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On opine à peu près de même du reproche " qu'on lui fait faire aux ennemis de marquer l'année 1638 pour lui avoir été favorable, fur ,, ce que la prise de Brisac devait avoir effacé toutes ,, nos difgraces. Ce lui aurait été une efpèce de " crime que d'omettre notre plus fignalé bon99 heur de cette année-là, qui fut la naissance de "monfeigneur le dauphin.

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"Cette omiffion donc n'était guère moins ,, remarquable que la contradiction qui fe voyait ,, au même teftament, où il eft dit, tantôt que la " paix était faite & tantôt qu'elle ne l'était pas. " D'où il fe peut infailliblement conclure que cette " pièce eft d'autant plus fauffe qu'elle était tout‚ à-fait inutile. ",

Quand il n'y aurait que cette preuve elle fuffirait, àmon avis, pour conftater que le teftament politique ne peut être du cardinal de Richelieu.

Le dernier critique qui a fait voir évidemment la fuppofition, eft le favant la Monnoie; on veut recufer aujourd'hui fon témoignage, parce qu'il eft trop décifif, & on fe contente de dire que ce favant homme n'avait pas tourné fes études du côté de ces recherches.

C'eft précisément à ces recherches qu'il s'appliqua fes dernières années; voyez fa Vie de Ménage, fes additions au Ménagiana, fa differtation fur le livre des Trois impofleurs; c'était dans cette partie qu'il

excellait.

Dans une difcuffion de cette nature, le lecteur doit, ce me femble, agir comme un juge équitable,

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qui n'adjugera jamais à perfonne un bien contesté que fur des preuves évidentes.

Vous affurez, malgré la dépofition formelle de l'hiftoriographe du cardinal de Richelieu, payé pour faire fon panégyrique, que le teftament politique eft de ce miniftre. On vous y montre des méprises groffières, indignes de tout homme en place & de tout écrivain. Montrez-nous donc quelques preuves convaincantes que le cardinal de Richelieu eft en effet l'auteur de ces bévues.

Vous êtes tenu de faire voir au moins l'ouvrage figné de fa main; vous n'avez que cette unique reffource, & encore nous examinerons fi cette preuve ferait décifive.

Objection.

IL ne paraît pas facile, dit-on dans la préface de l'éditeur du nouveau teftament politique, de concilier l'opinion où l'on était à l'hôtel de Richelieu que le teftament politique était du cardinal de Richelieu, avec ce qu'avance M. de Voltaire, qu'ayant fait demander chez tous les héritiers du cardinal, fi on avait quelque notion que le manufcrit du teftament ait jamais été dans leur maison, on répondit unanimement que personne n'en avait eu la moindre connaiffance avant l'impreffion.

Réponse.

RIEN n'eft plus aifé à concilier. M. de Voltaire chercha ce manufcrit dans l'hôtel de Richelieu, il

l'y trouva pas, & les dépofitaires des archives lui dirent qu'ils ne l'avaient jamais vu. En effet le feul exemplaire manufcrit qui avait été chez madame

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la ducheffe d'Aiguillon feconde du nom, comme il était dans trente autres bibliothèques de Paris, fut transféré en 1705 avec d'autres papiers du cardinal, au dépôt des affaires étrangères. Nous verrons en fon lieu de quelle autorité eft ce manufcrit.

Réflexion.

D'ou venait l'édition du prétendu teftament politique imprimé en 1688 ? pourquoi l'éditeur ne citet-il fes autorités? d'où a-t-il reçu pas fes garants, ce manufcrit? C'eft une pièce fi importante par le nom du respectable auteur à qui on l'attribue', par le monarque auquel elle eft adreffée, par le fujet qu'elle annonce, que l'éditeur eft indifpenfablement obligé de dire & de prouver comment un écrit de cette nature était tombé entre fes mains; il ne l'a pas fait; on ne lui doit donc nulle créance, comme on l'a déjà dit.

Il n'en eft pas de même, ce me femble, des mémoires du cardinal de Retz, de Talon, de Montchal, de la Porte. Perfonne n'a douté des auteurs de ces mémoires, au lieu qu'une foule de favans critiques a toujours nié que le teftament politique fût de l'illuftre cardinal de Richelieu. Ce teftament eft bien autrement important que tous les mémoires dont nous parlons.

Ces mémoires portent tous un caractère de vérité qui ne permet aucun doute fur leurs auteurs. Au contraire les anachronifmes, les erreurs de toute efpèce qui fourmillent dans le teftament du cardinal, font naître des doutes dans l'efprit de tous ceux qui réfléchiffent.

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Objection.

M. de Foncemagne dit que dans le catalogue des livres de feu M. l'abbé de Rothelin, on trouva un teflament politique du cardinal de Richelieu relié en maroquin rouge.

Réponse.

Il fait bien que ce maroquin rouge n'est pas une preuve que ce teftament fut présenté à Louis XIII, Un romain qui aurait eu dans fa bibliothèque un Pétrone en maroquin rouge, aurait-il dû conclure que cet ouvrage licencieux d'un jeune débauché fortant des écoles, était l'ouvrage du conful Petronius? On aurait beau relier les fauffes décrétales en maroquin rouge, elles n'en feraient pas moins fauffes.

Auffi le judicieux M. de Foncemagne ne fait pas grand fond fur cette preuve qu'il allègue.

Objection très-forte de M. de Foncemagne.

CE fage & favant critique me fait une objection bien plus importante, & qui peut faire une trèsgrande impreffion fur les efprits; c'eft qu'il se trouve au dépôt des affaires étrangères une copie du teftament du cardinal de Richelieu. Je ne fuis pas à portée de la voir dans le fond de mes déferts; & quand je ferais au louvre, je ne pourrais m'en rapporter à mes yeux, à qui la lumière eft prefque entièrement refufée. Je fais lire la lettre de M. de Foncemagne je dicte mes doutes, & je lui demande des éclairciffemens.

Le nouveau teftament qu'il a fait imprimer porte, dit-il, des corrections en marge de la main du

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cardinal de Richelieu; ces corrections d'une demiligne font dans le difcours préliminaire intitulé Maximes d'Etat ou Teftament politique, succinte narration des grandes actions du roi.

A la fin de cette fuccinte narration on prétend que le cardinal de Richelieu a écrit de fa main :

Monaco

fi vous reperdez

Aire

galères d'Espagne

perdues par la tempête

diftribution de
bénéfices.

Réponse.

Je fupplie d'abord M. de Foncemagne de vouloir bien inftruire le public fi on a confronté l'écriture reconnue du cardinal de Richelieu avec ces notes marginales; cet éclairciffement eft d'une néceffité indispensable; je ne cherche comme lui que la vérité. Le cardinal fefait fouvent mettre de pareilles notes par Bois-Robert & par fon médecin Citois, comme le rapporte Péliffon dans fon hiftoire de l'académie, au fujet de la critique du Cid. Je m'en rapporte entièrement à M. de Foncemagne, comme je le dois.

En second lieu, oferais-je dire que cette narration fuccinte qui eft au-devant du teftament politique me paraît une preuve évidente de la fuppofition du teftament?

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