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reillement, nubere était employé (Tertullien, St-Jérôme), pour signifier se marier, en parlant de l'homme. Les Provençaux et les Gascons emploient de même, mais avec deux terminaisons (1), lou nòvi, la novio, lou nobie, la nobio:

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Le marié seul est pâle comme un mort.

L'u tient la place de l'o étymologique dans turment (tourment), de tormentum, dans budèt (boyau), de botellus.

Turment était usité dans l'ancien français. On lit dans la Vie de St Thomas de Cantorbery :

Li cors en est purris, et l'aneme est en turment.
Son corps est pourri et son âme est en enfer.

Dans Ossau (vallée d'), c'est l'o qui a été substitué à l'u. On écrivait anciennement Ussau, de ursi saltus (bois de l'ours). Cette vallée a pour armoiries un arbre entre un

(1) Le béarnais les avait autrefois on trouve dans un Registre des délibérations de la communauté de Bielle, vallée d'Ossau (XVIe siècle): la nobia, lou nobi.

ours et une vache qui se dressent, et, pour devise: Ussau et Bearn, viva la vaca (Ossau et Béarn, vive la vache.) Cette étymologie d'Ossau nous paraît préférable à celle qu'en a donnée Fauriel; il prétend que ce mot dérive du basque, oso, osso (voir Gaule Mérid., 11). Voici le commencement d'une charte de paix entre Ossau et Aspe (1270, Arch. des Bas.-Pyr.):- Hæc est charta pacis quæ est inter homines ursi saltus et inter homines, etc., etc.

L'italien a tiré facolta (faculté), de facultas, molto (beaucoup), de multum, popolo (peuple), de populus, sospetto (soupçon), de suspectum, et homero de humerus; Henri Estienne disait dans son livre de la Précellence du langage français « Les Italiens ont fait le poète Homère de ce que les Latins nomment humerus, quand ils veulent signifier ce que nous appelons espaule.»

:

L'espagnol a boca, lograr, porpola (bouche, gagner, pourpre), de bucca, lucrari, purpura.-Porpola se trouve dans le Poème du Cid.

Des changements analogues se sont opérés dans le passage de plus d'un radical du latin au français. Dans la chanson de Roland, on trouve dulor, dolur (douleur), de dolor, plurer, de plorare: plurer des oilz (pleurer des yeux); nous écrivons douce, sommes, sur hommes; anciennement, on écrivait dolce, sumes, sor, humes de dulcis, sumus, super homines:

Amors est dolce et amare.

Ch. du Moy.-Age.

Lont sumes de Baufort, si sumes an lor terres.

FLOOVANT (1).

Le Turc feri Rollant sor son escu.

OTINEL (2).

(1) Floovant, chanson de geste du XIIe siècle.

(2) Otinel, l'une des dernières productions de notre poésie héroïque du moyenâge, n'est pas de beaucoup postérieur à la première moitié du XIIIe siècle.

Li reis Marsilus esteit en Sarraguce
Allez en est en un verger suz l'umbre
Sur un perrun de marbre bloi se culche,
Envirun lui plus de vint milie humes.
Ch. de Roland.

Abundantia, umbra, unda, undecimus, ont fait abondance, ombre, onde, onzième; mais Rabelais écrivait abundance, unziesme; et Montaigne : « Le menton commence à s'umbrager.» Nous avons encore jonc, de juncus, onction, de unctio, orme, de ulmus, ongle de ungula; oncle vient de unculus, partie de avunculus.

L'o figure dans bois, bosquet, et l'u dans bûche, débusquer, embûches; tous ces mots sont évidemment de la même famille; rac. allem. busch; bas lat. boisia.

De la rac. pui, lat. podium, viennent l'anc. esp. pujar, le port. pojar, l'ital. poggiare, notre puya, et l'anc. fr. puier (gravir, monter):

Deseure une montaigne ala moult tost puier.

Baud. de Seb (Gloss. rom. de Em. Gachet).

Voici, en dehors du latin, des exemples bien singuliers

de la permutation des voyelles, o, u:

Au xi et au xin siècles, on écrivait Mahomet :

Baron, de Mahomet soiez vos honoré!

(Gui de Bourgogne (1).

Par Mahomet! cestui avons perdu,

Ce est Rollans qui le nos a tolu.

OTINEL.

Au xvre siècle, on écrivait Mahumet: - «Un Espagnol de Grenade relégué en Afrique pour le mahumétisme (SAT.

(1) Gui de Bourgogne, chanson de geste; XIIe siècle.

Ce poème et les deux mentionnés aux notes 1 et 2 de la page précédente forment un volume de la Bibliothèque Elzévirienne; Edit. Jannet.

MÉNIPPÉE.)

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Mahumet second, se voulant desfaire de

son frère, y employa l'un de ses officiers (MONTAIGNE.) » Depuis, on est revenu à Mahomet: - « Je vois partout le mahométisme, quoique je n'y trouve point Mahomet (MONTESQUIEU; Lett. Pers. xxxv.).

Dans le pays basque, on écrit Urrugne (nom de commune), et l'on prononce Orrogne.

V. LESPY.

LA

COMMUNE DE MAUROUX
(ARRONDISSEMENT DE LECTOURE)

Son Administration Municipale jusqu'en 1789.

L'an 1294 occupe dans les annales de Mauroux une place importante. Entraînés par le mouvement général qui, depuis deux siècles, avait successivement apporté d'efficaces changements dans l'existence de la plupart des villes et des villages de France, les seigneurs de Mauroux accordèrent à leurs vassaux une charte de coutumes qui donna naissance à l'organisation communale et en régla les conditions et le mode d'exercice. Cette charte, datée de Mauroux, le 2 septembre 1294, fut octroyée par Vesian de Lomagne, Raymond de Léaumont, Arnauld de Léaumont, Raymond de Séguenville et Arnauld Guilhem de Mauroux, cosseigneur du lieu.

Nous donnerons plus tard le texte de ce document.

L'existence de la commune fut authentiquement reconnue et organisée. Quatre consuls pris parmi les habitants, désignés par leurs concitoyens, mais nommés par les seigneurs, avaient l'administration de toutes les affaires communales. Il leur appartenait de faire réparer les rues, les chemins publics, les fontaines et les ponts; de faire toute sorte de règlements dans l'intérêt de la communauté après entente avec les seigneurs ou leurs baillis; de constituer procureur et syndics; en un mot, tous les intérêts municipaux leurs étaient confiés. S'il arri

vait que les revenus ordinaires mis à leur disposition par les coutumes ne fussent pas suffisants, ils avaient droit d'y pourvoir au moyen d'impositions sur le peuple et habitants du lieu Personne n'en était exempt: Et les étrangers, eux-mêmes, qui avaient des propriétés dans l'endroit, sans y avoir leur domicile, étaient obligés de contribuer proportionnellement à ce qu'ils possédaient, de la même manière que les indigents. En cas de refus de leur part, les consuls portaient leur plainte au bailli des seigneurs qui avaient recours, s'il était nécessaire, aux mesures de rigueur pour réduire les récalcitrants au devoir.

Les consuls n'étaient en charge que pour un an. La charte des coutumes portait que la nomination aurait lieu, chaque année, le dimarche de l'octave de l'Ascensión. Mais cette clause ne tarda pás à subir des modifications. La charte laissait aussi leur nomination aux seigneurs. Néanmoins, ce droit ne fut jamais appliqué par la maison de Léaumont de Puygaillard qui absorba postérieurement presque toute le seigneurie de Mauroux, après que les autres familles cossignataires des coutumes se furent éteintes. Il est vrai qu'alors l'on trouve encore pour cossignataire de Mauroux M. de Grossolles-Flamarens, mais jamais il n'est question de lui quand il s'agit de la nomination des consuls.

La charte ne s'explique pas sur la manière dont cette élection était faite, mais il est facile d'y suppléer au moyen de documents que nous fournissent les actes des délibérations tenues à cet effet. Les plus anciens, qui remontent déjà à près de trois siècles, attestent qu'à cette époque le choix des consuls se faisait depuis un temps immémorial, non pas comme le portent les coutumes, le dimanche de l'octave de l'Ascension, mais bien le premier dimanche de septembre.' Encore ne peut-on pas dire que leur nomination se fît définitivement ce jour-là : seulement les consuls en exercice publiaient et affichaient à la porte de l'église une liste sur laquelle ils avaient inscrit, au nombre de huit, les candidats qu'ils jugaient les plus dignes de remplir la charge consulaire. Si les personnes ou quelqu'une des personnes portées sur ce tableau ne convenaient pas à la généralité de la communauté, on leur en substituait celles qui paraissaient les plus populaires. Dans le cas contraire, à l'expiration du délai voulu par l'usage (les listes étaient publiées pendant trois dimanches consécutifs), les candidatures étaient ensuite soumises au seigneur ou à son bailli, et le seigneur était tenu de choisir les magistrats urbains parmi les huit noms qu'on lui présentait.

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