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CLASSE DES BEAUX-ARTS.

Séance du 7 novembre 1901.

M. ÉD. FÉTIS, directeur, président de l'Académie.
M. le chevalier EDMOND MARCHAL, secrétaire perpétuel.

Sont présents: MM. H. Maquet, vice-directeur; A. Gevaert, Th. Radoux, J. Demannez, G. De Groot, Gust. Biot, H. Hymans, Th. Vinçotte, Jos. Stallaert, Alex. Markelbach, Max. Rooses, J. Robie, G. Huberti, A. Hennebicq, Ed. Van Even, Ch. Tardieu, Alfr. Cluysenaar, le comte Jacques de Lalaing, J. Winders, Ém. Janlet, et Ém. Mathieu, membres; Fl. van Duyse, G. Bordiau et L. Solvay, correspondants.

La Classe, voulant participer aux témoignages de sympathie et de dévouement dont la Famille Royale vient d'être l'objet à l'occasion de la naissance du Prince Léopold de Belgique, décide de s'associer à l'initiative prise par la Classe des lettres et des sciences morales et politiques, d'envoyer, à ce sujet, une adresse de félicitations au Roi, protecteur de l'Académie.

CORRESPONDANCE.

M. le Ministre de l'Agriculture transmet une copie du procès-verbal du jugement du grand concours de composition musicale décernant le premier prix à M. Adolphe

Biarent, de Montigny-le-Tilleul, professeur à l'Académie de musique de Charleroi. Un second prix a été décerné à M. Louis Delune, d'Ixelles, et une mention honorable à M. Charles Radoux, de Liége.

M. le Ministre ajoute : « Les concours pour les poèmes ayant toujours laissé beaucoup à désirer, j'ai, d'accord avec le jury, chargé celui-ci de choisir un sujet et de le confier à deux littérateurs connus. Pour le thème, son choix s'est porté sur les 250 premiers vers de la tragédie de Sophocle: « OEdipe à Colone », et, quant aux littérateurs, il a désigné M. Jules Sauvenière, de Liége, pour le texte français, et M. Pol de Mont, d'Anvers, pour le texte flamand. »

Le même Ministre envoie également en copie :

1o Le procès-verbal du jugement du grand concours de gravure décernant le premier prix à M. Victor Dieu et un second prix (avec distinction) à M. Louis Peeters;

2o Le procès-verbal du jury qui a jugé le grand concours de peinture ne décernant qu'un second prix, en partage, à M. Félix Gogo et à M. Joseph Posenaer, tous les deux d'Anvers, et une mention honorable à M. Camille Lambert, d'Arlon.

Selon la demande de M. le Ministre de l'Agriculture, ces distinctions seront proclamées en séance publique de la Classe.

RAPPORT.

Il est donné lecture du rapport de MM. Huberti, Mathieu et van Duyse sur l'envoi réglementaire de M. Rasse, premier prix du grand concours de composition

musicale de 1899 (sonate pour piano; poème lyrique;

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Rechercher les sources et déterminer la portée du genre satirique, tel qu'il se manifeste dans la peinture flamande au moyen âge et à l'époque de la Renaissance.

Rapport de M, Max Rooses, premier commissaire,

«En réponse à la question: Rechercher les sources et déterminer la portée du genre satirique, tel qu'il se manifeste dans la peinture flamande au moyen âge et à l'époque de la Renaissance, deux mémoires nous sont parvenus. Le premier porte la devise: Les sujets satiriques ou bouffons ont été traités dans beaucoup d'écoles accidentellement. Il a été donné aux Brabançons et aux Flamands d'en faire toute une école (RENOUVIER); il comprend 123 pages et est illustré de 59 figures. Le second a pour devise: L'art satirique, c'est de l'histoire, et comprend 532 pages illustrées de 271 figures.

L'auteur du premier mémoire a divisé sa matière en quatre parties:

1. Sujets grotesques et rustiques; II. La Folie; III. La Mort; IV. Les Diableries.

La première de ces parties, de beaucoup la plus importante, est subdivisée en quatre chapitres, traitant : le premier, des sujets grotesques; le second, de l'origine des sujets rustiques et de genre dans la peinture; le troisième, des sujets rustiques; le quatrième, de la satire sociale.

Le concurrent émet l'opinion que l'art du moyen âge repose sur des représentations grotesques et en trouve la preuve dans les bijoux mérovingiens, dans la sculpture et dans la miniature des siècles postérieurs. Les gargouilles, les chapiteaux, les miséricordes de stalle sont des manifestations bien connues de l'attrait que présentaient pour les artistes du ciseau les êtres monstrueux, la caricature de la forme humaine, les fusions de l'homme et de la bête. Les miniaturistes inventent des êtres ambigus, fleur et homme ou animal, de tournure gracieuse, de couleur diaprée. Le monstrueux fait ressortir les difformités, le grotesque les raille; de là à la satire il n'y a qu'un pas, et ce pas est franchi dès que l'art se développe et acquiert l'habileté nécessaire pour exprimer des idées plus complexes et des intentions plus subtiles.

Le réalisme constitue un trait caractéristique de l'art flamand; il observe la nature et la rend fidèlement, sans se soucier de la correction académique des formes. En obéissant à ce penchant inné, il fait ressortir les physionomies particulières, il accentue l'expression des sentiments, des défauts et exerce tout naturellement la critique. Ainsi la représentation de la réalité amène bien souvent nos premiers grands peintres à en faire la satire : les tableaux de van Eyck, de van der Weyden, de Quentin Massijs, de Marinus de Rocmerswael, de Lucas de Leyde en fournissent de nombreux exemples.

Les représentations de paysanneries conduisent au même résultat, et par paysanneries l'auteur n'entend pas seulement les sujets empruntés à la vie de nos villageois, mais encore les traits empruntés aux mœurs des vagabonds et des dépravés : les faits et gestes des charlatans, des mendiants, des filous. Une longue série de peintres se prolongeant à travers plusieurs générations se délecte à produire sur la scène les déclassés et les miséreux, les habitués de la Cour-des-Miracles, les héros des foires et des grands chemins, à mettre en action les proverbes et les dictons populaires. Jérôme Bosch et Pierre Breughel le Vieux, les deux artistes dans lesquels ce genre trouve son incarnation la plus haute et la plus complète, avaient eu pour prédécesseurs quelques grands Allemands et le maître réaliste par excellence, Lucas de Leyde. Dans le pays même, les scènes de la vie populaire furent traitées avant eux par un nombre assez considérable de peintres et de dessinateurs connus ou anonymes; mais à part quelques rares exceptions, telles que Pierre Aertsen et Pierre Huys, ce ne fut que de manière intermittente et accidentelle que des sujets de ce genre furent choisis par nos artistes. Après eux, au XVIIe siècle, la lignée se poursuit dans Pierre Breughel le fils, les Teniers, les Ryckaert, van Graesbeeck, d'autres encore.

Les grands satiriques, et Pierre Breughel le Vieux à leur tête, ne se contentent pas de railler les défauts individuels de leurs contemporains, ils s'élèvent aussi contre les imperfections de l'ordre social: la lutte du pauvre contre le riche, du faible contre le puissant, de l'affamé contre le repu, excite leur verve. Ils s'attaquent encore aux ridicules et aux vices de leurs contemporains, à la débauche, aux faux serments, à l'hypocrisie, à la mé

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