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des fautes de style. Nous croyons rendre service à l'auteur en les mentionnant. Ainsi p. 12, elle emploie l'expression « mettre à la vogue »> pour « mettre en vogue »; p. 131 le verbe « s'encourir » qui n'est plus usité de nos jours; enfin p. 172, les mots « l'année prochaine >> avec l'ellipse défectueuse de la préposition « à ». J. FLEURIAUX.

205. A. Farinelli, Dante e Margherita di Navarra (Rivista d'Italia, février 1902). Rome 1902, pp. 24.

Les travaux de MM. Abel Lefranc, Gaston Paris, H. Elsner et H. Hauvette ont mis en lumière l'importance des dernières œuvres de Marguerite de Navarre au point de vue de l'influence dantesque. M. Farinelli, ayant pu utiliser tous ces travaux, et étant lui-même fort bien préparé à l'examen de cette question, expose excellemment la place que tient Marguerite dans les mouvements intellectuels et littéraires de son temps, les études et les pensées qui ont ouvert son esprit à l'intelligence de la Divine Comédie, l'influence exercée sur elle par le divin poème. Le savant romaniste, non sans une réserve peutêtre trop scrupuleuse, distingue très justement (p. 10) dans la vie et la production de Marguerite deux périodes séparées par la mort de François Ier : ce n'est que dans la seconde que la malheureuse princesse, mûrie par la douleur et le recueillement, pénètre vraiment dans la poésie dantesque. L'éminent critique ne s'exagère d'ailleurs pas la valeur esthétique des poésies composées pendant cette période. Le caractère littéraire de la Rivista d'Italia, qui s'adresse au grand public, a empêché l'auteur d'ajouter à son travail une partie bibliographique et critique qui aurait certainement été fort complète et, pour les érudits, fort utile. Mais on sent à chaque page une docu mentation solide, et des recherches personnelles. L'auteur montre notamment (p. 16) que Louise Labé, la « belle cordière» de Lyon, lisait l'histoire de Francesca, et que le Débat de folie et d'amour rappelle l'éternelle amante. Enfin il conclut en termes élégants qu'à la mort de Marguerite se perd en France le secret de la poésie dantesque : il faudra de longues années avant qu'on le retrouve. A. COUNSON.

206. Alice Kemp-Welch. The Chatelaine of Vergi, a 13th Century French Romance done into English by Alice Kemp-Welch, edited with introduction by L. Brandin, with contemporary illustrations. Londres, David Nutt; Paris, Geuthner, 1903. xxIII-95 pp. Les Anglais ont plus d'une fois montré un goût vif et éclairé pour l'ancienne littérature française, surtout pour les récits naïfs et touchants qu'elle contient. Il serait malheureusement trop aisé de faire le compte des poèmes en vieux français capables de séduire encore

le grand public par le charme d'un art psychologique tout moderne : la Chastelaine de Vergi est au nombre de ces œuvres fortunées. C'est donc une idée heureuse qu'a eue la traductrice, de présenter ce récit aux lecteurs anglais. M. L. Brandin s'est chargé de la besogne principale, l'édition du texte (où il change, à la leçon jusqu'ici admise, chevalier en chienet, au vers 393) et l'introduction. Dans ces pages substantielles, dont un juge autorisé a déjà dit la valeur (M. Jeanroy, dans la Revue critique), le savant professeur de Londres rappelle les larmes qu'a fait verser la poignante histoire, il en dit en excellents termes le charme toujours nouveau, puis, examinant l'origine du poème, il montre les difficultés historiques qui empêchent d'y voir comme on a voulu le faire le récit d'événements récents : il conclut que les noms propres si précis ne sont que le résultat d'une affabulation bourguignonne. Quelques pages retraçant la fortune du vieux poème, et la reproduction d'illustrations du xive siècle achèvent de faire de cette édition un agréable et utile volume.

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A. COUNSON.

LANGUES ET LITTÉRATURES GERMANIQUES.

207. Dr H. J. E. Endepols, Het decoratief en de opvoering van het Middelnederlandsche drama, volgens de Middelnederlandsche tooneelstukken. Amsterdam, C. L. Van Langenhuysen, 1903. 1.75 fl

En s'occupant de l'organisation du théâtre néerlandais au « moyen âge» (nous verrons tantôt ce qu'il faut entendre par ces mots), M. Endepols a fait incontestablement œuvre utile, bien qu'il ne soit pas arrivé à un grand nombre de résultats nouveaux ni définitifs. Nous n'avions jusqu'à présent que des données un peu vagues, des indications éparses; il importait qu'on réunît tout cela et qu'on l'examinât de près et à fond.

Partant du fait que l'art dramatique de nos contrées a subi l'influence des pays voisins, il nous fait d'abord connaître, en guise d'introduction, l'organisation du théâtre en France, en Allemagne et en Angleterre. Le second chapitre est consacré à quelques généralités sur l'importance des représentations scéniques chez nous; puis l'auteur examine successivement, dans les suivants, le théâtre, le décor, le costume des acteurs, la représentation, la musique et les figueren, c'est-à-dire, les tableaux vivants. Il aboutit ainsi à constater que, d'une part, l'art scénique avait atteint un degré surprenant de perfectionnement, de sorte que c'est à tort qu'on n'a montré jusqu'à présent qu'une médiocre estime pour l'habileté des régisseurs de ces temps, tandis que, d'autre part, il n'y a aucune solution de continuité,

mais un lien intime, au contraire, entre l'organisation des spectacles au moyen âge et au commencement du xviie siècle.

Sans m'attarder à faire des remarques de détail, à demander compte à l'auteur de certaines affirmations quelque peu hasardées, j'en arrive à une observation sur l'ensemble. Il nous est parvenu un petit nombre seulement d'œuvres dramatiques des xive et xve siècles; la grande majorité date du xvre : ce sont les productions nombreuses de l'époque des rhétoriciens. En réalité, par théâtre du moyen age, M. Endepols entend surtout celui du xvre siècle. Il eût été préférable, me semble-t-il, de marquer nettement les divisions chronologiques, et de suivre, autant que possible, l'évolution historique de l'art scénique. On ne peut pas mettre sur la même ligne, au point de vue de leur organisation, les représentations des abele spelen et les spectacles de la fin du xvie siècle. Faute d'avoir respecté l'ordre indiqué, M. Endepols n'est pas parvenu à donner une vue bien distincte;. tout est un peu confus. Bien plus, il paraît parfois conclure trop facilement de ce qui existait à une époque déterminée, par exemple au xvie siècle, à ce qui aurait existé antérieurement, et vice versa, déductions qui ne sont pas toujours permises.

A part cela, nous devons reconnaître que l'auteur a tiré le meilleur parti possible de ses matériaux, et qu'il a tenu compte de ce qui a été publié à l'étranger sur le même sujet pour d'autres pays. Aussi bien, sa monographie constitue, malgré l'absence de certaines distinctions. nécessaires, une contribution des plus intéressantes à l'histoire de l'art dramatique néerlandais. C. LECOUTERe.

208. G. Wethly, Dramen der Gegenwart. Kritische Studien. Strassburg, Brust, 1903. 203 pp. 3.50 m.

Cet ouvrage a beaucoup d'analogie avec celui de Zabel que nous avons analysé (p. 78); c'est aussi un recueil de critiques théâtrales. Toutes les nouveautés de la saison, les dernières œuvres des poètes dramatiques allemands à la mode y sont appréciées; parmi les étrangers figurent Rostand, Brieux, Echegaray, Björnsen, Ibsen et Shakespeare. L'ouvrage n'a pas les qualités de style de celui de Zabel, il ne se lit pas aussi agréablement; il est beaucoup plus allemand. L'auteur est un critique grave et sérieux, il possède une bonne et toute fraîche formation philologique et littéraire, il a des convictions profondes, qu'il se donne beaucoup de peine à faire partager au lecteur; les discussions de principe abondent dans son livre. M. Wethly débute par un examen des différences essentielles entre le drame classique et le drame naturaliste et les idées qu'il développe ici servent de base aux appréciations individuelles qui

suivent. Il faut connaître les œuvres dont parle le critique, sinon on le suivra difficilement dans ses dissections, qui n'épargnent aucun détail. M. Wethly n'est pas un esthète, un enthousiaste d'art comme M. Zabel; il appartient à l'école opposée, à celle des philologues littéraires. Il y a beaucoup de fond chez lui et si, comme je le suppose, cet ouvrage est son premier, nous pouvons fonder sur lui de sérieuses espérances. H. BISCHOFF.

209. — R. Franz, Grillparzer's Werke. Leipzig, Bibliogr. Institut, 1904. 2 m. le vol. relié.

Parmi les innombrables éditions de Grillparzer, qui paraissent coup sur coup depuis que ses œuvres sont tombées dans le domaine public, il y a lieu de signaler notamment l'édition critique de Rudolf Franz, qui paraît en ce moment dans Meyer's Klassiker-Ausgaben. Cette édition comprendra 5 volumes, dont deux ont paru. Le premier (432 pp.) débute par une biographie du poète (64 pp.), illustrée d'un beau portrait et d'un facsimilé, il contient en outre les poésies complètes et le drame de jeunesse de Grillparzer Die Ahnfrau. Une introduction spéciale oriente le lecteur sur ces œuvres. De nombreuses notes au bas de la page expliquent les poésies. A la fin du volume est placé tout l'apparat critique, notamment toutes les variantes, et de nombreuses notes de tout genre, qui occupent 70 pages de petit texte. Un index alphabétique clôt le volume. Le second volume (375 pp.) contient : Sappho et Das goldene Vlies, deux chefs-d'œuvre dramatiques de Grillparzer. De nouveau nous trouvons ici pour chaque œuvre une introduction critique et à la fin des commentaires et les variantes (30 pp. de petit texte). Qu'on se garde de confondre cette édition tout à fait scientifique avec les nombreuses éditions populaires qui paraissent en ce moment. H. BISCHOFF.

210.

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W. Schins, Le problème de la tragédie en Allemagne. Thèse de doctorat présentée à la faculté des lettres de Paris. Neufchatel, Delachaux et Niestle; Paris, F. Alcan, 1903. 83 p., 1,20 fr. La dissertation de M. Schins passe en revue les différentes théories de la tragédie qui ont été émises en Allemagne. Il commence par Lessing, qui n'a fait qu'interpréter Aristote à sa façon et pour les besoins de sa cause. Il y aurait eu lieu de citer ici l'important ouvrage de Bernays: Zwei Abhandlungen über die aristotelische Theorie des Dramas. L'auteur passe ensuite à ce qu'il appelle la théorie optimiste de la tragédie, représentée par Hegel, Schlegel, Kant et Schiller. Puis il expose la théorie pessimiste défendue par Schopenhauer et Hartmann, la théorie mythique - appellation moins heureuse-,

dont Nietzsche et Wagner se sont fait les champions, pour finir par la théorie positiviste de Lipps. Nous ne ferons pas un reproche à l'auteur de la sobriété de ses remarques personnelles à propos de ces différentes théories. Un résumé fidèle, qui réflète le développement de la pensée allemande sur un sujet si intéressant et si important est déjà un travail assez méritoire. H. BISCHOFF.

211.-H. Bischoff, Richard Bredenbruecker, der suedtirolische Dorfdichter. Eine literarische Studie. Stuttgart, A. Bonz, 1903. 87 pp. 1 m. (1). Ce modeste volume est une nouvelle tentative pour faire connaître au grand public une figure trop peu connue de la littérature allemande contemporaine et pour aider un écrivain, un poète de réel talent à se frayer un chemin vers le monde des lecteurs. M. Bischoff semble se complaire dans des explorations de ce genre: tâche méritoire assurément et souvent ardue, surtout lorsqu'elle exige, comme c'est le cas pour Bredenbruecker, la connaissance d'un dialecte spécial. Il a suivi les procédés que nous avons essayé de mettre en lumière à propos de son étude sur Hansjakob, le conteur de la Forêt Noire (Voy. Bull., t. VII, p. 32) (2), et il est parvenu, grâce à l'agréable variété d'une série de petits tableaux finement tracés, grâce aussi à la limpidité d'un style entraînant, à faire de son livre une lecture vraiment récréative. C'est un mérite rare dans un travail de ce genre.

La première partie est une esquisse rapide du caractère et des tendances du mouvement littéraire et artistique qui se développe dans certaines provinces autrichiennes, et nous présente les personnalités qui se sont fait un nom dans le domaine particulier des contes populaires et de la poésie villageoise. Nous y trouvons une appréciation générale des qualités et des mérites de l'œuvre de Bredenbruecker; nous apprenons à connaître les moyens originaux grâce auxquels celui-ci est parvenu à se pénétrer des idées, des mœurs, de la manière de voir et de sentir de la population tyrolienne, dont il est éloigné par la naissance et par l'éducation, l'étonnante fécondité de l'écrivain, la nature de son réalisme, l'objectivité de ses conceptions et ce qui constitue la saveur spéciale de ses écrits, enfin ce qu'on pense de lui dans les sphères littéraires allemandes.

La seconde partie offre une analyse minutieuse des divers ouvrages

(1) La présente étude a paru d'abord en flimand dans la revue Dietsche Warande en Belfort (Nov.-Déc. 1902, et en brochure chez A. Sitfer, à Gand.

(2) Depuis, ce travail a paru en allemand: H. Bischoff, Hansjakob der Schwarzwalder Dorfdichter. Eine literarische Studie. Mit einem Bildnisse. Kassel, G. Weiss, 1904. 1 m. 60

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