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ment; mais, il est funeste pour les exploitations rurales proprement dites, parce qu'il prive l'agriculture des capitaux dont elle a besoin pour son perfectionnement, enfin il est nuisible à l'élève du bétail.

D'une manière générale, on peut dire que, même dans les circonstances les plus favorables le morcellement doit avoir des limites, car il ne saurait arriver sans de graves inconvénients jusqu'à la pulvérisation de la propriété.

Pour les bois, le morcellement est une des causes les plus énergiques de leur rapide et inquiétante diminution.

Une forêt est une unité formée d'éléments solidaires, que l'on ne peut séparer sans désorganiser la propriété même et sans amoindrir sa production.

Un champ peut être divisé en deux, cinq, dix parties; chacune de ces parties constituera un nouveau champ dont la culture et l'exploitation ne présenteront aucunes difficultés.

Dans la propriété boisée, il n'en est point ainsi.

Soit une forêt exploitée à la révolution de 20 ans. Cette forêt sera composée de vingt coupes, dont les bois seront âgés de 1, 2, 3......... 20 ans. La seule coupe âgée de 20 ans est exploitable, les autres n'ont qu'une valeur d'avenir. Si cette forêt est partagée en deux parties égales, on aura un lot de bois de 1 à 10 ans et l'autre de bois de 14 à 20 ans. Le propriétaire du premier lot devra donc attendre 10 ans avant d'exploiter ses bois, et le propriétaire du second lot devra modifier l'assiette des coupes. Dans les deux cas, il y aura une perturbation qui tournera au détriment de la forêt, c'est-à-dire que le premier propriétaire, ne pouvant ou ne voulant attendre, exploitera ses bois à 10 ans, et le second sera très fortement tenté de continuer l'exploitation des coupes telles qu'elles sont assises sur le terrain, quitte à n'avoir plus à la révolution suivante à n'exploiter que des bois âgés de 10 ans.

Si ce bois est divisé en trois, quatre, cinq parties, la perturbation est encore plus complète, et les propriétaires des lots composés des coupes les plus jeunes seront presque inévitablement conduits à renoncer à la culture forestière et à défricher le sol.

On ne peut songer d'ailleurs à partager les forêts entre les

héritiers, de manière à donner à chacun des bois de chaque âge. En effet, il faudrait diviser chaque coupe entre tous les ayants-droit, et composer par conséquent les lots de chaque héritier d'autant de parcelles isolées qu'il y a d'années dans la révolution.

C'est-à-dire que la forêt, citée plus haut comme exemple, se transformerait en supposant deux héritiers seulement en quarante propriétés enchevêtrées les unes dans les autres et d'une exploitation presque impossible.

Il est évident que les nouveaux propriétaires s'empresseraient de détruire de semblables bois et d'y substituer des cultures quelconques.

En conséquence, ou bien il faut introduire une exception pour les bois dans la loi sur les successions, ou bien il faut reconnaître que, la propriété forestière privée étant fatalement menacée dans son avenir, il est du devoir impérieux de l'Etat de conserver et même d'augmenter son propre domaine forestier.

Au sujet de la même question du programme, M. de Falbaire développe les considérations suivantes :

Il n'existe pas de problème plus discuté aujourd'hui que celui qui est relatif à l'extrême division parcellaire de la propriété rurale et aux exigences, souvent anti-économiques, de la loi des partages dans les successions. Il importe au Congrès d'émettre un vœu sur ce point. Il y a lieu de se demander si le Code Napoléon lui-même n'offre pas, dans quelques-unes de ses dispositions, un commencement de solution du problème.

L'article 832 pose d'abord comme règle (et ceci est essentiel à constater), que, dans la formation des lots, on doit éviter, autant que possible, de morceler les héritages et de diviser les exploitations. Il est vrai que la seconde partie de l'article porte ce qui suit : « Il convient de faire entrer dans chaque lot, s'il se peut, la même quantité de meubles, d'immeubles, de droits ou de créances de même

nature et valeur. » Mais, il ne demeure pas moins établi que l'extrême division des immeubles ruraux, aboutissant à rendre trop difficile leur exploitation, n'entre pas dans le vœu de la loi. Cela doit être mis en pleine évidence, en attendant les réformes qui devront suivre en cette matière les exigences de l'ordre économique, telles qu'elles se manifestent en France dans l'intérêt de la culture intensive et pour la plus grande somme de production.

Il y a une autre disposition du Code, dont on use malheureusement fort peu: c'est celle de l'article 1075. Elle est ainsi conçue: « Les père et mère et autres ascendants pourront faire, entre leurs enfants et descendants, la distribution et le partage de leurs biens. » Il y aurait là un correctif puissant aux conséquences de l'état de morcellement dont on se plaint. Ces partages n'ont pas seulement pour but de prévenir les dissensions entre les enfants. Ils permettent d'éviter les inconvénients souvent très graves d'une licitation. Il est à regretter que la jurisprudence des tribunaux aboutisse à empêcher ces partages ou à en détruire les heureux effets, en exigeant, sous peine de nullité, que les lots soient composés d'objets de même nature, à moins que le fractionnement de certains biens ne soit absolument impossible. Il serait désirable, au contraire, que cette liberté du père de famille fût étendue à des limites assez larges pour s'exercer efficacement. La quotité disponible serait toujours la même, mais, au moins, l'initiative paternelle pourrait se manifester dans des conditions qui répondraient mieux aux intérêts bien entendus de l'agriculture, aux convenances et aux situations respectives des enfants.

Ces conclusions sont adoptées par l'assemblée.

M. le Président ouvre enfin la discussion sur la dernière question mise à l'ordre du jour de la séance et qui est ainsi conçue: De la représentation de l'agriculture.

M. de Falbaire prend la parole pour demander que les

intérêts agricoles soient représentés, protégés et défendus par un Conseil général de l'agriculture, ayant son siége à Paris auprès du Ministère de l'agriculture, du commerce et des travaux publics, et qui se composerait de deux délégués par département, élus par des délégués cantonaux qui seraient eux-mêmes désignés par les propriétaires, fermiers et métayers de chaque commune.

M. le Président fait remarquer que la représentation élective de l'agriculture a déjà été organisée par une loi du 20 mars 1851 qui n'a jamais été mise à exécution, un décret réglementaire du 25 mars 1852 ayant disposé que les membres des Chambres consultatives d'agriculture seraient nommés par les Préfets.

Il propose d'émettre le vœu que cette loi soit remise en vigueur, et fasse ainsi revivre le principe d'élection qui assure la force et l'indépendance de cette représentation. L'assemblée s'associe unanimement à cette proposition.

Les vœux à émettre sur les autres articles, qui ont fait l'objet des précédentes discussions, sont expressément réservés et seront soumis dans une prochaine séance aux délibérations de l'assemblée.

M. Monerie de Cabrens, un des secrétaires, est chargé de rédiger le compte rendu analytique, destiné à être lu en séance générale.

La deuxième section du Congrès ayant été autorisée à se réunir désormais à 9 heures au lieu de 10, à cause du nombre et de l'importance des questions à traiter, s'ajourne à demain 9 heures du matin.

La séance est levée à midi.

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Séance du 15 décembre.

SOMMAIRE.-Orphelinats agricoles. Observation de M. de Falbaire.Quels sont les impôts directs ou indirects dont la réforme serait le plus utile à l'agriculture? Observations de MM. Monier, Degros, de Clappier, comte d'Agoult, de Falbaire, Béraud. Note de M. ReyLescure. Quel est le mode de jouissance des terrains communaux le plus égal pour les habitants, le meilleur pour les progrès de l'agriculture? Notes de M. du Guiny. · Différences entre l'agriculture du Nord de la France et celle du Midi. Mémoire de M. de Rey.

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- Carte agronomique du département des Bouches-du-Rhône, par M. Bonnet.

La séance est ouverte sous la présidence de M. de Larcy, à 9 heures du matin, conformément à la décision prise la veille.

Un membre regrette qu'en devançant ainsi l'ouverture, fixée tout d'abord à 10 heures, on force les personnes qui suivent les travaux de la première et de la seconde sections, à manquer une partie des séances de l'une ou de l'autre section.

M. le Président rappelle les motifs qui ont déterminé l'assemblée à opérer ce changement. Les travaux de la section d'agriculture sont si nombreux et si importants, et le temps de la session est si court, qu'il serait impossible, dans des séances de deux heures, d'arriver à traiter les principales questions inscrites au programme.

L'assemblée, consultée une nouvelle fois, tout en déplorant la fâcheuse coïncidence qui vient d'être signalée, décide qu'il y a lieu de maintenir les futures séances de 9 heures du matin à midi.

M. Monerie de Cabrens, l'un des secrétaires, donne lecture du procès-verbal de la dernière séance.

M. le Président propose de régler les excursions pro

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