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litiques, avait été secrétaire intime du duc de la Rochefoucauld, jusqu'à la catastrophe effroyable qui enleva ce bon citoyen à la France. Au moment où j'écrivais la biographie de Condorcet, je demandai à M. Feuillet de vouloir bien m'éclairer sur les bruits relatifs à la pension et à la demande du capital, qui étaient aussi venus à mes oreilles. Il me répondit sans hésiter qu'il n'en avait personnellement aucune connaissance. Ce renseignement négatif, et du plus haut prix, est corroboré par l'examen minutieux que j'ai fait du compte de tutelle de Mac O'Connor. Je trouve là des détails circonstanciés sur le passif et sur l'actif de la succession à diverses époques, sur la vente opérée par Condorcet, au moment de son mariage, d'une petite propriété située près de Mantes, nommée Denmont; sur l'acquisition qu'il fit, avec une partie du prix de la vente, de fermes près Guise, provenant de l'abbaye de Corbie. Il est mention dans ce compte, à l'article du passif, de mémoires très-peu importants de menuiserie, de serrurerie, etc. Je cite cette circonstance pour montrer avec quel scrupule, avec quelle minutie cet acte est rédigé. J'y trouve aussi dans l'actif l'origine, j'ai presque dit la filiation de petites rentes de 3, de 4 et de 5 francs.

Je n'y vois au contraire aucune trace d'une augmentation de revenu correspondant à 1786, année

du mariage de Condorcet, ni rien qui puisse faire croire à une augmentation de capital de cent mille francs, qui aurait eu lieu à l'époque de la rupture de mon confrère et du duc de la Rochefoucauld.

Il faudrait renoncer à toute logique pour supposer qu'après cette simple remarque il restera quelque chose de l'horrible calomnie qu'on a voulu faire peser sur la mémoire de Condorcet.

En parlant de la fuite de Condorcet, et de la tentative qu'il fit pour être admis à Fontenay-aux-Roses dans la petite maison habitée par M. et Mme Suard, M. de Lamartine a employé des termes qui seuls auraient rendu ces rectifications indispensables.

α

« Condorcet, dit l'auteur des Girondins, se refusa « généreusement aux instances qui lui furent faites, α de peur de traîner avec lui son malheur ET SON << CRIME sur le seuil qu'il aurait habité. »

Pour réprimer le mouvement d'humeur, j'ai presque dit de colère, que ce passage a soulevé chez moi, il n'a fallu rien moins que le souvenir des hautes qualités qui distinguent M. de Lamartine. De quel crime a-t-on voulu parler? Est-ce un crime privé, un crime public, un crime politique? Je ne trouve pas d'explication qui puisse atténuer la gravité de l'imputation odieuse, qui, dans son vague indéfini, n'est pas susceptible de réfutation. Je ne croirai jamais, par exemple, quoi qu'on en puisse dire,

que le culte de la forme ait dominé un homme de conscience et de talent, au point de lui faire tracer, dans l'unique but d'arrondir sa phrase, une expression outrageante, et qui ne devait jamais figurer à côté du nom glorieux de Condorcet. Cette expression ne peut être qu'un lapsus calami, ou une faute d'impression. Je laisserai à la loyauté de M. de Lamartine le soin de la retirer.

CORRESPONDANCE

ET

OEUVRES DIVERSES.

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