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relles de l'art, telles qu'on les voit apparaître dans le commun effort et la manière distincte de personnalités puissantes; que ces matières échappent à l'empire du particulier, car le vrai subsiste de lui-même, tandis que le faux disparaît, car les saines idées se développent sans cesse, tandis que les germes maladifs s'anéantissent. Elle nous apprend qu'il n'y a pas de Beau absolu, qu'il n'y en a jamais eu, qu'il n'y en aura jamais; qu'une forte intrusion du passé dans le présent est aussi dangereuse et anti-naturelle pour l'art, que pour le développement social et moral de l'humanité. Elle montre que toute vraie œuvre d'art, née d'une intime nécessité, porte en elle sa justification et a droit à un examen consciencieux; que les jugements du jour ne sont pas irrévocables; qu'enfin, comme le dit Ben Akiba: tout a déjà existé. »

Tels sont les hauts enseignements que M. von Oechelhaeuser voudrait voir tomber des chaires d'histoire de l'art. Je souscris de tout cœur à la plupart d'entre eux, et je tenais à les faire connaître.

VARIÉTÉS.

M. LAURENT.

469. La correspondance de Bentivoglio et les controverses de Jacques Ier, roi d'Angleterre, avec le cardinal Bellarmin. L'ouvrage du P. J. De la Servière, sur les controverses de Jacques Ier, roi d'Angleterre, avec le cardinal Bellarmin au sujet des relations de l'Église et de l'État (De Jacobo I Angliae rege cum cardinali Roberto Bellarmino S. 7. super potestate cum regia tum pontificia disputante (1607-1609). Paris, 1900, XXXI-169 p. in-8°) a obtenu un vif et légitime succès (1). En Belgique, par exemple, il a été fidèlement analysé par M. l'Abbé A. Bondroit dans la Revue d'histoire ecclésiastique, t. I, pp 760-772; il a de plus servi de base à une série d'articles aussi instructifs qu'attrayants publiés par M le Chanoine Ch. Scheys à titre de réponse aux questions d'histoire ecclésiastique discutées dans les conférences du diocèse de Tournai en 1901 et 1902 (Collationes dioecesis Tornacensis. Responsa ad quaestiones propositas mensibus Novembri 1901; Januario 1902; Maio et Julio 1902; nos 407; 409; 411; 413).

Si richement documenté que soit le travail, il est cependant une source assez importante qui paraît avoir échappé à l'attention de l'auteur aussi bien qu'à celle de ses critiques : nous voulons dire la

(1) Depuis que cet articulet a été envoyé à la Direction du Musée Belge, le R. P. De La Servière a repris le même sujet dans une série d'articles qui paraissent depuis mars 1903 dans les Études, Revue fondée en 1856 par des Pères de la Compagnie de Jésus.

correspondance du cardinal Bentivoglio, alors nonce de Flandre (1607 1615). Cette correspondance est encore en grande partie inédite; mais elle n'est pas tout à fait inconnue. Gachard, en effet, l'a utilisée dans sa notice sur Le cardinal Bentivoglio. Sa nonciature à Bruxelles (Bulletins de l'Académie royale des sciences, des lettres et des beauxarts de Belgique, 2o sér. t. XXXVIII (1874), PP. 154 ss.), et il en a tiré quelques renseignements des plus intéressants sur l'accueil fait par la cour de Bruxelles à l'œuvre du royal écrivain. Faute sans doute de connaître cette source, le R. P. de la Servière s'est forcément contenté de signaler le fait (p. 112), sans en exposer les circonstances, alors qu'il rapporte au long les péripéties de l'accueil fait à ce livre par la cour de France. Il est donc regrettable qu'elle ait échappé à son attention C'est pour réparer cet oubli que nous. revenons ici sur ce sujet. Nous ne nous bornerons pas d'ailleurs aux informations de l'éminent archiviste nous donnerons surtout des renseignements inconnus à Gachard lui-même, sans vouloir d'ailleurs être complet; car il nous faudrait pour cela posséder toute la correspondance de Bentivoglio. Il nous suffira d'avoir attiré l'attention sur ce point.

Et tout d'abord, pour situer les détails rapportés par Bentivoglio dans l'ensemble de la controverse, rappelons, dans l'ordre historique de leur apparition, la série des principales œuvres polémiques. publiées tour à tour par le cardinal Bellarmin et le roi Jacques Ier. A la suite de l'intervention de Paul V et du cardinal Bellarmin dans la question du serment de fidélité, Jacques Ier, aidé des théologiens anglicans, publiait en 1607, sans la signer, son œuvre Triplici nodo triplex cuneus sive Apologia pro juramento fidelitatis. Bellarmin lui répon dit, en 1608, sous le pseudonyme de Matthieu Torti, par un ouvrage. intitulé Responsio ad librum inscriptum Triplici nodo triplex cuneus. L'année suivante, en guise de contre-réponse, son royal contradicteur donnait une nouvelle édition de son œuvre précédée d'une praefatio monitoria. Bellarmin prit de nouveau la plume et publia une Apologia pro responsione sua ad librum Jacobi I... Jacques Ier avait déclaré dans sa praefatio monitoria qu'il ne répondrait plus à son adversaire. Il tint parole, mais la controverse n'en continua pas moins dans la suite.

Peu importe ici d'ailleurs; car le point auquel se rapportent les lettres de Bentivoglio est précisément la publication de la praefatio monitoria et de la seconde édition de l'œuvre de Jacques Ier; elles nous instruisent surtout sur l'accueil fait à cet ouvrage à la cour de Bruxelles où résidait Bentivoglio.

Appelé de par sa mission à promouvoir les intérêts de l'Église en Angleterre, celui-ci s'employait de tout son zèle à renseigner la cour

de Rome sur les tristes évènements de l'Angleterre, dont «le roi était l'ennemi le plus grand et le plus déclaré de l'Église romaine ». C'est ainsi qu'après avoir souvent parlé et traité des affaires religieuses de là-bas, après avoir envoyé à Rome, en avril 1609, une relation sur la situation troublée de ce pays, il continue à donner une attention spéciale aux nouvelles d'outre-Manche, principalement à celles qui regardent la publication de la praefatio monitoria Après en avoir signalé l'imminente apparition dans ses lettres précédentes, le 9 mai 1609 il en annonce finalement la publication dans les termes suivants qui indiquent en même temps l'idée qu'on lui avait donnée du contenu de l'ouvrage : « En ce qui regarde le livre du roi d'Angleterre, les nouvelles les plus fraîches venues de cette cour portaient qu'il est sorti des presses il y a quelques jours et qu'il se répand. Le contenu n'est quasi autre chose qu'une longue lettre du roi dans laquelle il renouvelle la vieille cantilène des hérétiques, s'efforçant de montrer, comme je l'ai déjà écrit, que le pape serait l'antechrist et de persuader à tous les princes qui se tiennent sous l'obéissance de Sa Sainteté, de la lui refuser et de se soustraire à ce joug. En tête de tous est mentionné l'empereur, à ce que j'entends dire, et puis les autres l'un après l'autre; le roi cherche de les persuader de faire une ligue et grâce à cette ligue de détruire de fond en comble l'Église romaine et son chef. Le roi dit grand mal du collège des cardinaux et nommément du cardinal Bellarmin. Il dit qu'il n'a pas voulu répondre à Matteo Torto parce que c'est un auteur vil et inconnu et qui a montré trop d'audace à mettre la main à une matière regardant un roi aussi grand. Ledit livre, comme je l'ai dit, est sorti des presses et s'est répandu. Depuis, le roi s'étant repenti et ayant fait plus grande réflexion sur le conseil que beaucoup lui avaient donné de ne pas publier un tel livre, comme étant vain et léger et d'aucune substance et nullement convenable à sa dignité, il a publié un édit de cette teneur que Sa Majesté ayant apris que son livre intitulé Apologia avait été imprimé et, par trop d'empressement du libraire, publié incorrect, pour cel motif Elle ordonnait que toute personne qui en avait un exemplaire devait le reporter immédiatement chez ledit libraire, en retour de quoi elle aurait un autre exemplaire corrigé. Tel était le contenu de l'édit. De cette manifestation de repentir et de légèreté est résulté grand étonnement et rire et mépris en même temps de la personne du roi parmi les siens mêmes et parmi les plus attachés à sa cause contre la cause catholique. Ici ce livre n'est pas encore arrivé, mais cependant on vient de me donner avis qu'il arrivera sans tarder... » (Archives vaticanes, fonds Borghèse, II, 98, f. 106).

Bentivoglio le reçut effectivement le 14 mai. Fait littéraire qui

paraît avoir échappé au R. P., l'ouvrage était en anglais, Bentivoglio s'empressa d'en faire composer un résumé en latin et d'en faire traduire quelques parties pour les envoyer immédiatement à Rome (lettre du 16 mai 1609. Bibliothèque Barberini, LXIV. 8, f. 416). Quelques semaines plus tard, l'œuvre paraissait en latin. Au titre Admonitio ad principes, Bentivoglio soupçonna qu'elle serait offerte à tous les princes. « C'est pourquoi, dit-il dans sa lettre du 20 juin 1609 (Archives vaticanes, fonds Borghese, II, 98, f. 143), ayant estimé qu'il doit être conforme au sentiment de Notre Seigneur qu'aucun prince catholique ne se laisse contaminer non seulement l'esprit, mais pas même les oreilles ni les mains en recevant un tel livre, j'ai fait les diligences qui convenaient à cette fin, auprès du Sérenissime archiduc... » Par le même courrier Bentivoglio adressait à Rome un exemplaire de l'ouvrage et il avisait ses confrères les nonces des autres pays de l'apparition de ce livre, pour leur permettre de faire les démarches opportunes auprès des princes auprès desquels ils étaient accrédités.

A Rome l'on attendait avec inquiétude « l'enfantement monstrueux du roi d'Angleterre (Lettre du secrétaire d'État à Bentivoglio, de Rome le 2 mai 1609. Archives vaticanes, Nunziatura di Fiandra, t. 136. Cfr fonds Borghese, II, 103) et l'on avait demandé à Bentivoglio d'envoyer un exemplaire de l'ouvrage s'il en venait aux Pays-Bas (Lettre du 30 mai 1609. Ibidem): l'on fut très content du sommaire qu'il en communiqua dans sa lettre du 9 mai et celle du 16 mai (Lettre de Rome du 13 juin 1609. Ibidem). A l'exemple de Bentivoglio, la Cour de Rome écrivit aux nonces de tous les pays au sujet de ce livre (Lettre du 11 juillet 1609 Ibidem); de plus, elle adressa à Bentivoglio une liste des principales hérésies contenues dans cet ouvrage avec ordre, de la part du pape, de les communiquer à quelque théologien éminent pour en obtenir la réfutation (Autre lettre du 11 juillet. Ibidem). En même temps il lui était recommandé de réitérer souvent ses offices auprès de l'archiduc pour entretenir celui-ci dans son dessein de refuser un hommage du royal auteur (Première lettre du 11 juillet 1609). Cette conduite de l'archiduc serait un bon exemple donné à tous les princes (Lettre de Rome du 18 juillet. Ibidem).

Entretemps, Bentivoglio n'avait pas manqué de renouveler ses démarches. Elles n'étaient d'ailleurs guère nécessaires pour décider un prince aussi attaché au Saint-Siège à refuser pareil cadeau. L'archiduc Albert ne voulait pas d'abord croire que Jacques Ier en vînt à lui offrir un exemplaire par l'intermédiaire de son ambassadeur; mais en tout cas, si on le lui offrait, il était bien décidé à montrer en cette occasion combien il faisait peu de cas de ce qui se disait et

de ce qu'écrivait le roi d'Angleterre contre l'autorité du Souverain Pontife et à montrer combien grand était son respect et sa soumission envers l'Église romaine et son chef suprême (Lettre de Bentivoglio du 20 juin 1609, citée supra). Effectivement Jacques Ier voulut prouver, selon l'expression de Bentivoglio, qu'il était aussi vaniteux qu'impie. Il fit offrir un exemplaire de son ouvrage aux archiducs ainsi qu'à tous les princes (Lettre du 27 juin 1609. Archives vaticanes, fonds Borghèse, II. 98, f. 157); mais il éprouva à la Cour de Bruxelles un refus humiliant, ainsi que l'a rapporté Gachard (loco citato) d'après les lettres mêmes de Bentivoglio. « Je ne pourrais, écrit le nonce le 11 juillet 1609 (Archives vaticanes, Nunziatura di Fiandra, t. 12, A, f. 5), exprimer à Votre Illustrissime Seigneurie l'horreur montrée par l'Infante (Isabelle) pour le livre et les concepts impies qu'il contient ». Heureux de ce succès, le nonce exprime le vœu que le pape s'adresse à l'archiduc pour le féliciter et il ajoute : « J'informerai les nonces de la décision prise par l'archiduc au sujet de ce livre pour que l'exemple d'un si grand prince puisse plus facilement porter les autres à faire la même chose. (Ibidem). Humilié et profondément irrité du refus qu'il avait essuyé en présentant l'ouvrage au nom de son maître, l'ambassadeur anglais, sir Thomas Edmonds, demanda et obtint son rappel. Loin d'émouvoir le nonce, ce départ lui fut une nouvelle source de joie; car, écrit-il le 18 juillet 1609 (Ibidem, f. 31), « on ne pourra lui donner pour successeur qu'un meilleur personnage, cet ambassadeur étant vraiment d'une nature très perverse ». A. CAUCHIE.

470. Il parait en ce moment une nouvelle édition complètement refondue et considérablement augmentée de Meyer, Grosses Konversationslexikon. Cette 6e édition comprendra 20 volumes (10 m. le vol. relié), tandis que les éditions antérieures n'en avaient que 17. L'ouvrage complet contiendra cette fois près de 150,000 articles sur 18,240 pages de texte, avec plus de 11,000 illustrations, cartes et plans dans le texte, et 1400 tableaux coloriés, parmi lesquels bon nombre d une valeur scientifique et artistique telle, qu'aucun lexique n'en présente de semblables. La dernière édition avait été tirée à un million d'exemplaires, qui ont été vendus en une demi-douzaine d'années. Ce succès colossal permet au Bibliographisches Institut de faire les frais nécessaires pour s'assurer la collaboration de somnités de la science dans tous les domaines, pour assurer par conséquent au texte toute la valeur scientifique et la sûreté d'information, et à l'illustration tout le fini que l'on peut désirer. Cette dernière partie est plus importante dans Meyer, que partout ailleurs. Déjà dans l'édition précédente on avait consacré 60 tableaux à l'ethnologie, 27 à l'anatomie, 193 à la zoologie, 140 à la botanique, 62 à la mineralogie, 18 à la géologie, 28 à la physique, 27 à l'astronomie, 141 à la technologie, 24 à la science minière, autant à l'électrotechnique, 76 à l'architecture, 51 à la science militaire, 71 à l'agriculture, 69 à l'histoire de l'art, 61 à l'industrie de l'art. 14 à l'écriture, 120 à la géographie politique, 56 à la géographie physique, outre les nombreux portraits d'hommes célèbres, les cartes historiques, les plans de ville,

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