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jetées pour les membres de la section. M. de Falbaire fait part de la gracieuse invitation de M. Agard, directeur des Salins du Midi et l'un de nos vice-présidents, qui veut bien mettre à la disposition des membres du Congrès un bateau à vapeur, pour la visite des Salins de Berre, de la fabrique d'engrais alcalins et de l'étang.

Le jour de cette excursion est fixé à demain dimanche, 16 décembre.

M. Degros, membre du Conseil général de la Drôme, émet sur l'ensemble des questions agricoles, d'un intérêt général, qui se trouvent inscrites dans les premiers numéros du programme, une série de vœux importants dont il dépose la formule sur le bureau.

M. le Président lui donne acte de ce dépôt, et annonce que les vœux exprimés par M. Degros seront discutés en temps opportun.

L'ordre du jour appelle l'examen de la deuxième question supplémentaire du programme, ainsi intitulée: Des orphelinats et asiles agricoles, et de l'extension à leur donner.

M. de Falbaire présente les considérations suivantes :

L'utilité des orphelinats n'est plus à démontrer. Si la société doit secourir et élever les enfants qui n'ont plus de parents, il faut que cette éducation profite à l'enfant qui la reçoit et à la société qui la donne. Aucune règle fixe ne saurait donc prévaloir; tantôt il y aura lieu de diriger les orphelins vers l'industrie, dans d'autres circonstances c'est à l'agriculture qu'il faudra les destiner.

En France, l'industrie trouve partout les ouvriers dont elle réclame le concours, il y a même dans certains départements plus d'offre que de demande. Pour la culture des champs, cette même concurrence n'existe pas; le manouvrier est sûr de trouver du travail, et dans des conditions qui lui sont avantageuses. Le pays a donc intérêt à élever les orphelins en vue de l'agriculture. Seulement, nous ne devons pas dissimuler

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notre pensée; jusqu'à présent, il a été plus facile de faire prospérer des orphelinats créés dans les villes. Les cotisations sont plus fortes, les dévouements sont plus ardents au milieu des habitants des villes; néanmoins', si la charité privée est sollicitée, elle est assez puissante en France pour répondre à ce nouvel appel. -Confiée à des religieux, la cause des orphelinats serait gagnée.

L'Etat leur accorderait des subventions, les départements leur enverraient les enfants qui sont à leur charge. Le succès serait complet, si on plaçait les élèves dans les fermes qui environneraient les orphelinats, dès qu'une place convenable leur serait offerte. Dans ce nouveau milieu, ils termineraient leur éducation agricole et apprendraient que l'homme qui veut vivre par son travail trouve toujours l'emploi de ses facultés.

Le Congrès, ce me semble, devrait émettre un vœu pour demander la création d'orphelinats agricoles; le succès des Fermes-hospices ou fermes de bienfaisance, qui existent en Belgique, doit encourager à créer de semblables établissements en France.

La section applaudit aux idées exprimées par M. de Falbaire, et émet un vou conforme.

M. Monier, président du Comice agricole d'Aubagne, a ensuite la parole sur la question n° 7, ainsi conçue : Quels sont les impôts directs ou indirects dont la réforme serait le plus utile à l'agriculture?

L'honorable membre pense qu'au premier rang des impôts directs ou indirects, qui grèvent le plus lourdement l'agriculture, on doit placer l'impôt sur les boissons. Ce serait celui dont la réforme serait le plus utile, à cause surtout des vexations sans nombre que sa perception impose aux viticulteurs. Après avoir énuméré les formalités de tout genre qui entravent les propriétaires de vins, M. Monier examine les charges résultant des droits de mutation et de succession, droits qui obèrent les cultivateurs au point d'empêcher pour longtemps les amélio

rations nécessaires à leurs propriétés. Il termine en demandant la réduction de tous ces droits.

M. Degros appuie les conclusions de M. Monier. La réforme des impôts lui paraît de toute justice, puisque le libre échange est adopté et que les pays étrangers, faisant concurrence à notre agriculture, jouissent de conditions bien plus favorables et ont des charges moindres que les

nôtres.

M. de Clappier émet le vœu que la disposition de la loi de 1824, soumettant à un droit fixe de 4 fr. tout échange d'immeubles ruraux, soit rétablie. Cette loi avait produit d'heureux résultats, dit un autre membre; mais, comme l'a exprimé M. Raudot, « les employés de l'enregistrement, fort peu agriculteurs, en demandèrent l'abrogation, sous prétexte qu'elle diminuait les recettes du trésor et favorisait la fraude, et elle fut rapportée en 1834, sans qu'il se trouvât personne dans les conseils du gouvernement ni dans les Chambres, pour protester contre une mesure si évidemment anti-agricole (1). »

Le vœu proposé par M. de Clappier est adopté par l'assemblée.

M. le comte d'Agoult, délégué de la société d'agriculture de l'Isère, a ensuite la parole et s'exprime en ces termes:

Je viens proposer à l'assemblée d'émettre un vou en faveur d'une meilleure répartition de l'impôt foncier, en demandant d'abord au gouvernement de tenir compte dans cette répartition des charges des syndicats, là où ces charges ont une certaine importance et doivent avoir une certaine durée.

Car ce sont des frais de culture, et la loi dit que l'impôt foncier est un prélèvement sur le revenu net.

Il est inutile de répéter ici les exemples bien connus de l'inégalité choquante qu'entraîne la répartition actuelle.

(1) De l'Agriculture en France, Correspondant, 1857. Le même savant économiste a demandé pour les mêmes motifs qu'on exemptât des énormes droits de vente les acquisitions de parcelles, faites par un propriétaire ayant des immeubles contigus.

Je crois le moment venu de faire une péréquation générale de l'impôt. Les campagnes sont écrasées, le sud-est surtout; on y paie parfois un impôt égal au quart du revenu. Les villes au contraire, sont peu chargées, et à Paris on paie seulement. le vingtième du revenu. Cette inégalité est contraire à la loi, à la justice et à cette première règle de l'économie publique et de bon sens, qui recommande de faire contribuer la richesse en allant la chercher où elle est.

M. Degros croit que les mesures sollicitées par le préopinant aggraveraient la situation agricole au lieu de l'améliorer.

M. Monier est d'une opinion contraire et pense que certaines localités, actuellement trop imposées, ont droit à une répartition plus équitable. M. Degros, en répliquant, ne conteste pas la justesse de l'observation; mais il établit les conditions dans lesquelles devrait s'effectuer une mesure aussi grave: il faudrait que la répartition de l'impôt eût pour base la valeur réelle de la terre.

M. de Falbaire, président du Comice agricole d'Aix, expose que ce Comice, sur la proposition d'un de ses membres, M. Béraud, a émis dans l'enquête agricole un vœu digne d'être pris en considération et adopté par le Congrès. Ce vœu tendrait à ce que, dans les successions, la perception des droits de mutation s'effectuât sur le vaillant net, c'est-à-dire défalcation faite des dettes hypothécaires.

M. Béraud demande que le vœu déjà formulė par lui soit modifié en ce sens que la défalcation serait opérée, non-seulement pour les dettes hypothécaires, mais encore pour toutes les dettes chirographaires dont il serait possible de prouver l'existence.

M. de Falbaire regarde comme juste cette extension donnée à la mesure; mais il craint qu'en pratique elle n'ouvrit une porte à la fraude. Dans l'intérêt de l'agri

culture, il convient de ne pas trop se montrer exigeant, et il importe d'obtenir tout d'abord la défalcation des dettes hypothécaires. C'est le point sur lequel il convient d'insister.

M. Rey-Lescure, de Montauban, a la parole et développe en ces termes les considérations suivantes :

En voyant grossir les budgets, on est naturellement porté à se demander, avec M. de Parieu, d'où ils viennent et où ils vont. La seconde de ces questions ne doit pas beaucoup préoccuper notre curiosité......, du moins ici; la première est au contraire l'objet principal de ce travail.

Tout le monde sait avec quel à-propos financier, avec quelle autorité scientifique et quelle hauteur de vues, M. le viceprésident du Conseil d'État a rempli la tâche difficile de faire connaître avec précision la situation et la puissance de gisement de ce combustible social qu'on appelle l'impôt. Le troisième volume de son histoire des impôts est en grande partie consacré à l'impôt noble entre tous, parce qu'il touche de tous les côtés au droit civil, je veux dire à l'enregistrement. Malgré cette noblesse de robe et d'épée de l'enregistrement bien établie, puisqu'il est toujours un peu réquisitorial et ferrailleur, armé d'arguments juridiques et de décimes de guerre, puisqu'il est à la fois le payeur des armées et le client de la Cour de Cassation; malgré cette noblesse qui doit le rendre chatouilleux sur le point d'honneur, je me permettrai de lui adresser poliment, toujours avec M. de Parieu, quelques remarques, non pas sur la loyauté de ses intentions ou de ses procédés (car elle est hors de cause et je serais ici au besoin pour lui prêter le bien faible mais bien sincère appui de mes souvenirs), mais sur les préjugés économiques qui entretiennent chez lui les habitudes aujourd'hui fâcheuses d'une trop grande inflexibilité.

Créé dans l'intérêt du justiciable, exagéré par la féodalité, absorbé et délocalisé par l'État au détriment de la propriété foncière, il est arrivé, comme on l'a dit avec tant de justesse, à faire dans des terres déjà très sèches un impitoyable et dé

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