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Madame de Sévigné justifie ainsi la conduite de cette femme célèbre par sa beauté et par son esprit : « On ne sauroit donc faire un bon compte de l'extra» vagance de cet homme (le duc de Mazarin). C'est » un fou: il est habillé comme un gueux; la dévotion >> est tout de travers dans sa tête. Nous voulûmes lui persuader de tirer sa femme d'Angleterre, où elle » est en danger d'être chassée, et peut-être pervertie, » et où elle est avec les ennemis du roi. Il en revint » toujours à dire qu'elle vienne avec lui. Avec lui, » bon dieu ! ah, disons avec Saint-Evremont, qu'elle » est dispensée des règles ordinaires, et qu'on voit » sa justification en voyant M. de Mazarin. »

>>

L'an 1747, le 2 juillet, Louis XV, secondé par le maréchal de Saxe, gagne la bataille de Lawfeldt sur l'armée confédérée des Anglais, des Hollandais et des Autrichiens.

Les Français perdirent dans cette bataille le colonel Dillon, nom célèbre dans les troupes irlandaises, et le marquis d'Autichamp. Le jeune marquis de Ségur (depuis maréchal de France et ministre de la guerre) eut un bras emporté; il avoit été long-tems sur le point de mourir des blessures qu'il avoit reçues dans les batailles précédentes; et à peine étoit-il guéri, que ce nouveau coup le mit encore en danger de mort. Le roi dit au comte de Ségur, son père : « Votre » fils méritoit d'être invulnérable. » Mais le discours le plus mémorable du roi est celui qu'il tint au générai Ligonier, qu'on lui amena prisonnier. « Ne vau» droit-il pas mieux, lui dit-il-songer sérieusement » à lapaix, que de faire périr tant de braves gens? >>

Après cette victoire, Louis XV offrit la paix aux alliés, comme il avoit fait à chaque avantage qu'il avoit remporté; mais il ne fut pas écouté : ce fut alors que le célèbre Loewendhal assiégea l'importante place de Berg-op-Zoom, qu'il prit au mois de sep tembre, de la même année (1747). Cette conquête, suivie de celle de Maëstricht, par le maréchal de Saxe, amena enfin la paix conclue en 1748 à Aix-la-Chapelle.

L'an 1798, le 2 juillet, L'armée française, commandée par le général Bonaparte, débarque en Egypte, et prend d'assaut Alexandrie.

et

Huit jours avoient suffi à Bonaparte pour prendre possession de l'île de Malte, y organiser un gouvernement provisoire, se ravitailler, faire de l'eau, régler toutes les dispositions militaires et administratives. Il avoit paru devant cette île le 10 juin : il la quitte le 19 juin, après en avoir laissé le commandeau général Vaubois.

Les vents du nord-ouest souffloient grand frais. Le 25 juin, la flotte est à la vue de l'île de Candie; le 29 elle est sur la côte d'Afrique; le 30 au matin, elle découvre la tour des Arabes; le soir elle est devant Alexandrie.

Bonaparte fait donner l'ordre de communiquer avec cette ville, pour y prendre le consul français, et avoir des renseignemens tant sur les Anglais que sur la situation de l'Egypte.

Le consul arrive le 1er juillet à bord de l'amiral: il annonce que la vue de l'escadre française a occasionné dans la ville un mouvement contre les chrétiens, et

qu'il a couru lui-même de grands dangers pour s'embarquer. Il ajoute que quatorze vaisseaux anglais ont paru le 28 juin à une demi-lieue d'Alexandrie, et que l'amiral Nelson, après avoir envoyé demander au consul anglais des nouvelles de la flotte française, a dirigé sa route vers le nord-est; il assure enfin que la ville et les forts d'Alexandrie sont disposés à se défendre contre ceux qui tenteroient un débarquement, de quelque nation qu'ils fussent.

Tout devoit faire craindre que l'escadre anglaise, paroissant d'un moment à l'autre, ne vînt attaquer la flotte et le convoi dans une position défavorable. Il n'y avoit pas un instant à perdre le général en chef donna donc le soir même l'ordre de débarquement; il en avoit décidé le point au Marabou; il avoit

même ordonné de faire mouiller l'armée navale aussi près de ce point qu'il seroit possible; mais deux vais– seaux de guerre, en s'abordant, tombent sur le vais– seau amiral, et cet accident oblige de mouiller à l'endroit même où il est arrivé. La distance de l'endroit du mouillage, éloigné de trois lieues de terre, le vent du nord qui souffloit avec violence, une mer agitée qui se brisoit contre les ressifs dont cette côte est bordée tout rendoit le débarquement aussi difficile que périlleux; mais ces dangers, cette contrariété des élémens ne peuvent arrêter des braves, impatiens de prévenir les dispositions hostiles des habitans du pays.

Bonaparte veut être à la tête du débarquement. Il monte une galère, et bientôt il est suivi d'une foule de canots sur lesquels les généraux Bon et Kléber avoient reçu l'ordre de faire embarquer une partie de

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leurs divisions qui se trouvoient à bord des vaisseaux

de guerre.

Les généraux Desaix, Regnier et Menou, dont les divisions étoient sur les bâtimens de convoi, reçoivent l'ordre d'effectuer leur débarquement sur trois colonnes, vers le Marabou.

:

La mer en un instant est couverte de canots qui luttent contre l'impétuosité et la fureur des vagues. La galère que montoit Bonaparte s'étoit approchée de plus près du ban des ressifs, où l'on trouve la passe qui conduit au banc du Marabou là il attend les chaloupes sur lesquelles étoient les troupes qui' avoient eu ordre de se réunir à lui: mais elles ne parviennent à ce point qu'après le coucher du soleil, et ne peuvent traverser que pendant la nuit le banc de ressifs. Enfin, à une heure du matin, le général en chef débarque à la tête des premières troupes, qui se forment successivement dans le désert à trois lieues d'Alexandrie.

Bonaparte envoie des éclaireurs en avant, et passe en revue les troupes débarquées elles se composoient d'environ mille hommes de la division Kléber, dix-huit cents de la division Menou, et quinze cents de celle du général Bon. La position des vaisseaux et la côte du Marabou n'avoient permis de débarquer ni chevaux ni canons; les divisions Desaix et Regnier n'avoient pu encore gagner la terre, par les difficultés qu'elles avoient éprouvées dans leur navigation; mais Bonaparte sait qu'il commande à des hommes qui ne comptent point leurs ennemis. Il falloit profiter de la nuit pour se porter sur Alexandrie; et à deux heures et demie il se met en marche sur trois colonnes.

Au moment du départ, on vit arriver quelques chaloupes de la division Regnier; ce général reçoit l'ordre de prendre position pour garder le point de débarquement. Le général Desaix avoit reçu celui de suivre, le mouvement de l'armée, aussitôt que sa division auroit débarqué.

L'ordre est donné au bâtiment de transport d'appareiller, et de venir mouiller dans le port du Marabou, pour faciliter le débarquement du reste des troupes, et amener à terre deux pièces de campagne avec les chevaux qui devoient les traîner.

Bonaparte marchoit à pied avec l'avant-garde accompagné de son état-major et des généraux. Il avoit commandé au général Cafarelli, qui avoit une jambe de bois, d'attendre qu'on eût pu débarquer un cheval; mais ce général, qui ne veut pas qu'on le devance au poste d'honneur, et sourd à toutes les instances, brave les fatigues d'une marche pénible.

La même ardeur, le même enthousiasme règnent dans toute l'armée. Le général Bon commandoit la colonne droite, le général Kléber celle du centre ; celle de gauche étoit sous les ordres du général Menou qui côtoyoit la mer. Une demi-heure avant le jour, un des avant-postes est attaqué par quelques Arabes qui tuent un officier : ils approchent; une fusillade s'engage entr'eux et les tirailleurs de l'armée, à une demi-lieue d'Alexandrie environ; mais à l'approche des Français, ils abandonnent les hauteurs qui dominent la ville, et s'enfoncent dans le désert.

Bonaparte se voyant près de l'enceinte de la vieille ville des Arabes, donne l'ordre à chaque colonne de s'arrêter à la portée du canon. Désirant prévenir l'ef

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