GÉNIE DU CHRISTIANISME. : PRÉFACE. tion même de ces consolations depuis longues an nées. Que de force surnaturelle à demander pour Lorsque le Génie du Christianisme parut, tant d'adversités subies ! Combien de familles mu la France sortoit du chaos révolutionnaire; tous les tilées avoient à chercher auprès du Père des homéléments de la société étoient confondus : la terri mes les enfants qu'elles avoient perdus! Combien ble main qui commençoit à les séparer n'avoit point de cæurs brisés, combien d'àmes devenues solitaiEncore achevé son ouvrage; l'ordre n'étoit point res, appeloient une main divine pour les guérir! encore sorti du despotisme et de la gloire. On se précipitoit dans la maison de Dieu comme on entre dans la maison du médecin au jour d'une Ce fut donc, pour ainsi dire, au milieu des débris de nos temples que je publiai le Génie du Chris contagion. Les victimes de nos troubles (et que de lianisme, pour rappeler dans ces temples les pom sortes de victimes!) se sauvoient à l'autel, de pes du culte et les serviteurs des autels. Saint-De même que les naufragés s'attachent au rocher sur nis étoit abandonné : le moment n'étoit pas venu lequel ils cherchent leur salut. Rempli des souvenirs de nos antiques meurs, de où Buonaparte devoit se souvenir qu'il lui falloit un tombeau; il lui eût été difficile de deviner le lieu où la gloire et des monuments de nos rois, le Génie du ja Providence avoit marqué le sien. Partout on Chr Christianisme respiroit l'ancienne monarchie tout entière: l'héritier légitime étoit pour ainsi dire cavoyoit des restes d'églises et de monastères que l'on ché au fond du sanctuaire dont je soulevois le voile, achevoit de démolir : c'étoit même une sorte d'amusement d'aller se promener dans ces ruines. et la couronne de saint Louis suspendue au-dessus de l'autel du Dieu de saint Louis. Les François apSi les critiques du temps, les journaux, les pamphlets, les livres, n'attestoient l'effet du Génie du prirent à porter avec regret leur regard sur le passé; les voies de l'avenir furent préparées, et des espéChristianisme, il ne me conviendroit pas d'en parler; mais n'ayant jamais rien rapporté à moi rances presque éteintes se ranimèrent. même, ne m'étant jamais considéré que dans mes Buonaparte, qui désiroit alors fonder sa puissance relations générales avec les destinées de mon pays, sur la première base de la société, et qui venoit de je suis obligé de reconnoitre des faits qui ne sont faire des arrangements avec la cour de Rome, ne mit aucun obstacle à la publication d'un ouvrage contestés de personne : ils ont pu être différemment jugés ; leur existence n'en est pas moins utile à la popularité de ses desseins. Il avoit à lutavérée. ter contre les liommes qui l'entouroient, contre des La littérature se teignit en partie des couleurs du ennemis déclarés de toutes concessions religieuses: il Génie du Christianisme ; des écrivains me firent fut donc heureux d'être défendu au dehors par l'ol'honneur d'imiter les phrases de René et d'Atala, pinion que le Génie du Christianisme appeloit. de même que la chaire emprunta et emprunte en Plus tard il se repentit de sa méprise; et au moment core tous les jours ce que j'ai dit des cérémonies, de sa chute il avoua que l'ouvrage qui avoit le plus des missions, et des bienfaits du christianisme. nui à son pouvoir étoit le Génie du Christianisme. Les fidèles se crurent sauvés par l'apparition d'un Mais Buonaparte, qui aimoit la gloire, se laissoit livre qui répondoit si bien à leurs dispositions inté- prendre à ce qui en avoit l'air : le bruit lui imporieures : on avoit alors un besoin de foi, une avidité soit, et quoiqu'il devint promptement inquiet de de consolations religieuses, qui venoit de la priva toute renommée, il cherchoit d'abord à s'emparer de l'homme dans lequel il reconnoissoit une force. 1 Cette préface a été composée pour l'édition de 1828. Ce fut par cette raison que l'Institut, n'ayant pas |