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ftyle eft d'autant plus épistolaire qu'il eft plus fouvent négligé, & qu'elle n'a peut-être jamais fongé à écrire une belle Lettre (2). Mais que ne fait-on point, même fans y penfer, avec du génie, de l'efprit, & une imagination fertile & riante? Tout s'embellit fous la plume de Madame de Sévigné, tout y prend de la vie & de la couleur, & jufqu'à fes pensées les plus brillantes, il ne lui échappe rien qui ne femble être amené par un fentiment fin & délicat ; en forte que fon efprit ne marche, pour ainfi dire, qu'à la fuite de fon cœur. Mais c'est trop m'arrêter fur un fujet, au-def

me de la Fontaine pour les Fables. Ce font deux modeles fi parfaits, chacun dans leur genre, que c'est déja un affez grand mérite que de bien fentir feulement ce qu'ils valent. Ille fe profeciffe fciat, cui Cicero valdè placebit Quint.

(2) Voyez la deuxieme Note de la Lettre XLVII du Tome VIII, où Madame de Sévigné fait la critique des Lettres trop étu diées.

fous duquel je ne pourrois que demeurer; & je me hâte de rendre compte de la conduite que j'ai tenue dans cette feconde Edition.

Toutes les Lettres nouvelles font marquées en haut d'un aftérifque (*); mais lorfque dans les anciennes il y a quelque article nouveau d'inféré, & qu'il eft tant foit peu intéreffant, l'aftérifque eft placé, felon le befoin, ou au commencement, ou dans le corps de la Lettre, & l'article eft continué jufqu'au premier alinéa. Si, au contraire, l'article nouveau n'eft que de quelques lignes, il ne fera marqué d'aucun (*). Mais pourquoi, dira-t-on, tant de chofes nouvelles dans quelques-unes des Lettres qu'on a déja vues? C'eft qu'elles avoient été imprimées fur des copies imparfaites, & que les originaux m'en font revenus dans la fuite. Quant aux notes, les anciennes ont été prefque toutes, ou changées, où re

L'EDITEUR. xiij fondues, & le nombre en eft, d'ailleurs, très-augmenté dans cette Edition; de forte que le Lecteur s'appercevra fans peine que rien n'a été oublié de ce qui pouvoit fervir à l'intelligence des endroits qui avoient befoin d'éclairciffement. Ce n'eft pas que je croie n'avoir rien laiffé à défirer làdeffus; car outre plufieurs traits, dont la clef ne pouvoit fe trouver que dans les réponses de Madame de Grignan (3), j'avouerai qu'il y en a d'autres à l'explication defquels j'ai renoncé, lorfqu'il m'a paru que pour les bien entendre il falloit avoir vécu dans la fociété de Madame de Sévigné : mais à l'égard des chofes ou des faits qui étoient de nature à s'expli

(3) On eft perfuadé que les Lettres de la fille à la mere n'exiftent plus, & qu'en 1734, c'est-à-dire, lorfque les quatre premiers Tomes des Lettres de Madame de Sévigné parurent, celles de Madame de Grignan furent facrifiées à un fcrupule de dé yotion.

quer les uns par les autres, j'ai eu foin, autant qu'il m'a été poffible, de renvoyer aux différentes pages où il en eft fait mention.

Il me reste encore un mot à dire au fujet de la révision exacte que j'ai faite des Lettres anciennes fur les originaux: elle étoit d'autant plus néceffaire, qu'elle m'a mis en état de reftituer non-feulement bien des endroits qui avoient été fupprimés, & d'en fupprimer d'autres que j'ai jugé moins dignes de l'impreffion; mais auffi de corriger des fautes même effentielles, qui s'étoient gliffées jufques dans l'Edition de Paris en fix Volumes, & que les différentes réimpreffions avoient encore multipliées au point que le texte en étoit fouvent défiguré. Qu'il me foit donc permis d'af furer que cette feconde Edition augmentée pourra fe faire cftimer encore du côté même de la correction. Je ne ferois pas furpris néanmoins qu'elle déplût au

tant que la précédente à l'Auteur de certain Dictionnaire (4), qui femble n'y avoir compris les Lettres de Madame de Sévigné, qu'afin de les envelopper dans le dif crédit, où il s'eft flatté de faire tomber un fi grand nombre de nos meilleurs livres de morale & de piété. Mais que peuvent les efforts d'un tel adverfaire ? Il eft à peu près auffi avancé que le feroit quiconque auroit entrepris de prouver férieufement que la lumiere eft moins défirable que les ténebres.

(4) Voyez le Dictionnaire des livres Janféniftes, page 527, tome 2.

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