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Samos a) Touillèrent le tribunal des Ephores: le lendemain par édit public

il fut permis aux Samiens d'être des vilains. Un vrai châtiment eût été moins févère qu'une pareille impunité. Quand Sparie a prononcé fur ce qui eft ou n'eft pas honnête, la Grece n'appelle pas de les jugemens.

a) Ils étoient d'une autre Isle, que la délicateffe de notre langue défend de nominer dans cette occafion.

!

CHAPITRE VII I.

De la Religion civile

Les hommes n'eurent point d'abord d'autres Rois que les Dieux, ni d'autre Gouvernement que le théocratique. Ils firent le raifonnement de Caligula, et alors ils raifonnoient jufte. Il faut une longue altération de fentimens et d'idées pour qu'on puiffe fe réfoudre à prendre fon femblable pour maître, et fe flatter qu'on s'en trouvera bien.

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De cela feul qu'on mettoit Dieu à là tête de chaque fociété politique, il s'enfuivit qu'il y eut autant de Dieux que de peuples. Deux peuples étrangers l'un à l'autre, et prefque tonjours ennemis, ne purent longtemps reconnoitre un même maître deux armées fe livrant bataille ne fauroient obéir au même chef. Ainfi des divifions natio

nales réfulta le polytéisme, et de-là l'intolérance théologique et civile qui naturellement eft la même, comme il fera dit ci-après.

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La fantaifie qu'eurent les Grecs de retrouver leurs Dieux chez les peuples Barbares, vint de celle qu'ils avoient auff de fe regarder comme les Souverains naturels de ces peuples. Mais c'eft de nos jours une érudition bien ridicule que celle qui roule fur l'identité des Dieux de diverfes nations; comme fi, Moloch, Saturne et Chronos pouvoient être le même Dieu; comme file Baal des Phéniciens, le Zeus des Grecs et le Jupiter des Latins pouvoient être le même; comme s'il pouvoit refter quelque chofe commune à des êtres chimériques portant des noms différens."

Que fi l'on demande comment dans le paganisme où chaque Etat avoit fon culte et fes Dieux, il n'y avoit point de guerres de religion? Je réponds que c'étoit par cela même que chaque Etat

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ayant fon culte propre auffi bien, que fon Gouvernement, ne diftinguoit point fes Dieux de fes lois. La guerre politique étoit auffi théologique: les départemens des Dieux étoient, pour ainfi dire, fixés par les bornes des nations. Le Dien d'un peuple n'avoit aucun droit fur les autres peuples. Les Dieux des payens n'étoient point des Dieux jaloux; ils partageoient entr'eux l'empire du monde; Moïfe même et le peuple Hébreu le prêtoient quelquefois à cette idée en parlant du Dien d'Ifraël. Ils regardoient, il eft vrai, comme nuls les Dieux des Cantanéens, peuples prof crits, voués à la deftruction, et dổnt ils devoient occuper la place; mais voyez comment ils parloient des divinités des peuples voifins qu'il leur étoit défendu d'attaquer! La poffeffion de ce qui appartient à Chamos votre Dieu, d difoit Jephté aux Ammonites, ne vous eft-elle pas légitimement due? Nous poffedons au même titre les terres que notre Dieu

rainqueur s'eft acquifes a). C'étoit-là, ce me femble, une parité bien reconnue entre les droits de Chamos et ceux du Dieu d'Ifraël.

Mais quand les Juifs, foumis aux Rois de Babylone et dans la fuite aux Rois de Syrie, voulurent s'obftiner à ne

a) Nonne ea quae poffides Chamos Deus tuus tibi jure debentur? Tel eft le texte de la Vulgate. Le père de Currieres a traduit. Ne croyezvous pas avoir droit de poffeder ce qui appartient à Chamos votre Dieu! J'i

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gnore la force du texte hébreu ; mais je vois que dans la Vulgate, Jephté reconnoît pofitivement le droit du Dieu Chamos, et que le* traducteur François affoiblit cette reconnoissance par un felon vous qui n'eft pas dans le latin.

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