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M. Van der Kindere mérite à juste titre la reconnaissance des historiens. Son livre est l'ouvrage primordial dans le domaine de la géographie politique historique de la Belgique, il abonde en outre en renseignements précieux relatifs à la chronologie et à la généalogie; il est et restera un guide sûr et indispensable pour quiconque s'occupe de l'histoire de nos provinces. EM. VAN CAPPEL.

87. - Dr E. Wolff. Le Blocus de Luxembourg (1681-1684). Luxem bourg, Jos. Beffort, 1903, in-4o, 56 pages.

Dans l'espace de trois ans, la ville de Luxembourg eut à soutenir, de la part des armées de Louis XIV, deux blocus, un bombardement, un siège en règle, suivi, après une résistance courageuse mais inutile, de la capitulation de la garnison espagnole qui la défendait. Ce sont ces sombres pages de l'histoire d'une cité aujourd'hui démantelée et protégée par des traités contre le retour de semblables infortunes, que M. Wolff entreprend de raconter. Toutefois son récit s'arrête au moment où le maréchal de Créqui, aidé de l'ingénieur Vauban, va commencer l'investissement de la place. Tout en s'aidant d'une chronique contemporaine et de divers ouvrages historiques, il emprunte surtout les éléments de sa narration à 30 pièces d'archives et à 236 lettres inédites d'officiers français adressées à Louvois et conservées au Ministère de la Guerre à Paris. Cela dit assez que ses renseignements sont sûrs et de toute première main. Son exposé, fait presque au jour le jour, est très fouillé, très minutieux, avec un grand souci d'exactitude jusque dans les moindres détails. L'aridité inévitable du sujet est tempérée par l'allure du style, qui a de la couleur et du mouvement, encore que ça et là l'expression soit forcée et l'image violente. L'auteur qui est professeur à l'Athénée grand-ducal de Luxembourg, a inséré son travail en annexe au « programme qui se publie à la fin de chaque année scolaire. C'est là, comme on sait, un usage chez nos voisins, qui tient lieu de notre discours de distribution de prix. Nous lui étions déjà redevables de plusieurs études utiles et recommandables, celle-ci en continue heureusement la série. A. DUTRON.

88. Alfred Doren, Studien aus der Florentiner Wirtschaftsgeschichte. Band I. Die Florentiner Wollentuchindustrie vom vierzehnten bis zum zechzehnten Jahrhundert. Stuttgart, in-8, xxII-584 pp.

Il est des livres qu'il est impossible de faire apprécier par un compte.

M. Van der Kindere, acquiesçant au désir des historiens, n'a pas voulu remettre à l'apparition du IIIe volume, la publication de ces précieuses tables. Tous lui en sauront gré; elles faciliteront considérablement les recherches et permettront d'utiliser plus aisément ce beau travail.

rendu, ils sont trop remplis de faits et trop minutieusement complets dans toutes leurs parties pour en faire valoir toute la richesse par une simple analyse; l'ouvrage de M. Alfred Doren, sur l'industrie drapière à Florence est de ce nombre.

Florence avant d'être productrice et industrielle fut commerçante. Ses marchands, par l'intermédiaire surtout des foires de la Champagne, firent le trafic des draps flamands, qu'ils s'en allaient revendre dans toute l'Italie. Bientôt, cependant, la civilisation de plus en plus raffinée du Midi ne se contente plus des produits assez grossiers du Nord.

De là une première industrie qui naquit à Florence la Callimala. Grâce au concours de toute une classe d'artisans, foulons, tondeurs de drap, teinturiers, les marchands florentins surent donner aux draps qui passaient par leurs mains des qualités de finesse et d'éclat qui manquaient complètement aux tissus flamands.

De ces procédés de perfectionnement à la fabrication elle-même. il n'y avait pas loin. Dès la seconde moitié du XIe siècle, l'époque à laquelle la Callimala a atteint son apogée, l'industrie drapière était née. Celle-ci ne tarda pas à supplanter la première, et Florence lui emprunta sa richesse au Xive et au xve siècle.

C'est à la genèse de cette industrie, à la recherche des différents facteurs qui la produisirent, et surtout à la description de l'arte della lana que, d'après les documents contemporains et en compulsant les archives de Florence, M. Alfred Doren consacre son livre.

Après avoir étudié les origines de l'industrie drapière, l'auteur examine les procédés techniques des fabricants florentins, les matières premières, laines italiennes et anglaises, qu'ils mettent en œuvre, les différentes qualités du produit de leurs manufactures; il fait ensuite une enquête approfondie sur le commerce d'exportation des draps. florentins, sur l'organisation des consulats, des maisons de courtage et des agences commerciales à l'étranger.

Une bonne partie du travail,

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environ la moitié, est consacrée à la condition sociale tant des employés de la gilde que des ouvriers. Le livre se termine par un appendice d'une centaine de pages où l'auteur reproduit une série de documents parmi lesquels nous citerons plus spécialement un tarif douanier du xive siècle, et un tarif, du même siècle, à l'usage des ouvriers des différentes industries

connexes.

Tout cela forme un volume du plus haut intérêt, lequel, par la richesse et par la sûreté des données, sera, certes, le bienvenu chez tous ceux et ils sont légion aujourd'hui qui s'intéressent à l'histoire économique et aux situations sociales.

J. LAENEN.

89-90.

ESTHÉTIQUE ET HISTOIRE DE L'ART.

- A. Streeter. Botticelli. Londres, G. Bell and sons, 1903, in 8°, 167 pp. Pr. 5 s.

Ce petit livre fait partie de la collection des Great masters in painting and sculpture, éditée chez Bell, sous la direction de M. Williamson. Je l'ai trouvé parfait; un autre mot répondrait trop faiblement à l'impression qu'il m'a laissée. Je louerai tout d'abord M. Streeter, d'avoir dressé en tête de sa monographie, un aperçu de la « littérature » à laquelle l'œuvre de Botticelli a donné naissance; non point qu'il fût nécessaire, comme dans une thèse scientifique, d'attester les preuves de son érudition, mais parce qu'il est indispensable, dans un livre élémentaire, de fournir à un lecteur peu renseigné, les sources d'une érudition plus profonde et d'une science plus complète. J'aime aussi le plan méthodique de M. Streeter, comportant d'abord la biographie du peintre (ch. I) et les caractères de son art (ch. II; puis, l'étude chronologique de ses œuvres (ch. III-IX); enfin les tableaux qu'on peut attribuer à son école. « En essayant, dit l'auteur, » d'étudier les œuvres de Botticelli dans un ordre chronologique, je >> sens que j'ai entrepris une tâche un peu périlleuse; car, pour justi» fier l'ordre que j'ai adopté, je n'ai pas à présenter des documents » d'une évidence absolue. Pourtant, un tel système de classification » était indispensable; malgré les difficultés qu'il entraîne, dans le cas » présent, il me semble plus clair et d'une meilleure critique qu'un » système de classification partant du sujet ». Cela est de toute évidence. Ainsi, M. Streeter a eu l'occasion de discuter les problèmes d'attribution et de classement les plus importants, il a pu opposer les opinions, énumérer les arguments, prendre son parti et le défendre; c'est l'histoire critique de l'œuvre accompli par un grand artiste, la seule étude qui permette de pénétrer intimement dans l'histoire de l'art.

Quarante-et-une illustrations, qui sont de toute beauté, accompagnent le texte; un catalogue complet des œuvres de Botticelli, classées d'après les pays qui les possèdent dans leurs musées, termine l'ouvrage.

Si toutes les monographies d'artistes, éditées par M. Bell (1), ressemblent au Botticelli de M. Streeter, il n'est pas de collection qui mérite d'être mieux recommandée.

(1) Ouvrages parus : Bernardino Luini, Velasquez, Andrea del Sarto, Luca Signorelli, Raphael, Carlo Crivelli, Correggio, Donatello, Perugino, Sodoma, Luca della Robbia, Giorgione, Memlinc, Piero della Francesca, Pintoricchio, Francia, Brunelleschi, Rembrandt, Mantegna, Giotto, Wilki, Gerard Dou, Watteau, Botticelli.

Le joli livre, de tenue si luxueuse, que la librairie G. Newnes, de Londres, consacre aussi à Botticelli (The Work of Botticelli) ne veut être qu'un recueil de reproductions augmenté d'une biographie par R. Dovey. Plus de soixante belles photogravures sont ici réunies. L'ouvrage ne coûte que 4 sh. M. LAURENT.

PÉDAGOGIE ET MÉTHODOLOGIE.

91.-H. De Raaf, Herbart's Paedagogiek (Umriss paedagogischer Vorlesungen), toegelicht en aangevuld uit andere geschriften van den schrijver. Groningen, Noordhoff, 1903. VIII-256 pp. 3,25 fr. Les doctrines de Herbart, qui sont restées ensevelies pendant près d'un demi-siècle dans les écrits de l'auteur, dont la langue serrée, abstraite et personnelle n'attirait guère les chercheurs de trésors pédagogiques, ont commencé à se répandre surtout depuis la fondation de l'école herbartienne vers 1860. Leur succès s'est accentué graduellement, et aujourd'hui, elles jouissent d'une faveur marquée, si l'on en juge par leur application dans bon nombre de livres classiques allemands et leur diffusion à l'étranger, dans presque tous les pays du monde. En 1894, Pinloche publia une traduction française des principales œuvres de Herbart; en 1899, le Musée Belge a exposé dans une série d'articles, les principes didactiques de l'école herbartienne illustrés d'une application pratique; voici la Hollande qui nous donne une traduction en langue néerlandaise.

Le choix de l'auteur s'est fixé, comme l'indique le sous-titre, sur l'Esquisse de leçons pédagogiques parce que « dit werk de vrucht is niet slechts van wijsgeerig denken, maar ook van paedagogische ervaring, en dus vooral de opvoeder daarin tot ons spreekt ». Nous ne pouvons que féliciter M. De Raaf de ce choix. En effet, s'il y a à laisser dans les œuvres de Herbart, il y a surtout à y prendre, et, en particulier, les idées qui resteront acquises au patrimoine pédagogique de l'humanité, telles que les doctrines originales sur l'association mise au service de la répétition, les notions si fécondes sur la condition et les différents genres de l'intérêt, sur la Vertiefung et la Besinnung et enfin sur les célèbres Formalstufen. Or, tout cela se trouve exposé de façon plus intelligible dans l'Esquisse que dans les autres œuvres du maître.

Le livre comprend une introduction de 24 pp. (vie et œuvres de H.), une première partie : Fondements de la pédagogie; une deuxième. partie Pédagogie générale, et une troisième partie : Pédagogie spéciale. La traduction est fidèle et élégante; sa valeur se trouve notablement rehaussée par le commentaire qui accompagne le texte pas à pas. Si les annotations se font plus rares dans la troisième partie, c'est que les sujets traités sont d'ordre moins abstrait.

M. De Raaf a fait une bonne action en rendant plus accessibles à ses compatriotes les doctrines du fondateur génial de la pédagogie et de la didactique scientifiques. Mais pour qu'elles trouvent la diffusion qu'il leur souhaite, le corps professoral devrait, à mon avis, avoir l'occasion de les voir appliquées dans des leçons concrètes choisies dans les différentes branches de l'enseignement. C'est là qu'il trouverait les éléments d'appréciation les plus convaincants. Si les théories herbartiennes se sont attiré le reproche de conduire au mécanisme, les applications feraient bien vite voir tout ce qu'elles renferment d'ampleur, de force et de souplesse. Il y a là un vaste champ à exploiter, et il serait excellemment mis en valeur par des pédagogues qui, comme M. De Raaf, ont médité Herbart, qui le connaissent et l'ont pratiqué. J. KREKELBERG.

92. H. Ahnen. La méthode directe dans l'enseignement des langues vivantes. Son application à l'étude du français dans le Grand-Duché. Progr. du Gymn. d'Echternach, 1903. Luxembourg, J. Beffert, 66 pp. in 4o.

Plus que d'autres pays, les pays bilingues ont intérêt à suivre de près les réformes qui ont été proposées en vue de perfectionner l'enseignement des langues modernes. Autant que la Belgique, le Grand-Duché se trouve dans cette situation. Dans le patriotique désir de voir tous ses compatriotes en possession réelle et effective de la langue française. comme seconde langue maternelle, M. Ahnen veut attirer l'attention du public sur le grand mouvement linguistique contemporain. Il fait connaître d'abord le caractère propre et les défauts de la méthode grammaticale et les principes fondamentaux de la méthode nouvelle. Puis, il expose en détail l'origine, l'historique et les principes des trois méthodes qui ont appliqué avec le plus de succès les nouvelles idées, les méthodes de Berlitz, de Gouin et de Carré. Ensuite, après avoir résumé et groupé les données acquises en faveur de la réforme, il constate, avec preuves à l'appui, que celle-ci est appliquée ou sur toute l'étendue ou sur une grande partie du territoire des trois pays circonvoisins, alors que dans le Luxembourg la méthode traductive est encore à la base de l'enseignement. Une réforme s'impose donc : « l'application de la méthode directe à notre enseignement du français dans l'école primaire ».

Le travail de M. Ahnen est sérieusement documenté, très instructif quant au fond, et écrit avec une chaleur et une conviction entraînantes. J. KREKELBERG.

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