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Louis XIV n'a pas été étranger à cette disparition; n'ayant plus ce grand-maître il a pu satisfaire ses passions déréglées et étaler un faste ruineux, il s'est livré à un trafic honteux et criminel sur les biens de ce grand personnage sans en donner aucun compte aux

héritiers.

Il s'en suit de cette spoliation que tous les biens de votre commune sont des biens de mineurs, et que vous en devez un compte fidel aux héritiers de Maria Chauvin, qui sont en ce moment en instance auprès de M. le ministre de la justice. Je vous donne cet avis pour votre gouverne afin que vous puissiez commencer de suite dans votre administration les travaux de réaction qui sont nécessaires pour régler avec les héritiers.

« Veuillez agréer, Messieurs, mes bien sincères salutations,
« BERTIN-MORISSARD: »

Nous devons encore à M. l'abbé Gross la copie de l'inscription suivante, qui se trouve sur une dalle tumulaire provenant d'une abbaye voisine de Lévignan, actuellement conservée au château de Collenance. La tombe est celle de Anne Lallemant de Lestrée, morte à 22 ans après trois ans en religion.

A l'âge de seize ans je consacray mon âme

Par le feu de l'amour à mon divin époux;

Il rendit mes travaux moins fâcheux et plus doux,
En coupant, de mes ans, six ans après la trâme.

Il me donna le temps de prononcer mes vœux

Et m'ôta les moyens de ralentir mes feux,

Mais ne j'ay trop peu fait pour vouloir qu'on me loue.
Comme un fleuve qui veut bientôt finir son cours,
Embrasse dans son lit moins de terre et de boue,
Pour finir mes péchés, Dieu raccourcit mes jours.

On sait que la famille Lallemant de Lestrée était une des plus notables de Châlons, dont la dernière représentante, la marquise de Massiac, y est mort récemment.

Plusieurs familles du nom de Lallemant existaient à Chalons-surMarne. Celle des seigneurs de Lestrée portait de sable au chevron d'or, accompagné de trois étoiles de même, celle de pointe sommée d'un besan aussi d'or. Une autre dont une branche demeura à Châlons et se continua jusqu'à la fin du siècle dernier. Toutes deux sortaient de la vieille bourgeoisie châlonnaise. La branche de la famille Lallemant, qui nous occupe en ce moment, remonte à Louis Lallemant qui acquit une charge de secrétaire du roi en 1671, ayant épousé en 1656 Marguerite Germain, fille d'un riche négociant en fers. Son fils, Charles-Louis Lallemant, crée comte de Levignen en 1723. seigneur de Betz, Macquelines, Ormoy, fut receveur général des finances à Soissons, puis fermier général, et mourut le 18 février 1730, ayant eu de Catherine Trois-dames :

Louis, comte de Levignen, maître des requêtes en 1719, intendant d'Alençon en 1726, marié avec postérité.

Jacques, évêque de Seez, mort le 6 août 1740.

Michel, seigneur de Betz, fermier général, marié à Marguerite Maillet de Batilly, d'où: Marie-Charlotte, dame de madame la Dauphine, puis de madame seconde Dauphine, mariée en 1736 à Philippe de Pont-Saint-Maurice, lieutenant général; et Marie-Françoise, mariée le 17 février 1749 à Gabriel Florent, comte de Choiseul-Beaupré, lieutenant général en Champagne, d'où les Choiseul-Praslin et les Choiseul-Daillecourt.

-

Etienne, seigneur de Nantouillet, fermier général, marié à Marie Boutin leur fils unique épousa en 1755 Mile de Damat-Crux.

:

N..., femme de Paul Hébert du Buc, maître des requêtes. Charlotte, mariée en 1715 à M. le Pelletier de la Houssaye, intendant des finances, seigneur de Signy.

Deux filles religieuses de la Visitation à Paris.

Alexis, seigneur de Macquelines, écuyer ordinaire du roi, mariée en 1743 à Marie Le Cocq, fille d'un maître des requêtes, d'où postérité. L'autre branche demeurée à Châlons y occupa une situation des plus distinguées. Nous lui consacrerons bientôt une étude dans la Revue.

LE MONUMENT DU GÉNÉRAL DE LA MORICIÈRE AU MUSÉE de Troyes. L'administration du Musée de Troyes vient de faire disposer sur un cénotaphe dessiné spécialement par un architecte de Paris les beaux modèles en plâtre des statues du tombeau du général de la Moricière que M. Paul Dubois a bien voulu donner au Musée du chef-lieu du département où il est né. Si la cathédrale de Nantes possède le tombeau définitif exécuté en marbre et en bronze, sous lequel reposent les restes du héros chrétien, le Musée de Troyes a les modèles des figures allégoriques, si fières, si expressives et si nobles qui décorent le tombeau et que l'on a pu admirer aux expositions de Paris. Mieux que le bronze, le plâtre a conservé l'empreinte de l'inspiration de l'artiste; on y voit pour ainsi dire le premier jet et la retouche; on y sent davantage la pensée et l'exécution. C'est donc une bonne fortune exceptionnelle pour la ville de Troyes que de posséder ces œuvres absolument originales d'un sculpteur contemporain, qui est non-seulement le plus illustre de la Champagne, mais qui l'est aussi de la France.

Les chefs-d'œuvre de M. Paul Dubois seront accueillis avec d'autant plus d'intérêt et de satisfaction à Troyes qu'ils peuvent se rattacher à la noble et féconde école de sculpture qui a fleuri au xvIe siècle dans cette ville. Cette école, où l'art flamand et même allemand avait exercé son influence, subit sous le règne de François Ier l'ascendant du génie italien. Elle se distingue par des qualités d'élégance, de naturel, de finesse un peu naive dans l'expression, qui sont propres au génie spécial de

la Champagne, mais auxquelles l'art florentin avait apporté son style. Ce double caractère florentin et champenois, nous le trouvons dans les statues de M. Dubois, qui a su à la fois être l'élève de MichelAnge et rester un français du XIXe siècle.

Il nous semble inutile de décrire les belles figures allégoriques du tombeau de la Moricière, que l'on a récemment admirées à l'exposition universelle et à propos desquelles la presse française a épuisé les formules de l'éloge. Qu'il me soit permis seulement de faire connaître l'opinion désintéressée d'un critique italien, qui n'hésite pas à déclarer que le monument de la Moricière avait paru l'œuvre de sculpture la plus admirable de l'exposition universelle de 1878; et cependant l'on sait combien les italiens sont fiers de leurs sculpteurs contemporains, qui ont tant de qualités de vie et de pittoresque. Le critique italien signale l'influence florentine qui se révèle dans les œuvres de M. Dubois ; mais en même temps il constate la singulière puissance d'assimilation et l'inspiration propre de l'artiste. Si la figure magistrale de la Méditation lui paraît avoir des modèles à Florence et à Rome, la Prière lui semble plus originale. « Un sculpteur florentin eût disposé autrement, dit-il, les vêtements sous lesquels se modèle son corps délicat et pur; mais en laissant apparaître à travers le vêtement la « morbidezza » des membres adolescents, le sculpteur français s'est rendu maître du corps et a donné à la personne ce parfum d'innocence, qui est supérieur à la pudeur et ajoute d'une manière efficace à l'expression religieuse de la statue tout entière. » A. B.

Mentionnons une remarquable conférence faite récemment à Châlons, par M. Jules Remy, de Louvercy (Marne), qui a passé la plus grande partie de sa vie en voyages, qui a publié il y a quelques années un remarquable ouvrage sur les Mormons. Cette fois, M. Remy a retracé épisode de son voyage dans l'Hindoustan en 1863, une visite au monastère bouddhiste de Pemmiantsi, dans le Thibet.

un

:

Mais avant d'arriver à la partie purement pittoresque et descriptive de son voyage, l'orateur a donné à ses auditeurs quelques notions sur le bouddhisme. Ce n'était pas là une tâche facile dans l'Europe civilisée par le christianisme, on a peine à comprendre ce que peut être une religion sans culte, sans Dieu, sans croyance à l'immortalité de l'âme. L'ancienne religion de l'Inde était le brahmanisme, dont l'idée fondamentale est celle de la migration successive des âmes dans les corps des divers animaux, suivant leurs mérites ou leurs démérites, jusqu'au jour où, purifiées, elles parviennent au paradis de Brahma. Le bouddhisme, qui succéda au brahmanisme, fut fondé 1000 ans environ avant notre ère par Chakiah-Mouni, fils du roi de Kapila, pays situé sur les frontières de l'Aoude et du Népaul. Cette religion, qui est aujourd'hui celle de 400 millions d'hommes répandus dans le Thibet, la Chine, le Japon, l'Indo-Chine, etc., promet à ses adeptes non pas

une vie future, mais l'anéantissement, le nirvana. L'homme qui, par ses fautes, n'a pu mériter de rentrer dans le néant, est condamné, sur la terre, à une existence nouvelle.

Le boudhisme s'est peu à peu altéré depuis Chakiah-Mouni; ses successeurs y ont ajouté des pratiques grossières; et le monastère de Pemmiantsi, visité par M. Jules Remy, donne une triste idée de l'ignorance des prêtres bouddhistes. Il ne croient pas en Dieu, mais ils ont la crainte des mauvais esprits, qu'ils chassent au moyen d'exorcismes et de formules.

Aux environs de ce monastère, dans ces hautes vallées de l'Hymalaya, où l'homme peut contempler les neiges éternelles et, à ses pieds, une verdure éternelle, vivent des populations qui ont conservé une singulière coutume, celle de la polyandrie. A l'inverse de ce qui se passe chez les peuples de l'Orient, une femme possède plusieurs maris; le ménage n'est complet que lorsque ceux-ci sont au nombre de douze, et chose étrange, la jalousie est inconnue parmi eux.

Monseigneur de Saulx-TavaNES. Nous avons trouvé dans une note contemporaine, non signée, les renseignements suivants sur le passage de Mgr de Saulx à l'évêché de Châlons :

Le siége ne fut vacant que trois mois et demi, parce que le roy y nomma, au premier juin de l'an 1721, M. l'abbé de Tavanes, appelé Nicolas, 2 du nom, de la très noble maison de Saulx de Tavanes, originaire de Bourgogne, qui y possédait Saulx-le-Duc, échangé depuis avec le comté de Langres qui est demeuré longtemps dans cette maison. Guillaume de Saulx avait épousé la sœur de saint Bernard : elle eut en mariage la terre de Fontaine, proche de Dijon, où ce saint avait pris sa naissance. Gaspard de Saulx, maréchal de Tavanes et ses descendants ont été pour la plupart lieutenants généraux pour le roy de Bourgogne.

« Cet évêque est le frère de M. le comte de Tavanes, lieutenant général de Bourgogne, qui a présidé cette année aux Estats en qualité de commissaire du roy, où il s'est distingué tant par sa magnificence dans la dépense qu'il a faite à traiter la noblesse de la province et les députés eux Estats, que par les heureux talents qu'il a hérités de ses illustres ancêtres.

Il est neveu de M. le chancelier d'Aguesseau du costé de sa mère; avant sa promotion à l'épiscopat, il était archiprêtre de Pontoise.

Ses bulles furent expédiées en septembre seulement à cause de la mort de Clément XI, et il fut sacré en l'église des Théatins par M. de Fleury, ancien évêque de Fréjus, précepteur du roy, assisté des évêques de Vabres et de Mirepoix, le 9e novembre suivant. Il prêta serment au roy le 11 de ce mois et prit le 3 décembre séance au parlement comme comte et pair de France.

Le 13, il arrive à Jaalons au soir et fut le 14 au matin à son

château de Sarry.

Il fit le mesme jour son entrée à Châlons.

‹ Le 25 octobre 1722, il assista au sacre de Louis XV; le 13 juillet 1724, il maria dans sa chapelle de Sarry le duc d'Orléans et la princesse de Bade, auxquels il donna un grand repas et avant il étoit allé dans son carrosse avec le prince à Lépine au devant de la princesse.

«En 1725, il fut député à l'assemblée du clergé. Au mois de juin, il est nommé premier aumônier de la reine et assista à son mariage à à Fontainebleau le 6 septembre suivant.

Le 23 juillet 1727, il célébra au château de Sarry le mariage du duc de Bourbon.

■ Il publia un cathéchisme pour la jeunesse. Il fut nommé en 1733 archevêque de Rouen.

La commune de

UN RÈGLEMENt de police a PERTHES EN 1788. Perthes qui, aujourd'hui, fait partie du canton de Saint-Dizier (HauteMarne), devait être en 1788 plus importante qu'elle n'est aujourd'hui, elle avait alors une mairie royale et un substitut du procureur général du Roi, nommé Pierre Bellard.

Nicolas-Joseph Jacquemard, était, à cette époque, maire, juge royal, civil, criminel et de police à Perthes, et il avait pour greffier Nicolas Chevillon.

Une première ordonnance de police rendue pour la ville de Perthes, le 26 septembre 1786, afin de maintenir le bon ordre et la tranquillité, était peu observée par les habitants, et le nombre des irrévérences, et des scandales qui se commettaient, soit à l'église, soit les jours de dimanches et fêtes ne faisaient qu'augmenter. Les auberges et cabarets assez nombreux dans ce lieu, situé sur la grande route étaient fréquentés par la jeunesse pendant les offices religieux, les habitants travaillaient toujours les dimanches et fêtes sans nécessité et sans permission; beaucoup de désordres se commettaient dans la paroisse, et notamment, il y avait de fréquentes querelles entre les garçons, pour gagner les gants aux jours de mariage; les danses publiques se continuaient fort avant dans la nuit; enfin, il se commettait journellement dans l'église un abus très-scandaleux, les garçons en distribuant des liards aux quêteuses, leur faisaient faire autant de révérences qu'ils donnaient de liards. En raison de ces désordres, le substitut du procureur du roi en la mairie royale de Perthes, requit le maire, juge royal, civil, criminel et de police, de rappeler les habitants à l'exécution de l'ordonnance de 1786 et de prendre de nouvelles mesures pour réprimer les abus signalés plus haut.

Sur ces réquisitions, le juge royal, criminel et de police de Perthes, rendit une ordonnance en treize articles, homologuée en Parlement par arrêt du 11 avril 1788.

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