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des Bibliographes, de tous ceux enfin qui aiment ou cultivent la Littérature. Je leur offre aujourd'hui ce monument de notre gloire nationale, et je n'ai rien épargné pour le rendre digne des grands Ecrivains, qui onthonoré la France par leur génie et par leurs talens. Jusqu'ici les gens de Lettres n'ont eu, que trop souvent, pour historiens des apologistes sans pudeur, ou des critiques passionnés. Rarement leurs ouvrages, et même leur mémoire, ont trouvé des juges impartiaux et désintéressés. J'ai osé, avec plusieurs Bibliographes, me charger de la tâche pénible et délicate, d'apprécier les productions des Ecrivains français et de dégager les différens jugemens, qui ont été portés, de tout esprit de parti, de faction et de cotterie. Je n'ai point suivi l'exemple des auteurs, qui ne parlent des ouvrages des autres que pour trouver l'occasion d'annoncer leurs opinions ou leurs projets littéraires. Constamment attaché au but que je m'étais proposé, je n'ai vu dans chaque article de mon Dictionnaire, que les principaux traits de la vie d'un homme de lettres à conserver, les beautés ou les défauts de ses ouvrages à faire remarquer. Que l'auteur ait appartenu à une secte ou à une autre, ce n'est qu'une circonstance particulière de sa vie privée que j'ai dû recueillir et consigner; mais ce qui a dû m'occuper entièrement, c'est l'histoire de sa vie littéraire. Si j'ai fait quelque omission à cet égard, j'invite ceux qui liront mon ouvrage à m'adresser des observations sur les erreurs qu'ils trouveront. Je

déposerai, dans un supplément, toutes les remarques fondées qu'on m'enverra. Avec cette réunion de secours, j'espère que je parviendrai à donner à cette nouvelle Bibliographie un degré de perfection qu'aucun ouvrage de ce genre n'a encore atteint jusqu'ici parmi nous.

LOIN de redouter la critique, je l'appelle, je la sollicite, et j'en attends les plus heureux effets pour perfectionner mon travail.

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POUR rendre cet ouvrage complet, j'ai fait dans tous les Journaux un appel général aux gens de Lettres, et un appel particulier à ceux dont je connaissais la demeure. Qu'ils reçoivent ici le tribut de ma reconnaissance pour l'intérêt qu'ils ont pris au succès d'un ouvrage qu'ils ont regardé comme un monument national, et pour l'empressement qu'ils ont mis à m'envoyer les détails les plus précieux ! J'en dois aussi aux sociétés littéraires, dont les membres m'ont donné des preuves rares d'un zèle sans bornes.

APRÈS avoir annoncé le plan général de mon ouvrage, il me reste à le développer, pour le faire connaître sous tous ses rapports, et en montrer l'utilité.

Il n'est que trop vrai que toutes les Bibliographies qui ont paru en France sont imparfaites. Les unes

n'offrent, en effet, qu'une nomenclature de livres sèche et aride; les autres n'ont pour objet que d'indiquer les ouvrages rares et curieux. Les premières, n'étant pas complètes, ne peuvent servir à guider les recherches; les secondes ne peuvent convenir qu'à un petit nombre d'amateurs, de Bibliomanes riches, qui ont la passion des éditions rares ou magnifiques. Il semble que les auteurs de ces deux sortes d'ouvrages n'ont pas voulu s'occuper de donner à la France sa véritable bibliographie, celle qui peut satisfaire tous les goûts. J'ai donc cru rendre un service en réunissant, dans une Histoire complète des Siècles Littéraires de la France, le dépôt de toutes les richesses que nous possédons en ce genre.

Si l'Histoire des hommes célèbres pique toujours la curiosité, c'est sur-tout la Biographie des grands écrivains, dont nous avons été les contemporains, qui a droit d'intéresser, non seulement les gens de Lettres, mais encore toutes les classes de lecteurs; car il n'est personne qui n'aime à connaitre la vie privée des auteurs célèbres, et à entrer, pour ainsi dire, dans la société intime de ces génies rares qui, en s'immortalisant, ont illustré leur patrie. C'est aussi pour satisfaire ce goût naturel et général, que je n'ai rien négligé pour offrir tout ce qui peut à-lafois intéresser dans la vie de nos grands écrivains, et faire connaître leur caractère, leurs vertus et leurs faiblesses.

J'AIME à croire que mon ouvrage ne, sera pas indigne des suffrages des gens de lettres, et des Bibliophiles éclairés. Si je suis assez heureux pour les obtenir, je recevrai la récompense la plus flatteuse de mon travail.

LES

LES

SIÈCLES LITTÉRAIRES

DE LA FRANCE.

lard la rendit bientôt sensi-
ble. L'attachement mutuel du
maître et de l'écolière excitant
les cris du public, Fulbert
voulut rompre leur liaison en
les séparant ; mais il n'était
plus tems: Heloise portait
dans son sein le fruit de son
amour. Abailard l'enleva et
la conduisit en Bretagne, où
elle accoucha d'un fils qu'on
nomma Astrolabe. Il fit pro-
poser à Fulbert d'épouser
Héloïse
, pourvu que leur
mariage demeurât secret. Les
deux époux reçurent la béné-
diction nuptiale; mais l'oncle
ne crut pas devoir faire un
mystère d'une chose qui ré-
parait l'honneur de sa niece.
Héloïse, à qui la prétendue
gloire d'Abailard etait plus
précieuse que la sienne pro-
pre, nia leur union avec ser-
inent.. Fulbert, irrité de cette
conduite, la traita très-dure-
ment. Son époux la mit à
l'abri de son ressentiment,
dans le monastère d'Argen-
teuil, où elle avait été élevée.
Fulbert, s'imaginant qu'A-
bailard voulait faire Heloise

ABAILARD OU ABÉLARD, (Pierre) naquit à Palais près de Nantes, en 1079. Il mourut au monastère de St.-Marcel près de Châlons-sur-Saône, en 1142, âgé de 63 ans. La dialectique était la science pour laquelle il se sentait le plus d'attrait et de talent. Attiré à Paris par ce penchant, il devint le docteur à la mode. Il joignait aux talens de l'homme de lettres, les agrémens de l'homme aimable. Mais, s'il fut généralement admiré des hommes, il ne plut pas moins aux femmes. Il y avait alors à Paris une jeune fille de qualité, pleine d'esprit et de charmes, nièce de Fulbert, chanoine de Paris. Son oncle, qui l'aimait tendrement, entretenait la passion qu'elle avait de devenir savante. Abailard trouva, dans les dispositions de l'oncle et de la nièce, un moyen de satisfaire la passion qu'Héloïse lui avait inspirée. Il proposa à Fulbert de le prendre en pension, sous prétexte qu'il aurait, plus de tems pour l'instruction de son éleve. Abai-religieuse pour s'en debar

Tome I.

I

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