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facilement, par le moyen des logarithmes, que cette puissance est égale à l'unité divisée par un nombre de 44 chiffres; et comme c'est la probabilité contraire à celle qu'on cherche, on jugera par là combien cette dernière approche de l'unité.

Si l'on se donne P et qu'on prenne a pour incon

nue,

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on obtiendra a = √1—P. En faisant seulement P, m étant toujours 100 000 000, trouvera

a = 0,999999993,

on

environ, fraction qui diffère bien peu de l'unité; et ce rapport du nombre des billets marqués AB au nombre total, sera la limite qui sépare les rapports probables, de ceux qui ne le sont pas (9); ensorte que celui qui est un peu moindre sera déjà probable (*).

Ces résultats peuvent donner une idée de ce que doit être, quand on l'étend à la suite des siècles connus et à toute la terre, l'expression numérique de la

(*) Si on n'a pas de Tables de logarithmes assez étendues pour effectuer ce calcul, on peut employer la formule

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dans laquelle le = 0,43429; il faudra y changer a en 1— -P

et x en

I

m+1

; et quand le nombre m+1 sera très-grand, les

deux premiers termes suffiront. Dans l'exemple ci-dessus, où

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probabilité de la dépendance de phénomènes tels que la rencontre des corps et le déplacement qui en est la suite, si prodigieusement répétés dans un seul jour et dans un seul lieu.

La probabilité qu'il y a très-peu de chances contraires à la permanence du mouvement de la terre, déjà très-considérable quand elle est conclue du nombre de levers et de couchers du soleil, comptés depuis les tems les plus reculés, devient bien plus forte encore quand on a égard aux lois connues des mouvemens de notre globe, parce qu'alors la conformité des positions observées, avec les positions calculées, doit être regardée comme fournissant de nouveaux faits, dont le nombre est presqu'infini.

Il s'en faut de beaucoup sans doute que les faits soient aussi multipliés, par rapport à d'autres liaisons regardées comme des lois de la nature; ni que la plupart de nos inductions soient établies sur de tels fondemens; mais il faut bien prendre garde à l'influence qu'exercent les faits les plus répétés, par rapport à ceux qui le sont moins. Dès que les premiers nous ont fait acquérir le sentiment de la constance des lois de la nature, nous l'étendons à tout ce qui se passe sous nos yeux; et pour tous les cas avec lesquels nous sommes familiarisés, notre confiance dans la liaison des effets aux causes, passant en habitude, peut encore croître, par cette raison, beaucoup plus rapidement que la probabilité indiquée par les calculs précédens.

De plus, le but essentiel de nos observations étant de prévoir ce qui doit arriver, la probabilité de la production d'un nouvel événement semblable à ceux qui ont déjà été observés, est celle qui nous intéresse le plus, parce qu'elle peut servir à régler notre conduite; or, pour celle-ci, le calcul prend une marche beaucoup plus

m+i

rapide; car l'expression (86) diffère bien peu de

m+2

l'unité, lorsque m est un peu grand. Cette proposition, le soleil se levera demain, par exemple, en prenant pour point de départ une époque reculée de 6000 ans, 2 191 501

Si

a maintenant une probabilité égale à 2 191 502 l'on embrasse un intervalle de plus d'un jour, la pro

babilité, donnée alors par la formule

m+1 m+p+i

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va sans

cesse en décroissant et peut devenir très-faible; mais cette conséquence n'a rien qui choque la raison, puisque l'avenir peut développer des lois qui nous sont encore inconnues (*).

(*) Bertrand, de Genève (Développemens nouveaux de la partie élémentaire des Mathématiques, t. I, page 418), a traité aussi la question précédente, mais par la considération des probabilités à priori seulement; et il a pris pour la probabilité simple de l'événement observé, celle qui donnait pour la probabilité de la répétition de cet événement m fois de suite, parce que l'hypothèse de cette probabilité ne favorise ni ne défavorise la production de la série d'événemens observés. Suivant ce mode, on a

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et comme, par cette expression, plus m augmente, plus x approche de l'unité, plus aussi on doit s'attendre à l'apparition d'un événement pareil à ceux qui ont déjà eu lieu.

La formule de la note précédente, donnerait, dans le cas de m un peu grand,

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sidéré qu'une seule hypothèse, au lieu que la méthode directe les

embrasse toutes.

99. On ne manque donc point de motifs suffisans pour appuyer la légitimité des conclusions du passé à l'avenir; et c'est en cela que consiste le pouvoir de l'analogie; mais n'est-il pas arrivé qu'en se livrant trop à ce pouvoir, les savans, aussi bien que le vulgaire, soient tombés dans l'erreur, et aient hasardé des assertions prématurées ? Cependant ils ne pouvaient suivre d'autre voie pour découvrir la vérité. Que l'on examine avec attention, soit les règles de Descartes, soit celles de Newton, rapportées dans la note de la page 2, y verra-ton autre chose que le soin de faire l'énumération la plus exacte possible des faces d'une idée ou des combinaisons de plusieurs faits? Lorsque l'énumération sera complète, que la dépendance, se trouvant la même dans tous les cas, sera nécessaire, il y aura certitude, soit physique, soit intellectuelle, au moins pour chaque partie indivisible du raisonnement, ou chaque fait en particulier (1 et 2). Hors de là, on ne peut plus que balancer les cas favorables à l'analogie avec les cas contraires ; et s'il ne s'en présente pas d'abord de cette dernière espèce, rien ne garantit qu'il n'en arrivera point. L'hypothèse qui explique complètement un grand nombre de faits n'est encore que probable, et le calcul apprécie le degré de confiance qu'elle mérite: mais tant que les faits ne seront pas tous observés, tous mesurés avec la plus grande précision, aucune hypothèse ne se changera en véritable théorie; les plus heureuses ne seront que des méthodes artificielles, pour lier par une seule formule, ou comprendre dans une seule expression, la dépendance d'un nombre de faits plus ou moins grand.

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100. Tels étaient les principes d'après lesquels Condorcet, plaçant la certitude absolue seulement dans la conscience d'une sensation actuelle, et dans la

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que

perception instantanée et avec pleine évidence de la convenance ou de la disconvenance de deux idées donnait pour fondement au reste de nos connaissances notre tendance générale à croire au retour des faits nous avons observés plusieurs fois sur nous ou sur les autres objets (1 et 2), et faisait deux classes de probabilités, la première comprenant celles dont la différence avec l'unité est inassignable, mais tellement petite, qu'il serait superflu de la calculer, et auxquelles nous acquiesçons par une habitude dont nous ne nous rendons pas compte, comme nous le faisons, ou du moins comme nous devrions toujours le faire pour les probabilités de la seconde classe (*). Ainsi s'établit une gradation non interrompue, depuis les propositions qui n'admettent aucun doute, jusqu'aux plus incertaines. Cette manière d'envisager nos connaissances donne une base solide au scepticisme « qui, dans les écoles » grecques, avait dégénéré en un ridicule charlata»nisme; mais qui, chez les modernes, dégagé de ces sub» tilités pédantesques, est devenu la véritable philo"sophie, et qui consiste, non à douter de tout, mais ❞ à peser toutes les preuves, en les soumettant à une » rigoureuse analyse; non à prouver que l'homme ne >> peut rien connaître, mais à bien distinguer et à » choisir pour objet de sa curiosité ce qu'il est pos"sible de savoir (**). »

"

(*) A la tête des probabilités de la première classe se trouve celle qui fonde notre croyance à l'existence des corps, ou notre «< per» suasion que le système des sensations qui sont excitées en nous >> dans un instant, se représentera constamment de même dans » des circonstances semblables, ou avec de certaines différences » liées constamment au changement des circonstances. » (Essai sur l'application de l'Analyse à la Probabilité, etc. Discours préliminaire, page xij.)

(**) Eloge de Franklin. OEuvres de Condorcet, tome IV, P. 94.

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