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les força d'aller à la meffe après la St Barthelemi. La ligue ofa appeler ces princes relaps; ils ne l'étaient point, on les avait forcés. On força de même Julien à recevoir ce qu'on appelle l'un des quatre mineurs, à être lecteur dans l'églife de Nicomédie; mais il eft certain par fes écrits, que dès-lors il fe livrait tout entier aux inftructions de Libanius, le philofophe le plus entêté du paganifme.

Ce qu'on peut donc reprocher bien plus raisonnablement à cet empereur, c'eft d'avoir été l'ennemi du chriftianifme dès qu'il put fe connaître ; & ce qu'il y a dé plus déplorable, c'eft qu'il était le plus beau génie de fon temps, & le plus vertueux de tous les empereurs après les Antonins.

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La Blétrie répète férieufement le conte ridicule que Julien, dans fes opérations théurgiques qui étaient visiblement une initiation aux mystères d'Eleufine, fit deux fois le figne de la croix, & que deux fois tout disparut. Cependant malgré cette ineptie, la Blétrie a été lu, parce qu'il a été fouvent plus raisonnable.

Au refte, nous ofons dire qu'il n'eft point de français, & furtout de parifien à qui la mémoire de Julien ne doive être chère. Il rendit la juftice. parmi nous comme Lamoignon; il combattit pour nous en Allemagne comme Turenne; il adminiftra les finances comme un Roni; il vécut parmi nous en citoyen, en héros, en philofophe, en père : tout cela eft exactement vrai. On verfe des larmes. de tendreffe quand on fonge à tout le bien qu'il nous fit. Et voilà ce qu'un poliffon appelle Julien l'apoftat.

En admirant la valeur de Charlemagne, fils d'un héros ufurpateur, & fon art de gouverner tant de peuples conquis, c'était affez d'être homme pour gémir des cruautés qu'il exerça envers les Saxons; & nous avouons que nous n'exprimâmes pas assez fortement notre horreur. Le tribunal veimique, qu'il institua pour perfécuter ces malheureux, eft peutêtre ce qu'on inventa jamais de plus tyrannique. Des juges inconnus recevaient les accufations rédigées par un délateur, n'entendaient ni les témoins ni les accufés, jugeaient en secret, condamnaient à la mort, envoyaient des bourreaux déguifés qui cxécutaient leurs fentences. Cette cour d'affaffins privilégiés fe tenait à Ormound en Veftphalie ; elle étendit fa jurifdiction fur toute l'Allemagne, & ne fut entièrement abolie que fous Maximilien I. C'est une vérité horrible, dont peu d'auteurs parlent, mais qui n'en eft pas moins avérée.

Que devait-on dire de l'iniquité dénaturée avec laquelle il dépouilla de leurs Etats les fils de fon frère? La veuve fut obligée de fuir & d'emporter dans fes bras fes malheureux enfans chez Didier fon frère, roi des Lombards. Que devinrent-ils, lorfque Charlemagne les pourfuivit dans leur afile, & s'empara de leurs perfonnes ? Les fecrétaires, les moines qui fabriquaient des annales, n'osent le dire nous nous taifons comme eux; & nous fouhaitons que ce Karl n'ait pas traité fon frère, fa fœur & fes neveux, comme tant de princes en ces temps-là traitaient leurs parens. La foule des historiens a encenfé la gloire de Charlemagne, & jufqu'à fes débauches. Nous nous fommes arrêtés

la balance à la main; nous avons laiffé marcher la foule on nous a remarqués; on a voulu nous arracher notre balance; & nous avons continué de pefer le jufte & l'injufte.

Nous n'avons pu encore découvrir quel droit avait Charlemagne fur les Etats de fon frère, ni quel droit fon frère & lui & Pepin leur père avaient fur les Etats de la race d'Ildovic, ni quel droit avait Ildovic fur les Gaules & fur l'Allemagne, provinces de l'empire romain, ni même quel droit l'empire romain avait fur ces provinces.

C'eft immédiatement après Charlemagne que commença cette longue querelle entre l'Empire & le facerdoce, qui a duré à tant de reprises pendant plus de neuf fiècles : guerre dans laquelle tous les rois furent enveloppés; guerre tantôt fourde, tantôt éclatante; tour à tour ridicule & funefte, qui n'a semblée terminée que par l'abolition des jéfuites, & qui pourrait recommencer encore, fi la raison ne diffipait pas aujourd'hui prefque par-tout les ténèbres dans lefquelles nous avons été plongés fi long-temps.

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ARTICLE VIII.

D'une foule de menfonges abfurdes qu'on a opposés aux vérités énoncées par nous.

NOUS nous fervons rarement du grand mot

certain il ne doit guère être employé qu'en mathématiques, ou dans ces efpèces de connaiffances, je penfe, je fouffre, j'exifte; deux & deux font quatre. Cependant fi l'on peut quelquefois employer ce mot en fait d'histoire, nous crûmes certain, ou du moins extrêmement probable :

Que les premiers étrangers qui prirent & qui faccagèrent Conftantinople furent les croifés, qui avaient fait ferment de combattre pour elle.

Que les premiers rois francs avaient plufieurs femmes en même temps; témoins Gontran, Caribert, Childebert, Sigebert, Chilpéric, Clotaire, comme le jefuite Daniel l'avoue lui-même.

Que le comble du ridicule eft ce qu'on a inféré dans l'hiftoire de Joinville, que les émirs mahométans & vainqueurs offrirent la couronne d'Egypte à St Louis leur ennemi, vaincu, captif, chrétien, ignorant leur langue & leurs lois.

Que toutes les hiftoires écrites dans ce goût doivent être regardées comme celles des quatre fils Aymon.

Que la croyance de l'Eglife romaine, après le temps de Charlemagne, était différente de l'Eglife

grecque en plufieurs points importans, & l'eft

encore.

Que long-temps après Charlemagne, l'évêque de Rome, toujours élu par le peuple, felon l'usage de toutes les églifes toutes républicaines, demandait la confirmation de fon élection à l'exarque ; que le clergé romain était tenu d'écrire à l'exarque fuivant cette formule. Nous vous fupplions d'ordonner la confécration de notre père & pafteur. "

Que le nouvel évêque était par le même formulaire obligé d'écrire à l'évêque de Ravenne; & qu'enfin par une conféquence indubitable, l'évêque de Rome n'avait encore aucune prétention fur la fouveraineté de cette ville.

Que la meffe était très-différente au temps de Charlemagne de ce qu'elle avait été dans la primitive Eglife; car tout changea fuivant les temps, fuivant les lieux, & fuivant la prudence des pafteurs. Du temps des apôtres, on s'affemblait le foir pour manger la cène, le fouper du Seigneur. (Paul aux Corinth.) On demeurait dans la fraction du pain. (A&t. ch. 2.) Les difciples étaient affemblés pour rompre le pain. ( Act. chap. 20.) L'Eglise romaine, dans la basse latinité, appelle missa ce que les Grecs appelaient fynaxe. On prétend que ce mot miffa, messe, venait de ce qu'on renvoyait les catéchumènes qui, n'étant pas encore baptifés, n'étaient pas encore dignes d'affifter à la meffe. Les liturgies étaient différentes, & cela ne pouvait alors être autrement: une affemblée de chrétiens en Chaldée ne pouvait avoir les mêmes cérémonies qu'une affemblée en Thrace. Chacun fefait la commémoration du dernier

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