VIII. Le Cheval et le Loup. Un certain loup, dans la saison Un loup, dis-je, au sortir des rigueurs de l'hiver, Bonne chasse, dit-il, qui l'auroit à son crọc! Qu'il connoît les vertus et les propriétés Qu'il sait guérir, sans qu'il se flatte, Une apostume sous le pied. Mon fils, dit le docteur, il n'est point de partie J'ai l'honneur de servir nosseigneurs les chevaux, Mon galant ne songeoit qu'à bien prendre son temps, Afin de happer son malade. L'autre, qui s'en doutoit, lui lâche une ruade Qui vous lui met en marmelade Les mandibules et les dents. C'est bien fait, dit le loup en soi-même, fort triste; Et ne fus jamais que boucher. IX. Le Laboureur et ses Enfants. C'est le fonds qui manque le moins. Un riche laboureur, sentant sa mort prochaine, Fit venir ses enfants, leur parla sans témoins. Gardez-vous, leur dit-il, de vendre l'héritage Que nous ont laissé nos parents: Un trésor est caché dedans. Je ne sais pas l'endroit : mais un peu de courage Vous le fera trouver; vous en viendrez à bout Remuez votre champ dès qu'on aura fait l'oût: Creusez, fouillez, béchez, ne laissez nulle place Où la main ne passe et repasse. Le pere mort, les fils vous retournent le champ, Deça, delà, par-tout; si bien qu'au bout de l'an Il en rapporta davantage. D'argent, point de caché. Mais le pere fut sage De leur montrer, avant sa mort, X. La Montagne qui accouche. U NE montagne en mal d'enfant Que chacun, au bruit accourant, D'une cité plus grosse que Paris: Elle accoucha d'une souris. Quand je songe à cette fable, Je me figure un auteur Qui dit : Je chanterai la guerre Que firent les Titans au maître du tonnerre. C'est promettre beaucoup : mais qu'en sort-il souvent? Du vent. X I. La Fortune et le jeune Enfant. SUR le bord d'un puits très profond, Un enfant alors dans ses classes: La Fortune passa, l'éveilla doucement, Je vous demande, en bonne foi, Si cette imprudence si haute Provient de mon caprice. Elle part à ces mots. Pour moi, j'approuve son propos. Il n'arrive rien dans le monde, Qu'il ne faille qu'elle en réponde: Elle est prise à garant de toutes aventures. XII. Les Médecins. Le médecin Tant-pis alloit voir un malade E Que visitoit aussi son confrere Tant-mieux. Après qu'en ses conseils Tant-pis eut été cru. L'un disoit : Il est mort; je l'avois bien prévu. XIII. La Poule aux œufs d'or. L'AVARICE perd tout en voulant tout gagner. Que celui dont la poule, à ce que dit la fable, Belle leçou pour les gens chiches! Pendant ces derniers temps, combien en a-t-on vus XIV. L'Ane portant des Reliques. S'imagina qu'on l'adoroit: Maître baudet, ôtez-vous de l'esprit Ce n'est pas vous, c'est l'idole, D'un magistrat ignorant XV. Le Cerf et la Vigne. Un cerf, à la faveur d'une vigne fort haute, Les veneurs, pour ce coup, croyoient leurs chiens en faute. Ils les rappellent donc. Le cerf, hors de danger, J'ai mérité, dit-il, ce juste châtiment: |