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On trouve aux pages 142 et suiv. de son Ouvrage, 1o, que dans l'état naturel, sur 1 000 000 d'enfans naissans, 85 635 mourront tôt ou tard de la petite vérole, et que la vie moyenne de ceux-ci sera de 3ans,9; 2°. que si cette maladie avait disparu, leur vie moyenne s'éleverait à 44,7; et que dans cet ordre de choses, que l'auteur appelle l'état non variolique, la vie moyenne de tous les individus serait de 32 ans au lieu de 28ans (108), la population, qui, pour 1 000 000 de naissances, ne monte qu'à 28 763 000 individus, s'éleverait à 32 256 000. Tels seraient les effets de la vaccine, si la pratique en devenait générale. Et qui pourrait empêcher qu'il n'en fût ainsi, puisqu'elle est d'une extrême facilité, qu'elle ne présente aucun danger, et que le nombre des épreuves directes et inverses auxquelles elle a déjà été soumise constate son utilité, par une probabilité très - approchante de l'unité, et appréciable par les calculs les plus simples?

118. Ce n'est pas pour la petite vérole seulement que les médecins ont formé des tableaux d'observations: il y a déjà quelques ouvrages où l'on a suivi cette méthode, la seule qui soit vraiment démonstrative; puisque la médecine ne se compose en grande partie que de faits déduits immédiatement de l'observation, qui seule a fait remarquer et a constaté l'effet des remèdes spécifiques les mieux reconnus pour tels. Les efforts de la nature se combinent de tant de manières avec les diverses méthodes curatives, qu'aucune de ces méthodes n'est peut-être entièrement dépourvue de succès, au moins apparens. C'est donc de la comparaison du nombre de ces succès, avec le nombre total des maladies traitées suivant chaque méthode, et des maladies abandonnées à la nature (si ce dernier cas pouvait avoir lieu), qu'on doit assigner le mérite re

latif de ces méthodes, et répondre aux objections renouvelées sans cesse contre la médecine. M. Pinel, et plusieurs autres médecins, ont fait connaître les résultats obtenus dans les hôpitaux où se traite l'aliénation mentale. En 1789, M. William Black, médecin anglais, a publié la seconde édition d'une Analyse arithmétique et médicale des maladies et de la mortalité de l'espèce humaine (An arithmetical and medical Analysis etc.). C'est par la continuation et l'extension d'un pareil travail, que l'on pourra constater irrévocablement si la médecine fait des progrès réels; les hôpitaux, plus nombreux et beaucoup mieux tenus que dans le siècle dernier, offrent à cet égard de grandes facilités (*).

(*) On a tant calomnié l'esprit philosophique, c'est-à-dire la raison appliquée à tout ce qui intéresse la société, qu'il doit être permis de rappeler les faits évidens qui parlent en sa faveur. L'an des plus frappans est l'amélioration du sort des malades dans les hôpitaux, due aux efforts d'hommes bien connus pour n'être mus que par une philantropie purement humaine. C'est par leurs soins, et dans un temps difficile, qu'a cessé l'entassement des malades dans un même lit à l'Hôtel-Dieu, que les mesures ont été prises pour diminuer la mortalité effrayante des enfans trouvés, qu'ont été formés des hospices séparés pour l'accouchement et l'allaitement, et beaucoup d'autres institutions d'ordre et de bienfaisance qu'il serait trop long de détailler ici. Dans ce dix-septième siècle, si vanté, la mortalité de l'Hôtel-Dieu de Paris était le scandale des étrangers : il y pé rissait plus de 3000 malades par an, faute de soins. (Voyez Essay tending to prove that in the Hospital called l'Hôtel-Dieu at Paris, thère die above 3000 per annum, by reason of ill accommodation (1687), Politicals Essays, by William Petty, édit. de 1755, p. 63).

Le zèle religieux comme la pitié, peut sans doute prodiguer les secours, mais la raison seule, les dispensant avec impartialité, établissant l'économie par l'ordre, sait faire participer le plus grand nombre d'individus au bienfait, et préparer dans le présent des ressources pour l'avenir.

Des Rentes viagères, et des Assurances sur la vie et sur les choses.

119. Les probabilités de la vie humaine, combinées avec l'accroissement des fonds placés à intérêt composé, ont donné lieu aux rentes viagères, aux assurances sur la vie, aux caisses d'épargne, et en général à toutes les spéculations par lesquelles on se procure, soit pour le présent, soit pour l'avenir, des avantages pécuniaires dépendans des chances de la mortalité. L'importance de ces théories a multiplié beaucoup les questions qui s'y rapportent et les auteurs qui en ont traité. On ne doit donc s'attendre à trouver ici que les indications nécessaires pour montrer comment le sujet se rattache au calcul des probabilités; et la solution des problèmes les plus simples suffira pour cela.

Considérons premièrement chacun des individus. compris dans une Table de mortalité à un âge donné, comme propriétaire d'une rente viagère s, ou comme. devant toucher annuellement cette somme pendant toute la durée de sa vie ; celui qui est chargé de payer ces rentes, et que je nommerai le banquier, donnera à la fin de la re année la somme v ́s, à la fin de la 2o, v"s, à la fin de la 3o, v′′s, et ainsi de suite; v^, v", v", etc. désignant le nombre des individus existans à la fin de ces années. Si t représente le taux de l'intérêt, çes sommes, rapportées au commencement de la première année (Voyez les Elém. d'Algèbre.), deviendront respectivement

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et ainsi de suite, jusqu'à l'âge où finit la Table de

mortalité. En les ajoutant on aura la valeur totale de ce qu'ont dû payer les individus existans à la première époque, pour acquérir ces rentes; chacun d'eux aura donc payé pour sa part,

v's

v"s

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+t + (1+1) + (1 + 1); + etc. } =

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3

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La somme S est le capital de la rente viagère s; c'est aussi la valeur moyenne des sommes payées par le banquier, réparties entre tous les individus de la Table, de manière qu'il n'éprouvera ni perte, ni gain, si l'extinction des rentiers a lieu conformément aux nombres marqués dans cette Table.

La formule de l'espérance mathématique donne la même expression pour S, en ne considérant si l'on veut qu'un seul rentier; car les sommes éventuelles rapportées à la première époque étant

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et les probabilités que le rentier existera à la fin des

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{+++++++ etc.},

+t (1+1) 2 (1+t)3

valeur de S trouvée ci-dessus.

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120. Ces deux manières de mettre le problème en équation, doivent rappeler les réflexions du no 78, et montrer comment le sort de l'emprunteur qui se charge d'une seule rente viagère, diffère de celui du banquier payant un nombre de rentiers assez considérable pour que leurs décès suivent l'ordre indiqué par la Table de mortalité. La première entreprise est bien hasardeuse; l'autre, au contraire, l'est peu, si toutefois la Table de mortalité a été construite ou choisie d'après la classe d'individus qui doivent composer les rentiers. Quand il s'agit d'un emprunt public à rentes viagères, on doit bien se garder d'employer la Table de mortalité générale, pour une grande capitale; car ce ne sont guère que des individus choisis qui s'intéressent à ces emprunts: aussi sont-ils trèsonéreux à l'état quand on donne le même taux sur toules tétes, c'est-à dire pour un âge quelconque, comme on l'a fait, en France, vers 1780, ce qui a produit la spéculation suivante.

Des banquiers, ayant remarqué l'avantage que les femmes avaient à Genève sur les hommes, par rapport à la durée moyenne de la vie, en ont fait choisir par des médecins, un certain nombre ayant déjà subi les épreuves de la petite vérole, de la rougeole, dont la constitution paraissait la meilleure, et dont ils pouvaient surveiller la conduite; c'est sur ces têtes qu'ils ont placé leurs fonds, dont ils ont formé un seul capital, divisé en actions, par un arrangement fait entr'eux, de manière à pouvoir associer un grand nombre de personnes à leur spéculation. Recevant 9 pour 100 d'intérêt, ils pouvaient donner 7 pour 100, ce qui était au-dessus de l'intérêt légal, et les 2 pour 100. qui leur restaient, étant placés à intérêt composé, à 5 pour 100 seulement, devaient en 26 ans reformer

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