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même temps, il me semble que l'opinion de biens des physiciens modernes n'est guère soutenable. Ils ont parlé avec confiance de l'éther comme s'il était une substance matérielle malgré que l'on n'ait jamais eu des témoignages indépendants de son existence. J. Stuart Mill dans sa Logique a accumulé des arguments admirables contre ceux qui veulent donner une réalité objective à l'éther et on n'a jamais réussi à les refuter. Il faut, je crois, nous en tenir à considérer l'éther comme une conception purement mentale qui est de la même espèce que l'atome chimique et qui, comme cette dernière, n'a pas d'équivalent que l'on puisse percevoir. C'est un procédé logique et nous ne pouvons nous en servir que parce qu'il nous permet de réunir un grand nombre de phénomènes physiques.

Notre connaissance de la structure intime des corps matériels et des conditions dont dépend l'existence d'un corps dans un état solide, liquide ou gazeux a fait de grands progrès. Le passage d'un solide à un état liquide ou gazeux et la disparition de la chaleur la chaleur latente de Black

s'explique facilement comme n'étant qu'un simple cas de la conservation de l'énergie, car la chaleur qui semble disparaître est transformée en une activité moléculaire plus grande, de manière à dominer en tout ou en partie les forces de cohésion et à écarter davantage les molécules. Il résulte de la doctrine de la condition moléculaire de la matière qu'il n'y a pas de différence radicale entre les solides, les liquides et les gaz. On savait depuis longtemps qu'il y avait des substances, dont les propriétés étaient intermédiaires entre les solides et les liquides et, en 1863, Andrews réussissait à démontrer expérimentalement la continuité des états liquides et gazeux.

Comme conséquence de nos connaissances plus approfondies sur ce sujet, le physicien a pu liquéfier et même solidifier tous les gaz. La liquéfaction de l'hydrogène nous a amené, à quelques degrés près, vers le zéro absolu de la température et la théorie indiquerait que tout mouvement moléculaire devrait y cesser et que toute énergie chimique devrait y disparaître. L'importance théorique des travaux à

cette température si basse est considérable et on est déjà arrivé à des résultats très importants en physique, en chimie et en biologie.

L'existence du vide a permis aux physiciens modernes d'examiner la condition moléculaire des gaz sous des circonstances très favorables et on a inauguré un nouveau champ de recherches dans le domaine de ce qu'on a appelé l'état ultragazeux de la matière et ceci nous a déjà donné les Rayons de Roentgen (Rayons X), une des plus importantes découvertes de la Physique pendant le dix-neuvième siècle.

(A suivre).

H. GORDON JONES.

Traduit de la Positivist Review par Paul Descours.

COMTE ET LA PHYSIQUE

Quelques points du précédent article (paru dans la Positivist Review de septembre 1903) appellent des explications complémentaires, si j'en juge par certaines critiques qui me sont parvenues et d'où il résulterait que je n'ai pas réussi à exposer clairement ma pensée sur l'attitude de Comte à l'égard de la Physique. J'ai dit que la croyance de Comte sur l'irréductibilité des différentes branches de celte science n'avait pas été confirmée par les recherches ultérieures. Mais il restait entendu que, dans l'esprit du maître, ces divisions (acoustique, optique, chaleur, électricité, etc.) étaient simplement subjectives et, par conséquent, ne correspondaient pas à des différences objectives entre chaque catégorie de phénomènes; elles résultaient de la constitution même de l'homme. Cette conception se justifiait par ce fait qu'il nous faut plus d'un sens pour prendre connaissance du monde extérieur. Cette pluralité des sens correspondait à une pluralité semblable de la Physique d'où, pour Comte, la nécessité d'ajouter deux nouveaux sens (chaleur et électricité) au cinq déjà connus.

Si nos sens étaient aussi différenciés que Comte le supposait, son argument serait inattaquable. Mais on peut, aujourd'hui, considérer un autre point de vue qu'il eût été impossible d'envisager à l'époque ou il écrivait. Nous savons, maintenant, grâce aux travaux des embryologistes modernes, que les organes des sens ne sont que des modifications de l'organe général du toucher: la peau. D'autre part, en physique, la chaleur rayonnante et la lumière semblent confirmer cette unité biologique. Ainsi, c'est par le sens de la vue que les rayons lumineux nous impressionnent; au contraire, c'est par le toucher, c'est-à-dire par le moins spécialisé et le plus général des organes de ce genre, que nous percevons les rayons de chaleur obscure. Or, ces deux va

riétés de rayons ne différent entre elles que sous le rapport des longueurs d'ondes. Nos connaissances embryologiques sur le développement et la formation des organes des sens nous donnent la possibilité d'établir des relations entre les différentes branches de la Physique; ce qui était impossible, tant qu'on crut à l'irréductibilité des sens. Comte aurait pu accepter le principe de la conservation de l'énergie, en tant que lien entre les divisions de la Physique et aussi entre les différentes sciences naturelles. Mais il avait hâte d'aborder la partie sociologique de son œuvre; aussi cessa-t-il ses études de Physique après la publication du 2e volume de la Philosophie positive, en 1833. Conséquemment, il reproduisait dans sa Politique, en ce qui concerne la Physique, les mêmes vues parues dans son premier traité. Il n'est pas douteux que, s'il avait pu suivre les progrès de cette science, il se serait exprimé différemment sur plusieurs points.

Quant à l'attitude. de Comte relativement à l'Ether, le Dr Bridges me rappelle ce qui est écrit dans la synthèse subjective sur l'espace, milieu subjectif, siège de tous les phénomènes objectifs. Cette conception ressemble beaucoup à l'hypothèse moderne de l'Ether.

Des critiques puériles ont été formulées en vue de discréditer l'enseignement de Comte. C'est ainsi que le professeur Huxley alla jusqu'à lui dénier toute capacité scientifique réelle, parce qu'il n'approuvait pas l'hypothèse de l'Ether.

Or l'histoire des faits montre que beaucoup de contemporains de Comte, surtout parmi les mathématiciens, partageaient sa manière de voir. D'autre part, en ce qui concerne la théorie ondulatoire de la lumière, on se souvient qu'un physicien de valeur, Biot, la rejetait encore. en 1862, date de sa mort.

En toute justice, on ne peut donc critiquer Comte au sujet de doctrines qui étaient matière à discussion entre les savants de sa génération.

H. GORDON JONES.

Traduit de la Positivist Review par G. Tridon.

BULLETIN D'ANGLETERRE

POLITIQUE INTÉRIEURE. POLITIQUE EXTÉRIEURE

Londres, le 14 Homère 116 (11 fév. 1904.)

La question du libre échange et du protectionnisme est toujours à l'ordre du jour et occupe beaucoup le public. M. Chamberlain a encore fait à ce sujet une grande quantité de discours et la question a été discutée aussi à la Chambre des Communes.

Il y a eu, depuis quelque temps, plusieurs élections législatives, et, bien que les circonscriptions électorales aient, pour ainsi dire, été inondées par la littérature protectionniste, les libéraux ont gagné les deux sièges de Norwick et d'Ayr et, dans d'autres circonscriptions où l'ancien député était libéral, ce parti à réussi à faire passer son candidat à une majorité plus forte. Dans les régions acquises depuis longtemps au parti conservateur, ses candidats n'ont de même été réélus qu'avec une majorité plus faible. Cela semble montrer que le pays est loin d'être converti au protectionnisme. Ce n'est pas la faute de M. Chamberlain qui a conduit sa campagne avec une vigueur vraiment extraordinaire. Il a l'art de parler au peuple; il sait bien flatter toutes les plus viles passions de nos chauvins en jouant de la grosse caisse nationaliste avec une grande force.

Le gouvernement adopte une attitude très étrange. Quelquefois, un membre du cabinet fait un discours libre-échangiste; mais, le lendemain, un de ses collègues lui répond en disant le contraire. Ces divergences rendent l'électeur perplexe : il ne sait pas bien ce qu'il doit faire. On réussira peut-être à vaincre M. Chamberlain. Mais il faudra continuer de lutter, car l'ennemi ne désarmera pas et une défaite des libres-échangistes serait un grand désastre, car elle rendrait la position du prolétariat plus difficile.

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