une méchante créature. Bouton-d'Or s'en aperçut bientôt; elle le traitait avec une dureté et une insolence telles, qu'il se demanda souvent s'il ne se sauverait pas de cette maison inhospitalière, où on lui faisait payer si cher le peu de pain qu'il mangeait. Mais où serait-il allé? Il ne connaissait rien de la vie de ce monde, et s'imaginait trouver partout les mêmes mauvais traitements.

Il se laissa donc accabler de travail par le père Pouldu, et battre par le méchant Rousset, qui était jaloux de sa jolie figure.

<< Mon ingratitude envers ma marraine et ma trahison envers Blanche-Fleur n'ont-elles pas mérité tout cela?» se disait-il.

Mais il y avait certaines besognes que, malgré sa bonne volonté, il ne pouvait parvenir à faire. Par exemple, il retourna un mois durant à la pêche du goëmon, sans mieux réussir que la première fois.

Il savait bien traire les vaches, balayer la maison, mener aux champs les moutons et les porcs, mais soulever ce lourd râteau lui était impossible.

Un jour qu'il faisait pour cela d'inutiles efforts, il aperçut dans la traînée lumineuse que le soleil projetait sur une vague, le coquillage rose qui servait à Mab pour se promener sur l'eau.

Il tressaillit! Pouldu ne l'avait pas accompagné ce jour-là. Rousset profitait de l'absence de son père pour jouer au loin dans le sable. Bouton-d'Or était donc seul. Il tendit les bras vers la petite barque dont le mât de corail étincelait à deux pas de lui. Mab semblait fort occupée à diriger elle-même le gouvernail, mais en réalité elle avait vu son filleul. Le spectacle de ses haillons et du rude labeur auquel il était condamné lui faisait grande pitié; en même temps, elle ne pouvait lui pardonner le crime dont il s'était rendu coupable à l'égard de sa chère BlancheFleur. Aussi feignit-elle de ne point remarquer sa posture suppliante; seulement, comme elle était parfaitement bonne, et que n'ayant jamais bu de vin d'oubli pour sa part, elle avait présent à la pensée le serment fait à Yvette de protéger son fils, elle envoya un de ses Elfes vers Boutond'Or.

Une petite voix douce et familière vint donc dire tout bas à l'enfant :

« Le matin, avant de commencer ta tâche, va là-bas dans cette caverne; tu y trouveras un râteau dont tu te serviras à la place de celui de Pouldu, et que tu reporteras à la même place, le soir, avant de rentrer au logis. »

Plein d'espoir, Bouton-d'Or courut à l'endroit qu'on lui indiquait. Le râteau était là; un petit râteau de fer à manche de bois, assez semblable à ceux que fabriquent les hommes, mais il s'aperçut bientôt qu'il avait des propriétés magiques, car à peine eut-il essayé de s'en servir, que le râteau se mit à agir tout seul, et entassa sur la plage des monceaux de goëmon.

Lorsque Rousset vint le rejoindre en s'apprêtant à le railler de son incapacité et de sa paresse, ce méchant garçon ne put retenir un cri d'étonnement; il fallut envoyer une charrette pour transporter cette récolte d'une seule journée. Boutond'Or reçut force compliments et une belle galette de mais. Depuis ce jour, il émerveilla ses maîtres par son activité; jamais Pouldu n'avait

rencontré un ouvrier semblable, il ne trouvait pas prétexte pour lui adresser un mot de reproche.

La Rousse s'était aussi un peu calmée et, quoiqu'il fit froid dans l'étable mal close, que la nourriture qu'on lui donnait ne fût pas suffisante pour le soutenir, Bouton-d'Or reprenait courage et commençait à se trouver moins malheureux. Rousset seul redoublait de méchanceté à son égard, mais comme ce petit monstre était fort chétif et toujours malade, il avait pitié de lui et se résignait à être son souffre-douleur sans jamais user de représailles.

Depuis longtemps Rousset se demandait par quel prodige Bouton-d'Or réussissait à recueillir autant de goëmon en si peu de temps et il épiait tous ses pas pour arriver à découvrir son secret. Il ne lui fut pas difficile de le voir entrer dans la caverne et s'armer du râteau qui apparaissait dès qu'il avait invoqué Mab à haute voix.

Le lendemain du jour où Rousset fit cette découverte, il devança Bouton-d'Or, se glissa luimême sous le rocher et prononça le nom de Mab, bien décidé à s'emparer du râteau magique et à ne le rendre jamais. Mais il avait compté sans la ruse des Elfes bien supérieure à la sienne!

Le râteau apparut en effet pour tomber sur les épaules de Rousset et le rouer de coups si violents qu'il roula par terre évanoui. Lorsque Boutond'Or arriva selon son habitude, il le trouva baigné dans son sang et couvert de contusions; il fallut beaucoup de temps pour le ranimer et on vit bien qu'il resterait toujours boiteux des suites de cette volée de coups de bâton.

Interrogé par ses parents, dès qu'il eut repris connaissance, Rousset raconta son aventure. Au lieu de gronder son fils d'avoir eu l'idée d'un vol, la Rousse se mit à jeter les hauts cris contre Bouton-d'Or :

<< Vois-tu, dit-elle à son mari, je te l'avais bien dit; c'est un sorcier, un démon, il a commerce avec les mauvais esprits, il attire le malheur sur notre maison. Chassons-le vite.

-Bah! répondit Pouldu, démon ou sorcier, il me fait gagner gros par son travail et je le garderai quand même. A propos, femme, ajoutat-il, j'ai rendez-vous aujourd'hui avec un marchand de la ville pour lui porter les diamants de ce petit. D'après ce que je lui ai dit, il m'en a promis dix mille écus; ce sera une belle dot pour Rousset et qui le dédommagera de sa jambe cassée.

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derrière la porte. Par bonheur, il comprit qu'il s'agissait de lui, et se sauva tout épouvanté. Pour la seconde fois il se trouvait sans asile et sans pain.

« Que devenir? » pensa-t-il.

Comme il se demandait cela, il apercut deux vers luisants, cheminant sur la mousso, au pied d'un genêt; c'était la reine Mab qui se rendait au bal des Elfes.

<< Bonsoir, Bouton-d'Or, » lui dit la fée.

Il courut à elle et couvrit d'un seul baiser la coquille de noisette qui formait le char, les vers luisants et le moucheron déguisé en cocher.

« Pardonnez-moi! dit-il avec un accent de prière dont Mab fut touchée.

- Oui, dit-elle, je te pardonnerai si tu t'en rends digne, si tu es décidé à tout pour réparer

tes torts.

Ordonnez, ma chère marraine !

- Je suis en retard pour le bal, continua-t-elle, et ne puis te parler longtemps. Mais voilà ce qu'il suffit que tu saches. Par ta faute, BlancheFleur est au pouvoir du roi des Korigans; elle y restera dix ans à moins que, d'ici là, tu ne trouves moyen de me rapporter l'opale que tu as arrachée de ses ailes et à laquelle est attachée sa puissance. Or, cette opale a été confiée par notre ennemi aux gnomes gardiens du trésor des fées. Ces gnomes sont des nains trapus à tête monstrueuse qui habitent les entrailles de la terre. Avant d'arriver jusqu'à eux, il te faudra marcher longtemps, traverser de grands lacs au bord desquels croissent des roseaux qui se tordent et sifflent comme des couleuvres, braver d'énormes grenouilles qui rôdent incessamment autour du trésor. Mais si tu suis mes conseils, tu arriveras sans accident jusqu'au palais souterrain des gnomes. A mon seul nom, ils te rendront le talisman. Qui me conduira, ma reine?» demanda Bouton-d'Or un peu tremblant.

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Ne le fais pas attendre, » dit Mab. Bouton-d'Or s'élança avec ardeur sur le chemin que lui indiquait son guide. Mais il ne se doutait pas des difficultés du voyage auquel on le condamnait. A peine eut-il commencé à s'en rendre compte, qu'il se découragea.

Durant son séjour chez Pouldu, il s'était corrigé de sa paresse et même un peu de son penchant à la curiosité, mais il lui restait un grand défaut que nous avons peut-être oublié de signaler en lui: l'impatience.

Il était incapable de persévérance en rien. Au bout d'une semaine, Bouton-d'Or était las de marcher tout le jour, de coucher à la belle étoile, de se nourrir de racines et de fruits sauvages, surtout de ne pouvoir échanger un mot avec personne; car dès qu'il demandait à son compagnon de voyage s'ils seraient bientôt arrivés ou toute autre chose du même genre:

« Coucou!» répliquait l'oiseau, et il était impossible d'en obtenir une autre réponse.

Bouton-d'Or ne rencontrant aucune des grottes souterraines dont avait parlé la fée et ne pouvant croire que l'empire des gnomes fût au sein de cette lande déserte qui s'étendait autour de lui à perte de vue, se prit à murmurer, à douter de la parole de Mab, à se plaindre de son guide, qui, sans paraître l'entendre, lui criait d'un ton moqueur :

« Coucou ! »

En volant toujours devant lui.

Un soir, sur le bord d'une mare, il vit tout à coup se dresser un joli petit génie, la tête surmontée d'une aigrette de flamme. S'il avait eu plus de mémoire, il eût reconnu en lui un feu follet ou farfadet de la suite du Nain-Jaune, et il se serait rappelé que ces esprits malfaisants ont pour métier d'égarer les voyageurs; mais il ne réfléchit à rien de tout cela, et avec un gros soupir :

« Dites-moi, s'écria-t-il, si je suis loin encore de l'empire des gnomes?

- J'y vais de ce pas, répondit le follet. Si tu veux, je vais t'y conduire.

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Ce bruit, dont vous parlez, vient du côté gauche de la lande, objecta Bouton-d'Or, et mon oiseau m'appelle à droite.

Suis-le, si bon te semble, mais il ne sait ce qu'il dit. Tu n'arriveras jamais. Bonsoir ! »

Et le farfadet s'enfuit au milieu des marécages.

Longtemps Bouton-d'Or demeura hésitant entre le chemin de droite et le chemin de gauche; d'un côté, il entendait la voix du coucou; de l'autre, il voyait sautiller la petite aigrette de flammes bleues et rouges.

«Le fait est qu'on entend à gauche un bruit de marteaux, se dit-il; qui sait si Mab n'a pas voulu

me tromper de façon à prolonger mon épreuve? Elle sera bien surprise si j'arrive à délivrer Blanche-Fleur par un autre moyen que celui qu'elle m'indique. »

Et ce pauvre fou, qui se mêlait toujours de raisonner mal à propos, se jeta dans le chemin de gauche, sur les pas du farfadet, tandis que le coucou s'égosillait dans le chemin de droite. Il courut toute la nuit après cette flamme qui bondissait devant lui, enfonçant à chaque instant dans les terrains humides, tombant dans des fossés remplis d'eau dont il se tirait à grand'peine. Le malin follet semblait prendre à tâche de le mettre dans l'embarras.

Plusieurs fois Bouton-d'Or se repentit de l'avoir suivi et voulut essayer de retrouver le coucou, mais aucun chant n'arrivait plus jusqu'à lui, et il eût fallu être bien habile pour revenir sur ses pas dans l'obscurité.

Tout à coup le feu follet s'éteignit, et à la clarté de la lune, Bouton-d'Or aperçut une de ces grosses pierres branlantes, communes en Bretagne, qui tournait sur elle-même en grinçant. C'était là ce qu'il avait pris pour un bruit de marteaux. Audessus se dessinait un cercle argenté, formé par des myriades de petits génics qui dansaient en rond. Lentement, ils descendirent de son côté, et, à leurs ailes veloutées, il reconnut aussitôt les Korigans. C'en était fait; il se sentit perdu. Déjà les méchants esprits tournaient autour de lui avec la rapidité d'un tourbillon.

En vain il résista, il leur demanda grâce: ils l'enlaçaient, le faisant danser sans trêve ni merci. Peu à peu le vertige le prit, le souffle lui manqua... et les Korigans dansaient encore!...

Ce fut Pouldu qui, passant par là avec sa femme, pour aller au marché, trouva près du dolmen, sur le bord d'un ruisseau, le corps inanimé du pauvre Bouton-d'Or. Il était couvert de gouttelettes d'eau, que Pouldu et la Rousse prirent pour des gouttes de sueur ou de rosée, mais qui n'étaient autres que les larmes de la reine des Elfes, inconsolable de la mort de son favori. Pénétré de remords involontaires, le paysan descendit de son âne et creusa une tombe à Boutond'Or. Cette tombe est cachée maintenant sous les genêts, mais chaque nuit Mab y descend, et l'on dit qu'au bout de dix années, lorsque BlancheFleur sera redevenue libre, elle obtiendra du rọi des génies la permission de ressusciter son filleul, pour l'emmener de nouveau dans le pays des Elfes.

En attendant, elle se berce tristement sur les fleurs de genêts, en chantant les chansons qu'il aimait.

T. B.

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Modes de Paris

ET PETIT COURRIER DES DAMES REUNIS

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