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éclat moins vif, se montrent toujours errants parmi ceux-là, dans des routes constantes. Nous les appelons, d'après les Grecs, les planètes; dénomination qui exprime leur caractère spécial de mobilité relative. Cinq s'aperçoivent à la vue simple; et, dès la plus haute antiquité, on les a partout distinguées des étoiles d'après ce caractère. Nous leur avons conservé les noms mythologiques par lesquels les Grecs les désignaient, et nous les appelons comme eux, Mercure, Vénus, Mars, Jupiter, Saturne. Mais, depuis l'année 1781, le télescope en a fait découvrir six autres auxquelles on a pareillement donné des noms tirés de la mythologie grecque. Ce sont Uranus, Cérès, Pallas, Junon, Vesta et Astrée. Je les désigne dans l'ordre de leur découverte, successivement attachée aux noms de W. Herschell, Piazzi, Olbers, Harding, et Hencke; deux fois à celui d'Olbers, pour Pallas et pour Vesta. Les cinq planètes anciennement connues, étant observées au télescope, se distinguent immédiatement des étoiles, parce qu'elles offrent l'apparence d'un disque arrondi, ayant un diamètre sensible; au lieu que les étoiles se voient comme de simples points lumineux, d'autant plus petits que l'instrument est plus puissant et plus parfait, leurs dimensions propres, agrandies optiquement plusieurs milliers de fois, restant encore imperceptibles dans l'immense éloignement où elles sont placées. Mais, parmi les planètes découvertes de nos jours, Uranus seul a pu être reconnu pour tel à l'inspection de son disque; et encore, parce que Herschell se trouva l'apercevoir dans un de ses télescopes qui avait un grand pouvoir amplifiant: car elle avait été déjà vue antérieurement, à dixneuf places différentes, par Flamsteed, Bradley, Mayer et Lemonnier, qui l'avaient prise pour une petite étoile, n'ayant pas comparé entre elles les positions qu'ils lui avaient trouvées à plusieurs jours consécutifs, malheureusement pour eux. Toutes les autres ont des diamètres apparents trop petits pour avoir été signalées aux observateurs par ce caractère, quoiqu'on l'y aperçoive maintenant, sachant qu'il existe. Ces astres, et la planète Le Verrier elle-même, ont été d'abord distingués optiquement des étoiles par l'observation de leur mouvement relatif. Or, à l'exception de cette dernière, qui était prédite, pour que l'on pût les reconnaître à cette particularité parmi la multitude infinie de points lumineux qui se présentent toujours à l'œil avec elles, et qui leur ressemblent, il fallait que le hasard de leur mouvement les amenât juste dans la plage du ciel qu'un astronome se trouvait actuellement étudier dans ses plus minutieux détails, pour ce but ou pour tout autre, à des jours divers et peu distants. Voulant donc rendre ce hasard plus aisé à saisir, et favoriser en même temps tous les progrès généraux de la physique stellaire, les astronomes de notre temps se

sont associés dans l'exécution d'un immense travail descriptif, dont je vais donner une courte esquisse.

On construit des cartes qui offrent la représentation du ciel stellaire, comme on construit des cartes géographiques. Pour cela, on détermine par l'observation les coordonnées angulaires des étoiles relativement à l'équateur ou à l'écliptique, de même que l'on fixe la position absolue et relative des divers points de la surface terrestre par leurs latitudes et longitudes; et, dans ces deux cas, plus les observations sont nombreuses, plus les cartes peuvent être détaillées. Les éléments de leur construction s'obtiennent par des méthodes pratiques dont l'exposé serait ici hors de place. Il suffira de dire que l'exactitude de ces données dépend de la précision avec laquelle on peut définir le rayon visuel mené à l'étoile, et marquer l'instant physique où il a eu telle ou telle direction. Le premier résultat se réalise admirablement avec nos lunettes, dont les objectifs achromatiques rassemblent tout le cylindre lumineux venu de l'étoile en un point focal unique, situé à une distance fixe sur le prolongement de leur axe central. A cette distance, on ajuste à demeure un réseau de fils d'araignée, tendus rectangulairement; et le rayon central venu de l'étoile, dans l'axe du cylindre, se définit presque mathématiquement, par la condition que l'image focale s'occulte devant le point de croisement des fils. Ce phénomène se voit très-bien à travers l'oculaire, qui est un petit microscope placé entre les fils et l'oeil pour rendre la perception plus précise; et, simultanément, les battements d'une horloge à secondes marquent à l'oreille attentive de l'observateur l'instant physique où l'occultation a lieu. L'étoile observée se trouve donc alors sur le prolongement du rayon visuel ainsi défini. On n'a plus qu'à déterminer la direction de ce rayon relativement à des droites fixes sur la surface terrestre, comme la verticale et la méridienne. Cela se fait par des mesures d'angles, prises sur des cercles gradués établis en connexion mécanique avec la lunette, et fixes ou mobiles selon la nature de l'instrument. Mais le principe d'exactitude de l'opération réside toujours, primitivement, dans la combinaison des lunettes à réticule avec les horloges à pendule. Les éléments de position ainsi obtenus sont d'abord rassemblés dans des tableaux numériques, où les étoiles sont rangées dans l'ordre suivant lequel leurs passages au méridien se succèdent. La diversité de leur éclat est spécifiée fort improprement par le mot grandeur, dont on conçoit un nombre infini de degrés, qui s'appliquent avec beaucoup d'incertitude et d'arbitraire. Les étoiles de 1 grandeur sont les plus brillantes, comme Sirius, Rigel, la Chèvre, Aldebaran. Celles de 8 grandeur sont à peine perceptibles à la vue

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simple par exemple, Astérope, la septième pléiade des Grecs. Mais les lunettes astronomiques nous font aisément voir les étoiles de 10° grandeur; et l'on distingue jusqu'à celles de la 17° avec de larges objectifs. Les tableaux de positions, ainsi formés, s'appellent des catalogues d'étoiles. Le plus ancien que l'on connaisse se trouve dans l'Almageste, et il est très-probablement l'ouvrage d'Hipparque, que Ptolémée s'est approprié.

On

y trouve les positions de 1022 étoiles définies par leurs coordonnées écliptiques : ce choix avait pour but d'éviter les changements que la précession opère dans les coordonnées équatoriales. Nous préférons maintenant celles-ci, que l'observation donne immédiatement, parce que nous savons très-bien corriger leurs variations. Ce catalogue est, malheureusement, trop imparfait pour nous fournir des données de calcul; son ancienneté ne compense pas ses erreurs. La même cause rend pareillement inutiles tous ceux qui, plus tard, ont été rédigés, comme celuilà, d'après des observations faites à la vue simple, sans moyens exacts de mesurer le temps; c'est-à-dire avant 1657, époque à laquelle Huygens appliqua le pendule aux horloges. L'emploi des lunettes à réticule, pour mesurer les angles célestes, est postérieur de quelques années. C'est une invention d'Auzout. Parmi les astronomes modernes, Flamsteed, vers l'an 1690, employa le premier ces deux instruments pour former un catalogue nouveau, accompagné de cartes célestes construites d'après un mode de projection particulier qui a été appelé de son nom; il contient plus de 3000 étoiles. Mais Flamsteed n'avait à sa disposition que des instruments fort imparfaits; son zèle était plus ardent qu'éclairé. Il n'adjoignit jamais à ses observations les indications du baromètre et du thermomètre, quoique Newton le priât instamment de le faire, pour que l'on pût un jour les dépouiller de l'effet des réfractions atmosphériques, lorsque la théorie en serait mieux connue. Par ces diverses causes, le catalogue de Flamsteed ne peut nous servir que comme renseignement. Enfin, soixante ans plus tard, vint Bradley, Bradley le modèle des astronomes, qui, avec les excellents instruments dont l'observatoire de Greenwich s'était enrichi, et qu'il rendait encore plus précis par son habileté à en faire usage, découvrit l'aberration de la lumière, la nutation de l'axe terrestre, et laissa dans les registres de Greenwich la plus précieuse collection d'observations d'étoiles qui eût été jamais formée. Mais, pour que l'on pût mettre à profit ce trésor, il fallait que toutes ces observations fussent discutées dans leur ensemble et dans leurs détails; qu'on en tirât les rectifications des instruments, et qu'on en réduisît tous les résultats à une même époque. Bessel entreprit cet immense travail, et il l'exécuta avec un dévouement, une science, des soins, qu'on ne saurait trop louer. Tel il fut, au reste,

dans toute sa vie scientifique; et si, venu plus tard que Bradley, il ne lui a pas été donné d'attacher son nom à des découvertes du même ordre, peut-être les astronomes ne lui doivent-ils pas moins de reconnaissance pour les secours de tout genre qu'il leur a laborieusement préparés. Un demi-siècle environ après Bradley, Piazzi publia un nouveau catalogue comprenant les positions actuelles des mêmes étoiles et de beaucoup d'autres, en somme 7646, toutes observées avec un magnifique instrument de Ramsden, et ramenées à l'époque commune du 1 janvier 1800, qui leur était à peu près intermédiaire. C'est le second fanal élevé sur la route des recherches astronomiques.

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L'utilité de ces travaux étant devenue de jour en jour plus sensible, on les multiplia. Un astronome laborieux, le Français Lalande, porta le nombre des étoiles observées à 50000; mais Bessel dépassa toutes ces limites. Comme les principaux éléments de l'astronomie générale se déterminent par des observations d'étoiles peu distantes de l'équateur, il se donna, pour champ de recherches, la zone circulaire qui s'étend de part et d'autre de ce plan, depuis 45° de déclinaison boréale, jusqu'à 15° de déclinaison australe. Puis, ayant partagé le contour de cette zone en subdivisions de 15°, comprenant chacune les étoiles qui traversent le méridien en une heure sidérale, il entreprit d'observer, à l'instant de leur passage, toutes celles que sa lunette pourrait lui faire saisir dans la zone entière, en mesurant aussi leur déclinaison. Il fit cela, en douze ans, assisté de quelques aides zélés; et, dans ces douze années, il détermina ainsi, par double observation, les coordonnées équatoriales de 75000 étoiles, auxquelles il joignit encore des tables numériques contenant tous les éléments de correction nécessaires pour les ramener à l'époque commune du 1 janvier 1825. L'Académie de Berlin conçut alors le grand et utile projet d'extraire, de cet immense travail, les résultats qui s'appliquent aux quinze premiers degrés de déclinaison, boréale et australe; d'y réunir les déterminations antérieures de Bradley, de Piazzi et de Lalande, qui entrent dans ces limites; d'en composer un catalogue général, comprenant jusqu'aux étoiles de 10° grandeur, toutes ramenées au 1er janvier de l'année 1800; et de fonder, sur cet ensemble, une série de vingt-quatre cartes célestes, une pour chaque heure, présentant, pour la même époque, l'image minutieusement fidèle de cette zone équatoriale du ciel étoilé. Une invitation publique fut adressée par l'Académie à tous les astronomes connus par leur habileté et par leur zèle, pour les engager à se partager le travail des réductions, comme aussi à enrichir de leurs observations propres la portion des cartes qui leur serait dévolue. Les plus zélés accomplirent bientôt leur tâche, mais tous ne l'ont pas encore

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remplie. Quatorze de ces cartes sont déjà publiées; la quinzième vient seulement de paraître à Berlin, le 23 septembre dernier; et neuf restent ainsi encore à finir pour embrasser le contour entier de l'équateur. Elles comprendront ensemble plus deux cent mille étoiles. Par un hasard heureux, qu'on dirait avoir été aussi un acte de justice, cette quinzième carte à peine terminée, que les seuls astronomes de Berlin possédaient déjà, contient la 21° heure à partir de l'équinoxe vernal. Or c'est dans cette heure-là, et dans telle position spécifiée de l'heure, que la planète de M. Le Verrier était comprise quand il en donna l'annonce. Ce fut donc avec le secours de cette carte, construite par M. Bremiker, que M. Galle, l'un de ces astronomes, l'aperçut tout d'abord dans le ciel, à la place précise que le mathématicien français lui avait assignée. Il la reconnut en remarquant, à cette place même, une toute petite étoile qui n'était pas indiquée sur la carte céleste. Il détermina sa position relativement aux étoiles voisines, et le lendemain cette position se trouva changée dans le sens prédit. C'était donc la planète; mais, partout ailleurs, on n'aurait pu la trouver qu'après avoir construit, par de minutieuses observations, la portion de la carte qui la devait contenir. M. Galle annonça aussitôt cette découverte à M. Le Verrier, qui l'apprit avec plaisir sans doute, mais sans surprise; plus que personne il était, et devait être certain du fait.

L'exploration détaillée du ciel, par laquelle les astronomes découvrent les planètes dont l'existence était ignorée, leur fait aussi apercevoir les comètes nouvellement arrivées ou revenues dans les régions de l'espace assez proches de nous pour y être perceptibles au télescope. Mais alors, indépendamment du caractère tiré du mouvement propre, et avant même qu'on ait pu le constater, ces astres se distinguent généralement des étoiles par leur aspect, qui les fait ressembler d'abord à une petite nébulosité blanchâtre, ne jetant qu'une faible lueur. Aussi l'astronome qui cherche des comètes parcourt-il le ciel serein et obscur avec une simple longue vue, ayant un objectif assez large pour recevoir beaucoup de lumière, et un pouvoir amplifiant très-faible pour ne pas trop affaiblir l'image focale; de manière à donner seulement une perception parfaitement nette des objets célestes, dans une amplitude angulaire de champ qui embrasse quatre ou cinq degrés. Cela s'appelle une lunette de nuit, et l'observateur la tient à la main. Aperçoit-il ainsi quelque trace vaporeuse qui lui semble nouvelle, il constate et fixe sa position absolue, en remarquant les étoiles qui l'environnent; puis il va l'étudier à l'équatorial. C'est un instrument établi autour d'un axe fixe, parallèle à l'axe de rotation diurne du ciel. Il se compose de deux cercles gradués, ajustés rectangulairement; l'un, per

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