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Voici l'analyse de cette ordonnance :

Il est enjoint à tous les habitants de se comporter, dans l'église et pendant les offices religieux, avec recueillement sans pouvoir y causer, rire ou s'y promener.

Il leur est défendu d'entrer dans l'église en habits indécents ou en vestes; de conduire leurs chiens dans l'église.

:

Il est défendu aux parents de laisser courir dans la nef et dans le chœur les enfants, avec recommandation de les faire sortir lorsqu'ils pleurent trop longtemps.

Aux garçons et aux filles de s'attrouper aux processions pour y rire, causer et badiner, sous peine de trente sols d'amende.

Aux fidèles d'attacher aux murs de l'église leurs chapeaux ou autres objets; de troubler les chantres ou le chœur, en affectant une voix discordante.

Aux quêteuses de faire à l'avenir plus d'une révérence à chaque personne, à peine de dix livres d'amende, tant contre les quêteuses que contre les garçons ayant exigé plus d'une révérence.

Aux aubergistes et cabaretiers de recevoir des habitants de Perthes pendant les offices religieux.

Aux habitants de travailler les dimanches et jours de fête sans nécessité et sans permission,

Aux jeunes gens de s'assembler aux jours de mariages pour gagner les gants à peine de vingt livres d'amende.

Enfin, les pères et mères, maitres et maîtresses sont déclarés responsables de leurs enfants, serviteurs et domestiques.

Nous apprenons avec plaisir que, dans sa séance solennelle du 1er mars, l'Académie des sciences a accordé une récompense de mille francs, pour ses découvertes paléontoligiques dans les environs de Reims, à M. le docteur Lemoine, professeur à l'Ecole de médecine de Reims.

On vient de découvrir à Reims, en pratiquant des fouilles pour l'installation de tuyaux de gaz, un vase contenant 450 monnaies de Gordien III.

Une découverte de grande importance vient d'être faite dans les travaux de déblais, qui ont eu lieu sur l'emplacement de l'ancien presbytère de Saint-Memmie, à Châlons, non loin du tombeau même du grand saint qui, le premier, évangélisa les Châlonnais.

Les ouvriers terrassiers ont mis au jour des débris de l'époque gallo-romaine et notamment des petites fioles en verre irrisé.

Elles ont été cédées à un amateur.

Il est regrettable que l'autorité compétente ne se soit pas émue de cette trouvaille, afin d'assurer, s'il y avait lieu, la conservation, en un lieu consacré, de vases précieux.

La Société historique de Langres a décidé la publication des cartulaires de Vignory, par M. d'Arbaumont; ce sera un précieux document pour l'histoire de la Haute-Marne.

Mile Lescornet vient de léguer au musée de Langres le portrait de son frère Joseph.

On vient de découvrir à Langres les traces d'une voie romaine inconnue jusqu'à présent: elle passe sous la porte romaine et traverse le chemin de cette ville à Brevoines.

Mentionnons encore, pendant que nous parlons de la Haute-Marne, la publication dans le Bulletin de la Société de Langres, d'une plaquette très-rare que possède M. Brocard: « Déclaration et protestation du Roy, faite le 11 août 1589, avec une lettre dudit seigneur roy addressée aux sieurs de Langres, plus la réponse d'iceux. A Langres : M. D. LXXXIX. »

Notre collaborateur, M. Morel, actuellement receveur des finances à Nyons (Drôme), continue avec succès les fouilles qu'il a si fructueusement pratiquées en Champagne. Il vient de découvrir dans les environs de cette ville une salle romaine pavée en mosaïque; il y a trouvé de nombreux débris de poteries romaines, une bague, des épingles en buis, etc.

M. Grivot, procureur de la République à Vouziers, vient de publier un intéressant travail sur la pêche à la ligne au point de vue judiciaire.

M. Henri Renault du Motay vient de publier dans le Journal de la Marne de janvier une étude très soigneusement composée sur notre pape Urbain II, qu'il appelle avec raison « une de nos gloires nationales. M. du Motay le fait descendre des sires de Châtillon : c'est une erreur que nous démontrerons prochainement. Urbain était fils du sire de Lagery qui n'avait aucune parenté, croyons-nous, avec les Châtillon, mais était vraisemblablement leur vassal. M. du Motay, dans

une note, mentionne les Châtillon de Châlons, qui ont fourni tant d'éminents ingénieurs militaires au xviie siècle, en ajoutant qu'il ne lui semble pas qu'il existe une communauté d'origine avec les puissants châtelains de la vallée de la Marne; jamais cette communauté n'a même été soulevée et nul n'y avait jamais songé: l'origine des Châtillon de Châlons est parfaitement connue et leurs armes ne laisseraient, au besoin, subsister aucun doute.

Le Secrétaire Gérant,

LEON FREMONT.

LES ROIS DE FRANCE A TROYES

AU SEIZIÈME SIÈCLE

Les fêtes données par les villes au seizième siècle pour honorer l'entrée des rois de France ont eu un incomparable éclat; elles témoignaient de l'accroissement de leur pouvoir et du respect qu'il inspirait. La première entrée des rois dans les villes était une sorte de prise de possession, un acte visible de souveraineté. Il semblait jusqu'alors qu'une sorte de consécration manquât à leur autorité. Le maréchal de Vieilleville raconte qu'après la mort de François Ier, Henri II se rendit à Paris non pour y paroistre en roy, car il n'y avoit pas encore fait son entrée, mais en habit incogneu pour donner ordre aux affaires. Depuis Charles VIII, la plupart des rois de France se conformèrent à cette coutume qui tomba complètement en désuétude à partir de Louis XIV. La monarchie était alors assez puissante pour ne plus avoir besoin de ces formes. La présence du roi fut toujours regardée comme un honneur, mais elle n'avait plus la même signification. C'était un honneur d'autant plus apprécié que l'entrée solennelle n'était pas l'apanage de toutes les cités. Lorsqu'Henri II traversait les villes sans importance, il les « passait en chasseur, sa trompe en écharpe1. Mais Troyes méritait bien que le roi « se parât » en sa faveur, et l'on verra que ses habitants n'épargnèrent rien pour accueillir d'une manière brillante les princes qui y entraient pour la première fois au milieu d'un cortège imposant et nombreux.

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Ces cérémonies fournissaient aussi l'occasion de mettre en relief le talent des artistes que la ville renfermait en grand nombre et de montrer sa richesse, son goût et ses ressources. Les comptes municipaux, les délibérations de l'échevinage, que nous avons pu consulter, nous permettent d'essayer de reconstituer quelques-unes des décorations superbes et éphémères que l'on élevait dans ces circonstances et de pénétrer, non-seulement sur le théâtre où se déployait la fête, mais dans les coulisses où on la préparait. Ils nous révèlent aussi des

1. Mémoires du maréchal de Vieilleville, liv. II, ch. X, liv. III, ch. IX.

mœurs et des usages disparus, et nous font voir quelques traits du caractère des hommes de ce temps dans les réjouissances auxquelles ils se livraient. On peut juger en effet du degré de civilisation d'un peuple par la nature des plaisirs qu'il recherche et qu'il prend.

I

LOUIS XII

I

Transportons-nous par la pensée dans un des carrefours de la ville de Troyes, en l'an 1500. Représentons-nous l'aspect étrange et pittoresque d'une ville du moyen-âge construite en bois, avec ses maisons aux portes étroites, aux escaliers saillants qui sont défendus par leurs bornes de pierre, aux étages s'avançant les uns sur les autres et dominés par le toit proéminent du pignon. Toutes ces maisons présentent une physionomie distincte; les unes sont couvertes d'ardoises, sombres sous le ciel nuageux, étincelantes au soleil; les autres montrent sur leur paroi le réseau de leur charpente enchevêtrée; celles-ci leurs lignots ciselés, leurs poutres sculptées; celles-là sont revêtues de peintures à fresque ou décorées de statues. Ajoutons de toutes parts des enseignes étranges ou bizarres, tableaux ou emblêmes, suspendus à des potences de fer forgé; des devises joviales, philosophiques ou pieuses; des blasons rehaussés d'enluminures; çà et là des tourelles accrochées aux façades ou placées en encorbellement dans les encoignures; par dessus les pignons, au-dessus des gargouilles, dressons les épis en terre cuite ou les girouettes en métal découpé dont la silhouette tranche sur le ciel clair; plaçons enfin, au-delà de la perspective échancrée et inégale des rues, les flèches aiguës des églises, qui se présentent aux regards toutes les fois que les faites des maisons permettent de les apercevoir.

C'est dans ces carrefours que le trompette de l'échevinage appelle les habitants, le 21 juillet 1500. Il est vêtu, selon l'usage, d'une casaque mi-partie bleue et violette, sur les manches de laquelle sont brodées les armes de la ville; il fait entendre au loin les notes claires de son instrument, dont la banderolle porte le blason de France et celui de la cité. Le sergent crieur

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