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baudissaient de leurs inventions, les mystifiés y trouvaient plus d'un motif d'agacement et de brouille.

Une petite lettre un peu trop parfumée, et dont les fines pattes de mouche demandent une étude toute particulière, me questionne sur l'origine du poisson d'avril. En vérité, mes chères correspondantes me font trop d'honneur; elles s'imaginent feuilleter en moi une encyclopédie vivante. Je vous en prie, mesdemoiselles, et dût même cet aveu me nuire un peu dans votre esprit, persuadez-vous que je ne sais pas tout, et que votre louable curiosité scientifique peut m'embarrasser de temps en temps. Cette fois, cependant je crois pouvoir répondre à mademoiselle Lucie de H., que de plus savants que moi, en présence des origines diverses attribuées à l'usage populaire du poisson d'avril, hésiteraient à se prononcer. En voici une qui rapproche beaucoup de nous cette bizarre coutume:

Un prince lorrain, gardé à vue dans le château de Nancy, par l'ordre de Louis XIII, fut assez heureux, assez adroit, pour s'échapper le premier matin d'avril, en traversant, à l'aide de quelques brasses vigoureuses, la rivière qui le séparait de la liberté. Ses compatriotes, naturellement portés à la plaisanterie, dirent alors que les Français avaient eu un poisson en garde.

Quoi qu'il en soit de cette interprétation, je trouve, moi, que le poisson d'avril est la plus répandue des nourritures..., il se sert, hélas, sur toutes les tables, en toutes les saisons de l'année, à toutes les époques de la vie...

Vous avez cinq ans, petit Paul; un long fétu de paille sort de vos lèvres rieuses; vos joues roses se gonflent pour l'emplir de vent; la bulle de savon s'élance, irisée et légère; vous tendez joyeusement la main pour la saisir et l'arrêter en son vol...; elle est déjà crevée et vous n'embrassez que le vide... poison d'avril !

Vous êtes fier de vos vingt ans, Pierre; l'orgueil de la vie allume vos regards; vous avez foi dans l'amitié qui fait cortège à tous vos plaisirs; vous avez foi dans l'amour qui semble vous sourire au pied même des autels; vous avez foi dans la gloire qui vous appelle d'en haut.... le vent de l'adversité disperse les amis... poisson d'avril! la fiancée, attirée vers un foyer plus heureux, renonce au vôtre... poisson d'avril! la gloire que vous poursuiviez s'évanouit en fumée... poisson d'avril !

Et vous toutes, filles, sœurs et mères qui me lisez, outre le menu fretin qui compose votre ordinaire, ne consommez-vous pas trop souvent de ces grosses et piquantes fritures qui ne sont pas des anguilles de mer mais de venimeuses couleuvres?

Rêves déçus, espoirs trompés, orgueils humiliés, tendresses dédaignées; sacrifices méconnus, tout cela... poissons d'Avril! poissons d'Avril !

Dans l'éducation actuelle on a supprimé la vache enragée..... hélas! cette suppression ne rend

que plus amer, plus déchirant à avaler l'inévitable poisson d'Avril!

Quand je dis l'inévitable poisson d'Avril, je n'entends pas m'exprimer d'une manière absoluc cependant; il est des préservatifs contre ces mets désagréables: une éducation religieuse, des principes solides, la modération des désirs, la simplicité des goûts, l'amour du travail et la force du caractère composent à qui les a, un pain quotidien qui permet d'écarter du repas certaines arêtes... quant aux couleuvres qui dépendent uniquement des circonstances, quant au fiel que n'ont point porté à nos lèvres nos faiblesses, nos torts et nos passions, quant au poison enfin que nos propres mains ne nous ont pas versé, il est un antidote, un seul la Foi qui donne la résignation, le cou rage, la force et l'espérance.

Elle illumine pour nous la grande fête qui s'approche, ma Florence, la fête de la Résurrection, la fête de l'Éternelle vie. Dans quelques jours les solennelles volécs des cloches l'annonceront au monde chrétien; le triomphant. O Filii éclatera joyeux d'un bout de la terre à l'autre et les âmes régénérées reprenant une vie nouvelle, se mettront à refleurir en même temps que la nature rajeunie...

Ce n'est pas seulement dans les basiliques des grandes cités et dans les chapelles des hameaux que la joie rayonnera les familles dont la Pâques aura rapproché les membres, se livreront à l'allégresse domestique; l'aïeul oubliera ses infirmités, les petits enfants tendront leurs mains vers les œufs de Pâques et...

Mais je m'empresse de prévenir d'autres ques

tions:

On attribue l'usage d'offrir des œufs à Pâques aux Phéniciens qui représentaient par un œuf le divin Créateur de toutes choses! Selon eux, de cet œuf engendré par la nuit, principe universel, était sortie l'humanité.

Des Phéniciens au bon chanoine Schmith, ces œufs de Pâques ont subi sans doute bien des transformations, ma Florence; mais du chanoine Schmith à nous, combien n'ont-ils pas dégénéré ! ce mot ne te fera point récrier, toi qui conserves les saines traditions de l'antique simplicité, toi qui vas faire jouer tes enfants avec de vrais œufs de poule teints dans une marmite. Et nous aussi chère amie, nous recevions pareils présents des mains de nos mères; nous les avons admirés, cassés et mangés, c'était le bon temps! Je souhaite aux petites demoiselles qui rêvent de luxueuses surprises sous cette enveloppe autant de plaisirs que nous en éprouvions à n'y trouver que du blanc et du jaune; et je prie leurs mamans d'accepter de mes mains un pauvre œuf, sans artifice de teinture même, sous la coquille duquel se cache cette précieuse devise:

« Simplicité! »

C'est la tienne, chère amie. Reçois-en les félicitations de ton affectionnée, JEANNE.

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Explication du Rébus de Mars: Mieux vaut soigner sa santé que sa maladie.

Le Directeur-Gérant : JULES THIERY

9 896 PARIS.

MORRIS PERE ET FILS, IMPRIMEURS BREVETÉS, RUE AMELOT, 64

DES

DEMOISELLES

JEAN SOBIESKI

« Il y eut un homme envoyé de Dieu, qui s'appelait Jean. »>

Jean Sobieski et la race antique dont il était issu devaient leur gloire à ces guerres saintes que la Pologne n'a cessé de soutenir contre l'Islamisme; sentinelles avancées de l'Europe, la Pologne et les Polonais l'ont défendue contre la puissance ottomane, alors si redoutable, et Sobieski a couronné deux siècles de luttes sanglantes en repoussant loin de Vienne l'armée infidèle, et en posant aux rives du Danube des bornes que les descendants des Bajazet et des Soliman ne devaient plus franchir. Ce grand homme semble la personnification du peuple généreux qui lui donna une couronne en retour de ses exploits.

Sobieski sortait d'une famille chevaleresque. Son père, Jacques Sobieski, castellan de Cracovie, passa sa vie à défendre les frontières de la Pologne contre les Turcs; sa mère, Théophila Danilowiczowna, appartenait à une race qui s'était signalée par ses éclatantes victoires sur les Moscovites, ces autres ennemis de la catholique Pologne ; une de ses aïeules avait recueilli de ses mains, sur le champ de bataille, le corps mutilé de son vaillant mari, et, sur le tombeau qu'elle lui éleva, elle écrivit ce vers de Virgile dans l'Enéïde : « Quelque jour de ma cendre, un vengeur sortira. » Exoriare aliquis nostris ex ossibus ultor! (Livre IV.)

Le vengeur naquit: ce fut Jean Sobieski. Sa mère, Théophila, venait de soutenir un siège contre les Tartares, lorsqu'elle mit au monde, parmi les éclats d'une effroyable tempête, ce fils QUARANTE-SEPTIÈME ANNÉE. No V.

qui prit au baptême le nom de Jean. C'était le 2 juin 1624.

Il reçut une éducation religieuse et mâle; il apprit sept ou huit langues; on lui rendit familiers les principes de l'art militaire, et son père s'appliqua à développer en lui le génie de l'éloquence parlementaire à laquelle il devait luimême une partie de sa réputation. Le génie actif de Jean saisissait tout, et son intrépidité effrayait parfois son père, lorsqu'il le voyait, armé comme un ancien Sarmate, d'un arc et d'une hache, poursuivre dans les montagnes l'ours, le sanglier et le bison sauvage.

Le castellan, pour compléter l'éducation de ses deux fils, les envoya en France; ils accompagnaient l'ambassade qui venait solliciter pour le roi de Pologne Wladislas, la main de la princesse Marie de Gonzague. Madame de Motteville raconte, dans ses Mémoires, l'impression que la magnificence un peu sauvage de ces envoyés produisit sur la brillante cour d'Anne d'Autriche. Jean Sobieski passa en France quelques années; il servit dans les Mousquetaires rouges, et il fut distingué par le jeune Condé; ces deux héros s'aimèrent toute leur vie et correspondirent toujours ensemble.

Les malheurs de la patrie rappelèrent Sobieski; il revint en Pologne; il trouva son pays inondé par une armée de Cosaques, qui avait rallié à elle tous les serfs mécontents de l'Ukraine, de la Podolie, de la Lithuanie, augmentés d'une coalition féroce de Musulmans et de Grecs schismatiques, qui se livraient à tous les excès de la guerre et du fanatisme. La noblesse polonaise n'avait pu ΜΑΙ 1879. 9

résister à ces hordes cruelles. Varsovie est menacée; les deux fils de Sobieski arrivent au château paternel et embrassent les genoux de leur mère, en demandant sa bénédiction.

Venez-vous pour nous venger? dit-elle. Je ne vous reconnaîtrais pas pour mes enfants si vous pouviez ressembler aux fugitifs de Pilawec!

Ils ne leur ressemblèrent pas. L'armée polonaise rencontre les Cosaques auprès de la petite ville de Lublin et, encore une fois, elle fléchit, lorsqu'un jeune homme, suivi de quelques nobles, s'élança au plus épais des rangs ennemis; les soldats, électrisés, le suivent; ils tiennent tête aux Barbares, et remportent un succès qui permet au roi de proposer à l'hetman des Cosaques une paix supportable. Ce jeune héros était Jean Sobieski.

Jean était entré dans la lice; il n'en sortit plus. Les Russes, les Suédois et les Cosaques menaçèrent la Pologne orientale. Sobieski défendit les frontières; il remporta contre ces ennemis coalisés une série de victoires et il fut rangé, dans l'opinion publique, parmi les habiles capitaines de son temps. Mais ni la lance ni l'épée ne devaient sauver la Pologne; elle portait en ellemême un principe mortel par les divisions de sa noblesse et par les haines qu'excitaient, à chaque changement de règne, les prétentions de tous à cette couronne élective et non héréditaire. Malheureuse couronne, à laquelle les rois auraient pu dire, comme notre Charles V, à la sienne « O précieuse couronne! précieuse par le mystère de justice renfermé en toi, mais vide, » à cause du travail, des angoisses, des peines » de cœur et d'esprit, des périls de conscience » que tu donnes à ceux qui te portent!»

Sobieski devait l'éprouver plus tard; en ce moment, de plus douces pensées remplissaient son cœur il venait d'épouser une Française, Marie d'Arquien, veuve du palatin de Sandomir; il l'aimait uniquement; il l'aima toute sa vie, quoiqu'elle fût indigne de l'amour d'une âme aussi noble.

A peine marié, il dut ressaisir l'épée : les Turcs prenaient leurs dispositions pour subjuguer la Pologne; elle était seule, sans alliés, << mais, écrivait un contemporain, (André Sa>> luski), dans ce désastre, il nous reste Sobieski, >> seul général auquel on ne puisse être agréable, » si on ne l'est aussi à Dieu, le seul qui sache >> être prodigue de sa fortune comme de sa vie, le seul à qui il soit arrivé de paraître à sa >> patrie un plus sûr boulevard que des places » fortes et des armées! >>

Sobieski justifia ce magnifique éloge; il rassemble ses faibles troupes et se retranche dans le camp de Podaïce, où il soutient dix-sept assauts, toujours repoussés; au dix-septième, il sort de ses retranchements, il descend en rase campagne; les paysans des environs arrivent, armés de faulx; un combat furieux s'engage, les Turcs plient et

fuient loin du champ de bataille en y laissant vingt mille morts (1668). La paix fut la suite de cette victoire étonnante, accordée par Dieu à l'héroïsme de Sobieski et aux prières de la nation, qui ne quittait pas le pied des autels. Quand Sobieski vint rendre compte de sa campagne à la Diète, tous se levèrent et proclamèrent qu'il avait sauvé la Pologne. « Dieu nous a sauvés, dit-il, Dieu seul! Puisse-t-il maintenant nous » donner la modération et la concorde!

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Une année après, le péril recommença; les Turcs revinrent, escortés des Cosaques, et, encore une fois, la petite armée de Sobieski fut le bouclier de son pays (1). Ses exploits, que l'on ne saurait ici raconter tout au long, tiennent du prodige; il délivra trente mille prisonniers polonais que les Musulmans traînaient en esclavage; il reprit un butin immense, et, sans cesse, alors que la Diète l'acclame, que l'Europe proclame miraculeuses toutes ses victoires, que les captifs délivrés baisent ses mains, il répète que Dieu seul mérite la gloire, et il remercie la bonté céleste qui lui a permis de compter dans sa vie de semblables journées.

Une dernière victoire sous les murs de Choczim couronna cette campagne. Sobieski était dans la plaine, les Turcs retranchés dans leur camp ; un froid rigoureux, une neige épaisse accablaient les deux armées, mais Sobieski releva le courage de ses compagnons en leur disant : « Vous avez » souffert, mais les Turcs sont épuisés; ces » hommes d'Asie ne peuvent tenir aux vingt» quatre heures qui viennent de s'écouler. Sui» vez-moi, et, avant ce soir, vous logerez sous ces tentes dorées. »

Sa promesse s'accomplit; quarante mille Turcs périrent dans une effroyable déroute. Sobieski s'empara de l'étendard donné par Mahomet IV à son pacha et il l'envoya au souverain-pontife. On dressa un autel sur le champ de bataille et un prêtre donna la bénédiction aux soldats vainqueurs du Croissant.

:

Cette série de triomphes désignait Sobieski pour le trône; il était vacant; deux prétendants s'offraient l'un était Charles de Lorraine, dépouillé de ses États héréditaires par Louis XIII; il avait de grandes qualités; il était soutenu par l'Autriche; la France soutenait, elle, le duc de Neubourg; on hésitait, on était sur le point d'en venir aux armes... Sobieski s'avançait, précédé des trophées de Choczim qu'il apportait pour les offrir au roi élu; les peuples couraient au-devant de lui, les arcs de triomphe se dressaient sur son passage. Il entra au Sénat avec sa simplicité habituelle et lorsqu'on lui demanda quel serait l'objet de son vote, il répondit : « Le prince de Condé. »>

(1) Nous avons consulté pour ce travail, la belle Vie de Sobieski, par Salvandy, et un petit ouvrage édité à Lille, par M. Lefort.

Le président de la Diète se leva alors. Dans un discours éloquent, il rejeta le duc de Neubourg, qui ne lui semblait pas de force à porter la couronne de Pologne; il rendit hommage au prince de Lorraine, ajoutant que la protection de l'Autriche le rendait suspect. Il continua: « Ce » matin, je me suis humilié devant Dieu pour » chercher des lumières au pied de la croix, sur » une décision qui doit finir le deuil de mon pays. » Je sais qu'en nommant Condé, je ne me prépa>> rerais pas un remords. Sa renommée répond » pour lui, et cependant ce grand homme n'aura ⚫ pas mon suffrage. Nous devons avoir un chef, ⚫ compagnon de nos travaux, citoyen de notre › patrie; je demande qu'un Polonais règne sur la » Pologne.

>> Parmi nous est un homme que le salut de la » République, assuré dix fois par ses conseils et » ses victoires, a déjà établi dans les respects du » monde et dans les nôtres, comme le plus grand, » le meilleur des fils de la Pologne... Rappelez» vous Podaïce, Kalutz, Choczim surtout, et » prenez pour roi Jean Sobieski ! »

Un long applaudissement suivit ces paroles; Seul, Sobieski protesta. Un nouvel orateur prit la parole et rappela, avec une ardente émotion, les services de Jean; toute la noblesse criait : Nous aurons pour roi Jean Sobieski!» Mais, à son tour, il monta à la tribune et il dit :

« Je m'oppose. Il ne serait pas digne de moi » d'arriver au trône d'une manière furtive, à la >> nuit tombante, quand personne n'a eu le temps » de se reconnaître dans une résolution si sou» daine. Je demande qu'il ne soit pas passé outre, et, en le demandant, je déclare qu'à défaut » d'une autre opposition, il y a mon veto. »

Il fallut céder à cette généreuse protestation; mais, le lendemain, Sobieski dut céder à son tour. Les suffrages furent comptés; ils étaient unanimes; l'évêque-régent parcourut les rangs des électeurs et demanda trois fois s'il y avait des oppositions; il ne reçut d'autre réponse que des vivats, et il proclama roi Jean III Sobieski. Le nouveau roi vint à Varsovie et, peu de jours après, il assistait, avec la reine Marie, à la procession de la Fête-Dieu. On portait devant lui soixante-six drapeaux ottomans, enlevés par Sobieski à Choczim. Quand le prêtre portant la Sainte-Eucharistie parut, ces drapeaux furent jetés à ses pieds et il les foula. Les assistants versèrent des larmes de joie.

Les premiers actes du nouveau roi furent des faveurs accordées à ses ennemis et aux rivaux de sa maison. Le calme intérieur régnait, mais les Turcs menaçaient toujours et, avant même d'être couronné, le roi Jean dut se mettre en campagne et défendre, pas pas, la ligne du Borysthène. Il voulait la paix avec la Turquie et la Russie; mais ses efforts se voyaient contrariés sans cesse par les intrigues du parti autrichien. Toute l'Europe accusait l'empereur Léo

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pold des malheurs de la Pologne; il craignait de voir acquérir trop de pouvoir à ce glorieux voisin et il fomentait contre lui des complots à Constantinople, à Moscou, et au sein même de la Pologne. Ce prince, chef d'une nation chrétienne, préférait affaiblir, au profit d'une puissance infidèle, un prince catholique comme lui; mais Dieu, par un équitable dessein, permit que, peu d'années après, l'Autriche, menacée et tremblante, à la veille de tomber aux mains des Ottomans, fut sauvée par l'épée de ce Sobieski qu'elle aurait voulu dé

sarmer.

Sobieski ne se découragea point, quoique ce royaume, qui venait de se donner à lui, fût menacé de rechef par une de ces armées turques qui recrutaient, dans les profondeurs de l'Asie et de l'Afrique, leurs hordes innombrables, et, une fois de plus, combattant au cri de Vive Jésus! il sauva sa patrie. Une série de victoires assura à la Pologne une paix de sept ans (1676).

Les Turcs, pendant ce laps de temps, laissèrent en paix leur ennemie; mais leur puissance qui, depuis deux siècles, se soutenait également formidable, tourna ailleurs ses vues; ce fut l'Autriche et son antique capitale qui devinrent, comme on le dit de nos jours, l'objectif des vainqueurs de Byzance. L'Autriche, isolée, n'avait point d'appuis, point d'alliés; il ne lui restait qu'un seul espoir : le roi Jean, et l'Autriche l'im. plora.

A cette nouvelle, Mahomet IV renouvela à Sobieski ses promesses d'alliance et d'amitié, mais le Saint-Siège appuya les sollicitations de l'Empire, et Sobieski fut docile à la voix du Père des fidèles, qui répondait d'ailleurs aux sentiments intimes de son âme. Il conclut un traité avec l'Empereur, repoussant toute clause favorable à sa maison, ne demandant de témoignages de gratitude et d'amitié que pour la Pologne et sollicitant surtout une union définitive contre l'islamisme qu'il eût voulu à jamais refouler en Asie.

Pendant ces préliminaires et les préparatifs de guerre de la Pologne, les Turcs s'avançaient au cœur de l'Empire et mettaient le siège devant Vienne. L'Empereur et sa cour avaient fui, ́l'abandonnant à sa destinée. Le duc de Lorraine et quelques gentilshommes étaient restés et organisaient la défense; les habitants étaient épouvantés à la vue de cette multitude d'ennemis qui les pressaient de toutes parts, de ce camp immense, de cette seconde ville qui serrait leur ville, et dont les canons répandaient sur Vienne l'incendie et la mort.

Sobieski s'apprêtait. Pour lever et soutenir son armée, il n'avait eu d'autres ressources que les subsides du Saint-Siège et ses propres revenus; enfin, il se mit en marche, donnant à ses capitaines pour mot d'ordre: Sous les murs de Vienne!

Quand on sut que le roi Jean venait, tout

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