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perche qui doit être électrifée, foit auffi haute qu'il fera poffible. Il faudra de même l'éloigner, autant qu'on le pourra, des bâtimens, des arbres, & de toute efpece d'objets élevés. 1°. Pour que ces objets n'attirent pas l'électricité, de préférence; 2°. Pour que le fil d'archal qui communique de cette verge à l'appartement où l'on fera les obfervations, traverfe dans l'air un efpace affez étendu, pour pouvoir acquérir par-là le même degré d'électricité que celui qui y regne à cette hauteur. Cela eft d'autant plus néceffaire, que l'électricité de l'air augmente, comme on l'a observé, à mefure qu'on s'éloigne des maifons, & diminue au contraire à mefure qu'on en approche. Ces chofes étant fuppofées; voici comme il faudra difpofer l'appareil, pour faire les obfervations fur l'électricité de l'air des nuages, &c.

On aura une espece de mât MM, voyez la Pl. I, fig. I, fur lequel on établira au haut avec du maftic, & bien folidement une groffe bouteille de verre, ou plutôt un ballon bien féché intérieurement, & d'une hauteur fuffifante. Il faut qu'il ait au moins vingt pouces pour bien ifoler le couvercle T, qui portera la verge. Ce couvercle maftiqué avec la partie fupérieure du ballon fera de fer blanc, & fait en forme de trompette. On lui donnera quatre pieds de haut, ou à peu-près; la partie qu'on appelle le pavillon débordera le ballon au moins d'un pied tout autour, non-feulement pour le bien garantir de toute efpece d'humidité, mais encore pour que ce pavillon préfentant une plus grande fuperficie à la pluie, it s'électrife plus promptement & plus fortement quand elle tombera.

On a fouvent expérimenté que la pluie eft électrique en été, nonfeulement dans les temps d'orages, mais encore dans beaucoup d'autres temps. Or, il arrive fouvent qu'un appareil destiné à faire des expériences fur l'électricité de l'athmofphere n'eft pas auffi promptement électrifé par l'action de fa pointe, fur les nuages électriques qui paffent au-deffus que par les gouttes de pluie qui tombent de ces mêmes nuages. Delà, quelques perfonnes ont penfé qu'il valoit mieux employer dans cet appareil des pommettes de métal que des pointes, &c. Mais elles fe font fort trompées, faute d'avoir fu diftinguer l'effet de la pluie fur les pommetde l'action de ces mêmes pommettes pour tirer l'électricité des nuages, deux chofes qui font cependant très-différentes. Car il eft bien certain que fi une nuée électrique, dont il ne tombe aucune goutte de pluie, fe trouve au deffus, ou dans le voisinage d'un appareil, fon électricité fera bien plutôt apperçue, au moyen de la pointe, que par les pommettes. Ainfi nous voyons conftamment dans l'électricité artificielle qu'une perfonne ifolée devient électrique de beaucoup plus loin, quand elle préfente une pointe au conducteur (1), que quand elle lui pré

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(1) Voyez dans le Cahier précédent, c'est-à-dire page 437, tome II, le Mémoire du même Auteur, fur la forme des Barres & des Conducteurs métalliques, &c.

fente une boule ou tout autre corps obtus. Après cette petite digreffion qui m'a paru néceffaire, je reviens à la defcription de l'appareil.

Le couvercle de fer blanc étant bien maftiqué fur le ballon, on en fera fortir une verge ou pointe de fer V, fort aiguë, ayant au moins quatre ou cinq pieds de long, de façon qu'avec le couvercle le tout ait neuf ou dix pieds de haut. On fera partir le fil d'archal F ( qui doit aller dans la maison) de la partie la plus élevée de ce couvercle. Ce fil entrera dans l'appartement où l'on fera les obfervations au travers d'un trou fait, si cela eft poffible, au milieu d'un de ces grands carreaux de Bohême; & ce trou fera affez grand pour que la matiere électrique, dont le fil fera pénétré & environné, puiffe avoir un libre paffage. La précaution de faire paffer ainfi ce fil au travers d'un carreau eft néceffaire, pour que les fenêtres de l'appartement puiffent être fermées, & que par-là l'humidité extérieure ne puiffe pas y entrer. Car cette humidité ôtant aux cordons de foie & aux fupports de verre qui foutiendront le fil, leur propriété d'ifoler; il en réfulteroit fouvent qu'il paroîtroit fans électricité, quoiqu'il y en eût affez dans l'air, pour l'électriler très-fenfiblement.

Une autre circonstance effentielle, & qu'il eft important de ne pas oublier; c'eft qu'il y ait un canal de décharge (1), fi cela fe peut dire dans l'appareil, pour que dès qu'il fera électrifé à un certain point, il ne puiffe pas s'électrifer davantage, & que toute l'électricité furabondante foit tranfmife au fol. Faute de cette précaution, on pourroit courir quelques rifques dans de grands orages, ce qui eft fort inutile dans des obfervations de Phyfique. Pour remplir cet objet, on fera partir du couvercle une chaîne de métal CC qui defcendra en bas, à un pied ou peu près de terrein. Par-là, fi l'électricité des nuages devient trop forte, elle fe déchargera fur ce terrein fans aucun danger pour les Obfervateurs. Mais comme cette chaîne ne peut pas s'approcher, ni s'éloigner de la terre, en proportion que l'électricité augmente ou diminue, ce qui cependant feroit néceffaire pour fatisfaire à son objet; on pourroit y fuppléer avantageufement, en établiffant au - deffous une efpece de bafcule horisontale qu'elle éleveroit & attireroit en vertu de fon électricité; car par-là cette bafcule s'approchant d'autant plus du bout de la chaîne qu'elle feroit plus électrique, tranfmettroit dans la même proportion cette électricité au terrein, enforte qu'il n'en réfulteroit jamais dans l'appareil que la quantité néceffaire pour faire les obfervations. On imagine bien qu'il faudroit en conféquence que cette bafcule communiquât de la maniere la plus intime avec le fol, & qu'elie fût garnie de métal ponr recevoir & tranfmettre bien exactement toute

(1) C'eft faute d'un canal de cette efpece que l'infortuné M. Richman, Profef feur à Pétersbourg fut tué en 1753, en faifant des obfervations fur l'Electricité de la Foudre,

l'électricité qu'elle pourroit tirer de la chaîne. On fent auffi qu'il fau droit qu'elle en fût placée à une jufte distance, comme d'un pied & demi Ou aux environs, afin qu'attirée par l'électricité de cette chaîne, elle pûc s'en approcher affez près pour produire l'effet dont nous venons de parler. Cette bafcule même pourroit dans l'occafion former une espece de fulguromètre qui annonceroit la force de l'électricité des nuages, au moyen d'un index qui marqueroit fur des divifions les distances de cette bafcule à la chaîne. Mais quoi qu'il en foit de cet ufage, il est tres effentiek d'avoir, comme je l'ai déjà dit, un canal de tranfmiffion par lequel l'électricité qui eft de trop dans l'appareil, puiffe paffer dans la terre. Il fera même très néceffaire, de veiller lorfqu'il fera dreffé, à ce que perfonne ne dérange la chaîne, & ne l'empêche, quand elle fera trop chargée d'électricité, de la tranfmettre au terrein ou à la bascule, s'il y en a une, cela eft de conféquence.

Cet appareil étant bien difpofé, comme nous venons de le dire, & le fil d'archal étant ainfi reçu dans l'appartement, & foutenu fur des cordons de foie, il faut expliquer comment on fera les obfervations.

L'électricité des orages & des nuages n'eft fouvent que trop confidérable, comme on vient de le voir, puifqu'on eft obligé d'avoir recours à des moyens pour en diminuer la force. Cependant il y a des cas où elle eft très foible, comme l'électricité de l'air qui l'eft prefque toujours. Il eft donc néceffaire d'employer dans ces circonftances tout ce qui peut la rendre fenfible. On connoît affez ceux dont on fe fert en pareil cas. On approchera donc du fil de l'appareil, de la poufliere de bois ou de tabac, un duvet fort fin, un peu de coton, &c. pour voir fi ces différentes substances auront quelque tendance vers ce fil. Un autre moyen encore plus fenfible, c'eft de fufpendre au fil d'archal une espece d'élec tromêtre compofé de deux fils de lin très-déliés de cinq ou fix ponces de long, & chargés au bout de deux petites balles de liege ou de moëlle de fureau très légeres; la moindre électricité fait écarter ces balles, & devient par-là très-fenfible. Cependant, ces divers moyens peuvent bien nous apprendre s'il y a de l'électricité dans l'appareil ou dans l'air, mais non pas de quelle nature elle eft, fi elle eft pofuive ou négative; ce qui eft néanmoins fort important, comme je l'ai déjà fait obferver. Celui que les Anglois emploient en pareil cas, c'eft de préfenter alternativement aux balles de liege un tuyau de verre & un bâton de cire d'Espagne frottés ou excités. Si le tuyau de verre attire vivement les balles, c'eft un figne qu'elles font électrifées négativement; &, au contraire, s'il les repouffe, c'eft un figne qu'elles le font pofitivement, & vice versa pour la cire d'Espagne.

Mais cette maniere de reconnoître la nature de l'électricité eft fort équivoque en ce qu'elle fuppofe toujours que le degré d'électricité excité dans la cire d'Efpagne ou dans le verre eft de la même intensité que

celui de l'électromêtre; ce qui ne doit arriver que très-rarement. Au refte, il paroît que c'eft la feule voie qu'on puiffe employer quand l'électricité eft très-foible, mais lorfqu'elle eft plus forte, & que les feux qu'elle produir aux pointes des corps électrifés, peuvent être fenfibles, on a un moyen fort fimple & fort sûr de reconnoître la nature de cette électricité, comme nous allons le faire voir.

Tous les corps électrifés en plus, ou qui ont plus de fluide électrique que les corps qui les environnent, ou qui ne font pas électrifés, ont à leurs pointes (pourvu qu'elles ne foient pas trop aiguës) des feux divergens & affez étendus, qu'on appelle aigrettes: tous ceux, au contraire, qui font électrifés en moins, ou qui ont moins de fluide électrique que ceux qui les environnent ou qui ne font point électrifés, n'ont à ces mêmes pointes que des points lumineux ou des feux beaucoup plus petits & plus courts que les aigrettes.

Ainfi, ces diverfes apparences d'aigrettes & de points lumineux forment, comme on voit, des phénomenes qui peuvent fervir à déterminet facilement & fans équivoque la nature de l'électricité qu'on obferve dans les corps, fi elle eft pofitive ou négative, puifque ces différens feux font refpectivement des indices certains de l'une ou de l'autre de ces électricités. On doit ajouter que, pour qu'ils fe manifeftent, il faut que la différence de denfité du fluide électrique dans les corps électrifés en plus & en moins d'avec les corps circonvoifins, foit fuffifante, & que ceuxci foient dans une certaine proximité. Cependant, comme malgré le concours de ces circonftances, ils font encore difficiles à appercevoir dans quelques cas, ou parce qu'ils font trop foibles, ou parce que le lieu où, on les obferve eft trop éclairé, j'ai imaginé, pour parer à cet inconvé nient, la machine fuivante, au moyen de laquelle on les apperçoit facilement, pour peu qu'ils foient fenfibles.

Cette machine, fig. II, eft compofée principalement de la boëte BB & des deux petites plaques PP, avec les pointes SS, portées par des fupports de verre V V. Nous en expliquerons l'ufage dans un moment. Il faut que cette boëte ait au moins deux pieds de B en C, autant de C en D, & un pied de D en E, ou dans fon épaiffeur. Ces dimenfions font néceffaires pour que les plaques foient fuffifamment éloignées des côtés de la boëte. La face CD tournée du côté d'où vient le fil de l'appareil ff, fera garnie d'un verre de Bohême, pour que l'élec tricité de ce fil ne fe perde pas en y entrant. On a fupprimé dans le deffin le fond de la boëte, oppofé à cette face CD, afin de laiffer voir les petites plaques PP avec leurs pointes SS. Ce fond; bien entendu, doit être de bois, comme le refte de la boëte. La petite ouverture 4. 4 fur le côté ou fur la face CF eft deftinée à pouvoir regarder dans l'intérieur de la boëte, & à y obferver les feux des pointes. On pourra y mettre un petit verre, comme aux curiofités; cependant cela n'eft pas né

Académie

MÉMOIRE

Sur la combinaifon du Mercure avec l'acide marin par la voie humide; où l'on expofe plufieurs procédés pour obtenir cette combinaifon dans le même état du fublimé corrofif;

Par M. MONNET, des Académies Royales des Sciences de Stockholm, de Turin, &c.

DEPUIS Is long-temps plufieurs Chymiftes s'étoient apperçus, qu'en Royale des faifant la combinaison du mercure avec l'acide marin par la voie huSciences de mide, ou faifant ce qu'on appelle communément le précipité blanc, il Stockholm. reftoit toujours une portion de cette combinaifon diffoute dans la liqueur,

1770.

foit que l'opération eût été faite par le fel marin ou par l'acide marin pur. Il arrivoit même affez fouvent, qu'en s'écartant de quelque chofe du procédé ufité, on n'obtenoit que très-peu de précipité, ou même point du tout; ou celui qu'on obtenoit avoit une qualité différente, c'est-àdire qu'il étoit plus corrofif que celui qu'on obtient par le procédé ordinaire. L'attention que je portai à ces effets me fit voir que cela tenoit à la grande difpofition qu'a le mercure de s'unir avec un excès d'acide marin, tant par la voie humide, que par la voie feche (1); & fachant que plus le mercure eft avec excès d'acide, plus il eft foluble; & qu'au contraire moins le mercure. contient de cet acide, moins il eft foluble: je voyois la chofe s'expliquer comme d'elle-même. Dès lors je fentis la poflibilité qu'il y avoit d'unir au mercure par la voie humide affez d'acide marin pour qu'il fût égal au fublimé corrofif. Avant d'entrer dans le détail des expériences que j'ai faites à ce fujet, il convient que nous nous arrêtions à confidérer les circonftances dans lefquelles cette union du mercure avec l'acide marin par la voie humide, fe préfente différemment. La premiere obfervation que je fis fur ce fujet, fut de reconnoître que plus on étendoit la diffolution mercutielle dans l'eau, auffi bien que la diffolution du fel marin ou l'efprit de fel, plus on avoit de précipité, & plus au contraire ces liqueurs étoient concentrées,

(1) Je fuis obligé de me fervir de cette maniere de parler pour me faire entendre ; car je fuis bien éloigné de regarder l'acide marin dans le fublimé corrofif, comme y étant dans un excès relativement au mercure. On verra au contraire par la Cuite, que je regarde l'acide marin dans le fublimé corrofif, comme y étant dans une faturation parfaite; & que la propriété corrofive de ce compofé eft due à ce nouvel être luimême, & non à l'acide marin en particulier,

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