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tions acquises dont l'importance devient de jour en jour plus évidente ». « Ces prérogatives, répondait le Président lui-même, sont comme la consécration des services rendus par la France dans le monde aux intérêts religieux. » Ce dialogue entre les deux pouvoirs ne vise-t-il pas principalement et les missionnaires si nombreux, qui sur toutes les plages vont avec joie souffrir et mourir pour Dieu et leur pays, et ces nobles œuvres qui fournissent le budget des apôtres. et donnent un peu d'or à ceux qui prodiguent leur jeunesse, leur vie tout entière et, s'il le faut, leur

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Les Eglises d'Orient continuent à être l'objet des prédilections de Léon XIII. L'Union au Saint-Siège de toutes ces communautés vénérables est, humainement parlant, une œuvre de siècles; mais Dieu a voulu, dès le début, donner des consolations à son représentant sur la terre, et d'après Mgr Altmayer, 50.000 Nestoriens sont rentrés, cette année, dans le vrai bercail. Ailleurs, si le travail est plus lent, du moins les progrès sont visibles. Grâce à toutes les congrégations d'hommes et de femmes qui, sur ce sol sacré, sont les auxiliaires des patriarches et des évêques; grâce aux Séminaires qui forment un clergé national instruit et pieux, les préjugés que la politique et des siècles d'erreurs et de sommeil spirituel avaient acclimatés, s'évanouissent peu à peu et, dans un avenir plus ou moins prochain, la réconciliation complète se fera entre l'Occident et l'Orient, entre le Pape et les Patriarches.

Donnons, en passant, un souvenir aux deux illustres chefs des Arméniens catholiques et des Maronites qui se sont endormis dans le Seigneur, et ont eu pour successeurs des prélats pieux et tout dévoués à l'Unité.

Dans l'Empire du Milieu, l'habileté du ministre de France, M. Pichon, et la légitime influence acquise auprès de l'empereur et de l'impératrice douairière par le vicaire apostolique de Pékin, Mgr Favier, ont fait rendre un édit impérial accordant protection complète aux chrétiens et attribuant aux évêques et aux missionnaires un rang qui les met à même de traiter officiellement avec les autorités civiles. Autrefois, il est vrai, des actes semblables avaient été

signés, mais jamais la forme n'en avait été si solennelle et si précise.

Sans doute, l'étendue de l'Empire, le manque de communication entre les provinces et la Capitale, s'opposeront longtemps peut-être à la paix parfaite, et nous aurons encore à déplorer des meurtres comme celui de M. Chanès au Kouang-tong et du P. Victorin au Hou-pé; mais les faits de ce genre, dus en grande partie à la malveillance personnelle de certains mandarins et à la connivence des petits fonctionnaires avec des bandes de pillards, ont été suivis de répression sévère; aussi, peu à peu, il faut l'espérer, la crainte du châtiment et la connaissance plus parfaite du rôle du missionnaire et de la doctrine qu'il préche, donneront partout force de loi aux édits nouveaux. En peut-il être autrement quand le sang de tant de martyrs demande clémence pour la Chine, et quand plusieurs d'entre eux vont recevoir les honneurs de la béatification ?

Si les missions de l'Inde n'ont pas à redouter la persécution sanglante, Dieu, cependant, ne leur a pas ménagé l'épreuve. Cette année encore, la famine, suivie bientôt de la peste et du choléra, a sévi terrible sur la plupart de ses provinces, et, aux cris de détresse poussés par les missionnaires, nos associés et les lecteurs des Missions Catholiques ont répondu, comme toujours, par des offrandes. Si elles n'ont pas suffi à guérir toutes les douleurs, elles les auront du moins soulagées, et auront attiré sur l'Eglise une reconnaissance et une sympathie dont chaque jour nous apporte la touchante expression.

III

En Afrique, mentionnons rapidement les faits les plus remarquables qu'aient eu à enregistrer les annales de l'apostolat. L'Eglise copte catholique, qui n'avait pas même d'évêque, il y a dix ans, a repris sa place au milieu des autres Eglises orientales en communion avec Rome; elle a des prêtres instruits, un épiscopat jeune, intelligent et actif et Sa Sainteté Léon XIII lui a donné dernièrement la plénitude de la hiérarchie en lui accordant un patriarche. Sa Béatitude Mgr Cyrille II a été solennellement intronisé au Caire, le 21 juillet 1899.

Quelques mois auparavant avait eu lieu, à Carthage, une cérémonie non moins grandiose, mais d'un autre caractère, l'inauguration du monument élevé en l'honneur du cardinal Lavigerie; le panégyrique de l'illustre primat d'Afrique fut prononcé par Son Eminence le cardinal Perraud, évêque d'Autun.

La mission de Madagascar a reçu son troisième évêque. Mgr Corbet, de la Congrégation du Saint

Esprit, a pris possession de la partie nord de la grande île et fixé sa résidence à Majunga.

Pendant que Madagascar obtenait ce renfort de travailleurs apostoliques, des insurrections désolaient la région du Niger, anéantissaient le poste d'Alla et mettaient en grand péril la station d'Isselė; celle-ci ne dut son salut qu'à la bravoure du R. P. Rousselet, à qui les Anglais ont rendu dernièrement un magnifique hommage. La Société des Missions Africaines de Lyon, à laquelle appartient le vaillant missionnaire, a été encore cruellement éprouvée à la Côte d'Ivoire par la mort de plusieurs missionnaires et de plusieurs religieuses emportés par une épidémie de fièvre jaune, entre autres le préfet apostolique de cette jeune et florissante mission, le R. P. Ray. Peu après s'éteignait à Carcassonne, au cours d'un voyage entrepris en France pour les besoins de sa mission, le vénérable Mgr Taurin Cahagne, premier compagnon et héritier du glorieux apôtre des Gallas, le cardinal Massaja, le plus célèbre membre, en ce siècle, de l'Ordre des Frères Mineurs Capucins.

Pour réparer les vides que la mort fait chaque année dans les bataillons apostoliques, les missionnaires s'efforcent de recruter des auxiliaires et des frères d'armes au sein même des populations déchues qu'ils évangélisent. La plupart des missions d'Afrique ont déjà des prêtres indigènes et on conférait derniè rement, à Rome, l'onction sacerdotale au premier prêtre zoulou.

L'Afrique, on le voit, toujours en marche, a été, pendant la fin de ce siècle surtout, la grande conquête des missionnaires, ces guérisseurs de nations; aussi, pourrait-on, dans une certaine mesure, attribuer à tous la parole d'un illustre orateur à propos de celui qui les personnifie: « Lavigerie d'Alger se montrera à la postérité serrant contre sa poitrine et enveloppant de sa pourpre les kabyles affamés de l'Atlas et les nègres esclaves de Tombouctou (1). »

IV

L'Eglise des Etats-Unis, cette fille aînée de la Propagation de la Foi, puisque nos premières offrandes ont été recueillies pour aider ses missionnaires, continue à prouver que l'apostolat catholique réclame seulement la liberté et non des privilèges. Son sol hospitalier se couvre comme d'un blanc manteau de cathédrales et son épiscopat honoré gouverne des diocèses qui se multiplient chaque année. Grâce à l'illustre Compagnie de SaintSulpice qui nous a donné des délégués pour plaider la cause de notre Euvre, nous espérons que la grande république prendra sur nos listes un rang (1) Mgr Touchet, évêque d'Orléans.

digne de ses richesses et de sa foi nationale en Jésus-Christ.

De nouvelles provinces sont venues, cette année, enrichir son empire colonial et jouissent de cette liberté religieuse que leur accordait, largement du reste, la Puissance catholique dont elles dépendaient.

Au Nord nous aimons, comme chaque année, à saluer les familles religieuses dont d'inexorables frimas, les difficultés des courses évangéliques et quelquefois, hélas ! la stérilité du travail ne découragent jamais la vaillance.

Quoique l'Amérique latine et l'Amérique du Sud soient, à proprement parler, en dehors du domaine qui nous est assigné, et que la Patagonie et la Terrede-Feu soient seules soutenues par nous d'une manière constante, pouvons-nous ne pas dire avec quelle générosité toutes ces républiques ont répondu aux délégués envoyés par nous avec l'approbation du SaintSiège? Mgr Terrien, dont nous ne saurions assez louer le zèle intelligent et le dévouement sans limites, a trouvé partout le plus bienveillant accueil.

Après lui, deux Pères Blancs, que leur vénéré supérieur, Mgr Livinhac, a mis gracieusement à notre disposition, sont entrés dans le sillon largement ouvert et complètent l'organisation de notre Œuvre avec ses dizaines et ses autres éléments constitutifs. Bientôt de nouveaux délégués, pris dans d'autres congrégations de missions, s'uniront à eux et feront connaître à ces peuples de foi l'action et les besoins de l'apostolat.

Il n'est pas juste, en effet, que la Propagation de la Foi reste la propriété presque exclusive de l'Europe; tous les hommes sont appelés à l'honneur de porter la Bonne Nouvelle par eux-mêmes ou par leurs offrandes. Ne devons-nous pas d'ailleurs faire appel à toutes nos forces, quand le budget du protestantisme augmente chaque année et se chiffre par millions, quand ses ministres pénètrent dans des pays où ils étaient hier inconnus et quand, en regard de ces efforts et du dévouement incomparable de nos missionnaires, nous voyons nos ressources annuelles demeurer stationnaires?

V

Peu d'événements importants en Australie et dans les iles de l'Océanie; la situation des missions y reste satisfaisante. Les Pères Maristes ont pris possession des îles Salomon et Mgr Vidal a constaté, une fois de plus, que la prière des martyrs avait préparé les voies à l'évangélisation de ces peuples hier encore anthropophages.

Les Pères du Sacré-Cœur d'Issoudun dans les îles Marshall et en Nouvelle-Poméranie ont, de leur côté, vu leurs premiers travaux récompensés, souvent même au-delà de leurs espérances.

Ce tableau rapide nous montre que, malgré les obstacles, malgré les persécutions et les défiances, la parole de Dieu n'est pas enchaînée; elle court, selon l'énergique expression de saint Paul, traverse les mers, et retentit victorieuse au milieu des peuples les plus divers de mœurs, de langage et de croyances. Grâce à l'apostolat surtout, ce siècle qui finit a été grand, celui dont nous saluons l'aurore, sera, nous l'espérons, plus heureux encore. Il trouve, à son début, une armée compacte d'ouvriers évangéliques, des œuvres apostoliques solidement organisées, encouragées par les Pontifes romains et les évêques du monde chrétien, sympathiques même à tous les esprits impartiaux sans distinction qui s'intéressent au progrès véritable. Nos apôtres ne demandent aux puissances de la terre que le droit de se dévouer, de travailler, de souffrir et de mourir. Ces enfants du peuple, ces humbles femmes qui vont consacrer à des tribus inconnues et souvent sanguinaires leur jeunesse, leur ardeur et leur vie, réclament une seule liberté, celle de pouvoir aimer Dieu et de faire aimer le pays, dont ils emportent avec eux le culte passionné.

Que fera de toutes ces ressources le xx° siècle?... L'avenir sera-t-il plus heureux, le ciel moins noir, la concorde entre les nations plus assurée, la réconciliation scellée enfin entre les enfants d'une même patrie?... Nous ne le savons pas, mais vous le savez, ô Jésus-Christ, roi des siècles et père des peuples!... C'est en vous-même que nous nous reposons, que nous confions l'avenir de notre Œuvre et de toutes les missions du monde. Soutenus par vous, nous attendons, nous croyons, nous espérons.

DÉPARTS DE MISSIONNAIRES

Voici les noms des Missionnaires Oblats de Marie, partis en 1899.

Pour l'Amérique du Nord: à St Boniface, les RR. PP. Kulawy diocèse de Breslau), Enck (Paderborn); à St Albert, les RR. PP. Balther (Namur), Seltmann (Breslau); au Mackenzie, RR. PP. Richler (Strasbourg), Croisé (Le Mans); en Colombie britanni que, RR. PP. Wagner (Metz), Tavernier (Le Puy); à la Saskatchewan, R. P. Watelle (Cambrai); au Texas, R. P. Pescheur Pour Ceylan: à (Namur); Canada, R. P. Brassard (Nicolet). Jaffna, R. P. Desloge (Nantes); à Colombo, RR. PP. Devise (Viviers); Croctaine (Nancy); Carty (Ferns). - Pour l'Australie, RR. PP. Smyth (Dublin), Flynn (Meath). · Pour l'Afrique : à Natal, RR. PP. Manuel (Grenoble); Yenn (Strasbourg); à l'Etat libre d'Orange, RR.PP. Kempf (Wurtzbourg), Gutfreund (Stras bourg); au Basutoland, R. P. Hoffmeyer (Paderborn); au

Transvaal, RR. PP. Voltz (Strasbourg), Schang (Metz); en Cimbébasie, R. P. Biegner et Frères convers Kleist (Münster) et Reinhart (Wurtzbourg).

- Voici les noms des Pères et Frères appartenant à la Congrégation des Missionnaires de la Salette partis dernièrement pourles Missions.

Au mois d'août 1899, à destination de Madagascar, les RR. PP. Dantin, du diocèse de Chambéry; Jos. Rutty et Cél. Gachet, du diocèse de Grenoble; le frère coadjuteur Aug. Clerc-Renaud, du diocèse de Chambéry.

Au mois de septembre 1899, à destination du Haut-Canada (Assiniboia), les RR. PP. J. Morard, du diocèse de St-Jean-deMaurienne; Lattier, du diocèse de Grenoble.

Etaient partis auparavant à destination des Etats-Unis : les RR. PP. Vignon, Moussier, Guinet, Latour, Aloysius, Julien, Michel, J. Mossier, Deschand-Beaume, Deschaud-Blanc, Girard, Roux, Coset, du diocèse de Grenoble; Socquet, du diocèse d'Annecy; Triquet, du diocèse de Chambéry; Ant. Schmid, du diocèse de Sion (Suisse); et les FF. coadjuteurs: Lobet Charles du diocèse de Lyon, Pierre, Emmanuel, du diocèse de Grenoble.

Arménie.

INFORMATIONS DIVERSES

Mgr Katchadourian, évêque arménien catholique de Malatia, nous adresse la notice suivante sur son diocèse: « Le premier pasteur de ce siège épiscopal fut mon prédécesseur d'heureuse mémoire, Mgr L. Khorkoronni. Il fonda et organisa toutes les missions de ce diocèse qu'il gouverna durant trente-huit ans, avec un zèle éminemment apostolique. Il commença par prècher et célébrer les saints mystères sous les arbres, faute d'un local convenable; sa parole ardente ne tarda pas à gagner à Jésus-Christ des âmes de plus en plus nombreuses. Aidé par de généreux bienfaiteurs, il fit construire au fur et à mesure des églises, des oratoires, des écoles, des presbytères, aidant lui-même les travailleurs et portant de ses mains consacrées par l'onction épiscopale les matériaux destinés aux édifices religieux. Le ciel éprouva à plusieurs reprises sa confiance et sa persévérance par des tribulations; des incendies successifs, des tremblements de terre anéantirent coup sur coup des œuvres qui lui avaient coûté bien des peines et de l'argent. Mais le saint pasteur ne perdit jamais courage: après chaque catastrophe, il réparait les dégâts et relevait les ruines. « Survinrent enfin les terribles événements de 1895-96; tous ses établissements furent saccagés et devinrent la proie des flammes. De tous les diocèses arméniens catholiques, celui de Malatia a été le plus cruellement éprouvé. Pendant plusieurs semaines, nous n'avions ni calice ni ornements sacerdotaux pour célébrer le sacrifice de la messe dans l'étroit réduit où nous nous étions réfugiés. Toutes les missions du diocèse subirent plus ou moins le même sort : le zélé missionnaire de Husni-Mansour fut massacré pour n'avoir pas voulu renier sa foi. Ce dernier coup fut trop douloureux pour le vénéré prélat. Déjà courbé sous le poids de l'âge et des infirmités, contractées au cours de son long apostolat, il ne survécut que peu de jours à cette epreuve suprême.

« C'est dans ces douloureuses circonstances que je fus appelé au gouvernement du diocèse de Malatia. Je tremblais en pensant à la gravité de la tâche que j'assumais car il me fallait recommencer, réorganiser tant d'oeuvres, reconstruire ou réparer beaucoup d'établissements détruits ou endommagés. En présence de tant d'entreprises coûteuses, je me trouvais dans un dénuement complet, les premiers subsides ayant été consacrés aux besoins les plus urgents secours aux survivants nécessiteux, réparation de l'église et reconstruction de la résidence de l'evêque et des prètres à Malatia et voilà pourquoi j'ai cru devoir recourir à la haute munificence de notre Souve

rain Pontife, Léon XIII, qui entoure d'une sollicitude tout spéciale la malheureuse Eglise arménienne.Sa Sainteté a daigné me réconforter par un généreux secours. Encouragé par la paternelle charité du Saint-Père et muni de sa bénédiction apostolique, je viens implorer la pieuse générosité des lecteurs des Missions Catholiques, et j'ose espérer que mon humble attente ne sera pas déçue! »

Pondichery (Hindoustan). — Le P. Antoninader, prêtre indigène de l'archidiocèse de Pondichéry, missionnaire à Mogaiyur, nous écrit:

<<< Faut-il vous le dire? Je n'ose pas trop. Vous avouerez, cependant, que vous m'oubliez depuis quelque temps. Tout de même, il me semble que je suis bien malheureux, et je vais vous le prouver. Songez-donc que je suis le pasteur de neuf mille parias dont les trois quarts sont nouvellement convertis... et qu'en cette qualité, ils sont dépourvus de tout, excepté d'un estomac qui a toujours faim. Sont-ce des paresseux ? Oh ! non loin de là. Ils font tous les travaux des champs sous la surveillance des païens qui leur donnent à manger le jour où ils travaillent, et voilà tout. Vient le moment des chaleurs. Plus de moisson, plus de travail, et mes chers parias se sentent des démangeaisons à l'estomac.

« Depuis le mois d'avril ils n'ont que moi pour soutien. Ils viennent de loin, restent des journées entières, couchés devant ma maison. Pourquoi ? parce que souvent je n'ai rien à leur donner. Le lendemain ils sont encore là en grand nombre, et d'autres viennent les rejoindre. A leur vue, j'ai comme la fièvre, je lève les yeux au ciel, je cherche un appui sur terre sans le trouver. D'où vient cette persistance de leur part? C'est qu'ils savent qu'ailleurs ils n'ont rien à espérer.

<«Dans ces moments, je fais des folies, j'écris ici et là aux riches païens de m'envoyer des charrettes de menus grains au prix coutant. Ils ont pitié de moi et consentent à attendre pour le pavement. Mais enfin ce n'est pas tout que de distribuer des vivres; un jour arrive ou il faut payer. Ce sont alors d'autres angoisses.

« Vous le voyez, je suis très pauvre. Ajoutez à cela qu'il fait une chaleur tellement forte que les toits en chaume prennent feu en plein midi dans bien des endroits et on compte sur moi pour les rebâtir.

« J'ai fini; je vous prie de publier ma lettre. J'espère en vous. Je sens que je suis importun, que je ne devrais pas vous poursuivre ainsi. Traitez-moi comme on traite un petit enfant. La mère ne se fâche pas contre lui; au contraire, elle lui donne le sein quand il pleure. »

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Egypte. M. l'abbé Raboisson écrit du Caire le 22 décembre 1889, à la Vérité :

« Un véritable événement a eu lieu dans l'église patriarcale copte catholique de la Sainte-Famille au Caire, ce matin : la cérémonie de la collation du Pallium, envoyé par S. S. Léon XIII à Sa Beatitude Mgr Cyrille Macaire, patriarche catholique d'Alexandrie, et apporté par Mgr Sogaro, délégué extraordinaire du Saint-Siège ad hoc. Mgr Gaudenzio Buonfigli, vicaire apostolique des Latins à Alexandrie, y assistait avec toutes les notabilités ecclésiastiques et religieuses de la ville, tant des Latins que des Coptes.

Mgr Macaire a lu avec une grande émotion, qui s'est vite communiquée à l'assistance, une belle lettre pastorale et en_ suite à genoux devant l'autel, en langue latine, la profession de foi des évêques en accentuant les passages les plus caractéristiques pour exprimer son union absolue sans réserve à l'autorité de l'Eglise romaine et du Saint-Siège. Il en avait agi de même déjà pour sa lettre pastorale, particulièrement à ce

passage:

Et nous sommes heureux de dire aujourd'hui à la face du « monde, avec l'accent de la reconnaissance et de l'amour : "O sainte Eglise romaine, mère et maîtresse de toutes les «Eglises, mère qui avez toujours eu pour l'Eglise d'Alexandrie

une affection spéciale, que na droite se sèche si jamais je "Vous oublie, et que ma langue s'attache à mon palais si vous

« n'êtes pas en tout temps le principal objet de ma joie et de

« mon amour. »

« Un tel événement et une telle lettre pastorale, qui font concevoir d'aussi légitimes espérances pour l'union des Eglises en Orient, méritent d'être connus du monde catholique. »

Madagascar central. Le R. P. Colin, de la Compagnie de Jésus, nous écrit de Tananarive, le 12 novembre 1899 :

« Le 6 novembre dernier, on célébrait à la cathédrale catholique de Tananarive, un service funèbre pour le repos de l'âme des militaires et colons décédés à Madagascar, durant le cours de l'année.

<< Pendant plusieurs jours, nos troupiers avaient rivalisé de zèle pour l'ornementation extérieure et intérieure de l'église et jamais plus belle décoration n'avait produit un si grand effet.

« Deux pavillons aux couleurs nationales flottent au sommet des tours. Au-dessus de la porte d'entrée, de nombreux dra peaux, cravatés de noir, encadrent ces deux vers de VictorHugo, qui s'adaptent si bien à la circonstance :

Ceux qui, pieusement, sont morts pour la Patrie,
Ont droit qu'à leur cercueil la foule vienne et prie.

« Dans l'intérieur de l'église, une draperie noire lamée d'argent et tendue tout le long du trifolium, et en tombant, recouvre de ses plis les piliers du transsept ornés d'écussons et de drapeaux. Une immense croix de la Légion d'honneur se détache au-dessus du maître-autel: elle rappelle, hélas! le souvenir de nos officiers tombés sous les balles des Sakalaves ou victimes du climat.

« Sur les gradins du catafalque, on remarque des sabres entrecroisés, des trophées de revolvers, des couronnes, en bas, quatre mitrailleuses, des canons-revolvers, des faisceaux de fusils Lebel, des lances malgaches, le tout artistiquement disposé tout autour du monument.

« A 8 h. 1/2 le général Pennequin, suivi de tout son personnel militaire et civil, fait son entrée dans l'église au son lugubre des cloches sonnant le glas, tandis que la Marche funèbre de Chopin est exécutée par la musique du 13° régiment d'infanterie de marine. La colonie française est au complet; le consul anglais assiste en grande tenue à la cérémonie. Les soldats ont envahi les tribunes, car l'église regorge de monde. « Le R. P. Castets, supérieur de la mission de Tananarive, célèbre la messe avec diacre et sous-diacre, tandis que Mgr Cazet, revêtu de la chape, assiste au trône. Les chants sont exécu tés par les élèves des écoles de la mission dirigées par lee Frères et accompagnés par le grand orgue. Un adjudant de l'Etat-Major chante avec beaucoup d'onction les strophes du Dies ira, auxquelles le choeur répend en faux-bourdon. A la fin de la messe, l'Evêque donne l'absoute.

<«< Et, à ce moment, ma pensée se reporte sur les morts du corps expéditionnaire qui jalonnent la route de Majunga. Je les vois là, tout près du chemin, ces tumulus envaliis par la brousse, et que surmonte un pieu qui fut jadis une croix; et ce cimetière d'Andriba, sacrilègement profané par de farouches Fahavalos qui en ont dispersé les ossements, et ces tombes de Suberbieville, de Marololo, d'Ambato, à peine reconnaissables, nivelés tous les ans à la saison des pluies par les eaux du marécage.

«Nobles phalanges de héros dont Dieu seul reconnaît aujourd'hui les ossements! oh! reposez en paix !

« Et je pensais à ces braves soldats français en proie aux affres de l'agonie, que j'ai si souvent visités dans les infirmeries et les ambulances. Comme leurs grands yeux brillaient, lorsque je leur parlais du pays, de leur père, de leur mère, de leur première communion! Jamais, ils n'ont refusé le secours de mon ministère.

<< Nobles victimes qui, pour la France, avez conquis Madagascar au prix de votre vie et de votre sang, reposez en paix! »

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PROMENADES EN NORVÈGE

Par Mgr FALLIZE, vicaire apostolique

Un grand nombre de nos lecteurs avaient désiré voir paraître dans les Missions catholiques, un nouveau récit de Mgr Fallize, le sympathique évêque de la Norvège. Ce désir, nous l'avons communiqué à l'illustre prélat; avec sa bienveillance habituelle, il à bien voulu faire droit à notre prière. Nous commençons donc, aujourd'hui. la publication de ce manuscrit, d'autant plus intéressant qu'il est accompagné de splendides gravures représentant et les sites et les types de ce pittoresque pays.

Ainsi on prétend que les lecteurs des Missions catholiques ont goûté la Tournée pastorale en Norvège que j'ai eu l'honneur de leur décrire en 1895 et on m'assure qu'ils voudraient de nouveau lire quelques pages sur cet intéressant pays. Puisqu'ils ont l'amabilité d'accepter ma prose avec bienveillance, je m'incline, et je le fais avec d'autant plus de plaisir, que je compte parmi les lecteurs de généreux bienfaiteurs, à qui je voudrais apprendre l'usage que nous avons fait de leurs aumônes. Dès maintenant je puis leur dire que, depuis 1895, bien des choses sont modifiées en Norvège, et qu'en les remenant en maint endroit que nous avons visité ensemble, je pourrai avec une figure rayonnante leur dire : « Vous y reconnaissez-vous? C'est vous-même qui avez changé ma tristesse en joie. »

Cependant je ne vais pas mener le lecteur par tous les chemins que nous avons parcourus alors; ce ne sera plus une tournée pastorale continue, mais des promenades, auxquelles nous rattacherons les souvenirs et les observations qui se présenteront au passage.

En route donc, ami!

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à la tête de notre école supérieure des garçons, fondée depuis quelques années, et dirige nos nombreuses Unions, notre théâtre s'il vous plaît et toutes ces petites et grandes œuvres qui réunissent nos braves catholiques, noyés dans une mer de plus de 225.000 protestants. Vous y trouverez encore quelques jeunes prêtres qui, récemment arrivés de leur patrie, apprennent dans ma maison la langue et les usages et coutumes du pays, avant de se rendre à leurs postes, situés souvent à des centaines de lieues d'ici. C'est là que se nouent ces doux liens entre père et fils, liens qui font la force et la consolation des ouvriers apostoliques vivant isolés dans ce pays plus grand que l'Italie et évangélisé par deux douzaines de missionnaires catholiques! Ah! si vous lisiez les lettres que ces chers fils m'écrivent du fond de l'éternelle nuit de la Laponic, des bords de la Mer Glaciale, battue par les ouragans arctiques, des fjords débouchant sur l'Océan Atlantique, sur la mer du Nord et le Skagerak! Alors vous saisiriez mieux que jamais le sens profond des paroles du Psalmiste: Quam bonum et quam jucundum habitare fratres in unum ! »

Mais pardon, on frappe. Une voix discrète me demande : Faut-il préparer les chambres! Il me semble que ce sont de nouveau des amis des Missions catholiques. (1 Vous y êtes, petite sœur?

Et la voilà partie, la « petite maman des missionnaires »>, qui ne se fàche plus de ce nom, depuis que tant d'aimables lecteurs des Missions catholiques ont bien voulu faire honneur à mon invitation et accepter notre modeste hospitalité, et lui ont raconté combien en France on aime les missionnaires et la Norvège.

Vous êtes donc installés, et nous pouvons visiter à loisir nos établissements de Christiania.

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