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47,5 et 45 mètres était bordée de trois côtés par une belle colon nade dorique. Le centre en était vide. Contre le mur de soutènement de la seconde terrasse, un tout petit temple ionique de marbre blanc, dans lequel se trouve un bassin où filtre une eau médicinale. Plus loin, d'autres sources, d'autres réservoirs, une belle fontaine, des bancs, des bases de statues; dans un angle, un soubassement circulaire, vestige malheureusement fort incomplet d'une Tholos. Cette esplanade était, sans aucun doute, le Kurplatz, l'endroit où les innom. brables clients du dieu guérisseur venaient prendre les eaux.

De pareils dégagements ne vont pas évidemment sans amener la mise au jour d'une très riche collection d'objets intéressants. De nombreux fragments de statues en marbre, des morceaux de sculpture, des bronzes, une série de terres-cuites allant du vie siècle jusqu'à l'époque romaine, d'innombrables monnaies dont plusieurs en argent, près de deux cents inscriptions parmi lesquelles il en est de fort instructives telle est la moisson récoltée jusqu'à ce jour; elle fait bien augurer de l'avenir.

L'histoire de la destruction de l'Asklepieion n'est pas encore bien claire. Il paraît certain que, dès le ive siècle, le sanctuaire était abandonné et qu'une population chrétienne était venue s'y fixer. D'innombrables monnaies découvertes au milieu des ruines le prouvent surabondamment. En 554, ce qui restait des anciens monuments fut détruit par un tremblement de terre. Puis, un village byzantin vint s'établir au milieu des décombres : une église s'éleva sur l'emplacement du grand temple, on ensevelit les morts tout autour dans le sol de la première terrasse. Des restes de maisons du moyen-âge ont été retrouvés un peu partout. Faut-il ajouter combien les débris de l'Asklepieion eurent à souffrir de ce voisinage et de la proximité de la ville moderne de Cos? Deux mosquées furent bâties avec des matériaux provenant des anciens sanctuaires. De beaux fûts de colonnes ioniques se voient dans les remparts de la forteresse qui commande le port, œuvre des chevaliers de Rhodes. Enlevées au temple ionique aussi, sans doute, ces colonnes admirables qui, dans la superbe gravure de Choiseul-Gouffier, soutiennent si gracieusement les branches d'un vénérable platane sur la place publique de Cos (Voyage archéologique en Grèce, 1782, t. I, p. 105), et qui furent détruites à leur tour, semble-t-il, depuis le jour où le voyageur français passa par là, car M. Herzog n'en fait nulle mention.

Tels sont les résultats des fouilles entreprises par M. Herzog. Leur importance n'échappera certes à personne. Le savant archéologue espère pouvoir terminer ses recherches dans le courant de l'été prochain et se propose d'explorer les alentours du sanctuaire. Déjà

des textes épigraphiques, des fragments architecturaux qui ne se rapportent à aucun des monuments mis au jour jusqu'à présent laissent entrevoir la possibilité de la découverte d'un stade et d'autres édifices.

Puisse la fortune continuer de prodiguer ses faveurs au vaillant professeur wurtembergeois et il ne sera pas téméraire d'affirmer que, dans un avenir très peu éloigné, l'Asklepieion de Cos constituera le digne pendant de ce magnifique ensemble archéologique qui a nom Epidaure. ALPHONSE ROERSCH.

PARTIE BIBLIOGRAPHIQUE.

128.

ANTIQUITÉ CLASSIQUE.

H. Hoppe, Syntax und Stil des Tertullian. Leipzig, Teubner, 1903. 9 mk.

M. Hoppe a commencé ce travail en 1894, sur le conseil de G. Wissowa, il a donc appliqué à la lettre le précepte d'Horace : nonum prematur in annum.

Dans l'introduction, il marque la place que Tertullien occupe dans l'histoire de la littérature latine et il s'efforce de faire ressortir ce qu'il y a dans son génie de primesautier et d'inattendu, de puissant et d'original. Puis, il débute par l'étude des cas. A l'occasion de chacun d'eux, il aligne la série souvent longue des verbes et des adjectifs qui se construisent avec ce cas, alors qu'à l'époque classique ils exigeaient une construction différente; il montre surtout le développement que prennent avec Tertullien l'accusatif déterminatif, l'accusatif complément interne, le génitif explicatif, le génitif partitif, les ablatifs de manière, de cause et de temps et surtout l'ablatif absolu, qui est devenu d'un emploi extrêmement étendu (Pud., 9 : filium prodigus satisfacto vedit). L'auteur est généralement complet en ce sens qu'il reproduit tous les exemples de Tertullien, à moins que la liste n'en soit absolument trop longue et l'énumération oiseuse. Quand il opère un rapprochement avec les auteurs classiques, il a toujours soin, quand le mot est rare, d'indiquer chez qui on le trouve, souvent aussi il compare Tertullien aux autres écrivains post-classiques. Il signale, quand il y a lieu, l'influence de l'hébreu et du grec; il cite de nombreux passages de la Bible qui ont été imités, quand ils n'ont pas été littéralement empruntés.

Le second chapitre est consacré à l'infinitif. Ici encore, nous ressentons de suite l'influence profonde du grec : l'infinitif peut être

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employé substantivement (Nat., I, 5: ut fines suos habeant inter dici et esse); mais, comme le latin n'a pas d'article, un tel emploi rend souvent la phrase obscure. Nous trouvons l'infinitif après des verbes qui ont pris un sens plus large (Scap., 5 inquirere accenditur), après des verbes impersonnels (pudet, sed aliter exprimere non est), après certains adjectifs (capax, cupidus, dignus est...), la proposition infinitive, avec des verbes dont le sens a changé (admittere = concedere; altercari= contendere; non dubitare... est).

Dans les chapitres III et IV, on étudie le gérondif et le participe; dans le chapitre V, les voix du verbe tels verbes qui étaient actifs, sont employés comme déponents (abstineri, consultari), d'autres qui étaient déponents, sont employés comme passifs (confiteri, gratulari); d'autres enfin, qui étaient transitifs, sont employés comme réfléchis (Hermog., 5: sic habente materia).

Le chapitre VI est consacré aux temps et aux modes : le futur est souvent employé avec la valeur d'un impératif ou du potentiel grec; la concordance des temps, telle que l'entendent les écrivains classiques, est fréquemment violée; semblablement, dans l'emploi des modes, nous trouvons l'indicatif pour le subjonctif dans les interrogations indirectes.

Dans le dernier des chapitres relatifs à la syntaxe, l'auteur examine les prépositions introduites par les conjonctions, quod, quin, quoniam, quam, quamvis, quando, dum, cum, ut, quatenus, si.

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La seconde partie du livre est consacrée au style de Tertullien. Ce qui frappe d'abord dans la langue de l'apologiste africain, c'est une abondance extraordinaire de substantifs abstraits : tantôt ils sont mis pour des adjectifs (Cult. f., I, 2: lumina lapillorum lapilli luminosi); tantôt ils sont employés au pluriel, pour marquer une action accomplie plusieurs fois ou un état relatif à plusieurs êtres (Res., 12 siderum absentiae). Beaucoup de substantifs sont employés adjectivement (Val., 15: o risum illuminatorem ! fletum rigatorem); inversément, on trouve pas mal d'adjectifs et de participes employés substantivement (Apul., 8: omnia ignaris praeparantur).

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Dans les chapitres X et XI, l'auteur étudie le sens et l'emploi des pronoms, des conjonctions et des adverbes; le point de comparaison, naturellement, est toujours l'usage classique. Un long chapitre a pour objet les mots nouveaux, qui abondent dans Tertullien et les sens nouveaux que prennent les mots anciens. Un autre étudie la brachylogie et l'ellipse : on est ici au cœur même du style de Tertullien et c'est ici qu'on découvre ses mille façons d'être concis jusqu'à l'obscurité.

Le chapitre XIV est consacré aux artifices de style: anaphore, alli

tération, clausules métriques (les plus fréquentes sont- -། -སྱཱ, ---), (c'est à dire le ditrochée, le crétique suivi d'un trochée et le double crétique), le parallélisme, la rime, les jeux de mots. Un chapitre spécial traite de la métaphore: l'auteur nous donne la liste alphabétique des substantifs, adjectifs et verbes, qui sont employés au figuré, alors qu'ils ne l'étaient que peu ou point à l'époque classique.

Enfin, un dernier chapitre nous donne une idée de l'imagination tout orientale de Tertullien, sous la plume duquel les idées abstraites se fondaient avec les mille phénomènes de la nature.

Il est visible que M. Hoppe a eu le souci d'être exact et complet dans ce long et minutieux travail. Si l'on peut lui faire un reproche, c'est d'avoir trop sacrifié aux détails et de n'avoir pas tiré de ceux-ci l'enseignement qui s'en dégageait trop rarement il a eu la bonne idée de résumer le résultat de ses recherches, de leur donner un cadre et d'en faire ainsi je dirais presque la philosophie. Son livre se consulte, mais il ne se lit pas. Au surplus, on se demande si l'auteur a bien pu croire que, pour avoir classifié et fait défiler devánt nous les artifices de rhétorique et les figures de style de Tertullien, il nous avait fait connaître son style; il eût peut-être mieux fait d'intituler son ouvrage : Langue de Tertullien.

Quoi qu'il en soit, nous avons là un livre substantiel, qui figurera désormais dans la bibliothèque des latinistes à côté de La latinité de St Jérôme de Goelzer et de La latinité des sermons de St Augustin de Régnier. J. HARDY.

129-130. Santi Consoli, L'autore del libro, de origine et situ Germanorum. Rome, E. Loescher, 1902, 133 p. 8o.

Ce n'est certes pas l'originalité qui manque au livre de M. Santi Consoli. Suivant celui-ci, l'auteur de la Germanie n'est pas Tacite, comme on l'a cru jusqu'ici, mais Pline l'Ancien, et cet opuscule n'est qu'une digression que Pline avait insérée dans ses 20 livres des Bella Germanica. Telle est la thèse M. Consoli, qui ne se dissimule pas qu'elle est hardie, essaie de la prouver dans un livre très savant, qui témoigne de beaucoup d'études et de lectures, mais qui n'a pas convaincu la critique Voici ses preuves: 1o Il n'est pas question dans la Germanie d'événements postérieurs à l'an 79; or, le premier ouvrage historique de Tacite, l'Agricola est de l'an 98. 2o La Germanie n'est mentionnée nulle part avant le xve siècle. 3° L'histoire de la découverte des ms. par Poggio est incertaine et c'est probablement par fraude que l'éditeur attribua cet écrit à Tacite. 4o Il y a concordance entre la Germanie et les autres écrits de Pline l'Ancien.

Enfin 5o, la comparaison avec les autres écrits de Tacite fait voir des différences sensibles. L'auteur n'a pas comparé le style de Tacite à celui de Pline: il se propose de le faire dans un autre ouvrage. Certes, si tout cela était prouvé, la thèse de M. Consoli le serait aussi; mais, malgré la science de l'auteur, on reste trop souvent sceptique à l'égard de ses arguments Nous ne voulons pas comparer sa thèse à celle d'un certain M. Hochard, qui soutenait, il y a quelque quinze ans, que l'auteur des écrits historiques de Tacite était Poggio, mais nous doutons qu'elle ait plus de chance d'être admise.

Ce qui précède était écrit, quand nous avons reçu le nouveau livre de M. Santi Consoli, La Germania comparata con la Naturalis Historia di Plinio e con le opere di Tacito. Rome, E. Loescher, 1903. 172 pp. 3 fr. Il se compose de deux parties divisées en deux sections: l'auteur compare successivement la Germanie à l'Histoire Naturelle et aux œuvres de Tacite, 1o au point de vue du vocabulaire, 2o au point de vue de la syntaxe. Il n'est plus guère question ici de la thèse hardie que nous venons d'exposer : ce sont de simples « recherches lexicographiques et syntaxiques », et à ce point de vue ce livre est fort intéressant: il contient beaucoup d'observations utiles sur la langue latine du premier siècle de l'Empire.

J. P. W.

131. H. L. Wilson, D. Junii Juvenalis saturarum libri V. Unversity publishing Co, New-York-Boston, 1903. LXXVIII-116 178 pp. Cette édition fait partie de la Gildersleevee-Lodge latin Series. L'auteur s'est fait connaître par divers travaux sur Juvénal (voy. p. LXXVII). Ici, il a pour but, non pas de faire avancer la science, mais de fournir le nécessaire aux étudiants qui s'appliquent pour la première fois à l'étude de Juvénal et d'aider ceux qui sont plus avancés à approfondir cette étude (Préface, p. III). Dans l'introduction de 78 pages, il traite du développement de la satire chez les Romains, de la vie de Juvénal, de ses satires et de l'histoire du texte: il consacre une trentaine de pages aux particularités de la langue et du style de Juvénal; puis il cède la plume à M. K. F. Smith, qui parle, en une douzaine de pages, de la métrique du poète. Enfin la bibliographie indique les éditions, les travaux sur les mss. et sur la critique du texte. Quant au texte de l'édition, M. Wilson nous dit qu'il diffère en 15 passages de celle de Bücheler (1893); dans huit de ces passages, il se trouve d'accord avec la nouvelle édition de S. G. Owen. Les satires II, VI et IX ne sont pas annotées, on devine pour quelle raison. Le commentaire des autres comprend 160 pages; tout y est expliqué : le plan et les idées, le style et la grammaire, les allusions historiques et mythologiques, et dans des notes placées au bas des pages, l'auteur

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