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trouve singulièrement simplifié. C'est à ces auteurs que nous renverrons le lecteur curieux de plus amples détails. Mais nous aurons toutefois recours à leur érudition pour compléter, le cas échéant, les quelques notes qui feront l'objet des lignes suivantes :

NAINS

Dans l'antiquité, à l'époque de la formation des premiers empires, les disgraciés de la nature étaient relativement rares: aussitôt, en effet, que l'enfant était né, on le portait, en Grèce, aux anciens de la cité s'il ne présentait aucune conformation vicieuse, il était déclaré apte à être élevé. S'il était contrefait, il ne pouvait plus reparaître au foyer de la famille, on le transportait au bord d'un gouffre auprès du mont Taygète.

:

A Rome, si l'enfant venait au monde avec une difformité, les parents ne devaient l'exposer avant que les voisins eussent donné leur assentiment. En Gaule, en Scandinavie, les nouveaunés mal conformés étaient impitoyablement sacrifiés.

Mais peu à peu on se relâcha de cette sévérité si contraire aux lois de la nature tout d'abord on les éleva dans l'ombre et le mystère: puis pro1. Dion Halic. - 16, 2, 15.

gressivement on les accepta et ils eurent leur place au soleil. Sous les empereurs quelques-uns de ces infortunés furent des objets de curiosité, traités avec sollicitude et aussi vendus fort chers. On s'en divertissait et le plus souvent ils prenaient place entre le chien favori et la bête rare amenée à grands frais des pays lointains. Alors on oubliait de voir en eux des témoignages de la colère céleste Sénèque confirme cette assertion dans un passage de ses controverses 1.

Parmi les êtres qui servirent de jouets à la cour, nous trouvons tout d'abord les nains, êtres humains dont les caractères physiques et psychiques, s'ils n'ont pas toujours été définis ont cependant toujours été entrevus et étudiés dans les limites des connaissances de l'époque. En interrogeant l'histoire aussi loin qu'on peut, on trouve des traces de leur passage auprès des hauts personnages et, de nos jours encore, nous voyons la coutume d'avoir des nains près de soi à différents titres, conservée non seulement dans les pays barbares, peu connus, mais même parmi les plus avancés en civilisation.

Mais a-t-il existé, existe-t-il encore réellement des peuples nains? La question est assez intéressante, ce nous semble, pour mériter de nous y arrêter quelques instants :

1. Liv. X, Déclam. IV.

NAINS DANS L'ANTIQUITÉ

pygmées

Lorsqu'on parcourt les auteurs anciens Homère, Hérodote, Ovide, Juvénal, Pline, Aulu-Gelle, Pomponius Mela... et tant d'autres, lorsqu'on lit les récits des anciens voyageurs, on est étonné de voir signalée presque à chaque pas l'existence d'une race d'hommes remarquable par sa petite taille.

Les Pygmées étaient connus d'Homère, qui, dans le chant III de l'Iliade, dit : « Ainsi monte jusqu'au ciel la voix éclatante du peuple ailé des grues, lorsque fuyant les frimas et les torrents célestes, elles traversent à grands cris l'impétueuse mer, et, portant la destruction et la mort à la race des Pygmées, livrent, en descendant des airs, un combat terrible... » Tableau >> Tableau que Juvénal complétera en disant : «Quand le nuage sonore des oiseaux de Thrace vient à fondre subitement, le Pygmée, muni de ses petites armes, court au combat: mais, incapable de résister à l'ennemi, bientôt l'impitoyable grue l'enlève dans les airs entre ses ongles recourbés. Si l'on voyait chez nous un pareil spectacle, on en rirait; chez eux, où le plus grand de la cohorte n'a pas plus d'un

pied de hauteur, personne n'en rit quoique la même scène se répète souvent... '. »

1

A côté de ces fictions reproduites par tous les poètes qui se sont succédé, on trouve cependant des relations qui revêtent un plus grand cachet d'authenticité, laissées par les historiens et les géographes de l'antiquité. Ils ne parlent pas de Pygmées, mais d'une race qui habiterait les déserts de Lybie. «<et disait tout récemment M. de Quatrefages 2, le récit de ces auteurs concorde trop bien avec les découvertes modernes pour que l'on en puisse mettre en doute la réalité. On sait que les zones géographiques indiquées par les Nasamons se retrouvent encore et que le fleuve dont ils ont révélé l'existence est le Djoliba ou Niger, que l'on a cru tour à tour être le Nil lui-même ou un affluent du lac Tchad, avant que Mungo-Park, Caillé, Clapperton, les frères Lauder, etc., nous en eussent fait connaître le véritable cours...

Avec Ctésias, voyageur grec contemporain de Xénophon, nous retombons dans la fable et le merveilleux :

« Il y a, dit-il, au milieu de l'Inde, des hommes noirs qu'on appelle Pygmées. Ils parlent la même langue que les Indiens et sont très petits. Les plus grands n'ont que deux coudées; la plu

1. Juvénal. Sat. XIII, trad. Dussaulx.

2. De Quatrefages, Journal des savants, février 1881.

part n'en ont qu'une et demie. Leur chevelure est très longue; elle leur descend jusqu'aux genoux et même encore plus bas. Ils ont la barbe plus grande que tous les autres hommes ; quand elle a pris toute sa croissance, ils ne se servent pas de vêtements: leurs cheveux et leur barbe leur en tiennent lieu. Ils sont camus et laids. Leurs moutons ne sont pas plus gros que des agneaux; leurs bœufs et leurs ânes le sont presque autant que des béliers. Leurs chevaux, leurs mulets et toutes les autres bêtes de charge ne le sont pas plus que des béliers. Les Pygmées accompagnent le roi de l'Inde : il en a trois mille à sa suite. Ils sont très justes et se servent des mêmes lois que les Indiens. Ils vont à la chasse du lièvre et du renard. Au lieu de chiens, ils se servent pour cette chasse de corbeaux, de milans, de corneilles et d'aigles1».

Strabon, seul parmi les auteurs de l'antiquité, a nié l'existence d'une race de nains: « On sait, dit-il, que toute contrée reléguée aux extrémités de la terre habitée, par cela seul qu'elle touche à cette zone inclémente que l'excès de la chaleur ou du froid rend inhabitable, se trouve vis-à-vis de la zone tempérée dans un état de désavantage ou d'infériorité marquée. Or, cette infériorité res

1. Charton. Les voyageurs anciens et modernes, t. I. 2. Strabon. Géographie. trad. A. Tardieu.

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