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Suite et fin (1)

De Puno à Arequipa et à Lima.

Lundi 14. Puno est une petite ville sans aucune importance; à part la cathédrale, il n'y a rien d'intéressant à visiter. Aussi, dès le lendemain matin, nous prenons le train pour descendre à Arequipa; nous avons dit adieu aux diligences, ce n'est pas trop tôt. C'est encore à une Compagnie anglaise que le chemin de fer appartient; il est un des mieux construits et des plus hardis que j'ai rencontrés dans mes nombreux voyages dans les deux Amériques. Les wagons sont commodes et confortables. La ligne part de Puno à une altitude de 4.000 mètres, et s'élève de station en [station jusqu'à 4.900 mètres, plus haut que le Mont-Blanc qui a 4.800 mètres. La puna y est supportable et tempérée par la vitesse du train qui agite le peu d'air rencontré dans ces régions. A une heure et demie à peu près de Puno commence une région de petits lacs, pièces d'azur, jetées de chaque côté de la ligne dans la dépression des montagnes : c'est un coup d'oeil féérique.

Sauf ce panorama ravissant, on ne voit guère que la pampa, steppe stérile où les vigognes et les biscachas (lievres) rongent le maigre pâturage qui croît à travers le sable et les pierres.

Par une série de courbes extrêmement hardies, le chemin de fer descend de 2.000 mètres, entre Cerro Alto et Arequipa. A Yura, dernière station, la vue se repose agréablement sur des prairies et des champs de verdure qui entourent la ville, grace à un cours d'eau qui coule à l'extrémité ouest. Vers les 6 heures, nous entrons en gare où nous attendent deux jeunes Pères lazaristes.

Arequipa est une ville de 20.000 habitants: ses rues sont propres, bien alignées, et ses blanches maisons lui donnent un petit air coquet. C'est la ville catholique et lévitique du Pérou ; elle fournit beaucoup de prêtres, de religieux et aussi de religieuses. Il y a plusieurs couvents, celui des Franciscains, des Récollets, des Dominicains, des Jésuites, des Salésiens et des Lazaristes qui dirigent les Séminaires. Il y a aussi beaucoup de communautés de religieuses cloîtrées et de vie active: les sœurs de Saint-Vincent-de-Paul

(1) Voir Missions Catholiques des 27 juillet 3, et 10 août.

ont les œuvres de charité, et celles des Sacrés-Cœurs une maison d'éducation.

Arequipa est la résidence d'un évêque, Mgr Ballon, fils du pays. Sa cathédrale toute en pierres est également l'œuvre d'un enfant de la ville. Il y a donc des éléments précieux et des ressources abondantes. Je suis sûr que l'œuvre de la Propagation de la Foi, dès qu'elle sera bien comprise, y sera florissante un jour.

Ce n'est pas sans regret que nous quittons cette ville sympathique à tout point de vue et dont nous gardons le meilleur souvenir.

Nous avons à nous rendre à Mollendo, port sur l'océan Pacifique où nous nous embarquerons pour Lima. D'Arequipa à ce point, il n'y a que 6 heures de chemin de fer par une voie admirablement bien construite, aux courbes plus savantes encore dans leur hardiesse que celles du chemin de fer de Puno, qui nous avaient déjà bien étonnés. Bien qu'il ne pleuve jamais dans ces régions, l'humidité de la mer et les rosées abondantes qu'elle produit couvrent au printemps les diverses collines qui s'étendent jusqu'à la côte, d'une abondante verdure et de luxuriantes prairies, au milieu desquelles se détachent de touffus bouquets d'énormes boutons d'or d'un parfum odoriférant.

Nous arrivons de bonne heure à Mollendo. La barre est favorable, la mer est calme; nous nous embarquons immédiatement à bord du vapeur « Impérial », qui est en rade, et qui partira dans la nuit. Mollendo, quoique port insignifiant par lui-même, a un certain mouvement commercial; il dessert Arequipa, Puno et tout le Nord de la Bolivie.

Nous avons trois jours de traversée d'ici à Lima, à cause des escales obligatoires. Le dimanche 18, nous touchons à Pisco, petite ville célèbre par son eau-de-vie.

Les Franciscains du grand (couvent d'Ica y ont un piedà-terre; c'est là que nous allons célébrer le Saint Sacrifice de la messe. Nous trouvons la petite ville tout émotionnée. On nous apprend que, trois jours avant, un certain Oné, chef de bandes insurgées contre le gouvernement, avait investi la ville avec 250 de ses hommes, et avait volé la caisse de la douane. Dans l'escarmouche avec la police, 7 hommes étaient restés sur le champ de bataille.

L'église paroissiale est vaste et possède de beaux autels de style renaissance espagnole.

Le lendemain, nous étions au Callao, port de Lima, où se terminait notre excursion. Nous débarquâmes à 8 h. 1/2, et, après une demi-heure de chemin de fer, nous allions frapper à la porte du collège des Pères des Sacrés Cœurs, dits de Picpus, où nous fûmes accueillis à bras ouverts par leur aimable supérieur, un ami de mon premier voyage au Chili en 1886. C'est là que nous avons reçu une cordiale hospitalité pendant notre séjour à la capitale du Pérou.

Il n'est pas dans mon plan de vous parler aujourd'hui de Lima, de ses monuments antiques, de ses établissements

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Le but principal de notre voyage à Lima terminé, nous prenons congé de nos amis, Pères picputiens et lazaristes, et nous disons adieu à la belle capitale du Pérou, la patrie de tant de saints et de tant d'hommes célèbres. Nous nous embarquons à bord du magnifique vapeur anglais Peru, pour revenir au Chili, en nous arrêtant à Iquiqué, dernière ville du Pacifique où, en quelques jours, nous installons d'une manière satisfaisante notre chère Euvre de la Propagation de la Foi, grâce à l'appui bienveillant de Mgr Cartes, vicaire apostolique, et au concours empressé de son intelligent et actif secrétaire, M. l'abbé Monteiro.

Ce modeste récit que je vous envoie, n'est pas d'un écrivain ni d'un littérateur, mais seulement d'un homme qui a observé. Peut-être qu'à ce point de vue ses observations pourront être utiles et instructives à quelques-uns des nombreux lecteurs des Missions Catholiques.

FIN

Par suite d'un regrettable oubli, le chapitre relatif à Oruro, qui devait être placé p. 366 au début du deuxième article de Mgr Terrien, ayant éte laissé de côté, nous croyons devoir donner ici en appendice cette page instructive et pittoresque.

A Oruro, nous sommes descendus chez les Révérends Pères Franciscains qui y ont un couvent, seulement depuis quelques années; nous sommes accueillis comme des frères et nous sommes heureux de nous reposer un peu à l'aise. Le départ de la diligence pour La Paz ne doit avoir lieu que samedi matin: nous avons donc deux jours à nous, nous en fitons pour visiter Oruro.

C'est une ville de 7 à 8.000 habitants, dont 1.000 blancs à peine; le reste de la population est composé d'Indiens aux costumes les plus étranges, mais gracieux et riches parfois. Le vêtement des Indiennes appelle surtout notre attention: leurs robes aux couleurs voyantes sont courtes et larges, comme les crinolines de l'Empire, et viennent à peine toucher le bout des chaussettes de celles qui en usent; mais la plupart de ces Indiennes portent des bottines assez élégantes, étroites sans prétendre aux petits souliers des Chinoises. Elles ont aussi le luxe des bracelets aux bras et au cou, et ornent leur chevelure bien tressée d'un chapeau d'homme en laine ou en paille: cela est moins gracieux. Comme nous sommes au jour des Morts, nous sortons pour visiter les principales églises de cette petite ville. Les Indiens ont un culte tout particulier pour leurs défunts, à l'intention desquels ils font dire tous les ans des milliers de répons. Aussi dans chaque église, 5 ou 6 catafalques de luxe sont élevės; de nombreux chandeliers en argent les ornent et des milliers de bougies y sont allumées. Depuis la veille au soir jusqu'à midi du jour des Morts, ce n'est qu'une longue file de fidèles qui s'en vont en procession d'église en église en priant pour leurs défunts et en faisant réciter des répons. A chaque catafalque il y a un prêtre qui ne cesse d'accomplir cette besogne, d'ailleurs assez Iucrative pour lui. Dans la soirée, prêtres et fidèles se trans

portent au cimetière, où les mêmes prières se disent aux mêmes intentions. Je ne crois pas qu'il y ait un seul Indien qui omette cette dévotion pour ses chers défunts : cette pratique est assez commune dans toute l'Amérique espagnole.

Pendant notre séjour à Oruro, nous apercevons dans les rues un certain nombre de messieurs (caballeros) en habit noir avec le chapeau d'étiquette.Notre surprise n'est pas de longue durée: nous apprenons que la Convention nationale vient de s'y établir; la dernière révolution contre le président Alonso ayant été victorieuse. Le général Pando, qui a triomphe du gouvernement, a été élu Président de la République et se trouve provisoirement à Oruro avec la Convention nationale. Une fois le nouveau gouvernement constitué, il établira son siège définitif probablement à la Paz, et non à Sucre, puisque c'est la rivalité entre ces deux villes qui a occasionné la dernière révolution et qui a amené la chute d'Alonso qui résidait à Sucre.

NÉCROLOGIE

MONSEIGNEUR FANTOSATI

Franciscain, vicaire apostolique du Hou-Nan méridional. Mgr Antoine Fantosati était né le 16 octobre 1842, à SainteMarie in Valle, fraction de la commune de Trevi, au diocèse de Spolête. Il entra très jeune dans l'ordre des FrèresMineurs réformés, fit son noviciat à la Spineta (Maremme Romaine) et passa de là à Rome, au couvent de SaintFrançois à Ripa (de la Rive) qu'habita Saint François d'Assise et où l'on conserve l'oreiller de pierre sur lequel il reposait, et dans le jardin l'oranger qu'y planta le saint en 1219.

Il demanda et obtint de ses supérieurs d'être envoyé aux missions de Chine, en 1867. D'abord, il fut destiné à la mission du Hou-Pé septentrional. Quelques années après, en 1876, il fut chargé par son évêque, Mgr Pascal Billi, de la procure du vicariat apostolique.

Mgr Billi étant mort en 1878, le R. P. Fantosati prit l'administration du vicariat jusqu'à l'arrivé de Mgr Banci.

Bien que d'un tempérament robuste, il dut revenir en Europe en 1887 pour soigner sa santé. Mais bientôt il retourna dans sa mission. Le 5 avril 1892, il fut nommé évêque titulaire d'Adra, et succéda comme vicaire apostolique du Hon-Nan méridional à Mgr Semprini. Naguère, quand la révolution se déclara à Nankin, le R. P. Fantosati écrivait : « Grâce à Dieu, jusqu'à présent nous sommes respectés par les autorités et par le peuple; mais le danger est toujours présent. Avec le secours divin, nous sommes prêts à souffrir tous les tourments plutôt que d'abandonner notre poste. Je me recommande à vos prières pour pouvoir résister à tant de dangers, et recevoir ainsi la récompense promise à ceux qui auront persévéré jusqu'à la fin... »

M. Fantosati a, comme il le souhaitait, persévéré jusqu'à la fin; la mort héroïque qu'il vient de subir a été le couronnement d'une sainte vie.

BIBLIOGRAPHIE

Le Bienheureux Augustin Schaeffler, par M. le chanoine MANGENOT, professeur au Grand Séminaire de Nancy. -Un vol. in-12, de 105 pages. En vente chez M. Drioton, libraire de l'Evêché, à Nancy. Prix: 0,75, port en plus.

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Une biographie du B. Scheffler avait déjà été publiée il y a quelques mois par un vénérable chanoine de Metz. M. Finot avait, dans une édifiante et intéressante brochure, intitulée Un martyr lorrain en Extrême-Orient; Vie et mort du Bienheureux Schaeffler, retracé d'une plume émue et éloquente la carrière apostolique de l'héroïque confesseur de la foi. Cette biographie nouvelle n'en sera pas moins favorablement accueillie car elle contient quantité de détails inédits et achève de faire connaitre la physionomie morale du glorieux apôtre.

«Nous voulons, dit le docte et pieux auteur, suivre l'action progressive de la grâce dans l'âme de l'enfant et de l'étudiant, du grand séminariste, du missionnaire et du martyr, afin d'en trouver le terme et la consommation dans le Bienheureux. Personne ne s'étonnera si nous contem-plons avec une complaisance particulière la figure du clerc nancéien. Augustin Schoeffler est le premier élève du grand séminaire de Nancy que l'Eglise ait proclamé Bienheureux. Il nous est agréable de montrer à nos chers disciples comment s'est formé dans les murs de notre maison, par des moyens mis à leur portée, un saint qui, sauf le martyre, n'a pratiqué que des vertus communes. »

M. le chanoine Mangenot termine son livre par l'émouvant récit de la fête grandiose célébrée le 19 juin dernier au séminaire de Nancy en l'honneur du martyr,avec un tel enthousiasme qu'un témoin ne put s'empêcher de lui dire :

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M. l'abbé Chalubert, Angers......

A Mgr Favier, Pékin.

Au nom de Mlle Agnès, Versailles......

Pour les missions des Pères Jésuites en Chine (Pétché-ly sud-est).

M. l'abbé Pellat, diocèse de Digne.....

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Un Catéchisme par Mgr Le Roy! Il suffit de l'annoncer dans les colonnes de ce Bulletin pour donner à tous nos lecteurs le désir d'en faire l'acquisition. Après des années ils sont encore sous le charme des pages étincelantes de verve et d'éloquence, d'humour et de poésie, que nous envoyait jadis du Zanguebar et du Gabon l'éminent missionnaire devenu aujourd'hui le successeur du V. Libermann. Dans ce Catéchisme illustré, résumant sur un plan nouveau l'ensemble des vérités religieuses, tous trouveront à s'édifier et à s'instruire, et c'est à tous que nous le recommandons.

DONS

Pour l'Euvre de la Propagation de la Foi

M. J.-C. Fleureton, diocèse de Lyon............. M. E., diocèse de Rennes...

......

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500 »

300 D

Un anonyme de Strasbourg. Adveniat regnum tuum.......

122 25.

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Résidence du R. P. Emonet et des missionnaires de passage.
Residence du vicaire apostoliqua
MANDCHOURIE. - CATHEDRALE DE MOUKDEN ET RÉSIDENCE DES MISSIONNAIRES; d'après une photographie (voir le texte).

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CHINE

La délivrance des Légations et l'entrée à Pékin des armées alliées, voilà les deux événements considérables de la semaine. Mais que se passe-t-il à l'heure actuelle dans la capitale de l'empire chinois? Les Européens sont-ils forcés de conquérir chaque quartier de l'immense cité; l'impératrice douairière et la Cour sont-elles en fuite ou confinées dans le palais impérial; l'ordre, au contraire, est-il rétabli et la ville. est-elle occupée toute entière par nos soldats?

Rien de précis encore au milieu des nouvelles les plus contradictoires que la presse nous envoie chaque jour. Ce qui nous porte à croire cependant que tout n'est pas fini à Pékin même, c'est le silence gardé au sujet de Mgr Favier, des Soeurs, de tous ceux enfin qui étaient réfugiés dans le Pétang, c'est-à-dire dans le grand quartier chrétien.

Quant aux autres provinces de l'Empire, elles sont loin encore d'être pacifiées, on le comprend, et nos malheureux chrétiens subiront, il faut le craindre, No 1629.24 AOUT 1900.

le contre-coup des événements de Pékin. Jusqu'à présent, néanmoins, aucune dépêche ne nous est parvenue annonçant un de ces nouveaux massacres qui, depuis près de deux mois, commencent chacune de nos livraisons.

Les lettres cependant continuent à nous arriver des vicariats ensanglantés par les Boxeurs, c'est-àdire de la Mandchourie méridionale, du Petchely Sud-Est et du Chan-tong. Nous commençons par celles de Moukden. Ecrites par les deux Sœurs de la Providence de Portieux, qui ont été brûlées vives, avec Mgr Guillon, elles nous conduisent jusqu'au moment même du supplice.

D'autres lettres nous racontent le double meurtre des deux Pères jésuites Audelauer et Isoré, au Petchely Sud-Est; enfin les Franciscains du Chan-tong nous adressent des détails sur les événements qui ont précédé la mort de Mgr Fantosati.

Nous publions intégralement ces touchants documents. Comme nous, nos lecteurs remercieront Dieu, au milieu de ces épouvantables épreuves, du courage héroïque qu'il a su inspirer à ses apôtres.

I

MANDCHOURIE

Comme nos lecteurs le savent, avec Mgr Guillon et le Père Emonet, deux Soeurs: soeur Marie-Albertine et soeur SainteCroix de la Providence de Portieux ont été brûlées vives à Moukden. Toutes deux, prévoyant le sort qui les attendait, et avec ce calme qui caractérise les prédestinés, ont écrit à Ing-sé à sœur Augustine, leur compagne, leurs impressions dans ce solennel moment. Ce sont leurs lettres que nous publions en les faisant précéder de deux lettres de sœur Augustine qui, elle aussi, donne sur la situation d'émouvants détails.

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Nous recevons à l'instant même les lettres ci-jointes de Moukden. Elles nous montrent que la persécution se répand partout dans notre pauvre Mandchourie! Jusqu'à présent Dieu nous a protegées, ainsi que nos orphelinats; mais qui sait ce que l'avenir nous réserve? Nous sommes toujours sur le qui-vive, dans des transes continuelles, surtout pendant la nuit; car c'est alors que ces bandits font leur œuvre de destruction! Sans les Russes, qui font tout ce qu'ils peuvent pour empêcher le désastre, la ville d'Ing-tsé serait détruite, pillée, incendiée depuis plusieurs semaines. Mais ici c'est surtout la guerre aux chrétiens, puisque ces vauriens s'attaquent tout d'abord aux missionnaires, menaçant de les tuer et de brûler les églises. Plus de quatre cents sont entrés, il y a quelques jours, dans la cour du bon P. Louis Perreau, à Fà-K'ou-Men, menaçant de le tuer et d'incendier sa maison et l'église! Les chrétiens sont parvenus à les repousser et à sauver le Père ! Pour le moment, le P. Perreau est dans sa résidence, mais les deux vierges qu'il avait pour instruire ses orphelines et les catéchumènes se sont enfuies pendant la nuit à Tié-ling chez nos Sœurs. J'ai eu des nouvelles de nos Sœurs de Tié-ling par télégramme; la position y est moins mauvaise; les Sœurs vont bien; pas de trouble encore dans cette ville.

Tout va dépendre du résultat qu'obtiendront les troupes européennes qui marchent sur Pékin pour sauver les pauvres Européens. Plus de soixante-dix mille soldats chinois, armés jusqu'aux dents, entourent la ville!

Quant à nous, nous avons déjà renvoyé une bonne partie de nos vierges chez leurs parents et placé nos plus grandes orphelines dans de bonnes familles chrétiennes. Les Pères nous diront ce que nous devons faire, si le danger devient imminent soit ici ou dans nos autres orphe- linats.

Que toutes les sœurs prient pour nous, nous le faisons pour elles! En attendant que nous puissions vous donner des nouvelles plus rassurantes, soyez assurée de notre abandon total entre les mains de Dieu, et de notre entière soumission à son bon plaisir.

Ing-tsé, le 4 juillet 1900, Vingt-cinquième anniversaire de l'arrivée de nos premières Sœurs en Mandchourie.

Je vous adresse de suite les lignes que notre bonne sœur

Sainte-Croix a pu encore nous envoyer. Mais le Consul russe a eu des nouvelles par téléphone, car le télégraphe a été coupé par les Boxeurs, dans la journée du 1er juillet. Ce brave Consul russe, qui fait tout pour nous protéger ici, vient de dire au P. Choulet que la résidence de Monseigneur et celle des Sœurs à Moukden, l'église et le voisinage, tout est cerné! Depuis deux jours que s'est-il passé? Dieu le sait! Monseigneur, en quittant Ing-Tsé, le jour de Saint-Jean-Baptiste, à cause des bruits qui menaçaient Moukden, me dit que la première chose qu'il ferait, en arrivant à la capitale, serait d'envoyer ici nos deux Soeurs de Moukden. Ces chères enfants auraient eu le temps de nous arriver avant cette attaque.

A l'instant même, il est 3 heures après-midi, nous apprenons que le bon P. Conraux a envoyé plusieurs centaines de ses chrétiens pour essayer de délivrer Monseigneur, les deux Pères et nos Soeurs! Mais que pourra faire cette poignée de braves chrétiens à côté de ces milliers de brigands encouragés par le gouverneur? Enfin ! fiat, au bon plaisir de Dieu!

Nous n'avons pas de nouvelles de nos Sœurs de Tie-ling; espérons qu'il n'y a rien là. Puis, les Russes les protégeront certainement autant qu'ils le pourront. Jusqu'à présent nos Sœurs de la ferme Saint-Joseph n'ont pas été inquiétées par ces Boxeurs, pourtant en grand nombre aux environs. Mais leur succès à Moukden va surexciter ces démons.

Notre sœur Henriette est ici depuis une dizaine de jours: il n'y a donc que nos sœurs Rosine et Symphorose à la ferme. Je leur ai bien recommandé de ne pas attendre que les insurgés aient commencé leur œuvre de destruction pour venir ici où nous sommes mieux protégées qu'ailleurs.

Nous avons renvoyé toutes nos vierges chez leurs parents, et placé bon nombre de nos orphelines dans des familles chrétiennes, afin qu'au moment de l'alarme nous n'ayons que nos personnes à sauver.

Toutes les Dames anglaises sont parties dans leur pays depuis que nous avons reçu de mauvaises nouvelles de TienTsin et de Pekin. Pour nous, nous obéissons au bon P. Choulet qui sait mieux que nous où en sont les choses.

LETTRE DE SŒUR SAINTE-CROIX GRANDURY
brûlée vive dans l'église de Moukden.

Notre-Dame Auxiliatrice, 24 juin 1900. Je vous écris à la hâte ces quelques lignes, car votre bon cœur se tourmente peut-être en entendant parler de ces Boxeurs qui menacent de tout incendier, et qui, depuis plusieurs jours, font leurs incantations diaboliques sur la place de Moukden, pour exciter une révolution; mais le bon Dieu et NotreDame Auxiliatrice nous protègeront; ne vous inquiétez pas à notre sujet.

Ces Boxeurs sont surtout furieux contre les catholiques, et il était convenu que, le 26 de la lune, fête du Sacré-Cœur, notre petite cathédrale devait être incendiée, à midi juste, ainsi que les maisons envi

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