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sion française (1572-1794). Chaque période est accompagnée de notices biographiques et généalogiques sur les membres, même les plus obscurs, du célèbre tribunal. Puis viennent les mayeurs, les greffiers, les chambellans, tous auxiliaires plus ou moins haut placés de la souveraine justice. Enfin, après des additions et des corrections témoignant d'un souci constant de mieux faire, une série de pièces justificatives et des tables terminent le volume.

Je n'insisterai pas sur le soin apporté par le savant écrivain à s'entourer de tout ce qui, de près ou de loin, pouvait éclairer son sujet. Ce qu'il a compulsé d'archives, de livres, de pamphlets et de factums presque introuvables, ses notes au bas des pages nous le montreraient assez, si les travailleurs ne savaient que d'ordinaire on n'achète une découverte qu'au prix de nombreux désappointements.

Mais ce qu'il faut le plus admirer, c'est l'art avec lequel tous ces matériaux ont été mis en œuvre dans les parties générales consacrées à l'exposition des vicissitudes d'une institution si longtemps mêlée aux révolutions politiques du pays. Ici la gravité de l'historien s'allie à l'animation du récit; jamais l'intérêt ne languit, parce que les événements ne cessent d'être présentés d'une manière attachante et que la narration revêt les formes les plus variées. L'auteur nous montre ainsi le triste sort des échevins après l'odieuse expédition de Charles le Téméraire et du temps de la guerre intestine suscitée par les la Marck, la perte de leur autonomie en matière civile depuis l'établissement de la Chambre impériale (1495) et la constitution du Conseil ordinaire (1531), enfin les sanglantes querelles

des Chiroux et des Grignoux « qui vont troubler jusque dans son prétoire la sereine majesté de la haute justice ». La tranquillité rétablie, c'est l'âge d'or des échevins qui commence ils n'auront plus désormais qu'à essuyer le reproche de vénalité qui atteignait tous les emplois, et à se défendre dans des conflits de juridiction dont le dernier se confond avec la révolution liégeoise.

On ne saurait trop le répéter le livre de M. de Borman est d'une importance beaucoup plus grande que son titre ne l'indique; c'est l'étude impartiale, faite par un esprit critique, de tout un côté de l'histoire de la principauté de Liége, et à ce titre il est appelé à figurer en première ligne sur la table des travailleurs qu'intéresse le passé du pays.

Baron DE CHestret de Haneffe.

ÉLECTIONS.

MM. le chevalier Descamps, le comte Goblet d'Alviella et Mesdach de ter Kiele sont élus membres du Comité chargé, conjointement avec le Bureau, des présentations pour les places vacantes.

La Classe nomme M. Ern. Mahaim, professeur à l'Université de Liége, membre du jury chargé de juger le Prix de Laveleye, en remplacement de M. Arthur Desjardins, décédé.

COMMUNICATION ET LECTURE.

LA CONSTITUTION INTERNATIONALE DE LA BELGIQUE ; par le chevalier Éd. Descamps, membre de l'Académie.

PARTIE HISTORIQUE.

Les pierres d'attente historiques et les antécédents immédiats.

Après avoir connu des agitations sans nombre, des luttes presque sans trêve et les épreuves les plus dures, après avoir servi tour à tour de champ clos aux querelles des autres peuples, d'appoint à leurs règlements de compte, d'otage à leur sécurité ou de butin à leur avidité, la Belgique, tant de fois sacrifiée à des intérêts qui n'étaient pas les siens, a pris énergiquement possession d'ellemême. Fermant le cercle de ses révolutions, libre sous une dynastie nationale, elle poursuit aujourd'hui depuis bientôt trois quarts de siècle, dans une indépendance sans ombrage pour personne, le cours de ses pacifiques destinées.

Elle possède une Constitution nationale qui donne une forme stable à sa vie publique à l'intérieur et qui vient

d'être appropriée aux besoins des temps nouveaux où

nous entrons.

Elle est dotée d'une Constitution internationale qui lui assigne une place spéciale au sein de la grande famille européenne et qui imprime à ses rapports avec les autres peuples un caractère particulier.

La première est l'œuvre souveraine du Congrès de 1831 et de la récente Constituante. La seconde a été <«< rédigée avec l'Europe ». Cette charte internationale n'est pas bien longue. On peut à la rigueur la ramener à trois articles, qui tiennent eux-mêmes en trois mots. Indépendance, Neutralité, Garantie: telle est, au point de vue de nos relations extérieures, notre trilogie constitutionnelle.

On a recherché les origines séculaires de notre Constitution nationale et l'on a signalé, dans les plus anciennes traditions du pays, le germe de nos futures libertés. Notre Constitution internationale, œuvre de sagesse pratique où se sont rencontrés et harmonisés les droits du peuple belge et les intérêts bien entendus des autres nations, plonge aussi, à bien des égards, ses racines dans un lointain passé. Après avoir écarté de la main les décombres sanglants amoncelés sur notre sol par tant de guerres, l'historien qui scrute nos annales ne tarde pas à mettre à nu ce que l'on peut appeler les pierres d'attente de cette Constitution.

CHAPITRE PREMIER.

Les pierres d'attente historiques de la Constitution internationale de la Belgique.

Indépendance, Neutralité, Garantie: scrutons l'histoire du peuple belge à ce triple point de vue et essayons de dégager la lumière qui en jaillit.

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La pierre d'attente historique de notre indépendance nationale, je la trouve dans la résistance absolue du peuple belge à toute assimilation étrangère. S'il est un fait rendu lumineux par l'ensemble de notre histoire, c'est que la Belgique, à quelque régime qu'on la soumette, n'est pas matière définitivement assimilable par d'autres États. « De l'aveu même des ennemis de la Révolution, écrivait J.-B. Nothomb, les Belges ont un caractère particulier et indélébile qu'on retrouve également sous la grossièreté des temps barbares, dans l'enthousiasme des Croisades et de la lutte communale, dans l'aisance de la prospérité industrielle et parmi les raffinements de la civilisation. L'histoire les présente comme inconciliables avec d'autres nations (1).

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(1) NOTHOMB, Essai historique et politique sur la Révolution belge, 4 ed., chap. XXI, p. 356.

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