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Après ce qui a été dit en paffant, fur les affertions des articles VI, VII, IX & X, M. de Morveau ne revient plus fur ces objets, & finit par la critique de l'article VIII.

On y attribue au caufticum la propriété exclufive de fe combiner avec les terres abforbantes, & de le changer en chaux vive: mais, dit M. de Morveau, il faudroit avoir prouvé fi ce phénomene s'opere par addition ou par fouftraction; problême fur lequel en ce moment les Chymiftes font divifés; mais fut-il réfolu à l'avantage de Meyer, fes partifans n'en feroient pas plus avancés, parce que nous ne fommes plus dans le où le befoin d'un principe autorifoit à le fuppofer.

temps

C'est par cette réflexion que M. de Morveau termine celles que lui a fait faire le parallele qu'il a difcuté.

RAPPORT

FAIT A L'ACADÉMIE DES SCIENCES

Par MM. MACQUER & LAVOISIER,

D'un Mémoire de M. MITOUARD, dans lequel il s'eft propofé d'examiner différentes fubftances qui fe trouvent dans les vaiffeaux où l'on diftille le phofphore par le procédé de M. Margraff, & que l'on a coutume de rejetter, quoiqu'il fût encore poffible d'en tirer parti. M. Mitouard obferve d'abord qu'indépendamment du phosphore qu'on trouve fous différentes formes attaché foit au col de la cornue, foit aux parois du récipient; on y peut diftinguer encore deux fubftances très-analogues: 1. des écailles d'un brun rougeâtre qui ne font autre chofe que du phofphore à demi-brûlé, & qui a perdu une portion de fon principe inflammable. 2°. Une grande quantité de matiere blanche pulverulente qui occupe le fond du ballon, & qui a toute l'apparence du tartre rouge en poudre.

Cette matiere blanche pulvérulente a fait un des principaux objets des recherches de M. Mitouard: jettée fur une pelle chaude, elle y brûle & donne une lumiere tout-à-fait femblable à celle qu'on obtient de la combustion du phofphore: mêlée avec une quantité fuffifante de nitre, elle donne par la détonation un fel neutre phofphorique à bafe d'alkali fixe qui cryftallife en lames plates, mais qui tombe en déliquefcence à l'air.

A mesure que ce fel s'unit à l'eau, foit par le déliquiefcent, foit par une diffolution plus prompte, il laiffe échapper une certaine quantité

d'une terre blanche infoluble dans les acides, telle que M. de Fougeroux l'a déjà apperçue en faifant bouillir du phofphore dans l'eau. Cette terre, qui paroît être auffi celle que M. Margraff préfume entrer dans la combinaifon de l'acide phofphorique, conferve un caractere falin dont elle ne peut être dépouillée que par des lotions répétées; auffi eft-elle très-fufible avant ces lotions & beaucoup plus réfractaire enfuite.

M. Mitouard donne un autre procédé pour décompofer cette matiere pulverulente & pour en obtenir l'acide; c'eft la combuftion avec les précautions qu'il décrit. L'acide qu'il a tiré par ce procédé peut fe concentrer par évaporation, & on parvient à le réduire fous une forme gélatineufe analogue à l'huile de vitriol glaciale.

Ce qui nous paroît très remarquable, c'eft qu'à quelque dégré de concentration qu'on porte cet acide, fon poids eft toujours fupérieur à celui de la poudre phofphorique qu'on avoit employée. M. Mitouard attribue ce phénomène à l'humidité de l'air ou à l'air lui-même contenu dans les vaiffeaux où fe fait la combuftion.

La poudre phofphorique brûlée dans l'appareil des vaiffeaux indiqués par M. Mitouard, laiffe fur les parois intérieures de la cornue, & même à l'entrée du ballon, une couche ou enduit d'un jaune orangé. Certe fubftance qui est très-analogue à la matiere écailleufe dont on a parlé plus haut, eft également un phosphore dépouillé d'une partie de fon phlogistique.

Cette matiere orangée eft encore fufceptible de s'enflammer, & elle fe réfout par la combustion en un acide, & une terre blanche telle qu'on l'a décrite ci-deffus.

De ces expériences, M. Mitouard conclud que la matiere pulvérulente qui fe trouve au fond du ballon dans la diftillation du phosphore, n'eft autre chofe que le phofphore lui-même combiné avec une portion de terre blanche indissoluble dans les acides, & de nature parti

culiere.

M. Mitouard donne à cette occafion un procédé qu'il regarde comme infaillible pour reconnoître la préfence de l'acide phofphorique dans toute fubftance faline; il confifte à étendre le fel dans lequel on foupçonne l'acide phofphorique dans une certaine quantité d'eau, & à le mêler dans cet état avec une diffolution de mercure par l'acide nitreux; auffitôt il se fait un précipité blanc réfultant de l'union de l'acide phofphorique avec le mercure mais qui différe du fublimé corrosif en ce qu'il n'eft point fufceptible de fublimation comme lui.

Ces expériences, qui ne forment qu'une partie de celles que M. Mitouard fe propofe de communiquer à l'Académie fur cette même matiere, le portent à conclure qu'en ménageant les matieres qu'on a regardé jufqu'ici comme inutiles, on peut parvenir à doubler la quan

tité de phosphore qu'on a coutume d'obtenir dans le procédé ordi

naire.

Le Mémoire de M. Mitouard nous a paru contenir des obfervations très-intéreffantes propres à répandre de nouvelles lumieres fur la nature du phofphore & de fon acide; il y donne d'ailleurs un moyen fimple & peu difpendieux d'obtenir cet acide en abondance en le combinant à la bafe du nitre, & le procédé ne manquera pas de faciliter les recherches de ceux qui voudroient faire une étude particuliere de la nature de cet acide.

MÉMOIRE

Sur la Terre qui fait la bafe du Sel d'Epfom, & fur fon existence dans plufieurs Minéraux ;

Par M. MoNNET.

J'AI fait connoître dans mon Traité fur les eaux minérales quelle étoit la cause de l'erreur qui, depuis fi longtems, a fubfifté & fubfifte encore en France à l'égard du fel d'epfom qu'on a méconnu & confondu mal-à-propos avec le fel de glauber des falines de Lorraine. J'ai démontré que ce fel n'a aucun rapport avec ce dernier.

Dans le tems que je m'occupois de ce fel, & que je faifois voir que fa bafe eft une terre particuliere qui tient le milieu entre la terre calcaire & la terre argilleufe, qu'elle a des propriétés relatives à l'une & à l'autre, mais qu'elle n'eft ni l'une-ni l'autre de ces terres, j'ignorois que M. Black s'occupoit du même objet (1), & j'ai vu avec plaifir que mes expériences font conformes aux fiennes. Il réfulte des unes & des autres que de quelque maniere qu'on traite cette terre, elle forme toujours avec l'acide vitriolique un fel particulier nommé par Hoffmann & Liotel, fel caloreux, & par les Auteurs Anglois, fel d'epfom.

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La dénomination de fel d'epfom devoit naturellement porter de la confufion dans les idées des François, attendu que le fel de Glauber qu'on retire des falines de Lorraine fe préfente à-peu-près fous la même forme; mais fi nos Chymiftes, au lieu de s'en rapporter la forme extérieure de ces fels, avoient comparé l'un avec l'autre, ils auroient vu qu'à cet égard il ne pouvoit pas fubfifter la moindre équivoque. Quoi qu'il en foit de cette méprife, jamais le vrai fel d'epfom

(1) Pour éviter des répétitions inutiles, lifez les Mémoires de M. Black, inférés dans ce Recueil, tome I, pages 210 & 261, année 1773.

n'a été confondu dans le commerce avec le fel de Lorraine; il y a tou jours été diftingué fous le nom de fel d'Angleterre ou de Sedlitz.

Il paroîtra en effet fort extraordinaire que des Artistes qui prétendent donner le ton, & qui par état devant connoître plus que perfonne les différentes fubftances employées en Médecine, fe trompent jufqu'à ce point. Quoi qu'il en foit, ce reproche ne peut s'adreffer à tous nos Chymiftes. Plufieurs d'un autre ordre, peu curieux d'enfanter des fyftêmes ridicules, de remplir de gros livres de puerilités ou de chofes hazardées, obfervent attentivement. MM. Roux & Rouelle font de ce nombre, & M. Darcet dans fon fecond Mémoire fur l'action d'un feu égal fur plufieurs fubftances, a déjà parlé de la base du fel d'epfom en termes qui, en détruifant l'équivoque, ne laiffent plus le moindre doute fur la bafe de ce fel. Il faut avouer, il eft vrai, que ces Meffieurs n'avoient pas à foutenir les intérêts d'une théorie adoptée, & qu'ils n'ont pas voulu borner la nature, comme les Minéralogiftes, à deux terres feulement, la calcaire & l'argilleufe, mais qu'ils font difpofés ainfi que moi à en adopter au contraire une quatrieme, s'ils ont le bonheur de la découvrir. Il n'y a donc plus qu'un entêtement déplacé qui foit capable de méconnoître la terre bafe du fel d'epfom nommée magnésie par M. Black; des yeux fuffifent pour la reconnoître dans plufieurs minéraux, & il eft impoffible, m'écrit M. Bergman, Chevalier de l'Ordre de Vasa, & Profeffeur en Chymie en Upfal, qu'on puiffe s'y méprendre aujourd'hui. Malgré ce que des Auteurs fi fages & fi prudens ont dit, tâchons dans ce Mémoire de répandre un nouveau jour fur l'existence de cette terre, en faveur de ceux qui font encore féduits par les faux raisonnemens inférés dans certains ouvrages modernes.

J'ai publié dans ma nouvelle Hydrologie, page 290, une notice fur une quantité prodigieufe de terre qui n'eft prefqu'entiérement que la terre même du fel d'epfom, mais combinée avec du foufre ; cette terre eft celle qui enveloppe la mine de charbon de Littry en Baffe Normandie. J'ai dit que cette terre calcinée fe convertit en fel d'epfom; que l'acide du foufre fe combine alors avec elle, la diffout & forme notre fel (1). Si ce fel eût été un objet de commerce confidérable, la Compagnie qui fait exploiter cette mine n'eût pas manqué de profiter de cette découverte, & d'établir une Manufacture de fel d'epfom pour exploiter

cette terre.

M. Margraff, dans un excellent Mémoire où il examine la nature des terres qui constituent les ferpentines de Saxe, a découvert qu'elles

(1) Après cette opération j'en ai obtenu le fel, au moyen du lavage & de la crytallifation, & je l'ai trouvé mêlé avec un peu d'alun. On va voir que la terre alumineufe accompagne toujours celle du fel d'Epfom.

contiennent

contiennent toutes notre terre du fel d'epfom. Les expériences de M. Margraff répétées fur toutes les ferpentines que nous avons pu obtenir, fe font trouvées très-juftes; mais ce que nous n'avions pas même foupçonné, eft que toutes les terres marneufes contiennent auffi de la terre du fel d'epfom. Toutes ces terres, dans lesquelles on n'avoit admis jufqu'à préfent que la terre argilleufe & la crayeuse, donnent du fel d'epfom, lorfqu'on les traite avec l'acide vitriolique; mais l'alun qui fe forme en même-tems eft un obftacle à la féparation du fel d'epfom. J'ai cependant employé un moyen pour féparer le fel d'epfom & le dégager de l'alun. Il confifte à faire bouillir toute la maffe faline avec la craie bien pure. Par-là, la terre de l'alun a été féparée & précipitée & il en a refté une félénite qui, fe cryftallifant promptement, n'a plus été un obstacle au fel d'epfom qui s'eft trouvé feul dans l'eau ; mais comme il y a une forte d'union entre l'alun & le fel d'epfom, à cause d'un peu de vitriol, ce n'eft qu'à la longue & par une ébullition foutenue qu'on peut féparer entiérement la terre de l'alun. J'ai même remarqué qu'il y a une bonne partie de la terre propre du fel d'epfom qui eft précipitée en même-tems que la terre alumineuse. Pour m'en affurer, voici l'expérience que j'ai faite.

J'ai pris le dépot féché fur le filtre, je l'ai doucement fait digérer dans l'efprit de vitriol, & par la cryftallisation j'ai obtenu des crystaux de fel d'epfom, qui ne contenoient que peu d'alun, parce que la terre du fel d'epfom, un peu plus foluble dans cet acide que la terre alumineufe, s'étoit mife en diffolution la premiere. J'avois effayé d'abord de faire ma diffolution avec l'acide du nitre; mais ce moyen ne me réufsît pas, parce que les fels qui réfultent de la diffolution de ces deux terres dans cet acide, font femblables à peu de chofe près. J'ai démontré dans mon petit Traité des eaux minérales, dans le Mémoire qui a pour objet l'examen de la terre d'epfom, page 333, que la combinaifon de cette terre avec l'acide du nitre, donne un fel très-déliquefcent; & M. Margraff avoit déjà démontré dans fon premier Mémoire fur la nature de la terre de l'alun (1) que la diffolution de la terre d'alun dans le même acide, donnoit un fel également déliquefcent, de forte que ces deux fels demeurerent confondus enfemble & ne parurent qu'un même fel. Il en fut de même lorfque je traitai ce dépôt avec l'efprit

de fel.

Cette difficulté de féparer ces terres l'une de l'autre eft vraisembla blement la caufe qu'on n'a pu jufqu'à ce jour découvrir notre terre de magnéfie; cependant je rapporterai ici un fait bien remarquable déjà cité dans le Mémoire dont je viens de parler, & encore mieux déve

(1) Voyez pages 116 de fes Opufcules chymiques.

Tome III, Part. VI. 1774.

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